Intervention de Nicole Belloubet

Séance en hémicycle du lundi 16 juillet 2018 à 16h00
Démocratie plus représentative responsable et efficace — Avant l'article 1er

Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice :

J'aimerais rappeler brièvement l'origine de l'attribution du titre de chanoine du Latran au Président de la République.

Selon l'article 5 de la Constitution, celui-ci veille au respect de la Constitution. Il veille donc au respect du principe constitutionnel de laïcité et à sa composante première, la neutralité de l'État et des services publics vis-à-vis des croyances et des religions, laquelle est la conséquence de la séparation des Églises et de l'État. C'est pourquoi la remise au chef de l'État de titres honorifiques relevant de traditions historiques, émanant le cas échéant d'une autorité religieuse, ne me semble nullement contrevenir au principe de laïcité, lequel a valeur constitutionnelle.

La tradition selon laquelle le Président de la République est fait chanoine du Latran ne figure dans aucun texte officiel de la République française. Il s'agit d'un geste de courtoisie internationale entre celle-ci et l'État du Vatican.

Depuis le XVIe siècle, six privilèges et titres émanant du Vatican reviennent de droit au chef de l'État français, dont celui de premier chanoine honoraire de la basilique de Saint-Jean-de-Latran. L'octroi automatique de ces titres relève d'une tradition diplomatique de concorde entre les deux souverains, poursuivie par les États modernes.

Cette tradition remonte à Louis XI, plus précisément à 1482. Elle a été renouvelée en 1604 par Henri IV, qui décida de faire don à la basilique Saint-Jean-de-Latran, cathédrale du Pape, de l'abbaye de Clairac, située dans l'actuel département du Lot-et-Garonne. En guise de remerciement, le chapitre du Latran lui accorda le titre canonique et honorifique de chanoine.

La tradition s'est maintenue sous la Ve République, tout en respectant le principe de laïcité, dont découle la neutralité du chef de l'État. Par ailleurs, la prise de possession du titre de chanoine du Latran n'attribue aucun pouvoir religieux au Président de la République, qui, bien entendu, ne prête nullement allégeance à l'autorité religieuse concernée.

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