Intervention de Yves Marignac

Réunion du jeudi 14 juin 2018 à 14h30
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Yves Marignac, directeur de Wise-France :

Le débat mêle en réalité deux enjeux différents sur deux échelles de temps distinctes. On parle, d'une part, d'une échelle de temps le long de laquelle on se projette dans une société responsable, qui conserve la maîtrise et la responsabilité des déchets, tout l'enjeu étant de trouver une solution définitive pour leur stockage ; il y a ensuite une échelle de temps beaucoup plus longue, qui nous projette vers une société dont il est à peu près certain qu'elle aura perdu la connaissance et la maîtrise de ces déchets, qui devront donc avoir été placés en situation dite de « sûreté passive », c'est-à-dire une situation où l'homme et l'environnement en seront protégés malgré l'oubli. Dans cette perspective de très long terme, je ne sais pas aujourd'hui imaginer de moins mauvaise solution que le stockage géologique. Pour paraphraser Churchill, je dirais que le stockage géologique est la pire solution à l'exception de toutes les autres.

Toute la question reste néanmoins de savoir comment gérer cette transition entre la phase active, qui consiste à imaginer une solution pérenne, et la phase passive de très long terme. Cela implique un effort d'anticipation, pour pouvoir lâcher prise, sans quoi l'objectif de sûreté passive ne sera pas atteint.

Il ne faut pas, néanmoins, se projeter trop loin, car la certitude que la pérennité de notre société est assurée pour les quelques siècles à venir est assez faible ; parallèlement, il ne faut pas non plus aller trop vite parce que nous n'avons aujourd'hui ni la capacité ni la garantie de pouvoir mettre en oeuvre correctement le stockage géologique, et nous avons besoin de poursuivre les recherches, d'imaginer d'autres designs de stockage, voire d'autres solutions.

C'est là qu'intervient la question d'un entreposage robuste du point de vue de la sûreté et de la sécurité, à une échelle séculaire. C'est, selon moi, la priorité, plutôt que de se focaliser comme on le fait sur la question du stockage géologique et d'essayer de mettre en oeuvre Cigéo le plus vite possible. Cigéo ne pourra pas être opérationnel rapidement, encore moins pour ce qui concerne la descente dans des galeries de stockage géologique des déchets les plus actifs.

Or les solutions d'entreposage dont nous disposons actuellement pour conserver les déchets les plus actifs et les combustibles usés ne me semblent ni suffisamment robustes ni suffisamment pérennes pour assurer la transition. Dans cette optique, l'entreposage en subsurface me semble la meilleure option.

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