On dénombre environ 70 cas de cancer de la vessie par an : élaborer un programme national sur un nombre de cas aussi réduit est compliqué pour nous. J'ai bien conscience du fait qu'il est horrible de parler de chiffres dans ces circonstances, car ces 70 cas sont bien 70 personnes malades. Néanmoins, construire un dispositif pour une telle population est difficilement envisageable. Pour autant, les services prévention de nos caisses régionales disposent de ces données et nos ingénieurs et contrôleurs de sécurité, qui interviennent au quotidien dans les entreprises pour les accompagner et les aider à prévenir un certain nombre de risques, ont ces éléments. Il est toutefois heureux que nous ne nous limitions pas aux déclarations et aux reconnaissances pour cibler les entreprises à accompagner, car nous tomberions souvent à côté, dans la mesure où il s'agit d'expositions passées. Il existe peut-être des cas, tels que celui que vous citez, dans lesquels les postes n'ont pas évolué au cours du temps. Globalement, nous constatons toutefois que les choses avancent dans les entreprises. En matière de risques psychosociaux (RPS), par exemple, la situation a vraiment évolué : on n'évoque pas du tout les RPS aujourd'hui comme il y a dix ans, où l'on se heurtait à un déni. On peut toujours juger cette évolution trop lente, voire insatisfaisante dans certains cas ; mais nous observons globalement une évolution positive.
En termes de capacités d'intervention, nous comptons 1 400 agents, répartis dans les vingt caisses régionales – seize en métropole et quatre outre-mer –, qui apportent une expertise technique. Nous avons également la capacité d'accompagner financièrement un certain nombre d'entreprises, avec des outils spécifiques pour les entreprises de moins de 200 salariés et celles de moins de cinq salariés. Le budget qui nous a été attribué jusqu'à fin 2017 nous permettait de subventionner à hauteur de 50 millions d'euros environ les entreprises à accompagner. Ceci concernait, dans un certain nombre de cas, le risque chimique, qui est souvent assez compliqué à appréhender, car lié aux processus. Or changer un processus dans une industrie n'est pas simple. La démarche de substitution des produits est très louable et vertueuse, mais peut s'avérer compliquée. Ceci suppose souvent, par ailleurs, la mise en oeuvre de moyens de protection collectifs assez lourds et coûteux. L'un de nos leviers consiste donc à aider les entreprises, notamment les plus petites, à investir dans des dispositifs de prévention, tels que des systèmes de ventilation ou de captation à la source, pour éviter d'exposer les salariés.
Face aux entreprises qui n'avancent pas, qui ne mettent pas en oeuvre les actions appropriées et dans lesquelles nous constatons l'existence d'un risque avéré, nos services de prévention peuvent mobiliser un outil spécifique d'assureur, sous forme d'une injonction majoration. Cela consiste en l'envoi d'un courrier, recommandé avec accusé de réception, présentant un constat de risque ainsi qu'un ensemble de mesures à mettre en oeuvre dans un délai donné. Si l'entreprise ne prend pas les mesures préconisées dans le délai imparti, nous pouvons aller jusqu'à majorer son taux de cotisation.
Nous pouvons donc, en résumé, mobiliser de la compétence technique, par le biais de nos experts, ingénieurs et contrôleurs, des outils d'incitation financière pour aider notamment les plus petites entreprises à investir dans des dispositifs de prévention et avons la possibilité de majorer les cotisations des entreprises qui ne donneraient pas suite à nos demandes. Nous disposons enfin de tous les outils d'information que nous co-produisons avec l'INRS : ce sont des centaines de guides et de supports permettant d'aider techniquement les entreprises à répondre aux situations qui posent problème et à progresser dans leur démarche de prévention.