Intervention de Laura Flessel

Réunion du mercredi 2 août 2017 à 16h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Laura Flessel, ministre des sports :

Je vous remercie de votre invitation. Je suis ministre des sports – et ravie de l'être – depuis deux mois et demi, avec pour seul objectif de réussir ma mission. Je viens du monde du sport, mais aussi du milieu de l'entreprise et de celui de l'humanitaire ; j'ai également créé un club d'escrime.

Ma priorité a été de composer un cabinet passant de vingt à dix membres ; il a donc d'abord fallu s'entourer de dix personnalités polyvalentes afin qu'elles travaillent avec moi en faveur du développement du sport, à l'échelle nationale mais aussi internationale.

Pour traduire concrètement ma vision du sport et de ce ministère, j'ai souhaité que notre plan d'action soit structuré autour de quatre axes et qu'il implique d'emblée tous les acteurs du mouvement sportif. Nous avons d'abord dressé un état des lieux en menant des consultations auprès des présidents de fédérations et des directeurs techniques nationaux afin de faire le point sur les enjeux auxquels sont confrontés les uns et les autres, mais aussi leurs besoins et, surtout, leurs attentes.

Puis nous avons consulté les organismes qui travaillent avec les ministères ou qui en dépendent, comme le Centre national pour le développement du sport (CNDS), le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), l'Association nationale des élus en charge du sport, les directions techniques nationales, mais aussi les syndicats. L'idée était de travailler de concert en vue d'une co-création.

Dans un troisième temps, nous sommes allés sur le terrain. J'ai annoncé dès ma prise de fonctions que je ne saurais me contenter de travailler dans un bureau ; très vite, je me suis donc rendue dans différents territoires, à Épinal, à Bourges, à Compiègne, à Hossegor ou encore aux Antilles. Je tiens à m'appuyer sur les acteurs locaux, en particulier les élus, pour garantir la cohérence de notre action. Je suis aussi allée à l'étranger : Kazan, Budapest et Bruxelles, où j'ai effectué mes deux premiers déplacements au Parlement européen pour rencontrer l'intergroupe Sports ainsi que mes homologues, pour leur présenter les orientations de la politique de mon ministère.

J'en viens précisément aux quatre axes de notre action : la France qui rayonne, la France qui bouge, la France éthique et la France en bonne santé.

Premier axe : la France qui rayonne. La priorité était de faire de la candidature olympique et paralympique de Paris 2024 un succès. Nous sommes sur la bonne voie : nous n'attendons plus que la ratification de la décision, le 13 septembre et, dès le lendemain, nous devrions pouvoir commencer non seulement à préparer les Jeux mais aussi à transformer l'essai en faisant évoluer l'ensemble de l'écosystème à l'échelle internationale. Pour ce faire, la performance sportive de la France doit s'améliorer. Dès mon arrivée au ministère, j'ai donc tenu à rassembler à l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (INSEP) son directeur, M. Ghani Yalouz, et l'ensemble des acteurs du sport français, y compris le CNOSF, avec M. Denis Masseglia, et le Comité paralympique et sportif français, avec Mme Emmanuelle Assmann. L'objectif était d'illustrer le travail collectif et transversal – et non plus en silo – que nous voulons conduire afin de mutualiser les compétences, de sorte qu'il ne soit plus nécessaire de disposer de trois observatoires pour obtenir un seul et même résultat.

Pour faire rayonner la France, il faut aussi renforcer la filière économique du sport en faisant augmenter d'un quart de point sa contribution au PIB d'ici à 2024. Le comité stratégique de la filière sport a été lancé il y a deux ans par Emmanuel Macron, alors ministre de l'économie. Nous avons la chance d'avoir à nos côtés des entreprises qui croient aux valeurs du sport et qui développent cette économie. Lors des Jeux de la Francophonie, à Abidjan, nous avons emmené une quinzaine de chefs d'entreprise qui ont pu réaffirmer sur place leur stratégie de coopération bilatérale. Notre objectif est aussi de développer la diplomatie sportive. Et pour rayonner, il faut non seulement se projeter à l'étranger mais aussi accueillir ; c'est pourquoi nous avons obtenu d'utiliser le visa « talents », non pas en vue de 2024 mais pour former des partenariats avec les pays dont nous pourrions recevoir des ressortissants. À Budapest, j'ai ainsi réaffirmé notre souhait de renforcer notre coopération avec l'Allemagne, la Hongrie et la Russie.

En clair, ces deux premiers mois ont été denses. J'ai notamment pu constater que l'intérêt que la Francophonie porte au sport, dont témoignent les échanges que nous avons eus à Abidjan avec 84 États sur divers projets de coopération. Nous ne faisons que débuter ce développement et je vous invite naturellement à vous rapprocher de nous, en fonction de vos centres d'intérêt et de vos spécialités, pour y participer.

Deuxième axe : la France qui bouge. Nous voulons développer la pratique sportive notamment en réduisant les inégalités d'accès aux activités physiques. J'ai fixé un objectif ambitieux : trois millions de pratiquants supplémentaires en 2022. Pour y parvenir, il faut faire naître une culture du sport dès le plus jeune âge, mais aussi lutter contre les discriminations et les violences dans le sport.

De ce point de vue, nous avons d'emblée conçu notre action dans une perspective interministérielle, comme l'a voulu le Président de la République. Le ministre de l'Éducation nationale, M. Jean-Michel Blanquer, et moi-même élaborons donc en matière d'éducation et de sport un projet pilote qui devrait prendre forme dès l'automne. Notre premier objectif est d'accroître la pratique sportive à l'école primaire. Je souhaite que les espaces de jeu soient ouverts non seulement aux enfants valides, mais aussi à ceux qui se trouvent en situation de handicap, car je n'étonnerai personne en rappelant qu'aujourd'hui, ils ne pratiquent pas le sport à l'école – ils se contentent souvent de travaux manuels ou de chronométrer les épreuves des autres. Les activités telles que le cécifoot, le handifoot ou encore l'escrime-fauteuil contribuent à faire accepter très tôt la différence. Le programme pilote auquel nous travaillons, et pour lequel je compte sur l'implication des élus, portera sur vingt-quatre écoles dans vingt-quatre régions. Nous montrerons ainsi que l'on peut intégrer le sport à l'école dès le plus jeune âge, pour les élèves valides et handicapés.

Pour lutter contre les discriminations, plutôt que de présenter le respect comme une obligation, nous préférons valoriser les gestes de respect à l'égard d'autrui afin de conduire une action plus positive en faveur de l'égalité. Tel sera notre engagement dès la rentrée.

Le troisième axe de mon action portera sur l'éthique. La France est et restera un pays qui, en matière d'intégrité, donne l'exemple sur la scène internationale. Après avoir rencontré l'intergroupe sport du Parlement européen, je travaille désormais à un rapprochement avec le Comité international olympique (CIO) sur ce sujet. Plutôt que de tout changer, nous allons poursuivre et intensifier le travail déjà entrepris. Les moyens de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) sont certes en baisse, mais les résultats sont là. Nous avons déjà anticipé en confiant sa feuille de route à Mme Dominique Laurent, qui succède à M. Bruno Genevois, parti à la retraite, à la tête de l'Agence.

J'ai également tenu à rencontrer Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, pour envisager comment associer les universités et le monde de la recherche à la lutte contre le dopage. Dans le même ordre d'idées, nous allons rencontrer l'Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL). Mon objectif est d'avoir toujours un temps d'avance, d'anticiper. Nous continuerons également de mobiliser nos partenaires européens.

Vous le voyez, nous allons mieux accompagner la croissance de la pratique sportive en prêtant attention aux tendances du marché tout en nous attachant à défendre les valeurs du sport.

Le quatrième axe, enfin, est celui de la France en pleine forme. Pour cet objectif important comme pour les autres, je me tourne vers vous, car nous souhaitons créer 500 maisons du sport et de la santé sur le territoire, afin d'accroître les effets de la pratique sportive sur la santé et le bien-être de tous, y compris les publics qui en sont aujourd'hui les plus éloignés. Ces nouveaux lieux d'éducation à la pratique sportive, qui s'appuieront sur des moyens numériques, faciliteront le diagnostic des pathologies et la programmation des activités sportives grâce à un travail étroit avec tous les acteurs du sport, en particulier des coaches spécialisés. J'ajoute que cela permettrait à certains de nos anciens champions de réussir leur reconversion ; d'expérience, je sais en effet que la réinsertion des sportifs de haut niveau est essentielle. Certains pourraient devenir managers ou entraîneurs dans ces nouveaux établissements, d'autres informaticiens, par exemple ; l'objectif est de n'oublier personne.

Mon projet est ambitieux et mon action s'exercera dans deux domaines distincts : l'organisation de grands événements – les Jeux de 2024, la Ryder Cup, les Gay Games – qui feront rayonner la France, et le développement du sport dans la société, qu'il doit irriguer, par exemple dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, mais aussi dans les entreprises, où la pratique sportive est faible, et dans les universités, où elle ne dépasse pas 2 %. Le sport est prescrit pour faire face au burn-out, pour soigner le diabète. Nous nous autoriserons donc à agir dans tous les domaines.

Nous réfléchissons aussi à un programme pour les réfugiés, pour que le sport – le simple jeu de ballon, qu'il soit de football ou de rugby – ajoute une dimension d'humanité aux outils d'apprentissage de la langue et de la culture qui leur sont proposés. Les moyens budgétaires ne sont pas extensibles, mais voyons le verre à moitié plein et soyons ingénieux, notamment pour associer le monde de l'entreprise aux différents programmes de développement du sport. Le sport, enfin, permet de réinsérer les jeunes embrigadés qui reviennent de Syrie. En bref, nous voulons découvrir et innover afin de déployer un programme ambitieux et cohérent.

Depuis deux mois, nous nous sommes attelés à la planification, mais aussi à la résolution des divers dysfonctionnements constatés au ministère en hiérarchisant davantage les actions, en développant le recours aux outils numériques et en travaillant davantage avec les territoires.

Permettez-moi de vous présenter les personnes qui m'accompagnent : Stéphanie Maringe, conseillère parlementaire, qui connaît déjà bon nombre d'entre vous et qui sera votre interlocutrice directe, et Dimitri Grygowski, directeur adjoint de cabinet – j'ai tenu, en effet, à ce que mon cabinet soit dirigé par un binôme : une femme provenant du monde de la santé, et un homme qui vient du sport de haut niveau.

Je suis également venue pour vous parler des Jeux : hier, le maire de Los Angeles a confirmé son souhait d'accueillir les Jeux en 2028, ce qui nous ouvre la voie pour 2024 même s'il reste encore des documents à présenter et à signer. Pour que la France puisse, à partir du 13 septembre, se préparer à organiser les Jeux de 2024, nous devons travailler ensemble, en lien étroit. Permettez-moi de vous montrer deux des films que nous avons projetés lors de notre présentation orale à Lausanne, en présence du Président de la République.

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