Non. Va-t-elle mieux protéger les Français, améliorer le fonctionnement de notre démocratie ? Je ne le crois pas.
C'est bien le chemin inverse que le Président de la République a choisi d'emprunter : une forme d'affaiblissement du rôle du Parlement.
Cette réforme de la Constitution n'est donc pas utile. Si vous souhaitiez seulement diminuer le nombre de parlementaires et introduire une dose de proportionnelle, une loi organique et une loi ordinaire suffisaient.
Les articles 6 et 7 du projet de loi constitutionnelle, dont la commission des finances s'est saisie pour avis, sont emblématiques, me semble-t-il, des faiblesses de ce projet de loi constitutionnelle : dispositions parfois superflues, manque d'ambition et abaissement du Parlement.
Les commissions pourront auditionner les ministres sur l'exécution de leur budget. Je ne crois pas que cela nécessite une révision de la Constitution car il a suffi que nous en décidions ainsi à l'occasion du printemps de l'évaluation.
Nous aurons dorénavant la possibilité d'examiner conjointement, en tout ou partie, les projets de loi de finances et les projets de loi de financement de la sécurité sociale. C'est un quart de mesure. Ce qu'il faudrait, en vérité, c'est fusionner les premières parties des projets de loi de finances et des projets de loi de financement de la sécurité sociale puisqu'il s'agit du même contribuable, qu'il paie des cotisations sociales ou des impôts. Nous aurions eu ainsi une vision d'ensemble sur les prélèvements obligatoires.
La suppression de la Cour de justice de la République n'est pas une question purement juridique. Attention car, comme l'a dit le Président de la République lors de la séance de rentrée de la Cour de cassation, appartenir au Gouvernement est une responsabilité très particulière. Si elle n'est pas prise en compte, la capacité pour les ministres de prendre des décisions difficiles, parfois à l'encontre de son administration, est remise en cause – l'ancien secrétaire général du Conseil constitutionnel l'a d'ailleurs rappelé, pas plus tard qu'hier, dans un grand journal.
Finalement les seules dispositions vraiment concrètes sont celles qui corsètent le Parlement. La restriction du droit d'amendement du droit d'amendement est une drôle d'idée et si le raccourcissement du temps d'examen du PLF ne me choque pas en tant que tel, nous pouvons d'ores et déjà ne pas utiliser tout le temps que nous octroie la Constitution actuelle pour le faire. Comme l'a dit Laurent Saint-Martin, nous avons surtout besoin de temps pour examiner le projet de loi de finances avant qu'il ne soit examiné en commission ; or rien n'est proposé dans ce sens.
D'autres besoins ne sont pas pris en compte par ce projet de réforme.
Je pense par exemple au remplacement du principe de précaution – contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure, je ne crois pas que celui-ci soit essentiel – par un principe d'innovation responsable.
Je pense aussi à l'article 40, qui contraint les membres du Parlement et non le Gouvernement. Les propositions et amendements des parlementaires ne sont pas recevables s'ils diminuent des ressources publiques ou entraînent la création ou l'aggravation d'une charge publique. N'était-ce pas le moment d'indiquer que la responsabilité du Parlement était au moins identique à celle du Gouvernement, que les parlementaires ne sont pas plus irresponsables que les membres du Gouvernement ? La liberté de proposer puis, bien évidemment, la liberté de disposer pour l'Assemblée, cela aurait été un sacré symbole. Vous ne l'avez pas voulu, je le regrette.
Enfin votre volonté centralisatrice s'exprime à plein. Vous auriez pu mieux préciser ce qu'était l'autonomie fiscale et financière des collectivités.
Alors, monsieur le Premier ministre, je vous le demande à nouveau, avec beaucoup d'humilité : à quoi sert cette réforme constitutionnelle ?