Votre proposition de loi tend, à bien des égards, à renforcer encore un peu plus le droit de propriété, pourtant déjà largement consacré, cela a été dit, par la Déclaration des droits de l'homme et par notre Constitution, parfois au détriment de l'intérêt général et du bien commun. Nous l'avons vu, hélas, pendant la discussion de la loi ELAN, et nous le voyons au quotidien dans les tribunaux devant lesquels les marchands de sommeil sont poursuivis.
En mettant en avant les squatteurs, elle prétend apporter des solutions inédites à un problème que le droit français n'aborderait pas, ou marginalement, alors qu'il existe au contraire un arsenal juridique déjà très fourni en la matière, comme M. le ministre nous l'a rappelé. En somme, elle propose des solutions à rebours des problèmes qu'elle prétend vouloir résoudre.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je tiens d'abord à rappeler que, si la loi DALO était correctement appliquée, nous ne serions certainement pas en train de débattre de ces problèmes de squats et d'occupation illégale de logements. Alors que les commissions de médiation prévues par cette loi ont rendu plus de 243 000 décisions favorables, seules 143 000 demandes ont pu être comblées à ce jour. Il faut absolument réussir, monsieur le ministre, à faire en sorte que ce taux de satisfaction des demandes augmente et tende vers 100 % ; c'est la seule condition pour que le droit au logement devienne réellement un droit opposable. En matière de résorption des squats, peut-être une discussion sur ce sujet aurait-elle été plus efficace pour répondre à la problématique posée. Mais sans doute aurait-elle été politiquement moins porteuse pour séduire un certain électorat très convoité.
Il est d'ailleurs assez regrettable que le groupe qui propose aujourd'hui ce texte soit celui-là même qui a fait voter la loi DALO il y a tout juste dix ans. Une dizaine des cosignataires de la proposition examinée ce soir avaient d'ailleurs voté pour ce texte en 2007. Nous assistons donc à un bien fâcheux revirement de situation.