C'est aussi une question de moyens – nous pouvons aborder le problème du financement de la recherche si vous le souhaitez. Le financement de la recherche qui repose uniquement sur des appels d'offres pose problème. Ainsi, il n'y a plus d'appel d'offres ciblé sur ces questions, par conséquent il n'est pas toujours évident de trouver des financements. L'Agence nationale de la recherche (ANR) n'est pas la plus prompte à financer ce type de projets qui relèvent de l'évaluation. Reste l'ANSES qui finance effectivement ce type de projets, cependant la hauteur de ces financements n'est pas toujours suffisante pour proposer une réponse globale. Financer ces projets est donc un vrai problème.
Les résultats que nous fournissons sont très clairs, dans le cas du dioxyde de titane et des nanoparticules, pour prendre des exemples que je connais bien. Ces résultats ont permis de soulever un nouveau risque qui a été présenté au niveau scientifique et au niveau médiatique et qui a permis d'avertir concernant un « potentiel nouveau danger » – je reprends là les termes de l'ANSES – associé à cet additif. Il est malheureusement logique que l'ANSES ne conclue pas sur la base d'une seule étude sur un modèle animal à un risque avéré pour l'homme.
Permettez-moi de prendre une image pour illustrer la différence entre le risque et le danger. Il existe un danger de se faire écraser quand on traverse la route, mais le risque est différent si l'on traverse une route départementale dans le Gers ou si on traverse l'autoroute A1 à l'heure de pointe. Aujourd'hui, pour de nombreux additifs, le danger a été avéré mais le risque n'est pas établi. Or le risque dépend de l'exposition et de l'impact sur la santé. Cette évaluation du risque est encore plus longue que la mise en évidence d'un danger – je suis le premier à le déplorer, mais c'est ainsi. La mise en évidence d'un danger est factuelle et peut être établie sur un modèle animal. Dans le cas du dioxyde de titane, elle a tout de même pris trois ans de travail sur la base d'un projet ANSES. Mais la quantification du risque, qui requiert des études épidémiologiques et une évaluation précise de l'exposition de la population générale à cette fraction nanoparticulaire, va demander encore malheureusement beaucoup de temps.