Chers collègues de toutes les sensibilités, ce n'est pas par coquetterie intellectuelle ou pour répondre aux sirènes de la communication que j'ai souhaité inscrire dans le préambule de la Constitution ces mots d'Albert Camus : « La démocratie, ce n'est pas la loi de la majorité mais la protection de la minorité ».
Au sein d'un État démocratique, la Constitution est la règle qu'un peuple se donne à lui-même. Elle définit à la fois le fonctionnement des institutions et les droits garantis aux individus. Ces dix dernières années, la France a connu une crise économique, une crise politique et une crise démocratique.
Introduire dans le préambule de la Constitution ces mots d'Albert Camus, c'est sortir de la matière froide d'un texte pour aller écouter les individus, c'est trouver une articulation entre justice sociale et liberté, c'est entrer dans la dialectique du jacobinisme nécessaire et du girondisme pragmatique, dans lequel on ne se retrouve pas jusqu'à présent.
Si rien n'aboutit jamais sans impliquer le peuple, avec ces mots d'Albert Camus, on pourrait ajouter que rien n'aboutit sans impliquer le peuple dans sa diversité.
Mes chers collègues, parce que la Constitution est aussi l'expression d'une philosophie politique, Albert Camus, ce combattant du pacifisme, cet angoissé des populismes, a toute sa place ici. Ce serait un trait d'union merveilleux entre l'esprit des Lumières, qui nous est très cher, et les temps présents.
S'il est un héritage dont notre pays peut être fier, c'est bien celui-ci. Par ailleurs, ce serait aussi choisir entre une « constitution Twitter » et une autre, plus inspirée de la Pléiade.