Nous ne pouvons tolérer plus longtemps les conditions dans lesquelles les décisions d'assignation à résidence sont prononcées par le ministre de l'intérieur dans le cadre de l'état d'urgence, qui, M. Collomb nous l'a rappelé ce matin, concernent soixante-deux personnes. Vous le savez, ces décisions sont si fragiles que le Conseil constitutionnel et le juge administratif en ont censuré et suspendu certaines.
Quel est le problème ? Pour l'instant, lorsqu'elle assigne à résidence, l'administration n'a pas à respecter le principe du contradictoire, pas plus qu'elle n'est tenue de prendre sa décision de manière écrite et motivée. Une telle conception ne me semble pas conforme à la conception de la justice que nous partageons tous.
Nous pensons, au contraire, qu'un débat contradictoire en présence d'un conseil ou d'un mandataire permettrait à l'intéressé de faire valoir ses arguments et à l'administration de lui faire comprendre la mesure et de choisir, en fonction des éléments avancés, s'il faut ou non engager contentieux.
Sans justification, sans explication, sans un débat qui laisse la place à la partie adverse, on ouvre la porte à quelque chose que nul ne peut accepter sur ces bancs : l'arbitraire. En effet, comment nommer une décision qui réduit la liberté d'un citoyen sans lui fournir la moindre explication afin qu'il la comprenne et, d'une certaine façon peut-être, qu'il l'accepte ? Qui, parmi les 577 députés, accepterait de se voir imposer sans argument motivé, sans la possibilité de se faire entendre de manière contradictoire, une réduction de sa liberté de circulation ? Personne.
L'absence de motivation se comprend d'autant moins que l'article L. 225-4 du code de la sécurité intérieure prévoit, pour le contrôle administratif des retours sur le territoire national d'individus dont il existe des raisons sérieuses de penser que leur déplacement a pour but de rejoindre un théâtre d'opération de groupement terroriste, que toute décision doit être écrite et motivée. Dans ce cas, la personne concernée dispose d'un délai de huit jours pour présenter ses observations.
Ce qui est possible pour ces individus doit l'être aussi pour ceux qui font l'objet d'une assignation à résidence. C'est du moins ce à quoi tend l'amendement.