Nous sommes en train de décrire les conséquences du dumping social qui engendrent les conditions de la précarité des salariés intérimaires comme des salariés détachés, le comble de la précarité ! Et qui dit précarité dit droit d'expression des salariés amoindri et moins de droits d'intervention pour faire évoluer leurs conditions de travail. On ne peut se soucier uniquement des conséquences, il faut s'attaquer en profondeur aux causes.
Une fois dit cela, je reviens sur la question des compétences, le socle sur lequel s'appuyer pour exploiter en toute sûreté nos outils de travail. Nous avons la possibilité de nous engager sur des accords de programmes de compétence et d'en refuser certains. Je pense notamment au plan de départs volontaires qui a sévi chez Areva, devenue Orano, comme chez Framatome, et dont nous avons constaté les conséquences désastreuses. Le plan est engagé depuis plusieurs mois. Il est nécessaire tout à la fois de réformer les organigrammes et d'imaginer des fonctions coeur de métier qui ont été supprimées. Tout cela est bien compliqué quand ceux qui sont partis ne sont plus là pour transmettre leurs savoirs. Au cours des périodes récentes, des effets balanciers chez EDF se sont révélés désastreux. Je ne reviendrai pas sur la dernière décennie et les plans de performance.
Les compétences nécessitent de la constance, car il convient de les transmettre et donc d'anticiper. Sur le parc, je connaissais les bâtisseurs des centrales nucléaires. Il faut qu'ils transmettent leurs compétences spécifiques. Dans le nucléaire, quel que soit le métier – soudeur, robinetier… –, les compétences professionnelles se conjuguent à la spécificité du nucléaire qui requiert d'appréhender l'environnement de travail, l'installation, les processus qualité. C'est en ce sens qu'il faut oeuvrer et que l'État doit prendre ses responsabilités, tout autant s'agissant des formations initiales que sur cette vision à moyen et long termes des compétences indispensables.
Qu'ils travaillent directement pour les donneurs d'ordre ou pour les entreprises sous-traitantes, les salariés s'entendent bien. Ce sont les circonstances, la pression accrue sur leurs conditions d'intervention qui engendrent des tensions susceptibles de dégrader les relations. Cela renvoie à la façon dont on écoute les salariés, à la manière de prendre en compte leurs conditions d'intervention, aussi bien en termes de délais que de moyens accordés. Ne serait-ce qu'obtenir une simple pièce de rechange devient extrêmement difficile et se consacrer à son coeur de métier réclame des efforts et une attention de tous les instants. Ces qualités font partie de la spécificité, non pas uniquement du secteur du nucléaire, mais du monde industriel en général.