Intervention de Yaël Braun-Pivet

Réunion du jeudi 28 juin 2018 à 21h10
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYaël Braun-Pivet, rapporteure :

Je ne suis pas favorable à la constitutionnalisation de l'état d'urgence pour plusieurs raisons.

D'abord, cela n'est pas nécessaire juridiquement, puisque l'absence de cadre constitutionnel n'empêche pas le législateur de définir un régime d'état d'urgence. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 22 décembre 2015 sur les assignations à résidence pendant l'état d'urgence a confirmé cette interprétation d'une manière très claire : « Considérant que la Constitution n'exclut pas la possibilité pour le législateur de prévoir un régime d'état d'urgence ; qu'il lui appartient, dans ce cadre, d'assurer la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, le respect des droits et libertés reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République. »

Ensuite, cela ne paraît pas utile puisque le régime de l'état d'urgence tel qu'il est défini par la loi du 3 avril a été considérablement rénové au cours du précédent état d'urgence. De nombreuses garanties nouvelles ont pu être apportées : contrôle parlementaire, suppression de la possibilité de transférer à la juridiction militaire la compétence pour se saisir des crimes et des délits connexes relevant de la cour d'assises, suppression des mesures pour assurer le contrôle de la presse et des publications de toute nature ainsi que celui des émissions radiophoniques, des projections cinématographiques et des représentations théâtrales, meilleur encadrement des perquisitions…

Enfin, la possibilité pour le Parlement de mettre fin à l'état d'urgence existe de facto au-delà de douze jours puisque, en application de l'article 2 de la loi de 1955, la prorogation de l'état d'urgence au-delà de douze jours ne peut être autorisée que par la loi. Lors de chaque prorogation, le Parlement peut rejeter le texte. Ce qu'une loi fait, une loi peut le défaire.

Le Parlement a pu se saisir de ce débat et de la raison d'être de la prorogation. Je vous indique aussi que le contrôle parlementaire de l'état d'urgence s'est déroulé de façon extrêmement fluide et que l'opposition y a été associée. Nous n'avons pas besoin de constitutionnaliser l'état d'urgence pour l'encadrer. Avis défavorable

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