Ainsi, depuis près d'un an, j'ai l'honneur d'être le rapporteur du groupe de travail consacré aux prérogatives parlementaires, décrites à l'article 24 de la Constitution : le contrôle de l'action du Gouvernement et l'évaluation des politiques publiques. Des avancées importantes ont été apportées de ce point de vue, lors de la révision constitutionnelle de 2008.
Avec mes collègues membres de ce groupe transpartisan – j'insiste – et en prévision de ce présent projet, nous avons formulé une quinzaine de propositions de niveau constitutionnel. Toutes visent à mieux légiférer en donnant aux parlementaires des capacités accrues d'évaluation ex ante et ex post des conséquences des textes qu'ils votent.
Comme le disait le général de Gaulle lors d'une conférence de presse en 1961, « Notre Constitution est à la fois parlementaire et présidentielle, à la mesure de ce que nous commandent à la fois les besoins de notre équilibre et les traits de notre caractère. » C'est donc au nom de ce caractère que nous partageons et de la qualité parlementaire du texte constitutionnel que je souhaite insister sur plusieurs aspects.
Nous serons tous d'accord sur ces bancs pour constater que le principal problème que nous rencontrons dans l'exercice de notre mandat est l'ordre du jour de nos travaux. La réforme de 2008 a instauré un rythme en 2-1-1 : deux semaines d'initiative gouvernementale, une semaine à l'initiative de l'Assemblée et une semaine dédiée au contrôle et à l'évaluation. Cette organisation avait d'ailleurs pour but de renforcer les droits de l'opposition. Or nous savons que ces deux dernières semaines sont soit occupées par des projets de loi, soit désertées car suscitant peu d'intérêt. Nous pensons que ce désintérêt est lié au manque de moyens dédiés au contrôle et à l'évaluation, entraînant une faible appropriation de cette mission par les parlementaires.
Cette révision constitutionnelle doit être l'occasion pour nous de réfléchir à une nouvelle organisation de l'ordre du jour, où l'initiative parlementaire et les prérogatives de contrôle et d'évaluation sont valorisées et rendues utiles pour les parlementaires, mais également lisibles pour les Français.
Certes, ce projet de loi propose un équilibre entre, d'une part, un raccourcissement de la procédure parlementaire et, d'autre part, une semaine au cours de laquelle des textes issus de travaux de contrôle et d'évaluation pourraient être adoptés. Il propose également, à l'article 8, ce qui ressemble à une augmentation des possibilités d'inscription, par priorité, de projets de loi à l'ordre du jour. Ainsi, nous devons collectivement rester vigilants sur l'équilibre du temps dévolu au Gouvernement et au Parlement. Il s'agit d'établir une relation de confiance, je dirais adulte, entre les deux instances qui partagent l'initiative législative.
L'autre aspect est la nécessité pour les parlementaires d'être informés des données, chiffrées ou non, ou des statistiques qui permettent l'élaboration ou la modification d'un texte législatif. L'évaluation des politiques publiques se pratique déjà en aval du vote d'un texte pour en contrôler l'application et vérifier que ses objectifs sont atteints. Il s'agit aussi de pouvoir réaliser des évaluations en amont de la procédure. Pour cela, nous avons besoin de moyens et d'outils, mais aussi de temps et de moments dédiés à ce travail au cours d'une session.
Je me félicite de l'inscription dans la Constitution de ce que l'on pourrait appeler le « printemps de l'évaluation », avancée nécessaire dans l'évaluation ex post. Il sera néanmoins très souhaitable que la possibilité de maintenir un temps minimum de travail entre le dépôt d'un texte et son examen soit discutée. La question se posera à l'article 6 avec l'organisation du travail sur la loi de finances.
Voilà mes chers collègues, monsieur le président, madame la garde des sceaux, les principaux points que je souhaitais porter à votre connaissance.