Intervention de Marc Kuntz

Réunion du jeudi 14 juin 2018 à 9h00
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Marc Kuntz :

Avant de répondre à votre question, je souhaite relever des éléments encourageants qui vont dans le sens de la sûreté. Au cours des dix dernières années, la direction du parc nucléaire d'EDF a remplacé la moitié des salariés. Dix mille nouvelles personnes ont été embauchées sur 23 000. Les chiffres montrent que le nombre d'arrêts automatiques réacteurs – l'indicateur par excellence de l'évolution de la sûreté – a été divisé par deux. Nous n'en avons jamais enregistré aussi peu que l'an dernier. Cela atteste du renouvellement des compétences. Pour autant, il convient de rester attractifs pour les prochaines embauches et que les personnes qui ont été recrutées aient envie de rester.

Par ailleurs, les accidents de sécurité « classiques » sont en diminution constante depuis dix ans, aussi bien chez les prestataires que chez les salariés d'EDF ; les niveaux sont de plus en plus bas.

Pour ce qui est de la radioprotection, globalement, les gens sont de moins en moins exposés. La dosimétrie moyenne ne fait que baisser.

Ensuite, les nouvelles technologies de l'information permettent de standardiser les méthodes de travail. Aujourd'hui, nous oeuvrons pour que l'accueil des prestataires, les méthodes de consignation et le passage au bureau de consignation soient exactement les mêmes, quels que soient les sites nucléaires. La standardisation de nos méthodes de travail va croissant, ce qui représente un grain de confort pour les intervenants.

Vous avez évoqué deux situations. Je ne connais pas le dossier Germanwings en détail, mais une fois qu'il a décroché les sécurités, un pilote est seul maître à bord de son appareil, ce qui n'est pas le cas dans une centrale nucléaire. Si j'ai bon souvenir, on a relevé un certain nombre d'alertes dans la vie de cette personne et le fait que des débriefings de situations précédentes n'avaient pas été correctement réalisés. À EDF, la détection des collègues en souffrance comme le débriefing font partie intégrante de notre vie quotidienne de travail.

Plusieurs possibilités s'offrent à un collègue en souffrance : il peut s'exprimer auprès de ses collègues proches, du management, des syndicalistes ou de son médecin du travail. Certaines centrales nucléaires ont développé des groupes de confiance, d'autres encore entretiennent des groupes multidisciplinaires.

De notre point de vue syndical, les groupes multidisciplinaires ne sont pas à la hauteur dans les centrales nucléaires françaises. Nous faisons pression pour que la situation s'améliore. Le 28 avril dernier, le comité exécutif a décidé de demander aux centrales nucléaires d'améliorer la prise en compte des risques psychosociaux. Lors du prochain renouvellement des habilitations pour la sécurité classique qui ont lieu tous les trois ans, cela se traduira par l'obligation d'aborder le thème des risques psychosociaux. Au surplus, dans la formation des managers, sera intégré un module de gestion des risques psychosociaux. Ce sont là des thèmes sur lesquels nous progressons.

De mon point de vue, une personne isolée sur une centrale nucléaire a moins de pouvoir de nuisance qu'un pilote sur un avion de la Germanwings.

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