En complément de la procédure pénale existante, la loi instituant le droit au logement opposable – dite « loi DALO » – a mis en place, en son article 38, une procédure administrative permettant au préfet, lorsqu'une plainte a été déposée pour violation de domicile, d'ordonner l'expulsion des squatteurs sans attendre une décision judiciaire.
Telles sont les dispositions législatives actuelles. On peut considérer qu'elles sont insuffisamment, voire mal utilisées, mais elles existent. Par ailleurs, il convient de préciser ici que, contrairement à ce qui a pu être dit, la violation de domicile est reconnue pour les résidences secondaires et les immeubles d'habitation, dès lors qu'ils sont meublés à cet effet. Il ne peut y avoir de confusion, car tel est le droit actuel ; je ne dis pas qu'il est parfait mais, en tout cas, il est parfaitement utilisable dans ces cas de figure.
La Cour de cassation définit le domicile comme « le lieu où une personne, qu'elle y habite ou non, a le droit de se dire chez elle, quels que soient le titre juridique de son occupation et l'affectation donnée à ces locaux ». Cela concerne les résidences principales comme les résidences secondaires. Plusieurs décisions assez récentes et univoques ont été rendues en ce sens. Il en est également ainsi des dépendances d'une résidence – que ce soit, par exemple, une cour attenante à une habitation ou une cave – , des appartements meublés, même momentanément inoccupés en raison de travaux devant y être effectués, ou encore des locaux affectés à l'exercice d'un travail ou d'une profession.
Je le répète, il n'est donc pas exact d'affirmer que le droit pénal actuel ne protège pas les résidences des Français lorsque ceux-ci s'absentent pendant plus de quarante-huit heures. Il n'est pas exact d'affirmer qu'il n'est pas possible d'interpeller et de déloger les auteurs de l'infraction de violation de domicile plus de quarante-huit heures après leur entrée dans les lieux. Le droit actuel, grâce notamment aux évolutions législatives des dernières années, le permet. Mais il est vrai qu'il peut parfois subsister dans l'esprit de nos concitoyens des ambiguïtés sur ces points, qu'il convient de lever.
En complément des protections apportées par les procédures pénales et administratives, que je viens d'évoquer, s'agissant de la protection du domicile, le droit civil, en particulier l'article 544 du code civil, confère une protection plus large au droit de propriété, et ce de manière efficace, comme l'attestent les données statistiques du ministère de la justice.
La procédure de référé civil permet de solliciter du tribunal d'instance l'expulsion à bref délai de squatteurs de tout logement ou bien immobilier, quand bien même celui-ci ne peut recevoir la qualification de « domicile ». La même procédure de référé peut être utilisée devant le tribunal de grande instance concernant les terrains occupés non bâtis ; c'est le cas, notamment, lorsque des caravanes s'installent sans autorisation sur le terrain d'autrui. Pour avoir présidé un exécutif pendant seize ans, je conviens que l'application de ces dispositions législatives peut – je l'ai vécu – se révéler compliquée. Tel est, néanmoins, le droit positif.
Devant les tribunaux d'instance, en moyenne, les décisions en référé sont rendues dans un délai de trois mois – j'ai vérifié ces statistiques, que je tiens à votre disposition. Devant les tribunaux de grande instance, elles sont rendues, en moyenne, dans un délai d'un mois et demi. En principe, la décision ordonnant l'expulsion ne peut pas être exécutée avant l'expiration d'un délai de deux mois – qui s'ajoute au délai précédent – à compter de la délivrance d'un commandement de quitter les lieux. Le juge des référés peut cependant, si les occupants sont entrés dans le lieu par voie de fait, ce qui est évidemment le cas en matière de squat, réduire ou supprimer ce délai. Ce n'est pas, j'en conviens, une obligation. Le juge peut également autoriser, par exception, l'expulsion de personnes entrées par voie de fait durant la trêve hivernale. La loi pour l'accès au logement et à un urbanisme rénové – dite « loi ALUR » – et la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté ont entraîné des évolutions ; je n'ai pas vu, d'ailleurs, dans la proposition de loi, de modification de ces deux textes. Le problème peut effectivement se poser puisque, pendant la période hivernale, quel que soit le type d'occupation, il peut ne pas y avoir d'expulsion – je ne pense pas que le cas inverse se produise souvent.
Je veux revenir sur l'affaire que vous avez évoquée, qui avait justement ému l'opinion publique il y a quelques années : celle de Mme Thamin, âgée de 83 ans, qui s'était trouvée confrontée à des squatteurs dans sa maison inoccupée en Bretagne.