Intervention de Jean-François Dumas

Réunion du jeudi 17 mai 2018 à 8h30
Commission d'enquête sur l'égal accès aux soins des français sur l'ensemble du territoire et sur l'efficacité des politiques publiques mises en œuvre pour lutter contre la désertification médicale en milieux rural et urbain

Jean-François Dumas, secrétaire général de l'Ordre national des masseurs-kinésithérapeutes :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames les députées, messieurs les députés, je vous remercie de nous recevoir et de nous écouter. Nous représentons une profession en très grande majorité libérale : 80 % des kinésithérapeutes exercent en libéral, 20 % sont salariés. Cette profession est en pleine explosion démographique. Nous étions 44 000 professionnels en exercice en 1990 – période à laquelle je me suis installé – contre 93 000 aujourd'hui. Nous enregistrons 5 000 nouveaux professionnels par an et nous estimons que, d'ici à deux ou trois ans, nous franchirons le cap des 100 000 professionnels en exercice. Tous auront une activité, il n'y a pas de kinésithérapeute inscrit au chômage.

Malgré cette explosion démographique, la population est confrontée à une importante difficulté pour accéder aux soins de kinésithérapie. Le premier désert en kinésithérapie, c'est l'hôpital, notamment l'hôpital public ; les jeunes ne veulent plus exercer à l'hôpital. Le deuxième désert, bien évidemment, à l'image des autres professions médicales et des infirmiers, ce sont les zones rurales, que nous appelons des zones très sous-dotées. J'exerce personnellement dans une zone très sous-dotée en Normandie ; je connais le système des mesures incitatives et les carences de ce système ; je pourrai vous en parler si cela vous intéresse.

L'explosion démographique est due à une formation encadrée, qui produit 2 800 diplômés d'État tous les ans, auxquels s'ajoutent environ 2 200 à 2 300 diplômés formés par d'autres pays de l'Union européenne. La moitié de ses diplômes sont obtenus par des Français qui, tous les ans, sont presque un millier à s'expatrier pour accéder à leur rêve, devenir kinésithérapeute.

C'est pourquoi la notion de régulation démographique ne peut plus simplement s'envisager à l'échelon national. Cela n'a plus de sens : il faut l'appréhender dans un ensemble européen cohérent. Un pays comme la Roumanie participe à la formation de jeunes Français, comme des Roumains qui viennent travailler sur territoire français. En France, la densité moyenne des kinésithérapeutes sur le territoire se situe autour de 13 kinésithérapeutes pour 10 000 habitants, salariés et libéraux compris ; en Roumanie, elle est de 1 pour 10 000 habitants. Ainsi, un pays de l'Union européenne forme des professionnels de santé dont il a besoin, mais qui vont directement travailler sur le territoire français.

Les plus importantes densités en kinésithérapie se trouvent dans les pays du Nord, notamment dans le Benelux. Ces pays ont fait le choix de la kinésithérapie, qui est une médecine douce, officielle, basée sur des preuves scientifiques, quasiment sans aucun effet secondaire. Ces densités sont quasiment deux fois plus importantes qu'en France, avec 24 ou 25 kinésithérapeutes pour 10 000 habitants.

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