Intervention de Christophe Arend

Séance en hémicycle du mardi 10 juillet 2018 à 15h00
Démocratie plus représentative responsable et efficace — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Arend, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre d'État, madame la garde des sceaux, monsieur le rapporteur général, madame et monsieur les rapporteurs, messieurs les rapporteurs pour avis, mes chers collègues, nous entamons la réforme de notre Constitution. Cela réclame notre plus grande attention parce que nous allons toucher aux fondements de notre République. Chaque modification devra être pesée et mesurée minutieusement pour s'inscrire dans les réalités de demain.

L'évolution de l'article 2 du projet de loi constitutionnelle est en ce sens un cas d'école : auditions d'experts, débats avec le Gouvernement, débats en commission du développement durable et en commission des lois ont permis à la proposition d'origine de mûrir.

Au début du processus de maturation du texte, le Gouvernement a souhaité faire de l'action contre les changements climatiques une priorité nationale. L'article 2 du projet de loi traduit la volonté du Président de la République d'inscrire au plus haut niveau normatif l'enjeu majeur que constituent de nos jours les changements climatiques. Dans la continuité de l'accord de Paris, adopté à la suite de la COP21, le 12 décembre 2015, et face à l'urgence climatique, l'exécutif hisse cet objectif au rang constitutionnel.

L'article 2 du projet de loi confie au législateur la responsabilité de définir les principes fondamentaux de l'action contre les changements climatiques, au moyen d'une inscription à l'article 34 de la Constitution – cet article innovant de la Ve République qui définit le domaine de la loi. Les spécialistes entendus au cours de dix-sept auditions ont souligné que l'article 34 de la Constitution n'était pas l'endroit le plus adapté pour porter l'action contre les changements climatiques, cet article ne pouvant contraindre le Parlement à légiférer. De plus, l'environnement fait déjà partie du domaine de la loi depuis la révision constitutionnelle de 2005. Enfin, la rédaction actuelle de l'article 2 du projet de loi constitutionnelle n'englobe pas la diversité des problèmes environnementaux.

Pour notre part, nous avons acquis la conviction que l'environnement ne peut être compris que dans sa globalité. À cet égard, une inscription à l'article 1er de la loi fondamentale, qui affirme les grands principes de notre République, de la préservation de l'environnement confère à celle-ci non seulement une portée symbolique forte mais aussi une valeur juridique plus affirmée, comme le rappelle Marie-Anne Cohendet dans Le Monde.

Le premier pas a donc consisté à proposer une inscription à l'article 1er de la Constitution. La commission du développement durable, s'astreignant à la concision que demande un texte comme l'article 1er de la Constitution française, a retenu dans son avis la formulation « elle assure la préservation de l'environnement », le recours à un terme englobant étant le plus efficace pour contrer le risque de fractionnement de l'environnement.

Depuis lors, les riches débats menés en commission des lois ainsi que les nombreux échanges avec le Gouvernement et avec nos collègues rapporteurs nous ont permis d'être encore plus ambitieux. Nous verrons, lors du débat public dans l'hémicycle, que la proposition d'inscription à l'article 1er de la Constitution de l'environnement, de la diversité biologique et de l'action contre les changements climatiques ne constitue pas une hiérarchisation des problématiques, mais bien une garantie de s'intéresser à l'ensemble des thématiques relatives aux écosystèmes planétaires.

De même, nous avons obtenu l'assurance du Gouvernement qu'« agir pour la préservation » est juridiquement équivalent à « assurer la préservation », le verbe « agir » reprenant la formulation du Conseil d'État « actions contre les changements climatiques ».

Dans les heures et les jours qui viennent, un débat de fond s'amorcera sur l'opportunité de faire évoluer la Charte de l'environnement. Une modification de la Charte peut s'entendre car celle-ci, actuellement, ne comprend pas le terme « climat ». Mais une telle prise de risque sur la modification directe du texte entraînerait un réel appel d'air et remettrait en cause un principe essentiel à la préservation de notre planète : le principe de précaution. Or nous avons la certitude que compétitivité et préservation de notre environnement vont de pair et forment un cercle vertueux. L'opposition entre principe de précaution et sciences n'est qu'un leurre. Bien au contraire, le principe de précaution est un puissant moteur de la sublimation de la recherche scientifique. La Charte de l'Environnement doit être considérée pour ce qu'elle est : un texte historique fondamental rédigé dans un contexte donné, symbole de notre passé. Elle se suffit à elle-même, au même titre que la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et le préambule de la Constitution de 1946. C'est pourquoi nous ne pouvons imaginer en modifier les droits, les devoirs et les principes et sommes opposés à son amendement.

Lors de nos débats, certains autres grands principes seront évoqués. Je pense particulièrement à celui de non-régression. Après de nombreux échanges en commission des lois et en commission du développement durable, il nous a semblé que ce principe déjà inscrit par la loi pour la reconquête de la biodiversité à l'article L. 110-1 du code de l'environnement pourrait s'avérer contre-productif pour l'écofiscalité.

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