Intervention de Jean-Louis Bricout

Réunion du mercredi 13 septembre 2017 à 9h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bricout :

Monsieur le commissaire, j'associe à ma question mon collègue Christian Hutin. Le 4 août dernier, les ouvriers de l'usine Nissan située à Canton, dans le Mississippi, État le plus pauvre des États-Unis, ont été empêchés, avec la complicité de l'État français, de se syndiquer. Quelle ironie de l'histoire que cette régression sociale ait eu lieu le jour de l'anniversaire de l'abolition des privilèges ! Au terme d'une élection syndicale perdue d'avance car précédée d'une recrudescence inégalée de menaces et d'intimidations de la part de la direction de cette usine, les ouvriers ont été contraints de renoncer à se syndiquer.

En tant que parlementaire, je suis indigné que l'État français, actionnaire principal de Renault, elle-même actionnaire principale de Nissan, ait refusé d'intercéder auprès de Carlos Ghosn, patron de Renault et de l'alliance Renault-Nissan, pour que cessent ces pratiques antisyndicales dont des ouvriers à 95 % afro-américains sont les premières victimes. La liberté syndicale est en effet une liberté fondamentale que la France s'honorerait de défendre en toute circonstance et en tout lieu, a fortiori au sein d'entreprises ayant à leur capital des participations publiques.

Vous avez été personnellement alerté de cette situation par le représentant du syndicat américain UAW, qui défend les ouvriers américains du secteur automobile et qui est soutenu par plusieurs syndicats français – CFDT, FO, CGT, CFE-CGC – ainsi que par de nombreux parlementaires européens et américains. À la veille de l'élection syndicale, vous n'avez pas donné suite à leurs sollicitations, non plus que les cabinets du Président de la République et du ministre de l'économie. Pis, les représentants du gouvernement français ont repris à leur compte les éléments de langage de Carlos Ghosn, selon lesquels ce dernier, patron de Renault, ne pourrait intervenir dans les affaires de Nissan, laquelle respecterait le droit américain en vigueur.

Alors qu'on observe une stratégie de convergence toujours plus forte entre les deux constructeurs, y compris en matière de ressources humaines, cet argument nous semble irrecevable. Je ne peux, hélas ! que souscrire au constat de la Cour des comptes qui déplore la faiblesse de l'État actionnaire. Faut-il rappeler que M. Emmanuel Macron, alors ministre de l'économie, s'était engagé devant nos collègues sénateurs, le 23 mai 2016, à interroger Renault sur les pratiques antisyndicales en cours dans l'usine de Canton et à en informer la représentation nationale ?

Pouvez-vous vous engager solennellement à recevoir les travailleurs de l'usine du Mississipi et les représentants de UAW, à nous informer des échanges que vous aurez avec le directeur de Renault à ce sujet et à exiger de Carlos Ghosn qu'un principe strict de neutralité soit respecté par la direction de l'usine si une nouvelle élection syndicale devait être organisée ?

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