Intervention de Bénédicte Peyrol

Réunion du mercredi 20 juin 2018 à 8h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBénédicte Peyrol, rapporteure pour avis :

Monsieur Grau, vous m'interrogez sur le risque juridique que pourrait représenter le fait que la clause anti-abus vise un « but principalement fiscal ». Le Conseil constitutionnel a censuré il n'y a pas si longtemps pour incompétence négative des tentatives de certains parlementaires visant à assouplir l'abus de droit ; on ne sait pas trop ce qu'il y a derrière ce « but principalement fiscal » mais il faut rappeler que la censure était aussi liée à la majoration de 80 % qui accompagne l'abus de droit. Les conseillers d'État Philippe Martin et Pierre Collin, que nous avons auditionnés, m'ont rassuré sur l'interprétation du « but exclusivement fiscal » de l'article L. 64 du LPF : il ne s'agit pas d'une interprétation restrictive mais la formule apporte tout de même une sécurité juridique aux entreprises. Le remplacer par un « but principalement fiscal » serait à mon avis un peu risqué. Je pense que ce dispositif anti-abus général n'écrase pas notre article L. 64 et il serait bon de garder les deux, avec l'article visant les dispositifs anti-abus de manière générale dans une répression très forte tout en conservant la règle d'assiette qu'est le dispositif. Nous conduirons, dans le cadre de la mission d'information sur l'optimisation et l'évasion fiscales, un travail d'explication de ce que devrait être selon nous l'articulation de l'ensemble de ces clauses anti-abus ; nous avons vu l'administration fiscale à cette fin et le travail est en cours.

Madame El Haïry, s'agissant de l'établissement stable, je vous renvoie à mon rapport, qui explique très précisément les choix qui ont été faits, ainsi qu'aux commentaires de l'OCDE sur lesquels se fonde l'administration fiscale quand elle a à interpréter une convention fiscale.

Monsieur Bricout, comme je l'ai indiqué, il n'y a pas de consensus aujourd'hui au sein de l'OCDE entre les États qui pensent que le sujet du numérique doit être envisagé de manière globale et ceux qui pensent qu'il doit être traité à part. Par conséquent, nous n'avons pas souhaité intégrer ces dispositions, afin que cela ne bloque pas les négociations sur le reste. Je rappelle tout de même que l'OCDE poursuit les négociations. Le G7 a rappelé la nécessité de trouver des solutions rapidement, dans l'idéal au cours de 2019, sur le sujet de la fiscalité numérique. La France est moteur au niveau de l'Union européenne avec la taxation à 3 % sur le chiffre d'affaires des services du numérique. L'idéal serait une définition commune de l'établissement stable virtuel, dans un premier temps au sein de l'Union.

Nous appelons à une information qui soit plus qu'annuelle, à savoir que la commission des finances, par le biais du président et du rapporteur général, puisse disposer d'une information régulière sur les futures conventions notifiées. Nous invitons le Gouvernement à nous transmettre ces informations, y compris sur les choix français.

Monsieur de Courson, cette convention multilatérale modifie les conventions bilatérales actuelles et vous savez comme moi qu'en vertu de l'article 55 de notre Constitution, une convention bilatérale prime sur le droit national, le cadre juridique de l'articulation entre ces normes ayant été précisé par le Conseil d'État dans ses décisions Schneider Electric de 2002 et 2013. Cela signifie que les stipulations de la convention primeront.

Nous avons reçu un engagement de l'administration fiscale de publier des versions consolidées des conventions fiscales notifiées par la France. Malgré cette consolidation, les conventions consolidées ne seront pas opposables à l'administration fiscale. Il faut donc se demander comment les rendre opposables.

Les réserves de la France, au nombre de cinq, ne sont pas dans le projet de loi mais elles figurent sur le site de l'OCDE.

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