Je serai synthétique, rassurez-vous, mais je veux rappeler que les salariés donnent un sens à leur action. Ils se rendent au travail pour répondre à un besoin d'ordre public de production d'électricité, qui répond à un besoin fondamental des populations, des collectivités et des entreprises. Le sens du travail relève de ce que l'on a dans la tête et dans le ventre ; il a une incidence sur les gestes professionnels et donc sur la sûreté nucléaire. Pour la CGT, tout conditionne la sûreté nucléaire. Certains s'interrogent sur ce qui est coeur de métier ; pour nous, tout est coeur de métier.
Vous nous avez interrogés sur les éléments que nous considérons incontournables à la garantie de la sûreté. Les questions de formation professionnelle et de compétences à tenir dans la durée touchent à des thématiques, telles que la sociologie des entreprises concernées, que ce soit les entreprises donneuses d'ordre ou les entreprises prestataires, et à la façon dont les salariés sont attachés à l'outil de travail dans le temps, ce qui pose la question des garanties sociales, des formations et de la rémunération.
Si le marché du travail venait à reprendre, ce que tout le monde souhaite, certaines industries connaîtraient sans doute des appels d'air. Comment, dès lors, conserver les compétences des salariés de cette branche professionnelle spécifique ?
S'ajoute la question de la représentation du personnel. Celui-ci doit pouvoir interroger, exprimer ses remarques et ainsi faire avancer la sûreté et la sécurité. À cet égard, quelques outils existent – les CE, les CHSCT, les réunions des délégués du personnel –, pendant encore quelques mois pour ce qui nous concerne.
Il y a quelques années, la loi avait permis un progrès en ce sens. Par exemple, les salariés des entreprises prestataires pouvaient être élus sur le registre des délégués du personnel et sur le registre des CHSCT. Sur un certain nombre de sites du parc nucléaire d'EDF, des représentants salariés des prestataires siègent au sein des instances représentatives du personnel. Cette opportunité va disparaître, ce que nous considérons comme un véritable retour en arrière, d'autant que nous avions eu bien du mal à obtenir ces dispositions. Or, à partir de 2019, ces salariés ne pourront plus s'exprimer en tant que tels auprès du donneur d'ordre, en tout cas, dans un organisme officiel. On vous expliquera qu'il existe des organismes informels mais, pour nous, la protection des salariés qui, avec courage, prennent la parole pour défendre les intérêts collectifs de leurs collègues, les conditions de travail et les conditions de vie, posera question très rapidement. Nous profitons de l'occasion pour vous alerter. Dans les mois qui viennent, ces salariés se retrouveront sans la protection de leur mandat. Nous le savons tous, il n'y a pas que des philanthropes dans le patronat, et un certain nombre de salariés seront mis sur le gril.