Intervention de Bernard Laponche

Réunion du jeudi 31 mai 2018 à 14h30
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Bernard Laponche, consultant, membre de l'association Global Chance :

Pendant un certain temps, les discussions et les décisions successives ont tendu vers une seule solution, l'enfouissement géologique profond. De grandes objections se sont manifestées, d'évidence assez récemment puisque l'on a eu connaissance il y a peu du dossier de sûreté : les problèmes de sûreté, les problèmes de sécurité et le non-respect d'une demande parlementaire très importante, la réversibilité, puisque l'enfouissement en profondeur en couche argileuse rend la réversibilité impossible. On peut essayer de récupérer des colis pendant un an ou quelques années au début, mais tout le monde reconnaît que très vite, cela n'est plus possible. Une décision du Parlement a-t-elle un sens ? Apparemment, non.

Alors que cette solution avait en somme été imposée par une série de décisions successives, il avait été demandé dès les débats publics, y compris par M. Chanteguet, votre prédécesseur, madame la rapporteure, à la présidence de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, que l'on étudie la possibilité du stockage à sec en subsurface. Je crois qu'il n'a pas eu de réponse mais, en raison des difficultés maintenant avérées de sûreté et de réversibilité en cas d'enfouissement en couche géologique profonde, le stockage à sec en subsurface est désormais considéré comme une alternative, ce qui n'est déjà pas mal. Il s'agit maintenant de comparer les deux options, comme le demandait la loi de 1991, ce qui n'a jamais été fait.

Pourtant, le stockage à sec se pratique aux États-Unis et en Allemagne, en particulier à l'aide de conteneurs fabriqués par Areva. Faisons au moins un stockage à sec en subsurface, qui n'est pas très compliqué et qui est considéré aux États-Unis comme très sûr car, pour le coup, on peut améliorer la sécurité avec des portes blindées et d'autres dispositifs. Cela étant, c'est une alternative, mais ce n'est pas une alternative de même niveau. Cigéo prétend proposer une solution définitive ; on peut s'interroger sur le fait de savoir si tout cela va tenir et s'il n'y aura pas de ruissellement. Mais le stockage en subsurface peut durer, lui, quelques centaines d'années. Et ensuite ?

Soit le nucléaire continue et il n'y aura aucun problème pour contrôler un stockage en subsurface, ce que l'on devrait dire aux promoteurs de Cigéo. Orano, le CEA et EDF sont plutôt partisans de la poursuite du nucléaire ; si c'est le cas, on pourra très bien surveiller les déchets sans forcément les enfouir et, donc, trouver éventuellement une solution pour simplifier les choses. Ces gens-là devraient en toute logique être opposés à Cigéo, mais ils veulent cacher la poussière sous le tapis.

Si le nucléaire s'arrêtait, il faudrait surveiller le stockage en subsurface pendant un certain temps et le contrôler, comme on sait que l'on doit contrôler les stockages actuels de déchets radioactifs pendant au moins trois cents ans à Morvilliers et à Soulaines. Pendant trois cents ans, on peut stocker en subsurface et poursuivre la recherche au CNRS et au CEA, pour voir si l'on ne peut pas pratiquer différemment et réduire le problème des déchets afin de ne pas léguer aux générations futures ces quantités de radioactivité dont on ne sait que faire. En résumé, il y a d'un côté stockage en subsurface et recherche, d'un autre côté enfouissement profond – et dans le second cas la recherche n'a plus de sens puisque l'on a enfoui.

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