Monsieur le président, je vous remercie d'accueillir notre association, et lui permettre ainsi d'exposer sa position sur cette question. Je compléterai votre présentation en ajoutant que je suis maire d'un petit village de 600 habitants dans la Sarthe.
J'établirai tout d'abord un état des lieux du monde rural, et évoquerai les difficultés qui accaparent et oppressent nos concitoyens. La question de la désertification médicale en France n'est pas nouvelle, mais elle s'aggrave depuis deux ou trois ans, laissant les habitants de communes rurales de plus en plus démunis face à la numérisation des actes de la vie quotidienne et à la disparition des services publics, notamment en matière de santé. C'est la raison pour laquelle votre commission et les propositions qui en découleront sont très importantes ; elles montrent que l'État a compris le désarroi de nos concitoyens, qui s'exprime notamment par l'abstention ou le vote en faveur de partis extrémistes. Il serait judicieux de redresser la barre et de leur proposer des solutions cohérentes afin qu'ils se sentent à nouveau des citoyens à part entière.
Comme cela vient d'être dit, chaque département cherche à mettre en place des solutions favorisant l'installation de jeunes médecins : certains recrutent directement des médecins, d'autres accompagnent des étudiants dès la première année, des communes salarient des médecins ou financent des MSP et des intercommunalités soutiennent des médecins faisant leurs études en Roumanie pour les fidéliser ensuite.
Cependant, toutes ces solutions ne fonctionnent qu'à moitié : un grand nombre de MSP sont ouvertes sans médecins, des médecins étrangers « picorent » et changent de cabinet médical tous les quatre mois, et les mairies ne pourront pas salarier autant de jeunes médecins qu'il serait nécessaire. La commune de La Ferté-Bernard, par exemple, peine aujourd'hui à remplacer les médecins salariés qui partent à la retraite.
Toutes ces initiatives entraînent parfois des aberrations : des habitants de ma commune sont obligés de se rendre à Paris en train pour consulter un ophtalmologue, et des Parisiens vont chez le dentiste d'une petite commune, parce qu'il est beaucoup moins cher. Ce qui se dessine à travers ces exemples, c'est bien la consultation à distance dans des cabines déshumanisées. Sachant que les pharmacies, qui sont censées accompagner ces cabines, sont elles aussi menacées : l'Ordre des pharmaciens prévoyant la fermeture de 1 700 officines.
Alors si certaines initiatives sont efficaces pour des spécialistes, pour la médecine générale, en primo-consultation, le remède est pire que le mal. Les parlementaires devront donc faire preuve d'un vrai courage politique pour inciter les étudiants ayant passé leurs épreuves classantes nationales (ECN), et qui voient leur rêve de devenir spécialistes s'évanouir, à s'installer dans des territoires sous-dotés en médecine générale, au nom de l'équité – comme cela existe dans d'autres professions.