La commission entend M. Martin Vial, commissaire aux participations de l'État.
Nous commençons nos travaux avant l'ouverture de la session extraordinaire pour reprendre notre cycle d'auditions. Nous recevons tout d'abord les interlocuteurs les plus habituels de notre commission : aujourd'hui M. Martin Vial, commissaire aux participations de l'État, que je remercie d'avoir répondu à notre invitation.
Je vous remercie, monsieur le commissaire, de nous présenter l'Agence des participations de l'État : son organisation, sa doctrine, ses méthodes de travail et son actualité – dans la mesure de ce que permet la confidentialité requise sur certains sujets.
Mes chers collègues, vous êtes souvent nombreux à souhaiter poser des questions aux personnes auditionnées. Il faut évidemment que chacun puisse le faire, et que notre interlocuteur puisse y répondre. Je propose donc que nous entendions les questions par séries de quatre ou cinq, avant que notre interlocuteur y réponde de la façon la plus précise. Nous n'avons pas instauré de limitation de temps de parole, je suis partisan d'une certaine liberté. Si cela s'avérait nécessaire, nous limiterions le temps de parole à deux minutes par question, mais peut-être pouvons-nous l'éviter pour l'instant.
Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, de m'accueillir ce matin. J'en suis doublement honoré : c'est la première fois que je m'exprime devant une commission parlementaire depuis le début de la législature, et il s'agit de votre première réunion avant l'ouverture de la session extraordinaire.
Avant de répondre à vos questions, je voudrais partager avec vous quatre convictions : premièrement, l'État actionnaire a vu son action beaucoup progresser depuis la création de l'Agence des participations de l'État (APE) ; deuxièmement, contrairement à une idée reçue, nous gérons notre portefeuille de manière assez dynamique ; troisièmement, l'État doit être un actionnaire responsable, décomplexé et exemplaire ; quatrièmement, nous devons faire évoluer notre doctrine d'investissement et le périmètre du portefeuille. Cette introduction me permettra de brosser un bref historique et un état des lieux de l'action menée par l'État actionnaire au travers de l'APE, et de vous présenter nos perspectives d'évolution.
Première conviction, qui est aussi un constat, le rôle de l'État actionnaire a beaucoup progressé depuis la création de l'APE. Je vous ferai un rapide historique. En 2004, les pouvoirs publics ont décidé de créer l'APE pour identifier le rôle de l'État actionnaire, c'est-à-dire la défense de ses intérêts patrimoniaux, au milieu d'une multitude de fonctions remplies par l'État. Celui-ci est effectivement tuteur, régulateur, préleveur d'impôts, mais aussi client et fournisseur d'un certain nombre d'entreprises du portefeuille. Il est apparu nécessaire, à la suite du rapport rendu par René Barbier de La Serre, d'identifier cette fonction de défense des intérêts patrimoniaux. L'APE fut donc créée sous la forme d'un service à compétence nationale, à l'époque inclus au sein de la direction générale du Trésor.
Après ce moment fondateur, la deuxième étape a été l'autonomisation, en quelque sorte, de l'APE, lorsqu'elle est sortie de la direction générale du Trésor. Cette dernière remplissant des fonctions de régulation dans un certain nombre de secteurs, notamment le secteur financier mais pas seulement, il est apparu nécessaire que l'entité qui incarne le rôle de l'État actionnaire en soit séparée. C'est alors que l'APE a été dotée d'un directeur général, devenu depuis lors commissaire aux participations de l'État, rattaché directement au ministre – depuis le mois de mai dernier, je rends compte directement au ministre de l'économie et des finances.
Troisième étape, qui a touché au fond comme celle de 2004, une doctrine d'investissement a été formalisée pour la première fois et adoptée en Conseil des ministres au début de l'année 2014. Elle a permis de formaliser les raisons pour lesquelles l'État investit dans des entreprises.
Quatrième étape, à l'été 2014, une ordonnance a été prise par le Gouvernement, avant d'être ratifiée par le Parlement, qui a en quelque sorte « banalisé » le mode d'action de l'État au sein des entreprises où il est représenté, notamment en ce qui concerne la nomination des administrateurs et la participation aux organes de gouvernance, et clarifié certains points relatifs aux règles applicables en matière de cessions. Du point de vue de sa représentation dans la gouvernance des entreprises, cette réforme a fait de l'État un actionnaire proche d'un actionnaire privé, le plus près possible du code de commerce.
C'est donc aujourd'hui, en 2017, un parcours de treize ans qui a permis à l'APE de mûrir et de devenir un actionnaire exerçant ses prérogatives en grande partie comme un actionnaire normal, comme un actionnaire privé.
Deuxième conviction : l'État actionnaire dispose aujourd'hui de leviers puissants qui permettent une gestion très dynamique de notre portefeuille. Le portefeuille géré par l'APE représente environ 100 milliards d'euros d'actifs. Le chiffre d'affaires cumulé des quatre-vingt-une entreprises du portefeuille est de plus de 400 milliards d'euros et elles comptent plus de 1,8 million de collaborateurs en France et à l'étranger. Pour gérer ce portefeuille considérable, notre équipe est très réduite : cinquante-cinq personnes, très en deçà des normes d'effectifs des gestionnaires de portefeuille, que ce soit à l'étranger ou en France. Environ les deux tiers de ces collaborateurs sont des cadres et des chargés de participation, un tiers est affecté à des pôles transversaux – juridique, comptable, d'audit, financier ou de communication – qui appuient les équipes de gestion de portefeuille. En majorité, ce sont des fonctionnaires, des fonctionnaires issus d'autres ministères que Bercy mais aussi beaucoup de fonctionnaires de la direction générale du Trésor. J'ai souhaité, en particulier depuis l'été 2015, accroître le recrutement de collaborateurs ayant une expérience mixte, dans l'entreprise et dans l'administration, pour que nous soyons aussi efficaces et proches des entreprises que possible.
Nous ne sommes évidemment pas les seuls intervenants dans le secteur public. La Banque publique d'investissement (Bpifrance), détenue à 50 % par l'État via l'APE et à 50 % par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), gère un portefeuille d'actifs de 18 milliards d'euros. Elle est le premier acteur en termes de fonds propres, avec un portefeuille de gestion de participation d'environ 26 milliards d'euros, sans compter ses propres filiales. Le Commissariat général à l'investissement (CGI) gère pour sa part un peu moins de 6 milliards d'euros de participation au travers du programme d'investissements d'avenir. La coordination est perfectible, notamment avec le CGI, et nous devons encore y travailler, mais nous travaillons en lien très étroit avec la CDC, dans Bpifrance mais aussi à propos d'autres participations communes, dont La Poste. Nous avons également un dialogue quotidien avec Bpifrance en tant que tel.
Contrairement à une idée reçue, la rotation de notre portefeuille a été très importante. On accuse l'État de se montrer très statique dans sa gestion, mais ce n'est pas conforme à la réalité. En 2004, le portefeuille de l'APE comportait 66 entreprises, et son portefeuille coté pesait environ 43 milliards d'euros. Aujourd'hui, les douze lignes cotées de notre portefeuille représentent 67 milliards d'euros, et nous avons réalisé plus de 30 milliards d'euros de cessions entre 2004 et 2016. Depuis deux ans, le rythme de la rotation du portefeuille s'est plutôt accéléré. Nous aurons effectivement réalisé plus de 9 milliards d'euros de cessions depuis 2015 et 11,5 milliards d'euros d'investissements, retracés sur le compte d'affectation spéciale Participations financières de l'État.
Nous avons ainsi été amenés à privatiser les sociétés aéroportuaires de Nice et de Lyon, et nous avons cédé une partie de nos participations dans l'aéroport de Toulouse ; au printemps dernier, nous avons cédé à Bpifrance notre participation dans le groupe PSA ; nous avons cédé pour environ 2 milliards d'euros de titres Safran depuis 2015 ; nous aurons cédé environ 3 milliards d'euros de titres Engie dans le même temps ; nous avons acquis pour 1,2 milliard d'euros de titres Renault en 2015, et quelques dizaines de millions d'euros de titres Air France. Nous avons également investi massivement dans la filière nucléaire, en contribuant à la recapitalisation d'EDF, à hauteur de 3 milliards d'euros, et dans le groupe Areva à hauteur de 4,8 milliards d'euros. Dans EDF, nous aurons aussi investi plus de 4 milliards d'euros sur trois ans, avec l'encaissement des dividendes en titres, qui a également permis de recapitaliser EDF.
Les performances de notre portefeuille sont clairement surdéterminées par la structure de celui-ci et par le poids relatif des entreprises énergétiques : nos participations dans EDF, Engie et Areva représentaient environ 50 % du portefeuille jusqu'à cette année. Cette surpondération des entreprises du secteur de l'énergie a évidemment pesé sur la performance boursière. La performance globale du portefeuille – c'est-à-dire l'appréciation de la valeur du portefeuille – aura diminué de 11 % sur la période 2015-2016, alors que le CAC40 progressait de 5 %. À long terme, hors énergie, c'est l'inverse. Le portefeuille hors énergie a progressé de 74 % depuis 2008, en intégrant donc les suites de la crise causée par la faillite de Lehman Brothers, alors que le CAC 40 a progressé d'environ 51 %. Il est évident qu'il n'était évidemment pas question de se séparer des titres d'EDF, le Parlement a d'ailleurs instauré un seuil de détention publique de 70 %, ni bien sûr des titres d'Areva – il s'agit en quelque sorte d'une « entreprise souveraine ». La performance est donc clairement affectée par le poids des entreprises énergétiques dans notre portefeuille, mais le phénomène n'est pas spécifiquement français : la crise dans le domaine énergétique a frappé de plein fouet les entreprises énergétiques européennes. Ainsi, en Allemagne, la baisse des prix du pétrole, de l'électricité, du gaz a réduit de moitié en un peu moins de trois ans la valeur d'entreprises comme E.ON ou RWE, les plus puissantes en Europe.
En revanche, le rendement de ce portefeuille d'environ 100 milliards d'euros est supérieur à celui du CAC 40, puisqu'il atteint environ 4 %, et même 6 % hors énergie, tandis que le rendement du CAC 40 est de 3,5 %. La politique de dividendes de l'État a beaucoup évolué, notamment au cours de la dernière période. Dans le cadre de la réforme de l'ordonnance de 2014 et dans la pratique de l'État, les dividendes sont fixés, dans les entreprises cotées comme dans les entreprises non cotées, en fonction des capacités distributrices, des comparaisons sectorielles et de la soutenabilité à long terme des taux de distribution. Le taux de prélèvement sur les entreprises du portefeuille est donc moindre qu'il ne l'était en vertu de pratiques antérieures, et les dividendes continueront de diminuer, parce que les entreprises les plus importantes du point de vue des dividendes distribués réduisent leur taux de distributions et parce que, au fil des cessions d'actifs, la base elle-même diminue.
Qu'en est-il de l'avenir ?
Ma troisième conviction est précisément que l'État doit être un actionnaire responsable, décomplexé et, bien sûr, exemplaire. La responsabilité implique que notre pratique se détache de plus en plus d'une mentalité historique de tutelle et que nous options pour une mentalité d'actionnaire. Nous sommes minoritaires au capital de nombreuses entreprises, et quand nous sommes majoritaires, les entreprises sont cotées ou n'en comptent pas moins d'autres actionnaires minoritaires. Nous tendons à prendre en compte, de plus en plus, l'intérêt social et l'ensemble des parties prenantes – les autres actionnaires, les salariés, les clients, les fournisseurs, tout l'environnement économique des entreprises. Ce changement de mentalité, extrêmement positif, est nécessaire.
L'État actionnaire doit aussi être décomplexé. Ce n'est pas parce qu'il est un intervenant public qu'il n'a pas droit à la même considération, sur la forme et sur le fond, qu'un actionnaire privé. Une entreprise cotée doit prendre en compte le poids de l'actionnaire de référence. C'est la raison pour laquelle nous avons été amenés à intervenir lorsqu'en tant qu'actionnaire de référence nous avons souhaité faire respecter la loi du 29 mars 2014 visant à reconquérir l'économie réelle, dite « loi Florange », en augmentant provisoirement notre participation dans le capital de Renault et d'Air France pour que ces entreprises inscrivent l'exercice du droit de vote double dans les statuts de l'entreprise. Cela nous a amenés à intervenir en assemblée générale pour qu'ils soient modifiés en ce sens.
Enfin, l'État doit être exemplaire. L'État n'est pas un actionnaire banal, car il porte un intérêt général. À travers ses prises de participation, il mène une politique de défense des intérêts stratégiques du pays, une stratégie industrielle. Notre comportement doit donc être exemplaire. J'évoquerai simplement la question de la diversité et la féminisation des conseils d'administration. Nous avons beaucoup progressé : en 2012, le taux de féminisation des conseils d'administration du portefeuille était de 16,2 % ; il est aujourd'hui de 31,8 %. En ce qui concerne les douze sociétés cotées du portefeuille, le taux est évidemment supérieur à 40 % – il est d'environ 42 %. Le mouvement va se poursuivre, et le taux de féminisation des entreprises non cotées de notre portefeuille, auxquelles la loi n'impose pas d'obligation en la matière, est supérieur au taux de féminisation des entreprises composant l'indice SBF 120 ou des entreprises européennes les plus importantes.
Dans ce même souci d'exemplarité, nous avons entamé un travail sur la responsabilité sociale et environnementale des entreprises du portefeuille, pour lequel nous allons nous faire aider. Ma conviction est très simple : l'empreinte sociale et sociétale des entreprises commerciales, des entreprises qui font du profit, doit dorénavant être positive, et les externalités négatives, autrefois distribuées autour de l'entreprise, doivent dorénavant être prises en charge par elle. Nous souhaitons que l'ensemble des entreprises du portefeuille soient, de ce point de vue, aux meilleurs standards, et nous allons essayer de faire en sorte que celles qui en sont le plus éloignées s'en rapprochent.
Quatrième conviction : nous allons à la fois changer la doctrine d'investissement et faire évoluer le périmètre des participations financières de l'État. L'environnement a changé, sous la pression de la dérégulation, de la disruption numérique et sous l'effet d'un contexte bouleversé en matière de finances publiques. Au lendemain de sa nomination, le Gouvernement a très clairement exprimé le souhait, à travers la déclaration faite par M. Bruno Le Maire au mois de juillet, de lancer un programme de 10 milliards d'euros de cessions de participations pour alimenter un fonds pour l'innovation disruptive. Nous serons évidemment un vecteur très important de cette démarche et, dans cette perspective, nous allons faire évoluer la doctrine d'investissement. Celle-ci sera définie et formalisée par le Gouvernement au cours des prochains mois autour des entreprises les plus stratégiques pour la souveraineté, pour les intérêts industriels du pays, pour les services publics. Dans le cadre de cette évolution de la doctrine souhaitée par le Gouvernement, nous ferons évoluer le périmètre des participations de l'État. Tout cela sera évidemment défini par le Gouvernement dans les prochaines semaines ou les prochains mois et sera bien sûr présenté et discuté au Parlement.
La tâche est complexe. L'État n'est pas un actionnaire « lambda ». Il exerce une responsabilité particulière, au travers de la politique industrielle, de la défense ou de la promotion des intérêts stratégiques économiques du pays. En même temps, il doit adopter certains comportements tels qu'on les connaît et tels qu'ils sont fixés par le code de commerce. C'est cette double nature, cette double fonction que nous exerçons qui rend la tâche objectivement complexe, mais qui témoigne du progrès accompli par rapport à une vision historique très directoriale, une vision de tutelle. L'état d'esprit a beaucoup changé. Nous souhaitons dorénavant être de plus en plus au service de l'économie, de l'innovation et, bien sûr, de la promotion de la croissance et du bien-être économique du pays.
Monsieur le commissaire, la semaine dernière, l'exécutif a annoncé vouloir trouver 10 milliards d'euros pour financer l'innovation, et l'État a débuté un programme de cession d'actifs en vendant, pour 1,5 milliard d'euros, une partie de sa participation dans le capital d'Engie.
Je ne vous demanderai pas quelles sont les autres participations que vous entendez céder, car je sais que vous ne pourriez pas répondre ; mais je vous interrogerai sur plusieurs points qui intéressent les commissaires aux finances, soit en tant que législateurs, soit parce qu'ils sont chargés d'une mission de contrôle de l'exécution budgétaire.
Quelles garanties pouvez-vous nous apporter sur ces cessions ? Les conditions de marché sont-elles favorables ? Le calendrier des opérations sera-t-il établi de manière à éviter toute cession précipitée, ce qui serait défavorable aux intérêts patrimoniaux de l'État et du contribuable ? Bref, pouvez-vous nous rassurer ?
La loi impose actuellement à l'État une participation minimale dans trois sociétés cotées : 70 % pour EDF, 50 % pour Aéroports de Paris (ADP) et 33 % pour Engie. Dans ce dernier cas, la participation de l'État peut être temporairement inférieure au seuil requis de détention du capital ou des droits de vote à condition qu'elle l'atteigne à nouveau dans un délai de deux ans. Après la cession intervenue la semaine dernière, la participation de l'État s'élève aujourd'hui à 24 %, pour 28 % des droits de vote. Quand la participation minimale obligatoire sera-t-elle atteinte ? La loi doit-elle à votre sens être modifiée pour abaisser les seuils minimaux de participation de l'État, non seulement dans Engie, mais aussi dans EDF ou ADP ?
Quelles leçons tirez-vous de la récente privatisation des aéroports de Nice-Côte-d'Azur et de Lyon-Saint-Exupéry, notamment en vue d'une éventuelle évolution du statut d'ADP ?
Une réflexion doit s'engager sur le maintien de l'État au capital des entreprises du secteur concurrentiel non stratégique. Quelles sont, selon vous, ces entreprises ?
Au mois de mars, l'APE a cédé à Bpifrance la participation de l'État dans le groupe PSA, pour 1,9 milliard d'euros. Vous avez ainsi réalisé une plus-value de 1,2 milliard d'euros. Lorsque l'État était entré au capital de PSA, il y a trois ans, l'entreprise était en grande difficulté ; cette expérience montre que l'État est capable de participer au sauvetage de fleurons industriels tout en réalisant de belles plus-values ! Pourquoi avoir cédé ces titres à Bpifrance ? S'agit-il uniquement d'obtenir une recette sur le compte d'affectation spéciale, en vue de financer la recapitalisation d'Areva ?
Enfin, un rapport de la Cour des comptes, en date du 24 janvier 2017, a recommandé la transformation de l'APE en opérateur public : cela vous permettrait de toucher directement les dividendes versés par les entreprises, alors qu'ils sont actuellement affectés au budget général de l'État. Que pensez-vous de cette proposition ?
Monsieur le commissaire, on constate aujourd'hui une nette dégradation des performances financières des entreprises dans lesquelles l'APE détient des participations. L'APE a enregistré en 2015 une lourde perte, de l'ordre de 10 milliards d'euros : c'est le fruit des difficultés structurelles que vous avez évoquées, notamment dans le secteur ferroviaire et dans celui de l'énergie, mais pas seulement ; d'une façon générale, de nombreux indicateurs montrent une détérioration de la performance.
Ainsi, en 2015, pour la première fois depuis la création de l'APE, les résultats d'exploitation et les résultats nets combinés des entreprises publiques ont été négatifs. Et je note aussi qu'au 31 décembre 2016, la valeur du portefeuille coté des entreprises relevant de l'APE a baissé de 29 % par rapport à 2010, alors que le CAC40 a au contraire progressé de 28 %.
Ces performances dégradées pourraient se justifier si elles s'accompagnaient d'une amélioration de notre situation macroéconomique. Or ces participations publiques, plus élevées que dans les pays comparables, ne s'accompagnent ni d'une meilleure croissance du PIB, ni d'une amélioration de nos finances publiques, ni d'une réindustrialisation de notre économie, ni d'une amélioration du taux de chômage.
Dans son rapport de 2017, la Cour des comptes a émis différentes recommandations.
Elle proposait ainsi d'associer à chaque motif d'intervention des taux cibles de détention – 100 % pour les monopoles naturels, 51 % pour l'énergie... Ces taux pourraient faire l'objet de choix publics, arrêtés par le Gouvernement et le Parlement. Serait-ce là selon vous une bonne méthode, qui faciliterait la gestion des participations de l'État ?
La Cour recommandait également l'établissement d'un code de bonne gouvernance des entreprises concernées. Pourquoi un tel code n'existe-t-il pas en France, à l'inverse de ce qui se passe dans un grand nombre de pays, où l'État détient pourtant des participations très inférieures ? Dans le secteur privé, il existe bien un code de gouvernement des entreprises.
Une troisième proposition portait sur la création d'un comité stratégique de l'État actionnaire, à l'instar de ce qui existe dans le secteur privé avec le haut comité de gouvernement d'entreprise. Serait-ce opportun, à votre sens ?
Enfin, la Cour des comptes recommande la transformation de l'APE en agence autonome. Quel est votre point de vue sur cette question ?
Le rapport de la Cour des comptes déjà cité pointe les faiblesses de l'action de l'État actionnaire ; il n'est que de lire le sommaire pour s'en rendre compte : « une situation financière préoccupante », « les contradictions de l'État actionnaire », « des progrès de gouvernance notables, des carences persistantes ».
La Cour estime que l'État devrait fixer des objectifs stratégiques clairs, et préconise notamment une redistribution des rôles entre l'APE et Bpifrance. Celle-ci a-t-elle été engagée, et selon quels principes ? Sinon, prévoyez-vous de la mettre en oeuvre et quand ?
La Cour considère également que « l'application intégrale de l'ordonnance du 20 août 2014 à toutes les entreprises du portefeuille permettrait de mieux identifier les différents rôles de l'État à l'égard des entreprises, de prévenir les conflits d'objectifs et les conflits d'intérêts ». Vous avez qualifié cette tâche de « complexe ». Où en est aujourd'hui l'application de cette ordonnance ?
On peut se réjouir de l'autonomie croissante de l'APE.
Vous évoquiez le décrochage des participations que vous possédez dans le secteur de l'énergie. Quelle est l'évolution de votre portefeuille dans ce secteur depuis un an, depuis six mois ? Quelles ont été les conséquences des opérations de recapitalisation d'Areva et de l'annonce de cessions prochaines, notamment de participations dans ADP ?
J'aimerais également vous entendre sur la proposition de la Cour des comptes concernant l'autonomie de l'APE. Cela vous permettrait notamment de réinvestir les dividendes reçus.
Pourriez-vous nous dire quand, pour la première fois, le produit des cessions sera affecté au désendettement de la France ?
Enfin, s'agissant de la nationalisation des chantiers navals STX, où en est-on ?
Tout d'abord, monsieur le commissaire, pourquoi l'État continue-t-il de détenir des parts dans Renault et Air France ? En quoi est-il utile de continuer à détenir des participations de 10 % ou 12 % qui ne confèrent aucun pouvoir particulier ?
Pourriez-vous ensuite expliquer à la commission le rôle qu'a joué l'APE dans l'affaire Areva ? À quel moment avez-vous alerté votre ministre sur la faillite – disons les choses telles qu'elles sont – de cette stratégie industrielle ? Pouvez-vous faire le point sur la recapitalisation d'Areva, mais aussi d'EDF, opération destinée à sauver ce qui peut encore l'être ?
Quel est enfin votre diagnostic sur EDF, dont certains investissements pourraient être qualifiés de pour le moins aventureux, ainsi que sur la SNCF ? Je sais bien que celle-ci est un établissement public, mais ce n'est que pour éviter l'application du droit des sociétés – là encore, on aurait pu parler de faillite.
Vous avez évoqué, monsieur le commissaire, le projet du Gouvernement de créer un fonds de 10 milliards d'euros. Je voudrais clarifier un point : ce qui serait investi, ce serait, si je comprends bien, le rendement de ce fonds. Il ne s'agit pas d'investir 10 milliards dans l'innovation, mais plutôt 5 % de 10 milliards, soit 500 millions d'euros par an. Pouvez-vous confirmer ce point fondamental ?
Ma deuxième question rejoint celle de notre rapporteur général. Si l'APE percevait les dividendes des participations qu'elle détient, elle pourrait les réinvestir directement : nul besoin, dans ce cas, du tour de passe-passe qui vous amène à vendre des participations pour recréer un fonds dont, je le redis, seul le rendement – au maximum 500 millions – sera investi. Là encore, pouvez-vous confirmer ce point ?
Vous avez évoqué les participations cotées ; il existe également des participations non cotées. Parmi celles-ci, je pense notamment à l'aéroport de Toulouse, qui me tient à coeur. Pouvez-vous nous indiquer le nombre de pactes d'actionnaires que l'État a signé avec des sociétés privées au sein du portefeuille que vous détenez aujourd'hui ? Je ne vous demande pas les noms ni les contenus, car je sais que vous ne pourriez pas les donner ; mais j'aimerais en connaître le nombre.
Élue dans la région Occitanie comme plusieurs autres membres de notre commission, j'aimerais que vous vous engagiez à ne pas exercer votre option de vente sur l'aéroport de Toulouse, ce qui donnerait les pleins pouvoirs à l'actionnaire chinois. L'État garderait ainsi 10,1 % des actions de l'aéroport. La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite « loi Macron », a permis que les erreurs commises lors de la privatisation de l'aéroport de Toulouse ne soient pas reproduites à Lyon et à Nice. Pouvez-vous vous engager fermement devant nous à ne pas exercer cette option de vente, qui est à votre main ?
Enfin, je voudrais insister sur l'importance de la question posée par Charles de Courson à propos d'Areva. Nous attendons des précisions et des informations sur les conséquences financières et budgétaires de cette affaire.
Nous ne goûtons guère, pour notre part, la politique de privatisations menée depuis 1986 ; nous pensons qu'elle ne s'est révélée bonne ni pour le pays, ni pour l'industrie française, ni pour la maîtrise des secteurs stratégiques.
Il n'est pas question, si je comprends bien, de privatiser des entreprises qui appartiennent à des secteurs qui relèvent de la souveraineté nationale. Cela concerne notamment EDF. Mais pourquoi alors Engie pourrait-elle être privatisée, à hauteur de 4,5 %, après 4,1 % les années précédentes ? La CFDT craint que l'État ne dispose bientôt plus de minorité de blocage.
De la même manière, à l'heure où la question du climat et de l'environnement est considérée comme fondamentale, pourquoi le secteur des transports n'est-il pas considéré comme stratégique ? La braderie d'aéroports à laquelle nous assistons me fait penser à ce qui s'est passé en Grèce, sous prétexte de renflouer le budget. Cela ne me semble pas profitable.
D'une manière générale, au moment où les dividendes sont au plus haut et les taux d'intérêt au plus bas, je suis très étonné que M. Le Maire annonce que l'État veut placer 10 milliards au lieu de toucher les dividendes versés par des sociétés très rentables. Comment cela peut-il être une bonne affaire pour l'État ? Nous avons appris ces jours-ci la teneur d'un accord secret signé par Emmanuel Macron en 2015 avec les sociétés d'autoroutes : en échange de quelques milliards de travaux que ces sociétés devaient de toute façon réaliser, et qui sont rentables puisqu'elles sont souvent aussi des entreprises du bâtiment et des travaux publics (BTP), cet accord prévoit une augmentation de 500 millions d'euros des péages payés par les usagers entre 2019 et 2023. Ce n'est pas moi qui le dis, mais l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER). Et on verra les mêmes problèmes, je vous l'annonce à l'avance, pour La Française des jeux : pourquoi privatiser cette entreprise qui distribue des dividendes pour 229 millions, d'autant que l'on touche là à un secteur très sensible, où il peut y avoir du blanchiment d'argent par exemple ?
Enfin, pourriez-vous dresser un bilan global des privatisations depuis 1986, en intégrant les hausses de tarifs pour les usagers et les recettes perdues ? Une mission parlementaire sur ce sujet me paraîtrait intéressante avant que l'on ne vende encore 10 milliards d'actifs.
Les participations de l'État ne devraient-elles pas contribuer au développement de l'industrie et de l'emploi dans notre pays ? Les entreprises concernées sont pourtant aujourd'hui jugées en fonction de leurs performances économiques et comparées à celles du CAC40. L'État a vendu des « bijoux de famille », et certaines privatisations ont constitué de véritables fiascos, pour les usagers comme pour le budget de la France. En revanche, les entreprises privées qui ont racheté les parts de l'État ont parfois fait de belles affaires.
L'État dispose de participations dans de nombreux groupes industriels. À notre sens, il doit jouer un rôle stratégique dans certains secteurs, notamment celui des transports : au lieu de juger la performance des actions, l'État devrait peser sur les choix stratégiques des groupes, afin que ceux-ci développent l'emploi en France et aident nos PME au lieu d'investir dans des pays low cost. Ainsi, l'État est actionnaire d'Alstom, alors que le lancement du Grand Paris va nécessiter des opérations très importantes. Il est important de localiser la production en France et de soutenir nos PME. L'État doit jouer pleinement son rôle pour développer notre industrie : en quinze ans, nous avons perdu 965 000 emplois dans ce secteur.
Merci pour ces nombreuses questions.
Monsieur le rapporteur général, vous demandez des garanties sur les cessions que nous prévoyons. La première règle, s'agissant de sociétés cotées, est de ne pas annoncer à l'avance ce que nous allons faire, afin de ne pas influer sur le cours de l'action.
Nous agissons selon certaines lignes directrices. Tout d'abord, nous essayons d'optimiser le moment où nous vendons nos actifs, en fonction de l'état du marché. Ensuite, je souligne que nous appartenons aux organes de gouvernance des quatre-vingt-une sociétés ou groupes dont nous sommes actionnaires ; en tant que membres du conseil d'administration, nous disposons très souvent d'informations privilégiées, portées à la connaissance du conseil d'administration mais qui, n'étant pas encore des décisions, ne sont pas connues des marchés. En ce cas, le code de commerce et la réglementation de l'Autorité des marchés financiers (AMF) nous interdisent de réaliser des opérations de cession. Il existe ce que l'on appelle des « fenêtres interdites » : aucun membre du conseil d'administration ne peut, par exemple, réaliser de transaction un mois avant la clôture semestrielle ou annuelle des comptes, et, selon les entreprises, quinze jours ou un mois avant la clôture trimestrielle. Les fenêtres de réalisation sont donc très contraintes. Enfin, les choix de cessions sont soumis au ministre de l'économie et des finances.
Toutes nos opérations de cession sont soumises au contrôle de la Commission des participations et des transferts (CPT), qui vérifie que les intérêts patrimoniaux de l'État sont bien défendus. Son avis est impératif : nous ne pouvons pas céder des titres à une valeur inférieure à celle qu'elle fixe.
Les garanties sont donc réelles. Bien sûr, nous ne braderons pas le patrimoine de l'État.
Je ne répondrai pas à votre question sur les seuils minimaux : ces verrous relèvent du Parlement et du Gouvernement.
S'agissant d'Engie, nous sommes tenus par le code de l'énergie d'en détenir 33 % en capital ou en droits de vote. Depuis la loi dite « Florange », nous avons deux ans pour revenir à ce niveau. Mais nous détenons des titres qui n'accordent pas aujourd'hui de droits de vote doubles, et que nous avons stockés pour ne pas dépasser les seuils initiaux de détention de droits de vote, et donc pour ne pas enfreindre le code de l'AMF. Ces titres sont désormais éligibles au droit de vote double, et dès le printemps 2018, nous dépasserons à nouveau le seuil minimal légal.
S'agissant des aéroports de province, les opérations de cession menées à Nice et à Lyon ont été réalisées dans le nouveau cadre législatif fixé par la loi dite « Macron » de 2015. Les procédures de constitution du cahier des charges et de concertation avec les collectivités locales et les chambres de commerce sont très rigoureuses. La mise en concurrence est totalement transparente : à Nice comme à Lyon, nous avons fait trois tours de mise en concurrence. Tout cela se déroule en outre sous le contrôle de la CPT. Il va de soi que le bon déroulement de ces opérations nous inspirera pour d'éventuelles opérations futures ; mais les décisions ne sont pas prises aujourd'hui.
Vous me demandez quelles sont les entreprises non stratégiques de notre portefeuille qui pourraient faire l'objet d'opérations de cession. C'est une question délicate... Je ne peux pas y répondre aujourd'hui, puisque le Gouvernement n'a pas encore arrêté le cadre de cette future évolution de notre portefeuille. Un certain nombre de ces décisions pourront naturellement être soumises, ou rapportées, au Parlement. Cela devrait se faire au cours des prochains mois.
S'agissant de la cession des titres PSA à Bpifrance, cette opération a été réalisée pour trois raisons. Tout d'abord, l'État a contribué à sauver PSA en 2014, vous l'avez dit, aux côtés du chinois Dongfeng, qui est entré au capital, et de la famille Peugeot. Trois ans plus tard, la plus-value était en effet de l'ordre de 1,2 milliard d'euros, et il nous a paru intéressant de la réaliser. Il se trouve ensuite que Bpifrance est très impliquée dans le secteur automobile, par d'importants investissements dans certains sous-traitants, mais aussi, dans le cadre du programme d'investissements d'avenir (PIA), par des investissements dans des entreprises innovantes. Il est donc apparu intéressant pour Bpifrance de disposer de titres du deuxième constructeur français, afin de créer des synergies. Enfin, vous l'avez rappelé, nous avions budgété des cessions pour environ 5 milliards d'euros en 2017. L'argent retiré de la vente des titres PSA a permis d'alimenter la recapitalisation d'Areva.
Plusieurs intervenants ont évoqué le rapport de la Cour des comptes, qui a d'abord montré les progrès accomplis par l'État actionnaire. Il a également, c'est vrai, relevé que la cohérence n'était pas encore parfaite entre la gestion patrimoniale de l'État, au-delà de l'APE d'ailleurs, et l'exercice de l'État tuteur dans certains domaines, la Cour s'intéressant notamment aux secteurs du transport ferroviaire et de l'audiovisuel.
Madame Louwagie, effectivement, suite à la publication de l'ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, nous avons modifié la composition d'un certain nombre de conseils d'administration pour qu'y siègent les seuls représentants de l'État actionnaire, ou les représentants de l'État nommés en assemblée générale, et que les représentants des ministères de tutelle de ces entreprises soient nommés commissaires du gouvernement. Nous avons opéré un certain nombre de mouvements en ce sens, puisque 2017 était la dernière année d'application de cette ordonnance. Nous avons encore des marges de progrès.
S'agissant de la gouvernance des entreprises publiques, qui a fait l'objet d'une autre question, dans toutes les entreprises cotées où l'État est présent, nous appliquons, conformément aux dispositions prévues par l'ordonnance précitée, le code de gouvernement d'entreprise des sociétés cotées rédigé par l'Association française des entreprises privées (AFEP) et le Mouvement des entreprises de France (MEDEF), dit « code AFEP-MEDEF ». Nous respectons donc l'ensemble des règles de ce code dans toutes ces entreprises.
Nous essayons également de l'appliquer dans les entreprises non cotées ayant un statut de société anonyme, même si certaines dispositions ne sont pas opérationnelles quand les entreprises appartiennent à 100 % à l'État, puisqu'en termes de gouvernance, ce code vise notamment à préserver les intérêts minoritaires, à travers la nomination d'administrateurs indépendants ou la création de comités.
Compte tenu de ces pratiques, l'Agence des participations de l'État intervient dans les groupes de travail internes au ministère de l'économie et des finances afin d'étendre ces bonnes pratiques de gouvernance aux entités n'ayant pas un statut de société anonyme – établissements publics industriels et commerciaux (EPIC) ou agences publiques, détenues par définition à 100 % par l'État. Même si les conclusions n'ont pas encore été publiées, nous travaillons afin que la gouvernance de ces entités publiques soit la plus proche possible des bonnes pratiques des entreprises.
De façon plus générale, le rapport de la Cour des comptes émet des propositions sur le périmètre des participations de l'État, sur la doctrine d'investissement, sur les dividendes – actuellement versés au budget général et non sur le compte d'affectation spéciale. Un certain nombre de ces propositions sont incontestablement pertinentes. Elles feront partie des décisions que prendront le Gouvernement et le Parlement dans le cadre de l'évolution de la doctrine d'investissement et du périmètre de l'État actionnaire. Je me permets donc de vous renvoyer aux décisions qui seront prises par le Gouvernement.
Monsieur Labaronne, vous évoquez la nette dégradation des performances financières du portefeuille de l'État actionnaire. Je ne partage pas entièrement votre analyse, même si les résultats que vous citez pour 2015 sont exacts. En 2016, ces résultats se sont redressés. En effet, en 2015, un certain nombre d'entreprises, qui pèsent lourdement sur les résultats des comptes combinés de l'APE, ont connu des dépréciations d'actifs très importantes. Je pense en particulier à la SCNF et à Engie. Cela explique que le résultat net du portefeuille de l'APE ait affiché des pertes en 2015. En 2016, ces dépréciations d'actifs n'ont pas été reprises. Les résultats sont, de ce fait, en nette hausse. Le rapport d'activité 2016, qui sera bientôt publié dans le cadre de la réglementation qui s'impose à nous, l'exposera clairement. Je tiens à le rappeler, les secteurs ferroviaire et de l'énergie pèsent très fortement – en dehors même du contexte boursier – sur nos performances financières et économiques. Mais il est bien évidemment hors de question que nous sortions de ces secteurs.
Je m'interroge sur votre proposition d'affichage du taux cible de détention par secteur : est-ce vraiment praticable ? Nous disposons aujourd'hui d'une quatrième ligne dans notre doctrine d'investissement : l'intervention en cas de risques systémiques. Ce fut le cas pour Dexia, pour PSA – comme évoqué avec monsieur le rapporteur général. Lorsque ce type d'événement se produit, même avec un taux cible affiché par avance, on change assez radicalement le poids ou la répartition du portefeuille. Cela étant, c'est une proposition intéressante, qui fait partie de la rationalisation de la doctrine d'investissement. J'ai été amené à faire des propositions au Gouvernement, qui prendra des décisions en la matière.
La création d'un comité stratégique de l'État actionnaire est une proposition intéressante. Est-ce opportun ? Je le pense. La création d'un tel comité aurait beaucoup de sens pour arbitrer entre les différentes politiques sectorielles et les intérêts patrimoniaux de l'État, comme l'a mentionné Mme Louwagie.
L'APE est aujourd'hui autonome, mais reste une administration centrale, sous l'autorité du ministre. Vous évoquez sa transformation en agence autonome. Cela fait partie des options présentées par la Cour des comptes. Ce n'est pas une proposition ferme. Bien évidemment, ce débat est ouvert. La Cour y voit un certain nombre d'avantages, qui seront sans doute soumis au débat par le Gouvernement.
Madame Louwagie, les politiques d'investissement de Bpifrance et de l'APE sont complémentaires. Nous investissons dans des entreprises de très grande taille, sur le très long terme, en tant qu'actionnaire majoritaire ou minoritaire, selon les quatre lignes de la doctrine d'investissement actuelle. À l'inverse, Bpifrance investit toujours en tant qu'actionnaire minoritaire, en partenariat ou en co-investissement avec d'autres actionnaires. Elle investit par apport de nouveaux capitaux, soit à l'occasion d'une augmentation de capital, soit en prévision de développements nécessitant une augmentation de capital, avec un horizon d'investissement beaucoup plus court que celui de l'APE. Bpifrance fait tourner son portefeuille, concentré de plus en plus sur les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de taille intermédiaire (ETI), davantage que sur les très grandes entreprises.
Je pense avoir également répondu à votre question concernant l'application de l'ordonnance et la clarification des rôles entre les ministères de tutelle et l'APE.
Monsieur Mattei, vous m'avez interrogé sur les évolutions de notre portefeuille depuis le début de l'année. Pour reprendre les choses de façon chronologique, nous avons cédé 1,1 milliard d'euros de titres ENGIE en janvier dernier, nous avons contribué à l'augmentation de capital d'EDF à hauteur de 3 milliards d'euros au mois de mars, ce qui nous a permis de vendre 90 millions d'euros de droits de souscription – puisque nous avons souscrit à cette augmentation de capital à une hauteur inférieure aux droits liés à notre participation initiale. Nous avons cédé les titres de PSA à la BPI pour 1,9 milliard d'euros. Puis, à partir de juillet, nous avons finalisé les augmentations de capital d'Areva SA. et de New Areva, tout en payant des avances d'actionnaires durant le premier semestre à partir du mois de février. Ces augmentations de capital se sont élevées à 2 milliards d'euros pour Areva SA. et à 2,5 milliards d'euros pour New Areva.
J'en profite pour évoquer la restructuration de la filière nucléaire : un travail considérable a été engagé après la décision du Président de la République de juin 2015, alors que l'entreprise était en faillite. La filière nucléaire a été totalement restructurée. Trois opérations ont concerné Areva. En premier lieu, une « nouvelle Areva », ou New Areva, positionnée sur le cycle amont – minerai, transformation du minerai en combustible – et aval – retraitement du combustible usé, enfouissement, travaux de démantèlement, etc. – a été créée et capitalisée à hauteur de 2,5 milliards d'euros en juillet. Suite à la cession d'Areva Nuclear Power (NP), une nouvelle augmentation de capital interviendra à partir de la fin de l'année, réservée à deux actionnaires japonais.
Le deuxième volet, l'activité de construction et d'exploitation de réacteurs gérée par Areva NP – ex-Framatome – va être cédée à EDF. Le contrat entre EDF et Areva a été signé et adopté par les conseils d'administration en novembre 2016. Il s'agit d'une opération complexe, soumise à des conditions suspensives. Elle devrait être achevée fin 2017 sous réserve de la levée de ces conditions suspensives, notamment liées à des décisions de l'Agence de sûreté nucléaire (ASN).
Le troisième volet concerne Areva SA – l'ancienne Areva. Cette entreprise va porter un certain nombre de garanties liées aux cessions réalisées au sein du groupe Areva. Ces cessions concernent également l'éolien, l'éolien offshore ou Areva TechnicAtom (TA), qui construit les chaudières nucléaires des sous-marins et du porte-avions militaires. Par ailleurs, et surtout, Areva SA conserve la responsabilité financière et juridique de l'EPR OL3 construit sur le site d'Olkiluoto en Finlande, suite à un contrat signé en 2003. Ce réacteur devrait être mis en service dans dix-huit mois à deux ans. Areva SA a donc encore des charges à supporter.
Depuis le début du mois de septembre, à la suite du rachat des actionnaires minoritaires, l'État, avec le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), est le seul actionnaire d'Areva SA. La holding New Areva est détenue à la fois par Areva SA, l'État et les actionnaires japonais. Areva NP sera détenue par EDF et les actionnaires japonais.
Nous avons réalisé toutes ces opérations au premier semestre. Pour conclure sur cette restructuration de la filière nucléaire, nous disposons d'un atout industriel majeur – on note d'ailleurs l'attrait des investisseurs étrangers ou privés pour Areva. Il convient de faire fructifier ce savoir-faire. Dans ce contexte, nous considérons l'investissement réalisé comme avisé.
Pour répondre à une autre de vos questions, les produits de cessions ont déjà été consacrés au désendettement de l'État, à hauteur de 1,5 milliard d'euros en 2014 et de 800 millions d'euros en 2015. Ce n'a pas été le cas en 2016 du fait des besoins de financement importants et prioritaires de la filière nucléaire. Naturellement, votre commission et le Parlement auront à en connaitre lors du débat budgétaire.
Comme annoncé par le ministre de l'économie et des finances fin juillet, l'État a effectivement exercé son droit de préemption sur la société STX. Ainsi que le ministre l'a indiqué lundi soir, les discussions avec le Gouvernement italien concernant la prise de participation de Fincantieri dans STX France sont constructives. Les deux gouvernements souhaitent aboutir à un accord pour le sommet franco-italien du 27 septembre prochain.
Monsieur de Courson, vous me demandez pourquoi nous restons dans le capital d'Air France et de Renault. Il y a certes des raisons historiques, mais nous nous projetons également vers l'avenir. Comme vous le savez, nous avons négocié des accords avec Renault et Nissan à l'automne et l'hiver 2015, qui donnent à l'État la capacité de faire entendre sa voix à l'occasion de restructurations stratégiques du capital. L'alliance entre Renault et Nissan est certes complexe, mais elle est très fructueuse et le développement de Renault doit être salué. L'État souhaite le renforcement de cette alliance, et souhaite à cette occasion faire entendre sa voix. C'est tout le sens des accords passés, qui – sans entrer dans le détail – nous donnent une minorité de blocage effective en assemblée générale extraordinaire, en cas d'évolution du capital.
S'agissant d'Air France, comme vous le savez également, deux nouveaux actionnaires sont entrés au capital de la compagnie il y a quelques jours : les compagnies Delta Air Lines et China Eastern Airlines, chacune à hauteur de 10 %, ce qui explique que la participation de l'État soit descendue à 14 %.
De façon plus générale, vous m'interrogez sur les entreprises qui doivent rester dans le giron de l'État et celles qui doivent évoluer. Je vous renvoie, là encore, aux débats et aux décisions qui seront proposées par le Gouvernement.
Mes prédécesseurs se sont exprimés à diverses reprises sur le rôle de l'APE dans la faillite d'Areva, devant le Parlement, devant ses commissions, et sans doute devant la vôtre. À l'époque, l'APE a exercé son rôle d'alerte, mais elle reste une administration et ne décide pas... Ce constat est connu et a été rendu public à diverses reprises. Je me permets de renvoyer aux comptes rendus de ces auditions.
Je viens d'évoquer la recapitalisation d'Areva. J'aborderai maintenant celle d'EDF. Quel est notre diagnostic ? L'entreprise vit une mutation sans précédent. Pendant près de quarante ans, le plan nucléaire a été massivement mis en oeuvre avec succès, sans accidents – fort heureusement – ou difficultés majeurs. Aujourd'hui, le contexte a complètement changé. Deux tiers du chiffre d'affaires d'EDF sont liés à des prix dérégulés, alors qu'il y a trois ans, le ratio était inverse. Or ces prix de marché se sont effondrés après la crise des matières premières en 2015, avec un point bas début 2016. Les prix sont en train de remonter. Sur le moyen terme, selon les prévisions du secteur, cette remontée sera progressive. Mais il s'agit d'un choc économique majeur, d'autant plus que la déréglementation se poursuit. La Commission européenne remet en cause, par exemple, les concessions hydrauliques d'EDF, alors que cette activité est très importante pour l'entreprise.
Par ailleurs, ces changements interviennent à un moment où EDF doit investir massivement pour assurer la maintenance, puis la prolongation de la durée de vie, de son parc de centrales, qui a maintenant plus de quarante ans. Ce « mur d'investissement » est une réelle problématique pour l'entreprise. C'est la raison pour laquelle l'APE a approuvé et souscrit à l'augmentation de capital d'EDF, car elle était accompagnée d'un vaste plan de réduction des charges d'exploitation, d'optimisation et de réduction des investissements et d'un plan de cession d'actifs de 10 milliards d'euros. Ce dernier plan, décidé au printemps 2016, est en cours de réalisation. L'objectif pour EDF est clairement de faire face aux défis qui l'attendent au cours des prochaines années. L'entreprise reste le premier électricien au monde et a tous les atouts pour investir dans les nouvelles énergies renouvelables.
Madame Rabault, le fonds pour l'innovation sera, vous avez raison, une poche d'actifs de 10 milliards d'euros, dont le rendement sera consacré au financement de l'innovation. Vous évoquez un rendement de 5 %. Nous verrons... L'objectif est d'obtenir un rendement optimisé mais aussi soutenable et régulier dans le temps. Les modalités de fonctionnement du fonds feront l'objet de décisions prochaines de la part du Gouvernement.
Je ne peux vous répondre immédiatement concernant le nombre de pactes d'actionnaires, car je ne les ai pas tous en tête. Un certain nombre est connu et public, comme celui avec la société Dassault dans Thalès. Dans ces entreprises, les pactes d'actionnaires visent à assurer la stabilité de notre actionnariat. Ils sont parfois signés en raison de la réglementation boursière. Je vous transmettrai leur nombre exact.
S'agissant de l'aéroport de Toulouse, je me permets de renvoyer aux décisions qui seront prises. En réalité, l'option doit s'exercer au printemps 2018 ; ce n'est donc pas une décision immédiate.
Monsieur Coquerel, vous m'interrogez sur les privatisations, en évoquant ADP ou La Française des jeux. Aucune décision n'ayant été prise, il n'y a donc aujourd'hui pas de sujet. Cela fera partie des décisions qui seront prises par le Gouvernement. Nous allons vous transmettre – peut-être plus tard – les éléments de bilan global que vous demandez concernant les privatisations depuis 2006.
Monsieur Roussel, la contribution de l'État actionnaire à la politique de l'emploi, et à la politique industrielle de façon plus générale, est une préoccupation permanente. L'État, comme je le disais, n'est pas un actionnaire banal. Dans les sociétés commerciales où nous sommes actionnaires, il est de notre devoir de promouvoir la responsabilité sociale et environnementale de l'entreprise et donc de nous préoccuper de l'emploi et des salariés.
Les errements de l'État actionnaire, l'inefficacité de ses stratégies et son défaut de surveillance dans les secteurs où il est en situation de conflit d'intérêts ont été épinglés par la Cour des comptes. En tant que rapporteur spécial du budget opérationnel de la défense, je me pose la question de savoir si ces errements se retrouvent dans la gestion par l'État de ses participations dans les secteurs, hautement stratégiques et concurrentiels, de la défense et de l'aéronautique.
Par ailleurs, pourriez-vous nous indiquer, monsieur le commissaire, la manière dont l'État procède pour s'extraire des situations de conflit d'intérêts dans lesquelles il se trouve ? Comment va se manifester le retour de l'État stratège annoncé par le Président de la République ?
Enfin, est-il envisagé, comme l'idée en a été émise, de confier à la Banque publique d'investissement un mandat de gestion concernant certaines participations minoritaires de l'État considérées comme moins stratégiques ? Si tel doit être le cas, est-il prévu de renforcer les moyens du contrôle de la cession des participations étatiques ?
Je souhaiterais que M. le commissaire nous précise sa vision de l'avenir. Il a expliqué le rôle des différents acteurs étatiques – l'APE, Bpifrance, la Caisse des dépôts, à quoi il faut ajouter, dans le secteur de la défense, la direction générale de l'armement (DGA) – et souligné l'évolution de l'APE qui, d'un rôle de tutelle, est passée à un rôle d'actionnaire au service de l'économie, évolution qui conduirait à modifier les périmètres de participation. Mais ne faudrait-il pas, pour tenir compte des profonds changements de l'économie, aller plus loin et repenser entièrement les outils de l'action de l'État ?
Monsieur le commissaire, vous avez déclaré au journal Le Monde que vous réclamiez au Gouvernement une feuille de route pluriannuelle telle que celle qui existait lors du précédent quinquennat. Cette feuille de route est-elle en cours d'élaboration, et quels devraient être, selon vous, son contenu et ses principaux axes ?
Monsieur le commissaire, ma première question porte sur les cessions de participations de l'État. Si l'information n'est pas révélée tant que ces cessions ne sont pas effectivement réalisées, le marché anticipe toutefois, et il existe donc nécessairement un effet sur les prix. Je souhaiterais donc savoir si vous avez une idée de la perte que cela représente pour l'État. Par ailleurs, quelle est la politique de l'État actionnaire en matière de surveillance de la rémunération des dirigeants, d'une part, et des délais de paiement des sous-traitants, d'autre part ?
Je m'interroge sur la nature même de l'APE. En effet, nous savons tous que des pans entiers de l'industrie ont disparu, que la part du secteur secondaire dans la population active ne cesse de reculer et que la gestion industrielle est une bataille permanente. Quel est le rôle de l'APE dans cette situation ? Se contente-t-elle de gérer un portefeuille boursier ou est-elle un agent actif de la politique industrielle ? En somme, quelles actions l'APE mène-t-elle pour limiter la crise industrielle et adapter l'outil industriel à la compétition mondiale ? Son action obéit-elle à une stratégie industrielle ou agit-elle au coup par coup ?
M. Gaillard m'a interrogé sur la gestion des conflits d'intérêts entre les différentes fonctions de l'État. Nous entendons, au sein de l'APE, défendre les intérêts patrimoniaux de celui-ci, mais dans un cadre fixé par le Gouvernement. Si nous sommes présents au capital d'un certain nombre d'entreprises, c'est précisément parce que l'on considère que celles-ci relèvent de la souveraineté ou qu'elles jouent un rôle particulier dans l'accompagnement d'une politique industrielle ou sectorielle. À cet égard, nous entendons faire valoir nos intérêts patrimoniaux, mais la présence de l'État dans ces entreprises fait l'objet, et c'est bien normal, d'arbitrages du pouvoir exécutif.
Quant à l'idée selon laquelle l'APE envisagerait de confier à Bpifrance un mandat de gestion concernant un certain nombre de ses participations, j'ignore d'où elle vient. Notre doctrine d'investissement est complémentaire de celle de Bpifrance. Dans le futur, il sera nécessaire, me semble-t-il, de la clarifier davantage encore ; c'est ce que Bpifrance et l'APE s'attachent à proposer au Gouvernement.
S'agissant de l'évolution du rôle de l'État actionnaire, il est vrai que l'environnement évolue beaucoup, pour différentes raisons. Ainsi, l'âge moyen des entreprises du CAC40 est actuellement supérieur au siècle, alors que celui des entreprises du NASDAQ est de quarante ans. Or le portefeuille de l'APE est, bien entendu, plus proche de l'âge moyen des premières que de celui des secondes. Nous devons donc veiller à consacrer également des ressources publiques – je parle là du compte d'affectation spéciale – à des entreprises innovantes, des entreprises du futur. D'où la création d'un fonds pour l'innovation : il s'agit d'être plus sélectif dans notre politique d'investissement et de consacrer les ressources issues des cessions à l'innovation.
Par ailleurs, l'État actionnaire, qui doit continuer de s'inscrire dans le long terme, devra être de plus en plus un État partenaire. Longtemps actionnaire unique puis actionnaire principal, il doit désormais trouver des partenaires afin d'accompagner le développement des entreprises dans lesquelles il est présent.
En ce qui concerne l'évolution des outils de l'action étatique, un certain nombre de progrès ont été accomplis, mais il reste des marges de progression. À cet égard, Bpifrance est un outil extrêmement précieux car, son horizon d'investissement étant plus proche, elle est beaucoup plus agile que l'APE, dont les contraintes sont différentes. La complémentarité entre l'État et Bpifrance me paraît donc importante, et le secteur public actionnaire devra s'appuyer de plus en plus sur cette dernière.
Il est vrai que j'avais exprimé le souhait, légitime me semble-t-il, que l'on définisse pour l'État actionnaire une feuille de route pour la durée de la législature. Cette feuille de route doit comporter l'évolution de la doctrine d'investissement, du périmètre de nos interventions et des outils mis à la disposition de l'État actionnaire ; elle sera arrêtée par le Gouvernement et proposée au Parlement.
M. Barrot a évoqué ce que nous appelons, dans notre jargon, l'effet overhang. En réalité, celui-ci est largement surestimé par certains observateurs. Il peut se produire, mais il est quasiment impossible à mesurer. En tout état de cause, nous faisons en sorte, bien entendu, qu'il n'existe pas, notamment en nous abstenant de donner quelque indication que ce soit sur les cessions auxquelles on va procéder.
Enfin, s'agissant de la surveillance de la rémunération des dirigeants, le gouvernement précédent avait fixé des règles afin de plafonner cette rémunération pour les entreprises dans lesquelles l'État est actionnaire majoritaire et de la modérer pour celles dans lesquelles il est actionnaire minoritaire. À ce stade, le Gouvernement n'a pas décidé de modifier ces règles. En ce qui concerne le rapport avec les sous-traitants, nous avons entamé, comme je l'ai indiqué, un vaste chantier concernant la responsabilité sociale et environnementale des entreprises, qui comprend notamment le respect des intérêts économiques et sociaux des parties prenantes.
Le plan de sauvetage d'Areva implique un investissement conséquent de 4,5 milliards d'euros assuré par l'État. Ces fonds seront principalement injectés dans NewCo, filiale d'Areva centrée sur les combustibles, et dans Areva SA, maison mère du groupe. Cette recapitalisation, qui représente 0,1 point de déficit public cette année, affectera l'objectif de ramener celui-ci sous la barre des 3 %. Nous pouvons donc nous interroger sur les sources de financement de cette dépense.
Pourquoi la recapitalisation d'Areva SA, dont relèvent la construction du réacteur pressurisé européen – European Pressurized Reactor (EPR) – en Finlande et la branche « énergies renouvelables » du groupe, est-elle réservée aux seuls fonds de l'État alors que l'on a accepté que des Japonais entrent au capital d'Areva NewCo, qui gère l'activité cycle combustible de l'extraction de l'uranium, pour 0,5 milliard d'euros, étant précisé que la filière stratégique nucléaire est reprise par EDF ?
Par ailleurs, on sait que le fiasco d'Areva SA est essentiellement dû à l'EPR finlandais. Je souhaiterais savoir quel rôle a joué l'APE dans le choix d'EDF de construire Hinkley Point et quel en sera le coût pour l'entreprise française, sachant qu'aucun réacteur de ce type ne fonctionne actuellement.
Enfin, à long terme, quels moyens l'APE a-t-elle prévu pour éviter que ne se reproduise le fiasco d'Areva ?
Comment la politique industrielle de l'APE va-t-elle se conjuguer avec la volonté du Gouvernement de transférer la gestion de la politique industrielle des secteurs de l'innovation au fonds pour l'innovation doté de 10 milliards ?
Par ailleurs, parmi les recommandations qu'elle a émises dans son rapport de janvier dernier, la Cour des comptes suggère de transférer les participations industrielles de l'APE vers Bpifrance. Un tel transfert serait-il justifié et contribuerait-il à la réussite de cette politique industrielle ?
À ce propos, monsieur le commissaire, vous n'avez pas complètement répondu à la question de Valérie Rabault sur l'arbitrage entre intérêts et dividendes. Or, ce sujet me semble important.
Monsieur le commissaire, pourriez-vous nous donner des indications sur la stratégie de l'État pour les entreprises de transport public dont il est directement ou indirectement, via la Caisse des dépôts et consignations, actionnaire ? Est-il logique qu'il conserve des participations dans l'ensemble de ces entreprises – je pense à Transdev, à Keolis et à RATP Dev –, qui sont parfois en concurrence au niveau international ?
Par ailleurs, quelle est la stratégie de l'APE et de Bpifrance dans le secteur du tourisme ? Comment accompagner les besoins d'investissement dans ce secteur, notamment dans le domaine numérique, afin d'éviter la dépendance de notre pays, qui est la première destination touristique au monde, vis-à-vis de géants américains tels qu'Airbnb ?
Monsieur le commissaire, j'associe à ma question mon collègue Christian Hutin. Le 4 août dernier, les ouvriers de l'usine Nissan située à Canton, dans le Mississippi, État le plus pauvre des États-Unis, ont été empêchés, avec la complicité de l'État français, de se syndiquer. Quelle ironie de l'histoire que cette régression sociale ait eu lieu le jour de l'anniversaire de l'abolition des privilèges ! Au terme d'une élection syndicale perdue d'avance car précédée d'une recrudescence inégalée de menaces et d'intimidations de la part de la direction de cette usine, les ouvriers ont été contraints de renoncer à se syndiquer.
En tant que parlementaire, je suis indigné que l'État français, actionnaire principal de Renault, elle-même actionnaire principale de Nissan, ait refusé d'intercéder auprès de Carlos Ghosn, patron de Renault et de l'alliance Renault-Nissan, pour que cessent ces pratiques antisyndicales dont des ouvriers à 95 % afro-américains sont les premières victimes. La liberté syndicale est en effet une liberté fondamentale que la France s'honorerait de défendre en toute circonstance et en tout lieu, a fortiori au sein d'entreprises ayant à leur capital des participations publiques.
Vous avez été personnellement alerté de cette situation par le représentant du syndicat américain UAW, qui défend les ouvriers américains du secteur automobile et qui est soutenu par plusieurs syndicats français – CFDT, FO, CGT, CFE-CGC – ainsi que par de nombreux parlementaires européens et américains. À la veille de l'élection syndicale, vous n'avez pas donné suite à leurs sollicitations, non plus que les cabinets du Président de la République et du ministre de l'économie. Pis, les représentants du gouvernement français ont repris à leur compte les éléments de langage de Carlos Ghosn, selon lesquels ce dernier, patron de Renault, ne pourrait intervenir dans les affaires de Nissan, laquelle respecterait le droit américain en vigueur.
Alors qu'on observe une stratégie de convergence toujours plus forte entre les deux constructeurs, y compris en matière de ressources humaines, cet argument nous semble irrecevable. Je ne peux, hélas ! que souscrire au constat de la Cour des comptes qui déplore la faiblesse de l'État actionnaire. Faut-il rappeler que M. Emmanuel Macron, alors ministre de l'économie, s'était engagé devant nos collègues sénateurs, le 23 mai 2016, à interroger Renault sur les pratiques antisyndicales en cours dans l'usine de Canton et à en informer la représentation nationale ?
Pouvez-vous vous engager solennellement à recevoir les travailleurs de l'usine du Mississipi et les représentants de UAW, à nous informer des échanges que vous aurez avec le directeur de Renault à ce sujet et à exiger de Carlos Ghosn qu'un principe strict de neutralité soit respecté par la direction de l'usine si une nouvelle élection syndicale devait être organisée ?
À propos de la cession d'une partie du capital d'Engie, j'ai noté qu'il n'était pas question, à ce jour, de revenir sur les seuils minimaux de détention publique. Ma question est plus large. J'ai apprécié vos propos sur la responsabilité et l'exemplarité de l'État, et je souhaiterais savoir si, à l'heure où la France entend prendre le leadership de la lutte contre le réchauffement climatique, l'État accompagne la transition énergétique à travers ses participations publiques ?
Tout d'abord, l'APE n'est pas un actionnaire banal. Nous intervenons en tant qu'État, et nous participons en tant qu'actionnaire à la politique industrielle, laquelle est définie, non pas par l'APE, qui est le gestionnaire du patrimoine, mais par le Gouvernement, en particulier par le ministre de l'économie, chargé de l'industrie. L'APE est, à cet égard, un instrument au service de cette politique. Naturellement, lorsque nous avons des propositions à soumettre au Gouvernement, nous avons des échanges avec nos collègues du ministère chargé de l'industrie – comme avec ceux des transports, de l'énergie, de l'audiovisuel ou de la défense – pour apprécier leur pertinence mais, in fine, le Gouvernement rend des arbitrages.
Si l'État est venu au secours d'Areva, c'est tout simplement parce qu'aucun acteur privé capable de mener une telle opération ne souhaitait s'y engager. Néanmoins, l'intervention de l'État a conduit d'autres opérateurs à investir ; je pense aux investissements japonais dans la nouvelle Areva Holding et aux investissements japonais et français dans Areva NP. C'est la raison pour laquelle nous défendons le caractère avisé de cet investissement, pour lequel il faut attendre plusieurs années avant d'espérer un retour.
S'agissant de Hinkley Point, la décision a été prise en juillet 2016. Quel est le contexte ? Le client, l'État britannique, s'est engagé à garantir un prix sur trente-cinq ans. Le Royaume-Uni, je le rappelle, est une des grandes puissances européennes du nucléaire civil. EDF a jugé – et nous avons soutenu ce choix – qu'ayant un produit déjà conçu, c'est-à-dire des EPR qui doivent être mis en service dans un peu moins de dix ans, il était pertinent de répondre à la demande de ce client, aux côtés des Chinois, puisque l'opérateur China General Nuclear Power Corporation (CGN) sera actionnaire de cette centrale à 33 %. Nous avons soutenu cette opération mais nous avons mené, avec les équipes d'EDF et les ministères compétents, une enquête extrêmement approfondie non seulement sur les contrats conclus par EDF, mais aussi sur les risques financiers, opérationnels et techniques associés à cette opération. À cet égard, l'analyse des risques liés à l'opération Hinkley Point n'a rien à voir avec celle qui avait été réalisée lors du choix d'OL3 en 2003.
Suis-je d'accord avec la Cour des comptes sur le transfert de participations à Bpifrance ? Je répète simplement que les doctrines d'investissement sont complémentaires. Du reste, certaines participations de Bpifrance sont remontées à l'APE. Nous avons ainsi racheté, en 2016, les parts que celle-ci détenait dans Eramet, car il s'agit d'une activité minière qui s'inscrit dans le très long terme et qui correspond donc davantage à la doctrine de l'APE qu'à celle de Bpifrance. Cela dit, il n'y a pas, aujourd'hui, de plans de transfert massif, dans un sens ou dans l'autre, entre Bpifrance et l'APE.
La question qui m'a été posée sur la politique de l'État concernant les entreprises qu'il détient indirectement à travers la Caisse des dépôts, la SNCF ou la RATP est tout à fait pertinente. Toutefois, dans la compétition internationale, il apparaît que, sur un certain nombre de marchés, la présence française à travers ces trois sociétés est plutôt positive. Cela n'empêche pas, dans certains cas, des coopérations techniques entre ces opérateurs mais, à ce stade, leur regroupement n'est pas prévu.
Par ailleurs, nous n'intervenons pas particulièrement dans le secteur du tourisme, qui relève plutôt, de même que l'innovation et le numérique, de Bpifrance. Vous avez raison, madame Bonnivard, le numérique transforme totalement l'économie de ce secteur. C'est la raison pour laquelle nous sommes attentifs non seulement à l'innovation industrielle, mais aussi à l'innovation numérique.
S'agissant de l'usine Nissan aux États-Unis, je rappelle, d'un mot, que nous n'intervenons aucunement dans la gestion de Nissan. Ce n'est pas seulement une intention ; ce point est formalisé dans les accords entre Renault et Nissan. En effet, lors des négociations de l'hiver 2015, l'exigence de Nissan était précisément que l'État et Renault n'interfèrent pas dans sa gestion.
Comment l'État accompagne-t-il la transition énergétique ? Nous mettons en avant, dans le cadre de notre participation aux comités stratégiques et aux conseils d'administration des entreprises, notamment énergétiques, deux thèmes majeurs : la transformation numérique et la transition énergétique, l'une et l'autre allant souvent de pair. Nous soutenons évidemment l'évolution du modèle économique d'Engie vers la constitution de réseaux et la production d'énergies renouvelables. Mais cela fait partie, comme je l'ai indiqué tout à l'heure à propos de la RSE, du diagnostic que nous allons établir avec les entreprises sur leur participation à la transition énergétique.
L'État est actionnaire, à hauteur d'environ 23 %, d'Orange, qui lui verse des dividendes assez significatifs. Cependant, le Gouvernement souhaite développer le très haut débit dans l'ensemble des territoires. Ces deux objectifs sont-ils compatibles ? Est-il prévu de diminuer la pression sur les dividendes pour permettre à Orange de développer le très haut débit ?
L'État s'est lancé depuis plusieurs années dans un processus de désengagement progressif des aéroports français, en vendant une partie du capital qu'il détient dans les aéroports régionaux. Il a ainsi vendu, fin 2014, à un groupement chinois et canadien les parts qu'il détenait dans l'aéroport de Toulouse, dont on sait les difficultés actuelles, puis ce fut le tour des aéroports de Lyon et de Nice. Que pouvez-vous nous dire du résultat de ces ventes ? On évoque aujourd'hui un désengagement des aéroports de Marseille et de Bordeaux et une étude prévoyant la vente des parts de l'État dans ADP, pour un total d'une dizaine de milliards d'euros. J'ai bien entendu votre réponse à ce sujet, mais je souhaiterais savoir s'il existe un calendrier, si un montant a été estimé et si une position a été adoptée par rapport aux collectivités.
Par ailleurs, la réforme portuaire de 2008 a permis de faire évoluer le statut des ports autonomes, qui sont devenus des EPIC. Selon des études, leur privatisation permettrait d'améliorer la croissance de la rentabilité de ces ports, comme l'illustre la réforme portuaire britannique. Que pensez-vous d'une éventuelle transformation du statut des grands ports d'EPIC en SA ?
Monsieur le commissaire, dans le rapport extrêmement critique que l'Institut Montaigne a publié il y a quelques mois sur votre activité, il était notamment souligné – et ce point m'a paru très convaincant, au point d'ébranler mes certitudes sur l'intervention directe de l'État – la difficulté, pour les entreprises dont le capital est en partie détenu par l'État, d'agir avec l'agilité et la rapidité requises par la compétition mondiale. Pouvez-vous nous démontrer qu'il n'en est rien ?
Face au réchauffement climatique, des mesures sont nécessaires pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et la question de la convergence essence-diesel se pose. L'État étant actionnaire de Renault et de PSA via Bpifrance, qu'est-il prévu, et quel rôle l'État entend-il jouer en matière de stratégie industrielle à l'égard des véhicules électriques, pour les populariser et les développer ?
Je voudrais revenir sur la question de Valérie Rabault, car elle me paraît importante. Le 5 juillet dernier, M. Bruno Le Maire déclarait que 10 milliards d'euros seraient mis à disposition pour financer l'innovation, en particulier celle de rupture. Il y a quand même un fossé considérable entre 10 milliards d'euros et 500 millions d'euros ! J'imagine donc qu'un arbitrage est intervenu.
Un appel à projets du PIA a été lancé il y a quelques semaines, pour lequel le financement apporté au titre de l'innovation est plafonné à 20 %. Mobiliser le reste n'est pas une mince affaire : pour m'y employer dans ma région, je peux vous l'assurer. J'avais espéré que les 10 milliards d'euros annoncés vous permettraient de jouer bien davantage un rôle de déclencheur avec la CDC, mais si l'on descend à 500 millions, l'ambition n'est plus au rendez-vous. Pourriez-vous nous apporter des éléments précis ? La douche va être froide pour les investisseurs.
Un mot sur l'arbitrage entre dividendes et intérêts : c'est une question qui se pose toujours. Un jour, nous obtiendrons une réponse...
Je voudrais préciser ma question de tout à l'heure sur les investissements des constructeurs français, notamment dans l'automobile et le secteur ferroviaire. L'État y participe, en particulier avec le groupe PSA. Dans les Hauts-de-France, notamment dans le Pas-de-Calais, où Renault et Peugeot comptent beaucoup d'établissements, les inquiétudes sont fortes chez les ouvriers et chez les élus locaux, mais aussi chez les chefs d'entreprise, notamment ceux de PME. Peugeot a construit une entreprise importante en Slovaquie, à Trnava, où l'on fabrique des moteurs susceptibles de remplacer ceux produits à Douvrin. Les choix industriels ont des conséquences importantes dans la région, en particulier pour le développement de l'emploi. L'État va-t-il peser de tout son poids pour faire en sorte que ces groupes privilégient l'emploi dans notre pays et favorisent les PME ?
Il n'y a en réalité aucune contradiction entre le versement de dividendes par Orange et sa politique d'investissement dans la fibre et le haut débit. Cet opérateur est de très loin le premier en ce qui concerne la fibre, et il continue d'investir. La politique de dividendes est fixée par le conseil d'administration de l'entreprise. Nous nous inscrivons dans sa gouvernance, à la fois en ce qui concerne la capacité de distribution, les comparaisons nationales et internationales dans ce secteur et la soutenabilité dans le temps. La politique de dividendes a changé, mais la situation financière d'Orange s'est améliorée par rapport à une période qui était plus critique. On ne peut pas dire aujourd'hui que le taux de dividendes bride la capacité d'investissement dans le haut débit.
M. Simian a évoqué les opérations de désengagement des aéroports de Toulouse, Lyon et Nice. Permettez-moi de vous renvoyer à ce que je disais tout à l'heure sur l'évolution du périmètre. Aucune décision n'a été prise au sujet d'autres opérations et il n'existe pas d'estimation de montants financiers. Quant aux opérations réalisées en 2015 et 2016, les recettes se sont élevées à un peu plus de 300 millions d'euros pour Toulouse, à 1,2 milliard pour Nice et à un peu plus de 500 millions pour Lyon.
Pour ce qui est des ports maritimes, il n'y a aucun projet de changement statutaire ni, a fortiori, de privatisation. Nous partageons bien évidemment l'objectif d'améliorer les performances des grands ports maritimes, qui constituent des actifs essentiels en matière de logistique, pour les exportations et les importations, ainsi que pour l'attractivité du pays.
M. Hetzel a évoqué la thèse de l'Institut Montaigne, présente depuis très longtemps dans ses travaux, selon laquelle l'État actionnaire serait un handicap pour l'agilité des entreprises. C'est une accusation assez injuste : depuis la mise en oeuvre de l'ordonnance de 2014, nos modes d'intervention dans la gouvernance se sont banalisés. Nous nous inscrivons dans les calendriers de décision des entreprises. C'est un changement culturel qui a été progressif, mais avec une accélération ces dernières années. Le rôle de l'APE est aussi d'anticiper le plus possible pour pouvoir présenter au Gouvernement les décisions nécessaires, au moment où elles doivent être prises, et de faire en sorte que les entreprises restent agiles dans leurs décisions. Il y a eu ces dernières années beaucoup d'opérations pour lesquelles on ne peut pas reprocher à l'État d'avoir été un obstacle, la dernière opération un peu spectaculaire ayant été l'annonce de la prise de contrôle d'Opel par PSA, dont je rappelle que l'actionnariat compte trois partenaires.
Sur la convergence essence-diesel, mais aussi, plus généralement, sur la contribution de l'État actionnaire à la stratégie industrielle de réduction des émissions et, surtout, de développement des véhicules électriques et autonomes, je peux vous dire, pour être administrateur de Renault et pour suivre aussi ce qui se passe chez PSA, que les constructeurs français ont pris le tournant. Les investissements réalisés par ces deux constructeurs sont désormais considérables. Nous soutenons la stratégie visant à ce qu'ils deviennent des champions dans ce domaine et contribuent ainsi à la réduction des émissions polluantes.
En ce qui concerne le fonds pour l'innovation et le PIA, on peut toujours dire que 300 ou 500 millions d'euros sont insuffisants, mais il existe aujourd'hui, du fait du PIA, des montants considérables qui sont consacrés chaque année à l'innovation et aux appels à projets. Dans le domaine de l'innovation, on ne peut pas avoir un système de subventionnement à 100 % : il ne s'agit pas de créer un dispositif sans aucune rationalité économique ni aucun partenariat. Comme je le disais tout à l'heure, le rôle de l'État au sens large, c'est-à-dire au-delà de l'APE, consiste à agir de plus en plus comme partenaire. C'est une évidence pour l'innovation : avec ces partenariats, on identifiera mieux les « pépites » et les bons investissements.
Sur l'arbitrage entre dividendes et intérêts, il y a d'une part la volonté de flécher une part des ressources publiques vers le long terme, ce qui est l'objectif du fonds pour l'innovation, et d'autre part les modalités d'alimentation, encore non arrêtées, de ce fonds, c'est-à-dire le support technique qui permettra de dégager un rendement. Nous allons faire en sorte d'obtenir un rendement aussi élevé que possible et néanmoins soutenable à long terme, qui ne dépende pas des performances de quelques entreprises et qui permette aussi d'alimenter de plusieurs centaines de millions d'euros l'enveloppe destinée à l'innovation. Nous aurons l'occasion d'en reparler quand les décisions seront prises, mais nous avons, bien sûr, cette préoccupation en tête.
L'État se désintéresse-t-il de la localisation des emplois en France ? La réponse est évidemment négative. J'en veux pour preuve le fait que l'État a demandé à Renault et à PSA des engagements sur le contenu en emplois de la croissance de l'activité, et qu'un suivi annuel est réalisé avec le ministère chargé de l'industrie. De manière plus générale, nous poussons à améliorer encore la compétitivité de ces deux entreprises afin que ce contenu en emplois, y compris indirects, c'est-à-dire en incluant la sous-traitance, reste au meilleur niveau dans le cadre des engagements pris.
Informations relatives à la commission
1. La commission a décidé la création d'une mission d'information commune avec la commission des lois sur les procédures de poursuite des infractions.
2. La commission a reçu en application de l'article 12 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) :
– un projet de décret de transfert de crédits d'un montant de 110 000 euros en autorisations d'engagement (AE) et 510 000 euros en crédits de paiement (CP), du programme 123 Conditions de vie outre-mer de la mission Outre-mer à destination du programme 152 Gendarmerie nationale de la mission Sécurité.
Dans le cadre du programme Infrastructure Nationale Partageable des Transmissions (INPT), un premier transfert de 1,2 million d'euros en AE et CP a été effectué en 2013 au titre des années 2013 et 2014, sur un montant total de participation de la mission Outremer fixé à 2,2 millions d'euros. Cet engagement a fait l'objet d'un second transfert en 2016 pour un montant de 890 000 euros en AE et 490 000 euros en CP. Le présent transfert correspond donc au solde de la participation du programme 123 ;
– un projet de décret de virement de crédits d'un montant de 572 181 euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), du programme 134 Développement des entreprises et du tourisme de la mission Économie et du programme 218 Conduite et pilotage des politiques économique et financière de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines à destination du programme 302 Facilitation et sécurisation des échanges de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines.
Ces mouvements de crédits contractent deux opérations distinctes :
– le financement du coût facturé de services liés à la location de baies informatiques par la direction générale des douanes et des droits indirects sur les sites du centre informatique douanier d'Osny et de Toulouse. Les programmes 134 et 218 contribuent au financement de cette prestation de service respectivement à hauteur de 10 400 euros et 561 781 euros à destination du programme 302 ;
– les audits diligentés par le Contrôle général économique et financier auprès des entreprises bénéficiaires de prêts et garanties de 1'État, à hauteur de 90 000 euros, du programme 134 vers le programme 218 ;
– un projet de décret de transfert de crédits d'un montant de 6 361 206 euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), du programme 105 Action de la France en Europe et dans le monde de la mission Action extérieure de l'État, du programme 214 Soutien de la politique de l'éducation nationale de la mission Enseignement scolaire et du programme 224 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture de la mission Culture à destination du programme 178 Préparation et emploi des forces de la mission Défense.
Ce décret comprend deux mouvements. Le premier transfert du programme 105 à destination du programme 178 d'un montant de 6 361 206 euros en AE et en CP concerne le remboursement par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères de l'avance faite chaque année par le ministère des armées au titre des frais associés aux actions de formation et de soutien des stagiaires étrangers.
Le second transfert des programmes 214, pour un montant de 30 000 euros en AE et en CP, et 224, pour un montant de 60 000 euros en AE et en CP, à destination du programme 105 intervient dans le cadre du soutien interministériel à la candidature présentée par la France au poste de directeur général de l'UNESCO.
Les annulations se répartissent de la façon suivante : programme 105 : 6 271 206 euros en AE et CP.
- programme 214 : 30 000 euros en AE et CP ;
- programme 224 : 60 000 euros en AE et CP.
Les ouvertures se répartissent de la façon suivante :
- programme 178 : 6 361 206 euros en AE et CP ;
– un projet de décret de transfert de crédits d'un montant de 714 950 euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), du programme 123 Conditions de vie outre-mer de la mission Outre-mer à destination du programme 178 Préparation et emploi des forces de la mission Défense.
Il correspond à la participation du ministère des outre-mer au dispositif des hélicoptères « Dauphin N3 » ;
– un projet de décret de transfert de crédits d'un montant de 2 800 000 euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), du programme 123 Conditions de vie outremer de la mission Outre-mer à destination du programme 214 Soutien de la politique de l'éducation nationale de la mission Enseignement scolaire.
Ce décret correspond à la dotation en faveur des établissements scolaires du second degré de Polynésie française (2,5 millions d'euros en AE et CP), et à la participation du ministère des outre-mer à la construction d'un Institut de la réussite éducative (IRE) à SaintPierre-et-Miquelon (0,3 million d'euros en AE et CP) ;
– un projet de décret de transfert de crédits d'un montant de 1 262 251 euros en autorisations d'engagement (AE) et 5 747 253 euros en crédits de paiement (CP), du programme 181 Prévention des risques de la mission Écologie, développement et mobilité durables à destination du programme 218 Conduite et pilotage des politiques économiques et financières de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines.
Ce transfert a pour but de financer des prestations au titre du fonctionnement courant de l'Autorité de sûreté nucléaire (immobilier, logistique, prestations d'actions sociales, frais de déplacement et de représentation, formation, traduction) dont la gestion est prise en charge sur le programme 218 ;
– un projet de décret de transfert de crédits d'un montant de 782 653 euros en autorisations d'engagement (AE) et 800 011 euros en crédits de paiement (CP), du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables de la mission Écologie, développement et mobilité durables à destination de trois programmes.
Le présent décret comporte quatre mouvements de crédits.
Le premier mouvement de crédits a pour objet un transfert de 200 000 euros en AE et en CP, du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables de la mission Écologie, développement et mobilité durables vers le programme 218 Conduite et pilotage des politiques économiques et financières de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines. Il correspond au remboursement des prestations sociales collectives servies aux agents de l'ex-direction de l'action régionale de la qualité et de la sécurité industrielle.
Les deuxième et troisième mouvements de crédits ont pour objet deux transferts, respectivement de 300 000 euros en AE et en CP et de 202 653 euros en AE et 220 011 euros en CP, du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de 1'écologie, du développement et de la mobilité durables de la mission Écologie, développement et mobilité durables vers le programme 333 Moyens mutualisés des administrations déconcentrées de la mission Direction de 1'action du Gouvernement. Ils correspondent d'une part au remboursement du loyer au titre de 1'année 2017 du bail locatif conclu au profit de la direction régionale et interdépartementale de 1'environnement et de 1'énergie de Normandie, dans le cadre du contentieux qui a opposé l'État à la Société civile immobilière « La Phalange » et, d'autre part, à la mutualisation des crédits de fonctionnement des directions régionales de 1'environnement, de 1'aménagement et du logement auprès des services du Premier ministre.
Le quatrième mouvement de crédits a pour objet un transfert de 80 000 euros en AE et en CP, du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables de la mission Écologie, développement et mobilité durables vers le programme 129 Coordination du travail gouvernemental de la mission Direction de l'action du Gouvernement. Il correspond à la contribution du ministère de la transition écologique et solidaire au titre de l'année 2017 à la fondation pour la nature et l'homme, dont le versement sera désormais assuré par les services du Premier ministre ;
– un projet de décret de virement de crédits d'un montant de 649 046 euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), du programme 105 Action de la France en Europe et dans le monde de la mission Action extérieure de l'État à destination du programme 185 Diplomatie culturelle et d'influence de la mission Action extérieure de l'État et du programme 209 Solidarité à l'égard des pays en développement de la mission Aide publique au développement.
Ce décret comprend deux mouvements. Le premier virement du programme 105 à destination du programme 185 d'un montant de 160 000 euros en AE et en CP concerne le projet de construction d'une antenne de l'Institut français du Vietnam à Hô-Chi-Minh-Ville.
Le second virement, d'un montant de 489 046 euros en AE et en CP, du programme 105 à destination du programme 209 intervient dans le cadre du transfert progressif des experts techniques internationaux vers 1'Agence française de développement et Expertise France, pour la prise en charge des coûts annexes hors titre 2 (frais de changement de résidence, voyages d'affectation et de congés).
Les annulations se répartissent de la façon suivante : programme 105 : 649 046 euros en AE et CP.
Les ouvertures se répartissent de la façon suivante :
- programme 185 : 160 000 euros en AE et CP ;
- programme 209 : 489 046 euros en AE et CP ;
– un projet de décret de transfert de crédits d'un montant de 379 033 euros en titre 2 et de 5 équivalents temps plein travaillés (ETPT), du programme 141 Enseignement scolaire public du second degré de la mission Enseignement scolaire à destination du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l'Écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer de la mission Écologie, développement et aménagement durables.
Le mouvement de crédits est destiné à financer l'ouverture de postes pour la rentrée de septembre 2017 afin de renforcer et développer les classes préparant au brevet de technicien supérieur dans les lycées professionnels maritimes ;
– un projet de décret de transfert de crédits d'un montant de 400 000 euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), du programme 205 Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture de la mission Écologie, développement et aménagement durables à destination du programme 162 Interventions territoriales de l'État de la mission Politique des territoires.
Ce transfert porte la contribution du ministère chargé de la mer au troisième plan Chlordécone (2014-2020) pour l'annuité 2017 (0,4 million d'euros). La chlordécone est un pesticide qui a fortement pollué les eaux littorales de la Martinique et de la Guadeloupe, rendant les produits de la pêche impropres à la consommation. Deux dispositifs ont d'ores et déjà été mis en oeuvre pour indemniser les pêcheurs frappés par l'interdiction de pêcher. Ce troisième plan en est la prolongation.
3. La commission a reçu en application de l'article 14 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) un projet de décret portant annulation de crédits d'un montant de 3 217 467 euros en autorisations d'engagement (AE) et crédits de paiement (CP).
Ce mouvement à caractère technique vise à rembourser des trop-perçus sur fonds de concours. Il concerne les programmes suivants :
- programme 181 Prévention des risques, pour un montant de 142 794 euros en AE et CP ;
- programme 203 Infrastructures et services de transports, pour un montant de 667 586 euros en AE et CP ;
- programme 190 Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables pour un montant 17 401 euros en AE et CP ;
- programme 146 Équipement des forces pour un montant de 20 884 euros en AE et CP. Ces crédits sont destinés à rembourser la société SAFRAN-ENGINES coordonnateur de l'opération OPENAIR ;
- programme 307 Administration territoriale pour un montant de 2 368 802 euros en AE et CP.
Membres présents ou excusés
Réunion du mercredi 13 septembre 2017 à 9 heures
Présents. - M. Saïd Ahamada, M. Éric Alauzet, M. Julien Aubert, M. Jean-Noël Barrot, Mme Émilie Bonnivard, M. Jean-Louis Bricout, Mme Émilie Cariou, M. Gilles Carrez, M. Michel Castellani, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, M. Olivier Damaisin, Mme Dominique David, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, Mme Sarah El Haïry, M. Nicolas Forissier, M. Olivier Gaillard, M. Joël Giraud, Mme Perrine Goulet, M. Romain Grau, Mme Olivia Gregoire, M. Stanislas Guerini, Mme Nadia Hai, M. Patrick Hetzel, M. Alexandre Holroyd, M. Christophe Jerretie, M. François Jolivet, Mme Aina Kuric, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, M. Gilles Le Gendre, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, M. Jean-Paul Mattei, Mme Amélie de Montchalin, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Jean-François Parigi, M. Pierre Person, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Sylvia Pinel, Mme Christine Pires Beaune, Mme Valérie Rabault, Mme Muriel Ressiguier, M. Xavier Roseren, M. Fabien Roussel, M. Laurent Saint-Martin, M. Benoit Simian, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Jean-Pierre Vigier, M. Philippe Vigier, M. Éric Woerth
Excusés. - M. Jean-Louis Bourlanges, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jean Lassalle, M. Olivier Serva
Assistait également à la réunion. - M. Jacques Marilossian