… tout en réduisant significativement le temps de parole des petits groupes, sans tenir compte de l'importance ou de la longueur du texte.
Sur le fond, notre groupe avait formulé un certain nombre de propositions dans le cadre du contre-projet que nous avons présenté à Alfortville. Celui-ci était articulé autour de trois axes qui synthétisaient selon nous les enjeux centraux du projet de loi.
Le premier enjeu est celui de la mixité sociale. De notre point de vue, la politique du logement doit concourir à l'amélioration de la mixité – nous avions engagé ce travail, en particulier dans la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté. Or plusieurs dispositions du projet de loi comportent des risques, directs ou indirects, pour la mixité sociale.
Le texte propose ainsi la suppression des servitudes de mixité sociale pour les opérations de transformation de bureaux en logements. Nous regrettons que vous ayez repoussé nos amendements qui visaient à maintenir ces servitudes ou, à tout le moins, à garantir que les communes carencées ne puissent bénéficier des dérogations d'urbanisme qu'à la condition qu'elles réalisent majoritairement du logement social. Nous craignons fortement que cette suppression ne réduise la part du logement social dans de telles opérations.
Après des échanges parfois animés en commission et un long débat en séance, nous reconnaissons néanmoins que, sur d'autres dispositions concernant la mixité sociale, vous avez su faire preuve d'écoute. Ainsi, qu'il s'agisse de l'extension de la réquisition avec attributaire à l'hébergement ou de la transformation d'hôtels en résidences hôtelières à vocation sociale, vous avez entendu nos craintes de voir ces mesures amplifier les phénomènes de concentration des populations en difficulté toujours dans les mêmes quartiers. Nos amendements visant à conditionner ces dispositifs à l'accord préalable du maire dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville – QPV – ont ainsi été adoptés.
Sur la question centrale de la politique d'attribution de logements sociaux, vous avez également accepté de faire un pas vers nous en permettant le renforcement des plafonds d'attribution aux personnes les plus en difficulté ou les plus modestes dans et en dehors des QPV. Nous aurions souhaité aller plus loin, notamment dans le traitement des demandeurs reconnus prioritaires au titre du droit au logement opposable, mais nous notons positivement cette évolution.
En revanche, pour conclure sur ce premier point, nous regrettons le maintien de l'allongement de cinq à dix ans de la comptabilisation des logements sociaux vendus dans le quota prévu par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains – SRU. Nous n'étions pas opposés à une évolution de la loi, mais nous considérons que vous l'avez modifiée dans le mauvais sens, et nous l'avons dit tout au long des débats.
Le deuxième axe concerne le logement social et, en particulier, votre volonté de développer la vente de logements HLM. Nous l'avons dit : nous n'y sommes pas opposés, mais des garanties doivent être apportées pour éviter les abus et les effets d'aubaine.
En permettant la vente en bloc à des personnes morales de droit privé qui peuvent être des sociétés immobilières, comme des fonds de pension – notre analyse étant confirmée par plusieurs médias – , vous vendez le patrimoine des Français à la découpe. Pire, en supprimant l'obligation de vente au prix des domaines, vous allez permettre à ces sociétés de réaliser des opérations financières juteuses, sans considération pour les deniers publics. Lorsque les immeubles seront situés dans des quartiers attractifs, ce sont des investisseurs qui achèteront et réaliseront dans dix ans de belles plus-values et lorsque les immeubles seront situés dans des quartiers défavorisés, ce sont des marchands de sommeil qui surgiront, avec pour conséquence la multiplication des copropriétés dégradées.
Tous les amendements que nous avons proposés ont été rejetés, qu'il s'agisse de limiter la vente en bloc aux seules ventes entre bailleurs, de rétablir le prix des domaines en tout ou partie ou même de prévoir une clause de retour à meilleure fortune en cas de plus-value importante à la revente. Le maintien du droit de préemption du maire a été une bien maigre et insuffisante concession, bien qu'éminemment nécessaire.
Le dernier axe que nous avons identifié est celui de la dérégulation. Le projet de loi porte une offensive inédite contre les normes qui garantissent la qualité de notre habitat : suppression de l'avis conforme des architectes des bâtiments de France, moindres exigences de performance énergétique des bâtiments tertiaires – et que dire de la quasi-suppression des normes d'accessibilité pour les personnes en situation de handicap ?
La majorité a amplifié cette vague dérégulatrice en s'attaquant à notre patrimoine paysager et à nos côtes en permettant de déroger à la loi littoral. Dorénavant, des constructions pourront être entreprises dans les fameuses dents creuses.
Des textes emblématiques de notre pays, qu'aucune majorité n'avait remis en cause – loi littoral, loi SRU, normes pour les personnes handicapées – , sont ainsi vandalisés.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, si l'évolution du texte sur les questions de mixité sociale est positive – nous la saluons – , nous ne pouvons que nous opposer vivement aux dispositions que vous proposez pour la vente des logements HLM et aux mesures de dérégulation qui vont promouvoir un habitat low cost. Pour toutes ces raisons, notre groupe votera contre le projet de loi.