Sur les nanotechnologies, plusieurs très bonnes équipes sont au travail en France. On leur demande de venir dans nos comités d'experts pour procéder aux évaluations de risques spécifiques. Si nous avons porté au niveau européen un dossier concernant le dioxyde de titane, notamment quand il est inhalé, c'est que nous avons pu produire des données toxicologiques solides. Nous avons également été très actifs pour proposer, dans le cadre du règlement REACH, un certain nombre de tests pour évaluer la génotoxicité des nanoparticules, dans un grand programme Nanogenotox que nous avons coordonné. La DGT est également impliquée. Donc nous sommes très actifs pour aboutir à un « NanoReach » européen. Nous avons bien progressé en quelques années et je suis moins pessimiste que vous.
Ceci dit, vous avez raison : il reste beaucoup d'incertitudes sur les dangers en milieu de travail, sur les travailleurs qui y sont exposés et sur les modes d'exposition. C'est pourquoi nous avons rendu des avis spécifiques sur les risques subis par les travailleurs exposés aux nanoparticules, afin de faire un certain nombre de recommandations de précaution. Par exemple, nous avons publié un certain nombre d'outils de gestion des risques et de control banding. Cela signifie que dès qu'on connaît sous quelle forme – poudre, aérosol ou produit solide – un nanomatériau a été introduit dans le milieu de travail et qu'il s'agit d'une substance dont on connaît la dangerosité quand elle se présente autrement que sous la forme de nanoparticules, on peut croiser des données pour émettre des recommandations qui peuvent aller de l'interdiction d'utilisation en milieu clos à l'exigence de protections collectives ou individuelles. Nous avions produit aussi, il y a pas mal de temps, un avis spécifique sur l'exposition des travailleurs aux nanoparticules dans lequel nous préconisions le principe « STOP » : Substitution – c'est-à-dire ne pas utiliser des nanomatériaux si on peut les remplacer par des matériaux sous une autre forme ; Technologie – c'est-à-dire trouver des processus permettant d'émettre moins de nanoparticules dans le milieu de travail ; Organisation du travail – pour éviter le plus possible les contacts des personnes avec ce type de matériaux ; Protection individuelle – en adaptant les équipements. C'est ainsi qu'on gère les risques sur lesquels il y a beaucoup d'incertitude – ce qui est la raison même pour laquelle on saisit l'Agence. Nous formulons alors des recommandations de précaution. Il nous importe beaucoup qu'elles soient suivies d'effet et nous demandons régulièrement à la Direction générale du travail d'envoyer des représentants dans les comités d'experts pour nous dire ce qui a pu être fait suite à nos avis. Rien n'est plus frustrant que de faire un avis circonstancié pour protéger les travailleurs et qu'il ne soit pas suivi d'effet.