Intervention de Yves Marignac

Réunion du jeudi 14 juin 2018 à 14h30
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Yves Marignac, directeur de Wise-France :

Absolument. Et c'est précisément parce que le « cycle du combustible » est extrêmement complexe que la manière simplifiée dont l'industrie le raconte lui permet effectivement de faire passer un certain nombre de messages qui ne sont ni cohérents ni conformes à la réalité industrielle. D'où l'importance de creuser le sujet.

Beaucoup d'acteurs de la filière vous ont dit que l'arrêt du retraitement entraînerait une augmentation du volume de déchets. En réalité, l'arrêt du retraitement aboutit à un volume de déchets comptabilisés plus important, mais le volume de matière reste globalement le même, sachant que ce qui détermine le volume utile de déchets à stocker, c'est la thermique, laquelle est assez directement proportionnelle au produit de fission, donc à l'énergie que vous avez tirée de votre matière.

Si le fait de retraiter ou non ne change pas fondamentalement les choses en matière de volume, cela complexifie en revanche énormément la gestion de la matière, puisqu'au lieu d'avoir un combustible usé qui sera géré en tant que tel, vous aurez les déchets du retraitement, le MOx usé, l'URE usé, l'uranium de retraitement appauvri, le plutonium accumulé ici et là, les rebuts du MOx et j'en passe. Wise Paris a réalisé il y a quelques années une note sur les comparaisons en volume, qui corrobore ce que disait Yannick Rousselet, à savoir qu'il n'y a pas de gain en volume final.

Au-delà de cela, les défenseurs du retraitement développent un argument très gênant que vous avez sans doute entendu, à savoir qu'il réduirait la radiotoxicité finale, du fait de l'absence de plutonium dans la matière destinée au stockage géologique. Or cet argument est fondamentalement biaisé, dans la mesure où, sous prétexte de prévenir un risque à très long terme – sachant de surcroît que le plutonium, s'il a certes une radiotoxicité forte, est l'un des éléments qui va le moins migrer dans l'environnement géologique de stockage des déchets –, on justifie une pratique industrielle – le retraitement – qui fait courir, elle, à court terme, un risque avéré aux travailleurs du nucléaire et à la population, puisqu'on va isoler et manipuler ce plutonium, qui est précisément la matière la plus radiotoxique, pour l'intégrer au MOx, lequel MOx va être transporté et réinjecté dans les réacteurs.

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