Concernant l'évaluation, la perception que chacun peut avoir de l'exposition n'est pas simple. Elle peut être collective, mais très différente individuellement, notamment pour les risques à effets différés tels que l'exposition à des cancérigènes. Les biais de représentation peuvent être immenses, et partagés aussi bien par les employeurs que les salariés. Il ne s'agit pas que d'une minimisation des risques par les employeurs. Les salariés sont parfois autoconvaincus que leur situation de travail ne va pas forcément dégrader leur santé sur le long terme. Les phénomènes psychiques à l'oeuvre ont été décrits. Il est très compliqué de se lever le matin et d'aller travailler en sachant que l'on va se faire empoisonner. Il est alors plus confortable de se dire que le risque cancérigène est maîtrisé, quand bien même la réalité est autre.
Cette difficulté d'appréciation du risque peut être réduite grâce à des actions de formation du côté des employeurs ; mais, du côté des salariés, on constate que beaucoup d'éléments viennent minimiser le risque. Un consensus sur la maîtrise du risque s'installe, le danger n'est donc pas mis en avant auprès des salariés. Trente ans plus tard, un cas de cancer ne sera pas mis en relation avec l'exposition professionnelle. Cependant, des études épidémiologiques montrent par la suite qu'il s'agit d'un phénomène d'ampleur, qui n'a pas été maîtrisé en amont. L'une des clés réside dans la manière de réaliser l'évaluation des risques professionnels, en particulier pour tous les risques à effets différés. Avoir la possibilité d'un regard externe est essentiel, un regard d'experts, qui ont un point de vue indépendant par rapport à certains consensus aveuglants installés dans les entreprises.