J'ai bien écouté l'intervention du président Mélenchon, et je partage certains de ses constats. Il a en effet pointé du doigt plusieurs dysfonctionnements de notre société et de la formation professionnelle. S'agissant de l'assurance chômage, par exemple, j'avais fait la même intervention lors de l'examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, en m'étonnant que l'on fasse passer son financement de la cotisation vers la solidarité, par le biais de l'impôt, alors qu'il y avait d'autres moyens de baisser le coût du travail, en transférant d'autres cotisations vers l'impôt.
Je suis également d'accord sur la question des maîtres d'apprentissage. C'est bien de développer l'apprentissage, encore faut-il qu'il y ait des maîtres ! Or, aujourd'hui, il est compliqué d'en trouver dans les TPE. C'est pourquoi j'ai déposé des amendements pour essayer de simplifier le recrutement des maîtres d'apprentissage et d'éviter le verrouillage à l'oeuvre dans le texte.
Enfin, je suis entièrement d'accord sur sa remarque concernant l'usine et les services. Pendant des années, dans cet hémicycle, on n'a parlé que des services, en disant que les usines étaient des pollueurs qu'il fallait faire disparaître. Il ne faut donc pas s'étonner que l'enseignement professionnel ait disparu des écrans radars. À partir du moment où il n'y avait plus d'activité professionnelle en usine, l'enseignement en a pâti et a été dévalorisé.
Mais nos points d'accord s'arrêtent là ! Je ne suis pas d'accord avec le principe du Grand soir. Cela fait près de cinquante ans que la formation professionnelle se réforme, petit pas par petit pas. La première loi relative à la formation professionnelle continue est parue en 1971. Puis, peu à peu, les lois ont fait évoluer la formation professionnelle, parallèlement aux évolutions de la société, du droit du travail et de la concurrence internationale. Il faut faire évoluer doucement la formation professionnelle. Nous en avons modifié la gouvernance et le financement, et nous continuons à le faire. Je ne sais pas si cette loi sera efficace, mais, ne partant pas du principe qu'elle est forcément mauvaise, j'ai déposé des amendements pour essayer de l'enrichir. Elle améliore certains éléments, comme la portabilité des droits ou l'accompagnement du salarié.
Monsieur Mélenchon, je ne suis pas du tout d'accord avec vous sur la question de la qualification nationale. La dentelle de Calais se fera toujours à Calais, le mouchoir de Cholet à Cholet et les pipes de Saint-Claude à Saint-Claude. Pour tous ces métiers, la qualification ne pourra être que territoriale, puisqu'ils n'existent pas ailleurs. Tout ne peut pas se faire au niveau national.
Enfin, madame la ministre, votre loi va changer plusieurs choses, en confiant la formation non plus à la région mais aux branches. Je tiens à vous alerter sur le danger de cette transition. Il ne faudrait pas qu'il y ait un creux pendant six, huit ou dix mois, le temps que les décrets et les circulaires soient pris, que les normes soient fixées – on aime bien tout cela en France – , parce que les organismes de formation seront morts au moment où la formation professionnelle devra repartir.
Pour conclure, même si j'étais d'accord avec M. Mélenchon sur plusieurs points, le groupe UDI-Agir et indépendants ne votera pas sa motion de rejet préalable.