Les rédactions locales sont une des grandes forces des deux réseaux, France Bleu et France 3. Nos journalistes sont présents sur tout le territoire, peuvent donner à voir ce qui s'y passe et relayer l'information locale. Cela nourrit non seulement notre offre de proximité – France Bleu pour Radio France – mais également les autres antennes des groupes. Au sein de chaque groupe, les rédactions se coordonnent et, s'agissant de Radio France, les informations délivrées par les stations locales de France Bleu sont transmises à l'agence de vérification de France Info qui les rediffuse ensuite auprès des différentes antennes du groupe. C'est un enjeu fort d'organisation. Nous nous appuyons sur le maillage très important des journalistes de France Bleu sur tout le territoire. France 3 dispose également d'importants effectifs de journalistes locaux, les principales tranches régionales diffusées par la télévision étant les informations.
Nous allons analyser ces complémentarités. De ce contexte, monsieur Attal, nos rédactions doivent être « agiles » et travailler selon les modèles de production de l'ère numérique. Les contenus sont certes pensés pour le média radio, mais les supports et les formats – notamment à France Bleu – doivent pouvoir être diffusés en numérique sur des smartphones. Cela nous permet d'être présents partout et d'être là pour capter l'information de proximité. Cette proximité avec l'actualité des territoires fait notre force : nos contenus et nos images sont souvent réutilisés sur les antennes de certains de nos concurrents privés.
Dès 2015, le projet de chaîne d'information continue de service public se voulait une réponse à la diffusion massive des images captées par le réseau de France Bleu sur les antennes des chaînes privées d'information continue.
La complémentarité des réseaux, ce n'est pas seulement la double diffusion radio-télévision. À l'étranger, certains pays ont suivi cette voie, mais ils sont isolés. À l'inverse, la British Broadcasting Corporation (BBC) pense ses contenus pour une diffusion à 360° – radio, numérique, télévision. Nous devons tendre vers ce modèle, afin que nos contenus d'hyper-proximité irriguent tous les supports.
Les équipes et les moyens de production sont désormais organisés dans une logique économique soutenable, pour nourrir cette offre renforcée. Nous disposons de tous les outils pour être imaginatifs, créatifs et audacieux. Nous reste à opérer cette mutation.
La diversité sur nos antennes est un enjeu majeur pour nous. Elle passe par la parité et la représentation des différentes origines et des différents milieux sociaux. En tant que média de service public, nous avons l'obligation de donner à voir la diversité sous toutes ses formes non seulement sur nos antennes mais aussi au sein de nos équipes. Un travail formidable a été mené ces dernières années pour augmenter le nombre de femmes présentes au sein des différentes chaînes. Il y a donc désormais chez Radio France autant – voire plus – de directrices d'antenne que de directeurs. La présence des femmes aux postes de responsabilité est très marquée. Il faut qu'elle le soit à tous les échelons, mais il faut aussi trouver un équilibre non seulement entre les hommes et les femmes, mais aussi entre les différentes origines. C'est un objectif très important que j'ai eu l'occasion d'affirmer lorsque j'ai présenté mon projet devant le CSA et au respect duquel je veillerai tout au long de mon mandat. Il s'agit de donner à voir la diversité de la société française. Je renforcerai les différentes initiatives qui ont été prises en la matière ces dernières années.
France Culture a effectivement une spécificité qu'il faut continuer à valoriser puisque c'est la seule offre culturelle vingt-quatre heures sur vingt-quatre en France, en Europe et sans doute dans le monde. Le numérique nous permet de mettre en valeur cette offre – y compris dans le champ de la production puisque France Culture est à la fois un diffuseur et un producteur de contenus culturels. J'ai parlé dans le cadre du projet stratégique que j'ai présenté devant le CSA de sortir de la gratuité : il s'agit aussi de faire de la Maison de la radio, lieu de production unique, un lieu de valorisation du savoir-faire des productions. Il faut montrer ce que le service public sait faire et je souhaite développer le label « Studio Radio France » qui puisse être un facteur de développement de nos ressources propres ainsi que d'innovation et de création à Radio France. Cette innovation et cette création doivent selon moi également passer par la mise en place d'un incubateur de jeunes talents qui nous permette de faire venir les jeunes à la Maison de la radio, de valoriser toutes les créations et la diversité dans ces créations, de soutenir cette jeunesse qui a beaucoup d'idées et de la rendre plus présente sur nos antennes. Cela peut permettre à ces dernières d'être mises en contact avec des jeunes qu'elles n'auraient pas l'occasion d'identifier autrement.
Les langues régionales sont évidemment une richesse de notre patrimoine. En Alsace, avec France Bleu Elsass, nous continuons à soutenir la langue régionale grâce à une offre numérique riche et dense. Nous en faisons autant en Bretagne, en Corse et dans d'autres régions. C'est une mission importante de Radio France que nous continuerons à développer, le numérique étant à cet égard un levier de valorisation comme il l'est pour d'autres offres très spécifiques du service public.
France Bleu n'a pas à rougir des audiences qu'elle a eues lors des dernières saisons : le niveau est en hausse et a atteint les 7,1% sur l'ensemble du réseau lors de la dernière vague. Nous devons continuer à faire progresser l'audience sur ces antennes, mais France Bleu est aujourd'hui la sixième radio de France. C'est un bon résultat, que je tiens à valoriser devant vous. Il faut rappeler que ces audiences sont très diverses sur le territoire. Dans certaines zones, France Bleu est la première ou la deuxième station. Dans d'autres zones, elle est essentiellement écoutée dans les agglomérations – où les Français sont beaucoup plus enclins à écouter des radios plus généralistes. France Bleu y est donc en concurrence avec France Inter, France Info et l'ensemble des radios privées à couverture nationale.
Tout dépend des attentes des Français – dont les habitudes diffèrent selon les zones du territoire – et du type de population auquel on s'adresse. Il y a une dichotomie entre les populations urbaines et les populations périurbaines et rurales. Il faut tenir compte de chacune de ces populations et répondre à chacune de leurs problématiques, y compris dans leurs modes d'écoute. Certaines populations utilisent beaucoup plus le numérique que d'autres. Aujourd'hui, je suis dans l'incapacité de savoir si l'écoute en numérique se fait plutôt dans les zones rurales et périurbaines ou dans les agglomérations, mais c'est un véritable enjeu puisque l'égalité sur le territoire passe aussi par l'égalité de la diffusion. Il y aura toujours une partie des Français qui voudra continuer d'écouter la radio sur un poste FM. Il faut veiller à ne pas perdre ces auditeurs, et il ne faut donc pas aller plus vite que l'évolution des usages. Les usages numériques sont importants, mais c'est souvent autre chose que les Français viennent chercher quand ils écoutent la radio par voie numérique – d'autres types de contenus et une autre manière de consommer les médias. Cette autre manière de consommer les médias s'ajoute, sans s'y substituer, aux modes d'écoute beaucoup plus traditionnels.
Les évolutions des usages s'accélèreront sans doute dans les prochaines années. Il faut y être attentif pour les anticiper et les accompagner, mais il faut aussi penser à tous les Français qui gardent un mode d'écoute plus traditionnel. Nous devons concevoir nos offres par rapport aux enjeux territoriaux, et je crois beaucoup en ce que va permettre la géolocalisation : nous allons pouvoir proposer à ceux de nos auditeurs qui nous écoutent par voie numérique des contenus géolocalisés. Nous allons ainsi jouer notre rôle de prescripteur culturel en mettant en avant les offres culturelles des territoires et leurs manifestations sportives. C'est en cela que le numérique peut nous permettre d'améliorer la manière dont nous nous adressons aux Français. Nous pourrons ainsi recommander des contenus en adéquation avec les préoccupations des Français dans leur environnement immédiat. Il faut penser le numérique non pas comme se substituant à un autre mode d'écoute, mais comme un moyen d'offrir de nouveaux services à nos auditeurs.
La crédibilité de l'information est un enjeu très important du service public sur nos différentes antennes. Plusieurs de nos antennes apportent une information de qualité : c'est le cas de France Bleu et de France Inter. Quant à France Info, elle est très identifiée comme apportant de l'information en continu et incarne la confiance dans l'information. Il faut qu'on s'appuie sur cette confiance car elle permet de nourrir une relation avec nos auditeurs qui s'inscrive dans la durée. Elle nous permet de leur donner à voir les débats qui se nouent sur les questions d'actualité. France Info et France Culture ont récemment créé un podcast intitulé Les Idées claires, visant à donner un éclairage au travers des savoirs, de la science et de la connaissance sur les sujets qui font débat et qui donnent lieu à des rumeurs diverses sur différentes plateformes et sur les réseaux sociaux. Il peut s'agir par exemple des évolutions du climat ou de la nourriture bio – sujets à propos desquels on peut lire des contre-vérités sur de nombreux supports. C'est notre rôle de service public que d'apporter la connaissance en fédérant toutes les expertises sur un sujet. C'est un enjeu démocratique très important. Ce podcast sera disponible dans un nouvel onglet du site Franceinfo intitulé Vrai ou fake.
L'interactivité, qui permet aux citoyens de nous interroger sur ce qui est vrai ou faux, fait partie des piliers de cette nouvelle offre. Certains Français nous font ainsi remonter qu'ils sont informés de tel événement de manière à ce que nous puissions, nous, apporter une expertise. La semaine dernière, un incident important à Londres a été annoncé en primeur sur le site de France Info par des citoyens français présents sur place. Cela a permis à nos journalistes de vérifier l'information et d'expliquer ce qui s'était produit. C'est une nouvelle manière de jouer notre rôle de média. Cette interactivité est un ressort très important d'évolution sur lequel il faut s'appuyer. Il faut comprendre le nouveau rapport que les Français – de toutes les générations d'ailleurs – veulent avoir à l'égard des contenus. Nous ne sommes plus dans une relation passive et verticale, mais dans une société où les gens interagissent, se positionnent, questionnent les contenus et veulent pouvoir interagir avec les médias.