C'est le sentiment que dans leur statut d'automobiliste, ils deviennent des citoyens au sang chaud qu'il faut mater par l'autorité et la répression. Et vous êtes nombreux à le savoir, mes chers collègues, y compris sur les bancs de la majorité. Alors, bien entendu, vous nuancez cette décision gouvernementale, au motif qu'elle ne concerne pas les routes équipées de séparateur central, ni les deux fois deux voies. La belle affaire ! Chez moi, en Ardèche, 99 % du réseau routier départemental est sans séparateur central. Et sur les 3 800 kilomètres de routes départementales, les deux fois deux voies représentent moins de 14 kilomètres. C'est donc tout le département qui est pénalisé.
Alors pourquoi une telle levée de boucliers contre une toute petite mesure, insignifiante, avouons-le ? Eh bien, parce qu'en Ardèche comme dans bien des départements ruraux, on attend autre chose, madame la ministre, on attend d'autres petites mesures insignifiantes. On a juste besoin de médecins dans nos villages, d'infirmières dans nos établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes – EHPAD – , de routes en bon état, d'écoles efficaces, de débit internet élevé et de téléphones qui fonctionnent. Et quand on attend une amélioration de la vie quotidienne, qui tarde à venir, et que l'on reçoit pour seule réponse une contrainte de plus, assortie d'une sanction si on ne la respecte pas, alors oui, c'est une France incomprise qui réagit vivement et qui rejette la mesure qu'on veut lui imposer. La décision est tombée comme une gifle que l'on n'attend pas, une sanction que l'on inflige à un gosse qui récidive dans ses bêtises.
Je dois reconnaître le talent gouvernemental pour sa communication : une dose de culpabilisation pour ceux qui s'opposent à la mesure, un Premier ministre qui consent à sacrifier sa popularité et une rhétorique assez habile pour faire de ce sujet un débat entre ceux qui seraient hautement responsables d'un côté et ceux qui seraient gravement irresponsables de l'autre.