La séance est ouverte.
La séance est ouverte à seize heures.
Mes chers collègues, avant de reprendre nos travaux, je veux saluer, comme nous avons été nombreux à le faire depuis hier soir, la victoire de l'équipe de France en coupe du monde de football.
Applaudissements sur tous les bancs.
Je crois que nous pouvons remercier tous ses joueurs pour ce beau succès, qui a rassemblé très largement les Français, comme nous avons pu le voir hier soir, dans un rare moment d'unité nationale. C'est pourquoi j'avais demandé que les colonnades du palais Bourbon soient illuminées aux couleurs de la France : bleu, blanc, rouge.
J'ai reçu de M. Yves Jégo, député de la troisième circonscription de Seine-et-Marne, une lettre m'informant qu'il se démettait de son mandat de député à compter du 15 juillet 2018. Par une communication du 5 juillet 2018, le ministre d'État, ministre de l'intérieur, m'a informé que M. Yves Jégo est remplacé, jusqu'au renouvellement de l'Assemblée nationale, par M. Jean-Louis Thiériot, élu en même temps que lui à cet effet.
Vendredi 13 juillet, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi constitutionnelle, s'arrêtant à l'amendement no 1118 portant article additionnel avant l'article 1er.
Rappel au règlement
Je n'ai pas participé à nos débats en fin de semaine dernière, mais cela ne m'a pas empêchée de les suivre à distance avec beaucoup d'intérêt. J'ai donc écouté avec la plus grande attention l'intervention de M. Jean-Christophe Lagarde, qui a cru bon de déplorer l'absence de certains députés dans notre hémicycle lors de la suppression du mot « race » de notre Constitution. Si j'ai bien compris ses propos, les députés manquant lors de ce vote sont supposés avoir organisé sciemment leur absence pour ne pas avoir à se prononcer sur cette mesure. J'invite donc les 458 députés absents et supposément racistes aux yeux de M. Lagarde à lui envoyer un mot d'excuse dûment tamponné ou un certificat médical, pour que le président du groupe UDI, Agir et indépendants puisse leur délivrer un certificat de bonne conduite et d'honorabilité dans cet hémicycle.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement no 1118 .
Par cet amendement, nous proposons que la Constitution prévoie explicitement une limitation du cumul des mandats, entre mandats électifs – nous sommes favorables au mandat électif unique – et dans le temps – un même mandat ne pourrait être exercé plus de deux fois consécutivement.
En effet, le renouvellement de la vie politique française implique que soit mis fin au cumul des mandats dans l'espace et dans le temps. Afin de lutter contre la captation du pouvoir politique par une oligarchie d'élus, une telle interdiction ferme permettrait d'empêcher la professionnalisation de la politique et l'émergence d'une véritable implication et d'un apprentissage collectif citoyen de l'exercice des mandats électifs.
La parole est à M. Richard Ferrand, rapporteur général de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission.
La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, pour donner l'avis du Gouvernement.
Avis défavorable.
L'amendement no 1118 n'est pas adopté.
Cet amendement vise à permettre la représentation de tous les Français par le scrutin proportionnel, à toutes les élections. Sa rédaction permet d'attribuer un nombre de sièges déterminé à la liste ayant obtenu le plus de voix. Un scrutin proportionnel avec prime majoritaire permettrait de faire émerger une véritable majorité, afin d'assurer la stabilité de la représentation.
Si l'on souhaite un mode de représentation ajusté aux besoins des Français, il est important que leur vote ait du poids : cela implique de faire émerger une véritable majorité et d'obtenir une représentation à la hauteur du nombre d'électeurs ayant exprimé leur opinion. Est-il normal qu'un mouvement ayant été au second tour de l'élection présidentielle, avec plus de 10 millions de voix, ne puisse obtenir un groupe à l'Assemblée nationale ?
Avis défavorable : il n'est pas dans la tradition républicaine de constitutionnaliser les modes de scrutin. L'article 34 prévoit qu'ils sont fixés par la loi, et nous pensons que c'est très bien ainsi.
L'amendement no 1152 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement no 1287 .
Par cet amendement, nous proposons de consacrer la possibilité de prendre un « congé républicain », sans risque de perdre son emploi ou ses droits quels qu'ils soient, en vue de se présenter à des élections. Un tel congé républicain serait le corollaire nécessaire d'une participation citoyenne accrue à la démocratie républicaine. Le congé républicain permettrait, en effet, d'assurer une sécurité nécessaire pour lutter contre toute forme de discrimination, et de donner à chacun et à chacune, quels que soient sa situation et son type d'emploi, la possibilité de s'investir librement dans la vie démocratique. Il paraît très important de le graver dans le marbre, et de permettre ainsi à tout le monde de porter la voix du peuple sur ces bancs.
Ces dispositions sont prévues par le code du travail : avis défavorable.
L'amendement no 1287 n'est pas adopté.
Dans 95 % des pays du monde, cet amendement n'aurait pas lieu d'être défendu. Dans 95 % des pays du monde, cet amendement n'aurait pas suscité la moindre minute de débats, et pour cause : dans 95 % des pays du monde, la priorité nationale est une évidence logique, l'un des fondements de la citoyenneté. En Suisse, aux États-Unis, au Brésil, en Australie, au Maroc, les nationaux ont davantage de droits, mais aussi plus de devoirs que les étrangers. Dans ces pays, les nationaux sont les premiers servis en matière d'emploi, de logement et de prestations sociales. Cette évidence n'est malheureusement pas la norme en France. Avec 6 millions de chômeurs et 9 millions de pauvres, nous devons donner la priorité aux nôtres sur les autres. Tel est le sens de cet amendement, qui prévoit une mesure de bon sens et de justice.
Avis défavorable. C'est la traduction du vieux slogan : « Les Français d'abord. » Nous considérons d'abord que cet amendement pourrait ne pas être conforme à certaines normes constitutionnelles : je pense notamment au préambule de la Constitution de 1946.
Ensuite, une telle mesure ne serait pas conforme aux textes internationaux.
Enfin, cet amendement est largement satisfait par de nombreuses dispositions législatives ordinaires.
L'amendement no 1708 n'est pas adopté.
Cet amendement vise à redéfinir le statut des étrangers et à rappeler que seul l'État français est souverain pour déterminer le nombre et la qualité des étrangers acceptés sur son sol, ainsi que les critères de leur maintien sur le territoire national. La France doit décider de qui rentre ou non chez elle, et ne rien céder aux injonctions de l'Union européenne, aux leçons de morale et au chantage permanent des organisations non gouvernementales – ONG – complices des passeurs et des trafiquants d'êtres humains.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 1009 .
Selon les médias, on fait dire tout et n'importe quoi aux chiffres concernant l'immigration. Selon certaines ONG, il n'y a pas de crise migratoire. Certains parlent même de fantasme migratoire agité inlassablement pour terroriser la population française, et brandissent un solde migratoire prétendument nul. Ce solde migratoire est, selon des démographes comme Michèle Tribalat, un très mauvais outil pour évaluer l'immigration étrangère.
Pourtant, les Français et, plus largement, les Européens, ne sont pas dupes. Ils ont raison : en 2017, plus de 1 million de demandes d'asile ont été recensées en Europe, dont la moitié s'adressait directement à l'Allemagne. Dans notre espace Schengen, savoir que 1 million de personnes demandent à venir en Europe inquiète évidemment. Quand on connaît le manque d'efficacité des reconduites à la frontière – je rappelle que la Cour des comptes a révélé, en 2015, que 96 % des personnes déboutées du droit d'asile restaient en France – , je comprends que cela crée une certaine défiance.
C'est pourquoi, comme toujours, je crois qu'il ne faut pas rechigner à dire les choses très clairement, même si c'est inconfortable, et à rappeler les principes de base, comme celui selon lequel tout étranger entré illégalement sur le territoire national et dont la situation ne relève pas du droit d'asile doit être reconduit à la frontière. Il en va non seulement de notre souveraineté, mais aussi de notre crédibilité, car, si certains aiment à penser que la France est le pays des droits de l'homme, de quels droits de l'homme et de quelle dignité parle-t-on lorsqu'on entasse les clandestins porte de La Chapelle ?
Je suis également défavorable à ces amendements. Vous voulez inscrire dans la Constitution le principe selon lequel tout étranger entré illégalement sur le territoire national doit être reconduit à la frontière. Or l'accès et le séjour des étrangers sur le territoire national sont consubstantiels à la souveraineté que l'État exerce sur son territoire. Il peut donc, au titre de cette souveraineté, prendre les dispositions nécessaires. C'est ce qu'a rappelé le Conseil constitutionnel dans sa jurisprudence très récente du 6 juillet dernier : « aucun principe non plus qu'aucune règle de valeur constitutionnelle n'assure aux étrangers des droits de caractère général et absolu d'accès et de séjour sur le territoire national. » Il me semble donc que les choses sont déjà très clairement dites.
Nous sommes également convaincus que les règles qui relèvent de cette matière extrêmement complexe et évolutive doivent rester du niveau du législateur. Dans l'état actuel du droit, je vous rappelle, d'ailleurs, que la loi française prévoit déjà que les étrangers qui sont entrés illégalement sur le territoire national peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, au seul motif qu'ils ne peuvent pas justifier être entrés régulièrement sur le territoire national.
En outre, je vous fais remarquer que votre amendement interdirait toute possibilité de régularisation de la situation administrative de tout étranger, sans considération de son état de santé, de sa situation personnelle ou familiale, de son insertion dans la société, voire de son comportement, comme cela a été le cas pour certains actes de bravoure ou d'héroïsme – je pense notamment à M. Mamadou Gassama. Cela risquerait également de concerner des mineurs. Or il me semble que la situation des mineurs doit l'emporter sur toute autre considération. C'est ce que nous faisons régulièrement en France.
Cet amendement de Mme Ménard s'inscrit dans la philosophie qui est celle de son parti depuis très longtemps, et qui vise à remettre en cause le droit du sol.
Il faut le dire clairement : vous souhaitez revenir à l'application exclusive du droit du sang. Quand on voit l'unité collective permise, dans ce pays, par la victoire de l'équipe de France, on peut être fier de l'application par la France du droit du sol.
Applaudissements sur les bancs des groupes NG, GDR et FI.
L'émotion que nous avons partagée n'est exploitée par aucun camp. C'est la fierté de l'élévation vers une reconnaissance.
Plus gravement, madame Ménard, je vous le dis de manière très claire, tout ce que vous pourriez proposer, dans un sens ou dans un autre, ne recevrait jamais mon agrément personnel. Je l'affirme clairement, car j'ai entendu dire, hier, que, lorsque vous faites des propositions intéressantes, elles pourraient être votées. Pour moi, non, car on ne peut pas laisser passer ce genre de choses, qui expriment en fait un racisme profond lié à un parti politique.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR, ainsi que sur quelques bancs du groupe LaREM.
Vous êtes un idéologue, vous avez des oeillères, tandis que, pour ma part, je peux voter une proposition pragmatique, de quelque banc de l'hémicycle qu'elle vienne, car, précisément, je réfléchis de façon cartésienne, pragmatique, en ayant à l'esprit le sens des réalités. Vous, dans cette matière, vous n'avez plus le sens des réalités, vous êtes complètement perdu. Je vous rappelle que 75 % des Français sont favorables à l'arrêt de l'immigration massive en France : je dis bien 75 % des Français. Cela prouve que vous êtes complètement déconnecté de la réalité.
Applaudissements parmi les députés non inscrits.
Ce sont vos idées qui ont conduit la France et l'Europe à la guerre ! Votre intégrisme !
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement no 2211 .
Cet amendement, qui nous tient particulièrement à coeur, a pour objet d'imposer aux partis et groupements politiques la parité sociale dans le cadre de la présentation des candidatures, afin que celles-ci reflètent la diversité de la société française.
Étant donné que la population active compte 22 % d'employés, 18 % d'ouvriers et 4,5 % d'artisans et commerçants, il faudrait ainsi, par exemple, un minimum de 11 % d'employés, 9 % d'ouvriers et 2,25 % d'artisans et commerçants parmi les candidats. Comme le souligne l'Observatoire des inégalités, si 4,6 % des députés sont employés, aucun n'est ouvrier, alors que, selon l'Institut Diderot, ces catégories représentent la moitié de la population active. À l'inverse, les cadres et les professions intellectuelles supérieures représentent 76 % des élus, soit 4,4 fois leur part dans la population active.
Historiquement, c'est sous la première législature de la IVe République que les catégories populaires ont été les plus représentées à l'Assemblée nationale, avec un peu plus de 20 % de députés ouvriers et employés. Par la suite, à l'exception d'un sursaut lors des élections de 1967, la représentation des classes populaires n'a cessé de se réduire, jusqu'à atteindre aujourd'hui 4,6 % de députés employés et 0 % d'ouvriers. L'Observatoire des inégalités identifie deux grands facteurs expliquant cette disparition progressive de la mixité sociale à l'Assemblée nationale : l'effondrement du parti communiste
Exclamations sur les bancs du groupe GDR
et l'embourgeoisement du parti socialiste, devenu un parti de diplômés. Si nous inscrivions cette disposition dans la Constitution, chacun pourrait se présenter aux élections et accéder aux bancs de l'Assemblée.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Défavorable. Je crois que ce serait très complexe à mettre en oeuvre et limiterait trop fortement la liberté de candidature. Il me semble que cela relève en grande partie d'une question de pratique politique.
L'amendement no 2211 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 192 .
L'objet de cet amendement est de garantir l'accès aux moyens matériels et financiers qui conditionnent l'accès aux élections. Les lois de financement de la vie publique de 1988 ont encadré de façon très stricte les campagnes électorales en limitant les dons des personnes privées, en interdisant les dons des personnes morales ainsi que, à présent, les prêts personnels au-delà d'un certain montant. Hélas, souvent par frilosité, les banques refusent d'engager des fonds en faveur de candidats à des fonctions électives. On est alors conduit à se tourner vers des établissements étrangers, les banques françaises ne finançant plus notre démocratie. C'est pourquoi il me paraît nécessaire de créer une Banque de la démocratie, qui pourrait consentir des prêts aux candidats à une fonction élective.
La question de la Banque de la démocratie est importante. Elle avait été introduite dans la loi pour la confiance dans la vie politique, que j'avais défendue l'été dernier devant vous. Le Gouvernement s'était engagé à étudier ce sujet de près, afin de mesurer si l'institution d'une structure bancaire, par définition assez lourde à mettre en place, était de nature à répondre aux difficultés de financement de certains candidats ou de certaines formations politiques.
C'est pourquoi le Gouvernement a demandé qu'une analyse précise soit effectuée par l'inspection générale de l'administration et l'inspection générale des finances. Ces deux corps ont entendu ou sollicité de très nombreux candidats, pour bien mesurer la situation. Les conclusions de ce rapport sont que l'accès au crédit, pour se concentrer sur ce sujet, relève moins d'une absence d'offre bancaire, que viendrait combler la Banque de la démocratie, que de questions d'informations ou de délais, qui pourraient être réglées par le médiateur du crédit qui, lui, a été institué par la loi pour la confiance dans la vie politique du 15 septembre 2017.
C'est la raison pour laquelle l'ordonnance qu'il était envisagé de prendre en vertu de l'habilitation qui avait été accordée par la loi ne l'a pas été. Je constate d'ailleurs que la création d'une telle banque ne faisait pas consensus. Certains estimaient que l'immixtion de l'État, par le biais d'une banque, pouvait porter atteinte au principe de neutralité. D'autres soulignaient la lourdeur d'un dispositif qui aurait dû respecter toutes les normes en matière d'activité bancaire, ce qui n'est pas rien.
Enfin, je rappelle que, chaque année, l'État verse plus de 60 millions d'euros aux partis politiques, au titre de leur financement public. Avis défavorable.
L'amendement no 192 n'est pas adopté.
Le présent amendement a pour objet de prendre en compte le développement des technologies numériques dans l'exercice de la souveraineté, telle qu'elle est définie au titre Ier de la Constitution, sans remettre en cause les conditions d'exercice de cette souveraineté, qui appartient au peuple, lequel l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum, avec le concours des partis et des groupements politiques.
Le numérique permet de rendre plus effective la participation des citoyens à la vie publique. En effet, il en renouvelle et en redéfinit les modalités, à un moment où les citoyens aspirent à être associés plus activement à l'élaboration de l'ensemble des normes qui les concernent et n'entendent plus restreindre leur participation à la vie de la Nation à la seule élection de leurs représentants ou aux référendums.
Dans ce contexte, l'article 4 de la Constitution, qui confie au législateur le soin de garantir les expressions pluralistes des opinions et la participation équitable des partis et des groupements politiques à la vie démocratique de la Nation, pourrait être complété.
Madame la ministre, pardonnez-moi cette incise, mais je souhaiterais être certain d'avoir bien compris les propos que vous avez tenus sur l'amendement précédent.
Cela veut-il dire que, à la suite des rapports que vous évoquiez, la disposition de la loi pour la confiance dans la vie politique qui offrait la possibilité au Gouvernement de créer une banque de la démocratie par ordonnance ne trouvera pas de concrétisation ? Je voudrais que les choses soient bien claires, parce que le sujet ne concerne pas seulement les partis « extrêmes », si j'ose dire, mais aussi de nombreux candidats, qui se trouvent confrontés à cette difficulté qui n'existait pas il y a quelques années. Nous constatons la frilosité des banques, qui, pour des raisons diverses, hésitent à financer des candidats. Nous avions imaginé ce dispositif, que nous vous avions autorisé à mettre en place par ordonnance. Est-ce définitivement abandonné, ou attendez-vous des précisions ?
Vous avez bien compris mes propos. Le projet de Banque de la démocratie est abandonné pour les raisons que j'ai expliquées. D'ailleurs, le délai d'habilitation fixé par la loi a expiré.
L'amendement no 1421 n'est pas adopté.
Cet amendement vise à inscrire dans la Constitution que les pouvoirs publics ont la responsabilité de défendre notre identité, pour protéger notre patrimoine et nos traditions. Il précise bien que l'ensemble de notre patrimoine est concerné, aussi bien matériel qu'immatériel. Cet amendement demande que cette mission soit également mentionnée parmi celles dévolues au Président de la République.
L'amendement no 1129 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les forces de l'ordre et les forces armées sont détentrices de la violence légitime. Il convient donc que leur rôle soit spécifié dans notre Constitution. Cet amendement a pour objet de consacrer dans la norme suprême le rôle des forces de l'ordre et des forces armées dans notre pays. Il convient que la Constitution exprime clairement les égards qui leur sont dus de la part des citoyens, mais aussi que nos forces de l'ordre et de sécurité sachent que la loi fondamentale consacre leur protection, ainsi que celle de leur famille.
Défavorable. Monsieur le député, les dispositions pénales existantes sont largement suffisantes, en ce qu'elles permettent d'appliquer des sanctions sévères aux auteurs de violences contre tous les dépositaires de l'autorité publique.
L'amendement no 1133 n'est pas adopté.
Cet amendement vise à parachever les efforts entrepris depuis plusieurs années pour construire un dispositif efficace de contrôle de la probité des responsables publics, de prévention des conflits d'intérêts et de transparence de la vie publique, en réponse à la crise de confiance que traverse actuellement notre pays et qui a été mesurée par maints sondages et évaluée dans de nombreux rapports officiels.
Des lois relatives à la transparence de la vie publique d'octobre 2013 à celles sur la confiance dans la vie politique de septembre 2017, en passant par la loi sur la déontologie, les droits et obligations des fonctionnaires d'avril 2016 et la loi Sapin II de décembre 2016, l'intégrité des élus et des responsables publics est devenue l'une des clauses essentielles du pacte de confiance entre les représentants et les représentés.
Il pourrait être complété afin que la loi prévoie les conditions dans lesquelles les technologies numériques contribuent à l'expression des opinions et la participation des partis et des personnes à la vie démocratique. Le présent amendement est issu de l'une des recommandations formulées par le groupe de travail commun entre l'Assemblée nationale et le Sénat, qui a été chargé par le président de chacune de ces assemblées de réfléchir à l'inclusion des droits et libertés numériques dans la Constitution.
Un certain nombre de lois, comme l'a indiqué notre collègue, répondent à l'objectif qu'il a exprimé. Il est donc inutile d'encombrer notre Constitution de recommandations supplémentaires, d'ores et déjà contenues dans la loi. Défavorable.
Je suis un peu ennuyée, car je ne sais pas si nous parlons du même amendement. Je vous ai entendu parler, monsieur le député, de droits et libertés numériques, ce qui n'est pas le sujet de l'amendement no 1422 , qui a trait aux aspects déontologiques.
Il y a eu une erreur sur la fin, mais cela concerne les conflits d'intérêts !
Quoi qu'il en soit, mon avis était, dans les deux cas, défavorable.
L'amendement no 1422 n'est pas adopté.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement no 1121 .
Par cet amendement, nous proposons de poser, dans la Constitution, le principe de la planification écologique. Cet amendement s'inspire de propositions de rédaction établies par « l'appel pour une Constitution écologique », à l'initiative, notamment du REFEDD – réseau français des étudiants pour le développement durable – , du WARN – We are ready now –, de 350. org et de la Fondation de l'écologie politique. Dans son programme présidentiel, L'Avenir en commun, Jean-Luc Mélenchon proposait la planification écologique pour relever le défi qui est devant nous, à savoir, notamment, le changement climatique.
Nous pensons que la puissance publique doit s'emparer de cette thématique, afin de déployer une planification à long terme. En effet, l'écologie est le domaine du temps long, que le marché ne prend pas en compte.
Nous proposons d'insérer dans la Constitution un titre Ier bis, comprenant notamment un article 4-1 se lisant ainsi : « L'État, avec le concours des acteurs privés, veille au respect des principes posés à l'article 1er de la Constitution. »
Il serait suivi d'un article 4-2 disposant que l'État protège les biens communs, car nous pensons que l'eau, l'air, le vivant et l'énergie ne sont pas des marchandises et doivent être gérés démocratiquement.
Nous proposons également, dans un article 4-3, que les « lois de finances déterminent le financement des investissements nécessaires à l'adaptation publique aux changements climatiques en cours et à venir ».
Enfin, nous souhaitons, qu'un article 4-4 vienne affirmer que le « principe de préjudice écologique guide les mesures de précaution et de restriction à l'égard de toutes les activités conduisant à l'extinction des espèces, la destruction des écosystèmes et l'altération des cycles naturels ; et organise leur restauration ».
La puissance publique doit organiser la planification, mais celle-ci doit être décidée démocratiquement, au plus proche des enjeux du terrain.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe FI.
Défavorable également. Il me semble que votre amendement, très long, vise à instaurer une nouvelle charte de l'environnement ou de l'écologie dans la Constitution, mais il le fait soit en paraphrasant des dispositions déjà existantes, soit en reprenant des jurisprudences du Conseil constitutionnel qu'il me semble inutile de préciser.
Madame la ministre, je ne suis pas sûr que les dispositions de l'article 4-2 que nous proposons, disposant que l'État protège les biens communs, et affirmant que l'eau, l'air, le vivant et l'énergie ne sont pas des marchandises, soient dans la charte de l'environnement ou dans la jurisprudence. Par ailleurs, la précision selon laquelle ces biens communs doivent être gérés démocratiquement est substantielle.
Que l'on ait des désaccords sur le sujet, dont acte. En revanche, ne dites pas que notre amendement n'est que paraphrases de dispositions et de jurisprudences existantes. Si tel était le cas, ce serait merveilleux, car nous serions déjà engagés dans la planification écologique que nous appelons de nos voeux. Si nous ne nous attaquons pas sérieusement à ce problème, nous ne pourrons plus en discuter, puisque l'écosystème qui permet la vie humaine aura disparu. Il est urgent de placer cette exigence au plus haut niveau qui soit, c'est-à-dire dans la Constitution, et pas seulement dans une charte, quand bien même on la paraphraserait.
L'amendement no 1121 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement no 1849 .
L'amendement no 1849 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement no 1836 .
Les biens communs correspondent à l'ensemble des ressources qui sont limitées et que l'on considère comme essentielles à la vie humaine dans des conditions saines et durables. Les marchés et la concurrence productiviste saccagent la planète. Ainsi, les biens communs doivent être sortis de la sphère marchande, ces ressources n'ayant pas vocation à générer des profits.
À titre d'exemple, l'accès à l'eau potable est menacé par la pollution grandissante issue des rejets de l'industrie et de l'agriculture productiviste. Il doit être garanti et ne devrait en aucun cas faire l'objet d'un commerce. Il ne devrait également pas être possible de faire des bénéfices sur l'accès à l'eau potable. Son coût ne devrait pas dépasser le prix du fonctionnement de l'infrastructure qui la rend disponible. Le décret de l'ONU du 28 juillet 2010 va dans ce sens, mais le droit français n'est, pour l'heure, ni suffisamment effectif ni suffisamment ambitieux.
La protection des biens communs est indispensable face à l'urgence écologique. En outre, il est au bout du compte plus coûteux de laisser faire les marchés, qui n'incluent pas ce qu'ils nomment les « externalités environnementales ». La préservation de ces biens communs ne peut donc se faire que par le biais d'une gestion publique.
Avis également défavorable. Vous évoquez, madame, la question de l'eau. Je redis ici que, sur ce sujet, le Conseil constitutionnel a récemment considéré que l'eau était un « besoin essentiel de la personne », avec objectif à valeur constitutionnelle, qui pouvait justifier une interdiction d'interrompre sa fourniture.
L'amendement no 1836 n'est pas adopté.
Cet amendement poursuit deux objectifs. Le premier est d'arrêter d'utiliser l'oxymore « développement durable ». En effet, le développement ne peut pas être durable, car certains types de croissance nous condamneront malheureusement à court terme. L'expression « développement soutenable » semble bien plus appropriée, car elle montre que seule l'activité économique soutenable pour la nature, l'environnement et le climat est acceptable.
Le second objectif vise à affirmer que l'intérêt écologique prévaut sur l'intérêt économique. La première urgence est de pouvoir continuer à respirer sur cette planète et à y vivre. Les questions économiques, y compris celles qui mettent en jeu le droit de propriété ou la libre concurrence, doivent être assujetties à l'intérêt écologique.
L'amendement no 1862 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement no 1863 .
Cet amendement propose d'insérer un article affirmant que « Les autorités publiques garantissent, dans le cadre de l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement, la participation et la consultation des populations concernées ».
Oui, madame la ministre, cette disposition est déjà présente dans la charte de l'environnement, sous une forme légèrement différente.
Oui, légèrement différente. Nous souhaitons la placer à un niveau plus haut, celui de la Constitution. En effet, bien que présente dans la charte de l'environnement, elle est souvent contournée, et la consultation des citoyens, sur de nombreux grands projets, ressemble plus à une mascarade qu'à une réelle participation à la décision.
Tout est dans le « légèrement différent ». J'émets un avis défavorable à l'adoption de cet amendement.
L'amendement no 1863 n'est pas adopté.
Cet amendement affirme que les êtres vivants ne peuvent faire l'objet d'aucun brevetage.
Nous nous inspirons de la Constitution de l'Équateur de 2008 qui dispose que « La nature ou Pachamama, où la vie est reproduite et existe, a le droit au respect intégral de son existence, du maintien et de la régénération de ses cycles vitaux, de sa structure, de ses fonctions et de ses processus évolutifs ». L'Équateur nous a montré le chemin à prendre pour que l'urgence écologique, quelle que soit sa dimension, prévale sur l'intérêt économique. Voilà pourquoi nous vous proposons cet amendement.
Avis défavorable également. Le droit européen protège déjà largement les êtres vivants.
Ce n'est pas un argument, madame la ministre ! De nombreuses dispositions de notre Constitution se retrouvent dans le droit européen : ce que celui-ci protège peut donc être inscrit dans celle-là. Donnez-moi un autre argument, s'il vous plaît.
L'amendement no 1858 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement no 1864 .
Cet amendement vise à insérer un article affirmant que « L'eau et l'énergie sont des ressources indispensables à une vie digne. Nul ne peut en être privé. Leur tarification est progressive. Les quantités minimales indispensables sont gratuites et garanties par les autorités publiques aux personnes physiques. Les mésusages de ces ressources sont sanctionnés. »
Madame la ministre, vous avez dit tout à l'heure que l'accès à l'eau était déjà protégé, mais l'interdiction d'interrompre l'eau n'empêche pas de réduire les débits au minimum, ce que les multinationales comme Suez font allègrement. Face à cela, cet amendement poursuit l'objectif de protéger tout le monde.
L'amendement no 1864 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement no 1848 .
Par cet amendement, nous proposons que la Constitution interdise les organismes génétiquement modifiés – OGM – auxquels nous sommes farouchement opposés. En posant certains interdits et limites, nous érigerions l'un des piliers de la refonte de notre agriculture.
L'amendement no 1848 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement concerne les animaux, qui, jusqu'en 2015, étaient considérés comme des biens meubles. Heureusement, le code civil estime désormais qu'ils sont des « êtres vivants doués de sensibilité ». Ce changement fut long à obtenir, et la question des animaux nous renvoie à notre conception philosophique du vivant sur la planète.
Fort heureusement, les choses évoluent, notamment dans la remise en cause de la souffrance animale, souvent gratuite car liée à des impératifs économiques qui laissent pantois – qu'on songe, par exemple, à la destruction des poussins en batterie.
Il faut inscrire dans la Constitution la question du bien-être et de la non-souffrance des animaux, qui rejoint notre conception du reste de la planète.
Nous souhaitons donc insérer l'article suivant dans la Constitution : « Tout acte de cruauté envers les êtres doués de sensibilité est défendu, que ces êtres soient domestiques ou sauvages. »
J'émets un avis défavorable à l'adoption de cet amendement, puisque le code pénal réprime déjà les actes de cruauté envers les animaux.
Mon avis est également défavorable, non pas que nous ne partagions pas l'objectif défendu par M. Coquerel, mais l'évolution du code civil, qui, comme vous l'avez rappelé, fait des animaux des êtres doués de sensibilité, les protège mieux. Toutefois, les animaux sont toujours soumis au régime des biens.
La disposition du code civil et celles du code pénal, appliquées avec une grande sévérité par nos juridictions, me semblent répondre à votre objectif.
La cause nous semble d'une telle importance que l'on ne saurait se contenter du fait que le code pénal réprime les actes de cruauté envers les animaux. Nous estimons d'ailleurs que de nombreuses dispositions du code pénal devraient être inscrites dans la Constitution. Le bien-être des êtres vivants que sont les animaux en fait partie. Il est à nos yeux très important, et nous ne faisons pas suffisamment de progrès en la matière – pensons à la chasse à courre, par exemple, ou à d'autres activités faisant souffrir gratuitement les animaux. Nous devrions être capables, comme nous l'avons été pour plusieurs thèmes depuis quelques jours, d'inscrire cette protection dans la Constitution. Cela honorerait notre assemblée.
L'amendement no 1838 n'est pas adopté.
La parole est à M. M'jid El Guerrab, pour soutenir l'amendement no 871 .
Par le biais de cet amendement, il s'agit de donner une définition plus exacte du rôle du Président de la République. Notons que c'était là une recommandation du comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions.
L'objectif est donc de prendre acte de soixante ans de présidentialisme majoritaire, en clarifiant la lettre de l'article 5 de la Constitution. Aux termes de cette disposition, le chef de l'État est essentiellement appréhendé comme un « pouvoir neutre », selon la formule de Benjamin Constant, ou encore comme le « gardien de la Constitution ». Sa vocation serait de faire valoir l'intérêt de la Nation par-delà les combinaisons et les contingences partisanes. Lorsque les ressorts de l'État « se croisent, s'entrechoquent et s'entravent », observait Benjamin Constant, « il faut une force qui les remette à leur place ». L'article 5 attribuait cette mission au chef de l'État.
Or, en pratique, le Président de la République est non seulement l'arbitre du jeu politique, mais aussi une sorte de capitaine d'équipe. Il est simultanément l'un et l'autre dans ce que l'on appelle communément notre « monarchie républicaine ». Telle est la logique de la Ve République, installée d'emblée par le général de Gaulle. Il serait opportun de mettre le texte constitutionnel en conformité avec la pratique politique.
Bien entendu, il s'agit d'un amendement d'appel visant à ouvrir le débat. Dès lors que nous réformons la Constitution, aucun débat n'est à exclure. J'aimerais donc ouvrir le débat – comme je l'ai fait en commission – sur la définition exacte du rôle du Président de la République.
Il s'agit en effet d'un débat important, car il est principiel. L'article 5 de notre Constitution attribue six missions au Président de la République, mais ne lui donne qu'un moyen pour les remplir, l'arbitrage. Le questionnement sur ce terme est très intéressant.
Toutefois, il a été abordé lors de la révision constitutionnelle de 2008. En effet, le comité Balladur s'était saisi du sujet et avait proposé la réécriture de l'article 5, qui serait devenu « Le Président de la République définit la politique de la Nation », ainsi que de l'article 20, qui serait devenu « Le Gouvernement conduit la politique de la Nation ». Une telle rédaction était censée éviter toute dyarchie à la tête de notre État, en établissant une hiérarchie entre le Président de la République et le Premier ministre.
On y a finalement renoncé, en raison des risques d'autoritarisme – clairement perçus alors – inhérents à une telle réforme, laquelle aurait également aggravé le fossé entre responsabilité et pouvoir. Le choix du verbe « arbitrer » est tout à fait sensé. Il permet à notre Constitution de s'adapter à la réalité de la vie démocratique du pays. Le Gouvernement souhaite donc maintenir cette terminologie. J'émets un avis défavorable sur l'amendement.
Je ne suis pas d'accord avec cet amendement sur le fond, car je suis opposé à la monarchie présidentielle. Néanmoins, il a le mérite de clarifier une situation étrange.
On lui oppose qu'on voyait nettement émerger, lorsqu'on débattait d'une telle rédaction, des risques d'autoritarisme exercé par un Président de la République surpuissant. Mais que constatons-nous en l'état actuel de la rédaction de la Constitution ? Emmanuel Macron n'a-t-il pas défini la politique de la Nation à Versailles ?
Je n'y suis pas allé, mais telle était l'impression que cela donnait à la télévision. Je m'interroge donc sur votre réponse, madame la ministre. Pour ma part, je suis radicalement et résolument favorable au passage à une VIe République, démocratique et dépourvue de monarque républicain – ou de droit divin, d'ailleurs. Les termes du débat proposé ici me semblent intéressants.
Certaines propositions qui semblent intéressantes cachent parfois de grands périls. À l'heure actuelle, rien, dans la Constitution, n'interdit l'hypothèse d'une cohabitation. Or, si nous retenions la proposition que vous formulez, monsieur El Guerrab, un Président de la République pourrait définir pour la Nation une politique contraire à celle décidée par la majorité élue à l'Assemblée nationale, ce qui serait incohérent et incompréhensible.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Nous avons déjà entendu deux orateurs en réponse à la commission et au Gouvernement, monsieur El Guerrab.
L'amendement no 871 n'est pas adopté.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement no 1125 .
Nous proposons un article additionnel ainsi rédigé : « Le Président de la République se conforme au principe de laïcité dont il est aussi un des garants. Il ne peut à ce titre ni recevoir, ni accepter, aucun titre ou distinction, que ce soit directement, ou indirectement, d'une quelconque nature religieuse. »
Eh oui ! Le titre de chanoine du Latran n'est pas un titre laïque, n'en déplaise au porte-parole du Gouvernement, même si le terme « laïc » a deux sens distincts. Si le Président de la République accepte un titre conféré par une autorité religieuse, on est en droit de se demander à quoi sert la laïcité. J'ignore s'il sera sollicité à l'avenir par d'autres autorités religieuses souhaitant lui conférer de nouveaux titres, tels que ceux des bouddhistes – s'ils existent – ou ceux de grand imam ou de grand rabbin.
Il serait surprenant que nous suivions une telle pente. J'ai bien remarqué que, depuis qu'il a reçu la distinction de chanoine du Latran, le Président de la République dit un peu mieux la messe qu'auparavant, comme nous l'avons vu à Versailles.
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Toutefois, est-ce nécessaire et suffisant dans cette République qui se veut – et qui est – laïque ?
En la matière, j'estime qu'il vaut mieux clarifier les choses dans la Constitution en précisant que le Président de la République – ainsi que les membres de son gouvernement, d'ailleurs, en cas de cohabitation évoquée tout à l'heure – ne peut recevoir aucun titre religieux.
J'aimerais rappeler brièvement l'origine de l'attribution du titre de chanoine du Latran au Président de la République.
Selon l'article 5 de la Constitution, celui-ci veille au respect de la Constitution. Il veille donc au respect du principe constitutionnel de laïcité et à sa composante première, la neutralité de l'État et des services publics vis-à-vis des croyances et des religions, laquelle est la conséquence de la séparation des Églises et de l'État. C'est pourquoi la remise au chef de l'État de titres honorifiques relevant de traditions historiques, émanant le cas échéant d'une autorité religieuse, ne me semble nullement contrevenir au principe de laïcité, lequel a valeur constitutionnelle.
La tradition selon laquelle le Président de la République est fait chanoine du Latran ne figure dans aucun texte officiel de la République française. Il s'agit d'un geste de courtoisie internationale entre celle-ci et l'État du Vatican.
Depuis le XVIe siècle, six privilèges et titres émanant du Vatican reviennent de droit au chef de l'État français, dont celui de premier chanoine honoraire de la basilique de Saint-Jean-de-Latran. L'octroi automatique de ces titres relève d'une tradition diplomatique de concorde entre les deux souverains, poursuivie par les États modernes.
Cette tradition remonte à Louis XI, plus précisément à 1482. Elle a été renouvelée en 1604 par Henri IV, qui décida de faire don à la basilique Saint-Jean-de-Latran, cathédrale du Pape, de l'abbaye de Clairac, située dans l'actuel département du Lot-et-Garonne. En guise de remerciement, le chapitre du Latran lui accorda le titre canonique et honorifique de chanoine.
La tradition s'est maintenue sous la Ve République, tout en respectant le principe de laïcité, dont découle la neutralité du chef de l'État. Par ailleurs, la prise de possession du titre de chanoine du Latran n'attribue aucun pouvoir religieux au Président de la République, qui, bien entendu, ne prête nullement allégeance à l'autorité religieuse concernée.
Rires sur les bancs des groupes NG et GDR.
Le titre tend simplement à renforcer des relations diplomatiques et historiques de compréhension et de confiance entre la France et le Vatican. J'émets donc un avis défavorable à l'amendement.
Mme la garde des sceaux vous a-t-elle convaincu de retirer votre amendement, monsieur Bernalicis ?
Sourires.
À mes yeux, l'argumentation n'est pas extraordinaire. Madame la ministre, vous avez une solide formation juridique. Il me semble étrange que vous invoquiez la coutume, la tradition ou la courtoisie diplomatique. Tout cela me semble juridiquement faible, pour reprendre un argument que vous avancez parfois.
Plus sérieusement, vous avez rappelé l'origine royale de cette tradition. En effet, depuis Louis XI, les rois en étaient destinataires. Toutefois, à un moment donné, la tradition s'est perdue. Certains rois ne se sont pas rendus au Latran pour recevoir cette distinction. Et en 2018, en République, le Président s'y rend !
Vous pouvez arguer que le titre est octroyé automatiquement et qu'on n'y peut rien, mais il existe une différence entre se rendre sur place, prononcer un discours et s'en féliciter, d'une part, et ne pas s'y rendre, d'autre part, comme d'autres Présidents de la République, qui ont adopté une attitude de retrait. François Hollande, par exemple, n'est pas allé recevoir la distinction de chanoine du Latran – il n'a pas été « chanoinisé », mais je doute que ce terme existe !
Imaginons que trois, quatre ou cinq religions proposent d'attribuer au Président de la République de tels titres honorifiques. Que fait-on ? On les accepte tous ?
Comment le chef de l'État pourrait-il alors assurer la neutralité de l'État, prévue par la loi de 1905 ? On marche sur la tête ! Votre argumentation ne tient pas la route !
Je profite de cette deuxième intervention sur l'amendement, dès lors que leur nombre est contingenté. Tout à l'heure, je n'ai pas pu répondre à Mme la ministre, mais peu importe, je m'exprimerai sur l'amendement no 1125 .
La distinction de chanoine du Latran peut heurter le concept de laïcité. Ce débat mérite d'être ouvert. Nous réformons la Constitution ; nous devons prendre le temps de le faire. Nous devons faire l'éloge de la lenteur, et ne pas nous soumettre à ce que Gilles Finchelstein appelait la « dictature de l'urgence » en examinant trop rapidement un texte fondamental.
La question soulevée mérite d'être posée. Mes parents sont originaires d'un pays, le Maroc, où il existe un « Commandeur des croyants ». Si celui-ci nommait le Président de la République grand mufti d'Europe, cela poserait problème en termes de laïcité et susciterait des interrogations. Il me semble donc que le débat est légitime. Je suis favorable au respect des traditions de notre pays, mais on ne peut pour autant écarter ce débat intéressant d'un revers de la main.
Si vous avez quelque chose à dire, demandez la parole, chère collègue !
L'amendement no 1125 n'est pas adopté.
Je suis saisi de huit amendements, nos 2235 , 2233 , 211 rectifié , 1795 , 911 deuxième rectification, 1288, 45 et 904, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 211 rectifié et 1795 sont identiques, ainsi que les amendements nos 911 deuxième rectification et 1288, et les amendements nos 45 et 904 .
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 2235 .
Beaucoup de gens sérieux – et cet hémicycle en compte de nombreux – , soucieux du caractère démocratique de notre régime, s'accordent à considérer que l'adoption du quinquennat était une erreur.
À l'époque, comme souvent de ce côté-ci de l'hémicycle, nous ne nous sommes pas trompés, notamment Jacques Brunhes qui rappelait : « L'important, c'est que le mandat du Président de la République soit plus long que le mandat législatif. La tradition française s'appuie sur cette double articulation, qui oxygène la politique, des mandats présidentiel et législatif de durée différente. C'est ce qui peut empêcher la présidentialisation accrue. »
De nombreux amendements portent sur ce sujet, dénonçant une présidence hypertrophiée et un Président de la République omniprésent, omnipotent ou doté de pouvoirs exorbitants. Nous nous fondons sur le travail réalisé en vue de la publication en 2015 du rapport Bartolone-Winock intitulé Refaire la démocratie, …
… qui préconisait d'ailleurs d'en finir avec cette situation. Celle-ci renforce le fait majoritaire et réduit les législatives à une sorte de réflexe de Pavlov consécutif à l'élection présidentielle. Au demeurant, nous mesurons à l'heure actuelle à quel point cette analyse est juste.
Le présent amendement vise donc à rétablir le septennat. Il va même plus loin et propose que le Président de la République soit élu non plus au suffrage universel, mais par le Parlement réuni en Congrès.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement no 2233 .
L'élection du Président de la République au suffrage universel est une anomalie démocratique fondamentale de plus en plus dénoncée. Celui-ci est d'ores et déjà investi par nos institutions d'un pouvoir exorbitant, qui sera encore amplifié par le présent projet de loi.
Échappant à tout principe de responsabilité et de contrôle, le mode d'élection du Président de la République entretient l'illusion d'un rapport immédiat entre un chef et son peuple, laquelle entretient à son tour un conflit permanent de légitimité entre le Président de la République et l'Assemblée nationale. C'est si vrai que la question a été tranchée sous le gouvernement Jospin en donnant la primauté au chef de l'État grâce à l'inversion du calendrier électoral, laquelle subordonne de fait les élections législatives au scrutin présidentiel, avec les effets désastreux que l'on sait sur le pluralisme démocratique.
Nous avions dénoncé cette réforme avec vigueur, et nous continuerons de le faire, comme nous continuons de demander la suppression de l'élection du Président de la République au suffrage universel, qui a constitué une étape décisive dans l'affaiblissement du rôle du Parlement.
Il ne peut y avoir deux légitimités issues du suffrage universel sans que l'une prenne le pas sur l'autre. Nous vous proposons, avec cet amendement, de nous doter d'une République moderne, afin de balayer la chimère de l'homme providentiel et de sortir du cycle infernal de l'espoir et du désespoir qui se renouvelle tous les cinq ans. Nous redonnerions ainsi au Parlement son utilité, et à la loi son autorité – et nous vous proposerons plus loin un amendement visant à instaurer une motion de censure constructive, afin d'écarter tout risque de retour à l'instabilité de la IVe République.
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l'amendement no 211 rectifié .
La mise en place du quinquennat a été une erreur qui, ajoutée à l'élection du Président de la République au suffrage universel, a réduit au quasi-néant l'autonomie de l'Assemblée nationale. Depuis 2002, par nature, la plupart des parlementaires sont élus dans la foulée de l'élection du chef de l'État : cela crée une pression, une contrainte, un devoir qui sont excessifs.
Cet amendement vise donc à revenir à l'esprit de nos institutions, c'est-à-dire à des durées de mandat différentes pour l'Assemblée nationale et le Président de la République. Élire le Président de la République pour sept ans – mandat plus long que celui des députés – permettrait à celui-ci d'être le gestionnaire du temps long, et pas du temps court ou du temps parlementaire ; élire les députés pour cinq ans permettrait aux Français de juger l'action de l'exécutif et de la majorité avant la fin du mandat présidentiel, comme ce fut le cas par le passé.
On dira que cela peut conduire à des cohabitations ; c'est incontestable, mais j'observe que les trois périodes de cohabitation que notre pays a connues sont sans doute celles où nous avons été le mieux gouvernés. C'est si vrai que les lois adoptées alors n'ont jamais été remises en cause par qui que ce soit.
Cet amendement tend en outre à prévoir que le mandat de Président de la République n'est pas renouvelable. Malheureusement, les chefs de l'État qui se succèdent – qui ont pour beaucoup mis très longtemps à arriver à l'Élysée, même si ce n'est pas le cas du Président de la République actuel – n'ont pour seule préoccupation, dès le début de leur mandat, que d'être réélus. Cela fausse leur action. Il nous semblerait donc plus satisfaisant d'adopter un nouvel équilibre : deux durées de mandat différentes, une pour le Président de la République, celle du temps long, une autre pour l'Assemblée nationale, celle du temps du Gouvernement ; un mandat non renouvelable pour le Président de la République, afin que sa seule ambition soit, une fois élu, de servir le pays au mieux, sans préoccupation électoraliste.
Je serais extrêmement surpris que vous adoptiez cet amendement, chers collègues, je ne vous le cache pas ; mais, souvent, les idées doivent être défendues pendant longtemps. Le quinquennat a été défendu pendant très longtemps…
Je me souviens du président Valéry Giscard d'Estaing qui disait : « nous ne changeons qu'un mot dans la Constitution ». Eh bien, ce changement de « sept » en « cinq » a considérablement affaibli l'Assemblée nationale. Il est temps de rééquilibrer les pouvoirs dans notre pays.
La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l'amendement no 1795 .
Mon amendement est identique au précédent : il vise à porter à sept ans la durée du mandat présidentiel et à le rendre non renouvelable.
Cela permettrait de donner au Président de la République davantage de liberté et de capacité d'action ; celles-ci sont aujourd'hui entravées par la perspective d'une nouvelle élection à brève échéance, puisque le Président de la République est le plus souvent candidat à sa propre succession. En revenant au septennat, nous redonnerions au Président de la République la capacité d'envisager des réformes d'ampleur, réclamant plusieurs années de préparation, mais aussi d'en assurer la mise en oeuvre et d'en mesurer les effets.
De plus, le quinquennat entraîne aujourd'hui une confusion des rôles entre le Président de la République et le Premier ministre ; il empêche le premier de jouer véritablement le rôle d'arbitre institutionnel que la Constitution lui confie.
Voilà pourquoi nous défendons l'idée d'un septennat non renouvelable.
La parole est à M. Ludovic Pajot, pour soutenir l'amendement no 911 , deuxième rectification.
Force est de constater, comme notre mouvement politique l'avait d'ailleurs prévu dès l'instauration du quinquennat, que la réforme issue du référendum du 24 septembre 2000, lancée par Jacques Chirac, est un échec patent. Tout le monde s'accorde à dire que le bénéfice d'une action présidentielle de qualité ne peut se ressentir sur une période si courte, bien trop courte pour mettre en place les réformes nécessaires.
Pire, leur mandat étant renouvelable, les présidents de la République n'ont qu'une seule perspective : leur réélection. Cela nuit mécaniquement à la qualité de l'action présidentielle, entache l'image du chef de l'État et contribue in fine à rompre le lien de confiance entre nos concitoyens et l'ensemble des élus.
Cet amendement tend donc à revenir au principe du septennat, mais aussi à mettre un terme au caractère renouvelable du mandat du Président de la République. Ce serait une mesure efficace, et propre à restaurer la confiance dans la vie politique.
La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l'amendement no 1288 .
Cet amendement vise également à rallonger le mandat présidentiel. Divers arguments ont déjà été avancés, mais je voudrais citer ici l'exposé des motifs d'une récente proposition de loi : « Conformément à la lettre et l'esprit de la Constitution du 4 octobre 1958, ainsi qu'à la mission historique du Président de la République, la durée du septennat permettait à la fonction du chef de l'État d'incarner la continuité et l'unité de la nation. » Cette proposition de loi a été déposée en 2014 par M. Jacques Mézard et plusieurs de ses collègues sénateurs…
Elle me permet de verser au débat le fait que certains membres du Gouvernement ont défendu, de façon détaillée, un nouvel équilibre constitutionnel, et en particulier un retour au septennat, afin de permettre au chef de l'État de jouer pleinement son rôle de garant des institutions, et d'éviter la superposition des mandats des députés et du Président de la République.
Il est dommage que M. Mézard ne soit pas présent au banc cet après-midi ; il est vrai qu'il serait dans une situation difficile, puisqu'il devrait défendre une position diamétralement opposée à celle qu'il tenait il y a quelques mois encore.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR ainsi que parmi les députés non inscrits.
Cet amendement a également pour objet de revenir au septennat. Tous nos grands problèmes exigent une réflexion sur la longue durée, qu'il s'agisse de l'environnement, du climat, de l'intégration des populations d'origine étrangère, de la défense nationale, de l'énergie… Chaque fois, il faut du temps ; donnons du temps.
Regardons aussi ce qui se passe dans le monde : les dictateurs, et souvent les plus redoutables d'entre eux, ont la durée pour eux ; face à eux, nos démocraties, et en particulier la nôtre, y ont renoncé, alors que nous l'avions naguère.
Enfin, si nous sommes passés de sept à cinq ans, c'est parce que l'on a fantasmé sur la cohabitation. D'autres l'ont dit avant moi : ces trois périodes furent pourtant positives ; je le dis aussi pour ma famille politique, puisque, entre 1986 et 1988 puis entre 1993 et 1995, nous avons pu travailler.
Le quinquennat a rompu l'équilibre entre le Président de la République et le Parlement. On parle aujourd'hui, à propos d'autres pays, de démocraties illibérales ; ce n'est pas cette crainte-là que je nourris pour notre pays, mais celle d'une démocratie aparlementaire. Le Parlement découle du Président de la République, de façon logique, inévitable ; les élections qui se sont succédé depuis 2002 l'ont systématiquement confirmé. Regardez l'histoire ! Les élections de 1993 et 1995 furent les dernières véritables élections législatives, les dernières qui – parce qu'elles ne se tenaient pas juste après l'élection présidentielle – ont permis un vrai débat démocratique. Ce n'est plus vraiment le cas depuis 2002.
Je vous propose donc de rééquilibrer nos institutions en rétablissant un mandat de sept ans pour le Président de la République. Des élections législatives à la moitié de son mandat, à midterm, comme disent les Américains, permettraient une véritable respiration démocratique.
Sinon, la population trouve d'autres occasions de dire tout son désappointement.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 904 .
Mon amendement est identique au précédent.
Pendant 127 ans, le septennat a été la règle ; c'est le référendum du 24 septembre 2000 qui a balayé une tradition plus que centenaire – par opportunisme politique, sans que la question ait été vraiment étudiée, et dans une relative indifférence, puisque le taux d'abstention était de presque 70 %.
Loin d'être anodine, cette réforme a profondément changé la nature de la Ve République ; elle a renforcé le fait majoritaire, puisque, désormais, les élections présidentielle et législatives ont lieu presque en même temps, ce qui permet d'éviter d'éventuels temps de cohabitation.
Autre évolution, qui irait dans le bon sens s'il faut en croire Emmanuel Macron et le Gouvernement : cela permet de mieux contrôler, ou plus exactement d'effacer encore davantage le rôle de contre-pouvoir de l'Assemblée nationale vis-à-vis du Gouvernement. Car si l'Assemblée pouvait naguère constituer une véritable force d'opposition, notamment lors des périodes de cohabitation, elle n'est plus maintenant qu'une chambre d'enregistrement des réformes gouvernementales.
Revenir au septennat permettrait de séparer à nouveau l'élection présidentielle des élections législatives ; les Français pourraient ainsi à nouveau faire entendre leur voix : sont-ils, oui ou non, satisfaits de la politique menée par le Gouvernement ? Cela éviterait aussi de donner aux élections intermédiaires valeur de test national d'approbation des mesures engagées. Nous restaurerions ainsi le lien entre les Français et leurs institutions ; aujourd'hui, ils ont souvent l'impression qu'après avoir été dragués pendant le temps de la campagne électorale, ils sont jetés aux oubliettes – avec, pour seule réponse à leur accompagnement, le désormais classique « mais vous avez voté pour nous » seriné à l'envi. Et l'on s'étonne ensuite de l'augmentation toujours plus importante de l'abstention !
La pluralité des propositions témoigne à tout le moins que la réflexion n'est pas totalement aboutie : un amendement nous propose huit ans, avec un mandat parlementaire de quatre ans renouvelable deux fois ; un autre propose sept ans, avec des élections législatives à midterm, pour employer un nouveau bretonisme ; un autre encore propose le renouvellement de l'Assemblée nationale par moitié.
Certains proposent un septennat non renouvelable, d'autres un septennat renouvelable une fois. J'observe d'ailleurs que la seule proposition qui aurait pu être jugée pertinente n'a pas été faite : ce serait de permettre au Président de la République, comme pour un député ou un sénateur, d'exercer trois mandats.
Ce ne sont pas tout à fait les mêmes fonctions, ni les mêmes responsabilités !
Sourires.
Mais l'imagination des députés n'est pas allée jusque-là ! Peut-être, en deuxième lecture, y reviendrons-nous.
Plus sérieusement, ces propositions n'entrent pas dans le périmètre du projet de révision constitutionnelle que nous avons examiné durant plus de quarante heures en commission. Dans la mesure où des travaux sur le sujet n'ont pas été menés au préalable, où il y a manifestement un dissensus, chaque auteur d'amendement présentant une idée différente, …
… et où l'on ne constate pas de portage politique lisible, évident, la commission a donné un avis défavorable à chacune des variantes, plus ou moins novatrices ou cocasses, qui viennent d'être présentées.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements portant sur la durée du mandat présidentiel ?
J'avais bien observé, monsieur le président, qu'il était question de la durée du mandat présidentiel.
Mesdames, messieurs les députés, vous avez été nombreux à rappeler que le quinquennat a fait évoluer la pratique de notre régime politique. Vous proposez un sexennat, un septennat, un octennat, bref, des solutions très diverses.
Pour ce qui me concerne, j'émets un avis défavorable à l'ensemble des solutions proposées, pour trois raisons de fond et une de forme.
Première raison : le quinquennat et l'organisation des élections législatives ont procuré des institutions à la fois stables et efficaces. Si le Parlement se donne les moyens d'exercer son pouvoir d'évaluation, il peut jouer pleinement le rôle que lui attribue l'article 24.
Deuxième raison : le quinquennat est adapté à l'importance que prend aujourd'hui la fonction présidentielle. Les Français se prononcent désormais à intervalle régulier, relativement rapproché, sur le choix du chef de l'État. Il me semble que cette solution convient à leurs attentes.
Troisième raison : le quinquennat contribue à l'efficacité de nos institutions, à la vitalité de la vie démocratique et au renouvellement de la vie politique.
Ces trois raisons justifient d'en rester là.
Par ailleurs, je le rappelle, le quinquennat a été adopté en 2000 par voie référendaire, avec une large majorité de oui – plus de 73 %. Il serait délicat de revenir sur ce sujet sans un large débat populaire.
Telles sont les raisons pour lesquelles j'émets un avis défavorable sur ces amendements.
Plusieurs députés souhaitent répondre à la commission et au Gouvernement.
Monsieur Mélenchon, si vous avez un problème, signalez-le. Je disais justement que j'avais noté le nom de plusieurs collègues qui avaient demandé la parole pour répondre à la commission et au Gouvernement. Votre attitude me semble donc incompréhensible.
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, qui a défendu un amendement sur le sujet. Comme d'autres députés se trouvant dans le même cas, il est donc prioritaire pour répondre à la commission et au Gouvernement.
Ceux qui liront le compte rendu de cette séance doivent savoir que, si ces amendements sont examinés en discussion commune, c'est uniquement pour des raisons propres à l'organisation des débats de l'Assemblée nationale.
Le rapporteur général vient de nous répondre avec humour que nous n'étions pas d'accord entre nous. Ces amendements diffèrent, comme tous ceux présentés en discussion commune. Sinon, ils seraient tous cosignés par l'ensemble des députés.
Ils méritent donc mieux que cette forme d'humour, que je peux cependant comprendre, surtout dans les moments d'euphorie que nous traversons collectivement.
Ce débat, qui est sérieux, ne doit pas être évacué. Des forces politiques très diverses s'interrogent en effet sur le quinquennat, bien que celui-ci ait été adopté par référendum. Cependant, madame la garde des sceaux, vous avez vous-même, avec raison, donné un avis défavorable à un amendement qui prévoyait de ne modifier que par référendum une mesure adoptée par référendum.
Or le Parlement réuni en congrès peut aussi modifier le quinquennat, s'il constate que celui-ci, en effaçant le Parlement, particulièrement l'Assemblée nationale, n'a pas modernisé la vie démocratique.
La réalité du quinquennat, tel qu'il a été testé depuis seize ans, c'est l'effacement de l'Assemblée nationale, dans un régime qui, dès son origine, était très présidentialiste.
Si je n'ai pas d'objection au régime présidentiel, j'en ai à l'égard du régime présidentialiste. Un régime présidentiel suppose un président très fort, aussi fort, parfois moins, que l'actuel Président de la République. Mais il a en face de lui un Parlement, et notamment une Assemblée nationale.
Dans un tel régime, on doit s'interroger sur la fonction de Premier ministre, avec l'évolution de l'implication quotidienne du chef de l'État, sur tous les sujets, y compris les plus anodins, même lorsque trois présidents de la République successifs ont affirmé qu'ils laisseraient leur Premier ministre gouverner. Dans les faits, le chef de l'État est conduit à s'impliquer et à s'exprimer sur chaque sujet, quasi quotidiennement.
On a transformé la fonction présidentielle, celle du Premier ministre et, malheureusement, celle de l'Assemblée nationale. On a abaissé sa capacité à équilibrer les pouvoirs face au Président de la République.
Ces amendements et ce débat sont si sérieux qu'il conviendra de les reprendre ici et face à la population.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LR et NG.
Monsieur le rapporteur général – j'insiste sur ce titre – , je vous prie de ne pas caricaturer le débat. Le mandat de huit ans n'a pas été défendu ici.
Les amendements que nous avons évoqués aujourd'hui concernent un mandat de sept ans, renouvelable ou non. Tel est le sujet sur lequel nous attendons vos réponses.
Ensuite, nous sommes dans une logique aparlementaire, où le Parlement est abaissé, notamment par le mandat de cinq ans du Président de la République.
Il est vrai, Mme la ministre l'a rappelé, qu'il a été abaissé à la suite d'un référendum. Mais celui-ci a été aggravé par la loi du 15 mai 2001, qui a pour effet de placer dans le calendrier les élections présidentielles avant les élections législatives. Nous devons en remercier M. Jospin, qui a pris cette initiative.
De fait, le la est donné par les élections présidentielles. Or le propre de ces élections est que le débat sur la personne dévore en quelque sorte celui sur le programme, lequel est logiquement associé à une élection telle celle des députés.
Sans doute, nous ne résoudrons pas la question à l'occasion de ce débat ; nous ne devons pas moins nous la poser. Y manquer trahirait un manque de confiance en notre institution, et ce serait admettre que les élections législatives sont secondes par rapport à l'élection présidentielle.
Ce week-end, à Dieppe, entre deux buts et deux baignades, je me suis replongé dans De l'esprit des lois, car c'est bien de la séparation des pouvoirs qu'il s'agit. Montesquieu explique que, en cas de confusion des pouvoirs législatif et exécutif, la loi n'est plus un obstacle à l'arbitraire du gouvernement.
Avec l'inversion du calendrier électoral et le quinquennat, le fait d'avoir renforcé le fait majoritaire et la pratique à laquelle nous assistons depuis un an aboutissent à une confusion des pouvoirs. Le Premier ministre est transformé en collaborateur ; l'ordre du jour de l'Assemblée nationale est défini par le Président de la République pour l'année qui vient ; à la faveur du Congrès de Versailles et de la réforme constitutionnelle, des amendements d'une nouvelle nature, d'origine présidentielle, voient même le jour.
Nous mesurons bien à quel point ce quinquennat et cette inversion du calendrier, surtout lorsqu'un phénomène de cour s'organise autour du Président de la République, contribuent à concentrer tous les pouvoirs sur un seul homme et, au bout du compte, à effacer et à affaiblir les contre-pouvoirs, notamment le pouvoir législatif, que nous représentons.
C'est pourquoi, monsieur le rapporteur général, nos amendements, qui sont sérieux, ne peuvent pas être transformés en folklore. Ils pointent du doigt une atteinte très grave au principe de séparation des pouvoirs, qui est de nature à affaiblir la démocratie.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et parmi les députés non inscrits.
Le septennat a été inventé en 1895, parce que certains espéraient le retour du roi. La durée la plus longue avait été choisie, en attendant que s'accomplisse la disparition de ce crétin d'Henri V, qui prétendait revenir avec le drapeau blanc, pour supplanter le drapeau bleu blanc rouge.
Le débat sur la durée du mandat est entièrement relatif à la nature de l'institution qu'on lui adjoint. Lorsque nous sommes passés de sept à cinq ans, d'aucuns prétendaient que ce serait une modernisation et qu'un recours plus régulier au peuple permettrait de contrôler ce qui se passait.
Très vite, on s'est aperçu qu'une telle cadence laissait le pouvoir à la seule chose qui soit permanente dans l'État, l'État lui-même, qui a fini par considérer qu'un ministre, un Président ou un Premier ministre étaient un embêtement provisoire, qu'il suffisait de stocker des dossiers pour les ressortir chaque fois que quelqu'un arrivait, tout neuf, au pouvoir, en se demandant que faire.
La durée ne se conçoit qu'en relation avec une institution. Pensant moderniser, nous sommes passés de sept à cinq, puis, avec le mandat de cinq ans, nous nous sommes aperçus que le délai n'était pas suffisant. Il faut un an, voire deux ans, pour s'installer, puis un an pour faire. Ne reste alors plus qu'un an ou deux pour s'en aller. On cherche maintenant des formules plus longues.
Le débat, sous cette forme, nous paraît sans objet. C'est de la Constitution dans son ensemble, et de la relation entre les différents pouvoirs qu'il faut débattre. Cela est l'objet d'une assemblée constituante plutôt que d'un règlement sur la durée.
C'est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons sur l'ensemble des amendements qui concernent la durée du mandat du Président de la République, quoique nous entendions d'une oreille très favorable tout ce qu'a dit notre collègue Sébastien Jumel.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Certains arguments de cette discussion m'ont un peu surpris. Il est question du régime présidentiel. Aux États-Unis, où un tel régime est en place, le mandat du président est de quatre ans et celui des membres de la Chambre des représentants, de deux ans. Dans notre pays, ces deux mandants s'élèvent à cinq ans chacun.
Par ailleurs, certains lient l'élection des députés à celle du Président de la République. Or, ce n'est qu'à la suite du décès du Président Pompidou qu'une élection a été organisée au mois de mai.
De plus, en 2002, l'élection présidentielle et les élections législatives n'ont coïncidé que grâce à la dissolution de M. Chirac.
Aujourd'hui, tout dans la Constitution permet au Président de la République de dissoudre l'Assemblée, …
… ce qui entraînerait une déconnexion parfaite entre les durées du mandat présidentiel et de celui des députés.
À l'inverse, si, par malheur, le président était empêché de poursuivre son mandat, nous aurions une élection présidentielle l'année suivante, puis un président pour cinq ans. Dès lors, le mandat présidentiel serait à nouveau déconnecté du mandat législatif.
À ma connaissance, la Constitution ne prévoit donc pas de lien automatique entre les élections présidentielle et législatives. Les deux peuvent parfaitement être déconnectées, notamment en cas de dissolution.
Le débat est sérieux, intéressant, passionnant même, mais un peu décalé par rapport à la réalité du mandat qui nous a été donné. Triennat, quadriennat, quinquennat, quinquennat sec, septennat sec, octennat renouvelable, on peut tout imaginer. Personne n'a raison, ni tort. En revanche, le peuple est appelé à arbitrer.
Et le peuple a récemment arbitré, en élisant un Président de la République qui n'avait pas prévu de modifier la nature profonde du régime.
Nous ne pouvons pas envisager de changer la durée du mandat de façon brute, sans réfléchir à la logique globale du système. Cette question a été clairement arbitrée il y a un an.
Dans le périmètre qui nous est donné pour la réforme de la Constitution, à laquelle, je n'en doute pas, nous finirons par procéder, figurent certains aménagements relatifs à l'instance parlementaire dans laquelle nous siégeons. Considérablement enrichis par les travaux menés par la commission, auxquels, chers collègues, je vous invite à vous intéresser, ils ont pour mission de faire avancer cette institution.
J'ai entendu M. le rapporteur général qualifier nos propositions de « cocasses ». L'affaiblissement croissant du rôle du Parlement me semble plus inquiétant que cocasse.
Mme la ministre a par ailleurs rappelé le score obtenu lors du référendum consacrant le principe du passage du septennat au quinquennat. Certes, en 2000, 73 % des Français se sont prononcés pour le quinquennat. Il est toutefois utile de rappeler, comme je l'ai fait dans ma précédente intervention, que le taux d'abstention s'élevait alors à 70 %.
Le septennat reviendrait sur le véritable déséquilibre des pouvoirs qui, depuis 2002, existe entre Gouvernement et Parlement.
Applaudissements parmi les députés non inscrits.
Les amendements nos 2235 et 2233 , ainsi que les amendements identiques nos 211 rectifié et 1795 , 911 deuxième rectification et 1288, nos 45 et 904, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 1423 .
Si, autrefois, le mandat présidentiel était renouvelable sans aucune restriction, la révision constitutionnelle de 2008 a établi une limite : le Président de la République ne peut effectuer plus de deux mandats consécutifs.
Notre amendement va plus loin puisqu'il propose de limiter à deux le nombre de mandats, qu'ils soient consécutifs ou non. Sous la Ve République, jamais un Président n'a jusqu'à présent fait plus de deux mandats.
Monsieur Ferrand, justifier la limitation dans le temps en faisant une analogie entre le mandat du Président de la République et celui des parlementaires, ce n'est pas sérieux quand on sait la charge et la responsabilité que représente le mandat présidentiel. Pour ma part, je ne ferai pas une telle comparaison.
Vous craignez, au travers de cet amendement, qu'une même personne assume la même charge pendant une durée excessive.
Inspiré par la victoire des Bleus, l'ancien Président, François Hollande, a tenu à souligner qu'il était possible de gagner deux fois, ce qui est une remarque pertinente.
Ce n'est pas nécessairement de manière consécutive, j'ai bien compris. On ne voit pas ce qui pourrait faire obstacle à ce qu'une même personne accomplisse deux mandats de cinq ans, d'autant qu'il est parfois nécessaire de disposer de temps pour agir de manière efficace – certains, sur d'autres bancs, l'ont dit dans une discussion précédente.
Si les Français estiment qu'une action doit être poursuivie sous la responsabilité de celui ou de celle qu'ils ont choisi à un moment donné, pourquoi l'empêcher en instaurant une mi-temps, une rupture intermédiaire que rien ne paraît justifier ? Avis défavorable.
Même avis. Il ne me semble pas nécessaire de durcir la règle actuelle.
Je tiens à mettre le rapporteur général face à une contradiction qu'il n'aura pas de difficulté à assumer au cours du débat. Selon lui, il appartient aux Français de décider si un mandat doit être prolongé ou pas. Or, pour les parlementaires, vous tenez un raisonnement qui est exactement inverse.
S'il appartient aux Français de décider de la prolongation d'un mandat, laissez-leur la possibilité de le faire pour tous les mandats ! Encore une fois, votre doctrine est à géométrie variable, ce qui en dit long sur votre volonté d'établir une hiérarchie entre les différents mandats, et, ce faisant, sur l'atteinte que vous portez à la séparation des pouvoirs à laquelle nous sommes attachés.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe FI.
Une subtilité a sans doute échappé au rapporteur. L'amendement supprime le mot « consécutifs ». Il vise notamment à éviter ce que nous avons vu en Russie : une personne peut exercer deux mandats, trouver une autre personne pour conserver le siège et revenir par la suite.
Il me semble assez sain que, pour une fonction aussi importante, les mandats soient limités à deux.
L'amendement no 1423 n'est pas adopté.
Par cet amendement, nous entendons défendre le référendum révocatoire à l'encontre du Président de la République, qui confère au peuple un droit de veto – c'est lui qui, en dernière instance, devrait être souverain.
Cette question est importante, car, pour les citoyens, la démocratie représentative consiste en rien de moins que d'accepter d'abandonner une part de leur souveraineté individuelle à quelqu'un d'autre. C'est un geste peu banal, à tel point que certains considèrent que la démocratie représentative ne peut pas être tout à fait une démocratie et en appellent à la démocratie directe.
Nous pensons que la complexité de nos sociétés et notre nombre impliquent une représentation. Mais, dès lors que le Président de la République est élu par des millions de citoyens, il ne peut pas exercer son mandat sans un contrôle du peuple. Notre proposition n'est pas seulement théorique ; elle est liée à la méfiance de plus en plus grande de millions de nos concitoyens à l'égard de la politique – méfiance qui a fort peu à voir, selon moi, avec les notes de frais de certains députés, comme on a essayé de le faire croire avec la loi pour la confiance dans la vie politique que nous avons votée l'été dernier, mais qui a tout à voir avec le respect de son mandat par le chef de l'État.
Nous avons connu un exemple récent d'un chef de l'État élu en assurant qu'il ne signerait pas un traité s'il n'était pas modifié – le TSCG, traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance – et qui a accepté de le signer tel quel, trahissant quelque part la souveraineté que le peuple lui avait confiée.
Afin de rétablir le lien de confiance entre le peuple souverain et ceux qu'il élit, à commencer par le Président de la République, nous proposons d'instaurer un référendum révocatoire. À mi-mandat, il suffirait que 10 % du corps électoral le demande pour que soit organisé un référendum qui pourrait aboutir à l'élection d'un nouveau Président de la République. De nombreuses démocraties le pratiquent – États-Unis, Canada, Venezuela du temps d'Hugo Chavez…
Nous devrions nous en inspirer, puisque nous sommes tous d'accord pour juger que le pouvoir présidentiel est trop important.
Avis défavorable également. Le référendum révocatoire, c'est l'élection présidentielle.
Madame la ministre, j'ai beaucoup de respect pour vous, mais votre réponse n'en est pas une. Vous ne pouvez pas dire que l'élection présidentielle est le référendum révocatoire.
Notre régime politique donne au Président de la République plus de pouvoir qu'à aucun autre monarque au monde. À lui seul, il représente la souveraineté de toute la Nation. Dans son cas, il n'existe pas de filtre comme à l'Assemblée nationale où chacun d'entre nous représente une part de souveraineté, mais où le collectif oblige – devrait obliger, si elle avait davantage de pouvoirs – à la prudence avant de s'abstraire de son mandat. Un Président de la République, lui, peut faire ce qu'il veut : il est le garant des traités, de l'indépendance de la Nation.
Pour éviter que cette charge ne se transforme en monarchie – évolution à laquelle nous assistons déjà – , il faut se doter de ce moyen de contrôle. Je fais confiance au peuple français. Cet outil ne sera pas utilisé à tort et à travers – il ne peut l'être qu'à partir de la moitié du mandat. Combien de dégâts sont causés aujourd'hui par ceux qui font fi du mandat qui leur a été confié, qui font l'inverse de ce pour quoi ils ont été élus ? Il est temps d'en finir avec cette monarchie qui étrangle progressivement notre démocratie.
L'amendement no 1126 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour soutenir l'amendement no 1128 .
Cet amendement concerne le filtre mis en place pour pouvoir être candidat à l'élection présidentielle.
On peut comprendre l'existence d'un filtre même lorsqu'on est opposé à la VeRépublique. Si l'on en croit les Mémoires d'Alain Peyrefitte, le général de Gaulle se serait contenté de cent signatures. Leur nombre a finalement été fixé à cinq cents. Cette exigence plombe et paralyse le début de campagne de tous les candidats qui ne disposent pas au départ des cinq cents signatures de grands élus, comme les grands partis politiques de la majorité ou de l'opposition.
Cette procédure n'a alors plus rien à voir avec l'esprit qui a présidé à son instauration – l'idée était d'empêcher quelqu'un comme Marcel Barbu de se présenter une deuxième fois ; étaient visés des personnages pleins d'une vérité personnelle qu'ils pensent valoir pour tout le monde.
Il y a six ans jour pour jour, le 16 juillet 2012, le Président de la République, François Hollande, annonçait l'installation d'une commission transpartisane présidée par Lionel Jospin. Cette commission avait proposé de soumettre toute candidature à l'élection présidentielle au recueil des signatures de 150 000 citoyens. Ce chiffre avait été déterminé en considérant le fait que les candidats qui ne sont pas majoritaires recueillent entre 200 000 et 600 000 voix – 150 000 paraissait un seuil raisonnable. Je l'ai déjà dit, même si la barre était fixée à 1 million, ce ne serait pas un problème, car la campagne commencerait par une campagne de mobilisation pour que les citoyens parrainent un candidat et s'engagent politiquement. Voilà le sens de cet amendement qui vient de loin, de 2012 et de l'équipe composite de la commission Jospin.
L'idée de M. Mélenchon est très bonne. Je voterai cet amendement, car j'ai expérimenté à deux reprises la quête de signatures. Remplacer les maires par les citoyens pour le parrainage serait le meilleur moyen d'éviter l'organisation de la sélection des candidats par les grands partis.
Que ce soit par le biais des banques ou des maires, des partis vermoulus ont tout fait pour empêcher le renouvellement politique. À défaut de cette mesure, il serait opportun de revoir les modalités de sélection des candidats à l'élection présidentielle.
Le contrôle des parrainages, c'est précisément ce que ne voulait pas le général de Gaulle. M. Mélenchon a raison, sa proposition permettrait de surmonter l'obstacle des parrainages qui, dans sa version actuelle, permet aux grands partis politiques qui détiennent tous les mandats dans les collectivités de choisir les candidats qui peuvent se présenter.
On le sait après une série de livres écrits par d'anciens responsables politiques, des opérations ont été menées pour donner des parrainages à certains afin qu'ils ne profitent pas à d'autres. C'est contraire à l'esprit de l'élection présidentielle telle qu'elle a lieu depuis 1962. Monsieur Mélenchon, le seuil initial était bien de cent signatures avant d'être porté à cinq cents par M. Giscard d'Estaing.
Je plaide sans trop d'espoir, mais je voudrais raconter à nos collègues qui ne le savent pas comment les choses se passent. Nous sommes quelques-uns ici à avoir connu cette épreuve, nous l'avons surmontée, mais il est indéniable que les grands partis politiques donnent des consignes.
Ce n'est pas une calomnie ni une invention. Les partis décident de ne pas donner de signature à untel. Le moyen de persuasion du signataire n'est pas toujours très idéologique : lorsque le président du conseil départemental appelle le maire d'une petite commune, celui-ci cède assez rapidement à cette affectueuse pression. L'exigence des cinq cents signatures est devenue un mode de contrôle des candidatures par les grands partis.
Ma proposition ne fait pas courir de risques à l'institution, ni à la dignité de la fonction en fixant un chiffre. Elle peut immédiatement être sous-amendée pour relever le seuil de 150 000 à 300 000. J'insiste sur le fait que cela amorcerait la dynamique citoyenne.
Enfin, pour faire écho à quelques interventions précédentes, vous devez savoir que, à l'heure qu'il est, quand nous échappons à la tyrannie des signatures automatiques, c'est pour subir celle de la menace bancaire. À moi qui vous parle, aucune banque ne veut actuellement prêter d'argent pour les élections européennes.
Certains auraient tort de s'en réjouir ; c'est un grand problème pour la démocratie. Que dois-je faire ? Je vous pose la question, madame la garde des sceaux, ce qui vous donnera l'occasion de nous aider.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
L'amendement no 1128 n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement no 2246 .
Chacun ici a compris combien nous sommes opposés au présidentialisme et combien nous pensons qu'il s'agit d'un poison pour notre démocratie, d'un facteur d'appauvrissement prononcé de sa vitalité. Nous ne voulons pas que l'élection présidentielle demeure l'élection reine dans notre pays, car elle s'accompagne de toute une série de démarches de nature plébiscitaire ou visant à accréditer la foi en une sorte d'homme ou de femme providentielle, ou de sauveur suprême. Au travers d'un certain nombre d'arguments avancés au cours de cette discussion, nous voyons bien où cela nous conduit : notre rôle se résume parfois ici à mettre en musique une partition déjà écrite ailleurs.
Pour notre part, nous envisageons les choses autrement. Nous contestons le pouvoir accru et exorbitant du Président de la République, qui tient aussi à son mode d'élection. Nous avons déjà fait des propositions en la matière et nous vous en présentons une nouvelle. Nous souhaitons atténuer les effets profondément nocifs de ce mode d'élection, les deux tours tels qu'ils sont actuellement organisés tendant à accroître les logiques de bipolarisation et à accentuer les mécanismes d'appauvrissement que j'ai évoqués.
Selon l'enquête « Comprendre le vote des Français » réalisée par Sopra Steria et publiée le 7 mai 2017, 31 % des abstentionnistes sondés ont déclaré avoir refusé de choisir entre deux candidats qu'ils rejetaient totalement, et 28 % d'entre eux estimaient en outre qu'aucun des deux ne correspondait à leurs idées. Ce refus de choisir révèle un problème de représentation et un manque de pluralisme. Afin de donner à nos concitoyens la possibilité de choisir le meilleur candidat à leurs yeux et de leur éviter de voter uniquement par défaut, nous proposons de permettre le maintien, au second tour de l'élection présidentielle, de tous les candidats ayant obtenu plus de 12,5 % des suffrages exprimés, comme lors des élections législatives.
Cette disposition rendra caduc le vote utile dès le premier tour et favorisera le pluralisme.
J'émets également un avis défavorable, car cela pourrait donner lieu à une triangulaire, voire à une quadrangulaire, au second tour de l'élection présidentielle. Selon moi, ce n'est pas souhaitable, et cela poserait une difficulté au regard de l'article 7 de la Constitution, qui précise : « Le Président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages exprimés. »
Pour vous répondre, monsieur le président Mélenchon, il me semble que le médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques pourra jouer un rôle utile dans la résolution des difficultés que vous avez évoquées. Il devrait être nommé prochainement.
L'amendement no 2246 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 1017 .
Pour certains, la dernière élection présidentielle a été le signe d'une victoire, celle du « nouveau monde » contre l'ancien, de ceux qui aiment à se penser comme progressistes et résolument modernes, car tournés vers le marché mondial, contre les autres, les conservateurs, les enracinés, ceux qui sont affectés par la « lèpre » du populisme, comme l'a déclaré Emmanuel Macron.
Pour ma part, je crois que cette élection a plutôt été marquée par une grande défaite : il y a eu 3 millions de bulletins blancs et 25 % d'abstention. Si l'on considère les choses avec lucidité, c'est bien le signe d'une grande défiance, d'une véritable remise en question de la classe politique et, plus largement, de nos institutions. Face à ce malaise, il existe deux options : ignorer que le lien entre les Français et leurs représentants ne cesse de se distendre, ou regarder cette réalité bien en face et la prendre en compte.
De ce point de vue, reconnaître une véritable valeur aux bulletins blancs, ce serait admettre que, si une partie des Français ne viennent plus voter et ne se sentent plus concernés, c'est non pas parce qu'ils préfèrent partir en vacances ou ont mieux à faire, mais parce qu'ils ne se sentent plus représentés. Lorsque ce sentiment est partagé par plus de 50 % des électeurs, il faut que cela soit pris en compte par nos institutions, car le Président doit être élu par tous les Français, et non seulement par une partie d'entre eux. Avant de donner le droit de vote aux personnes sous tutelle, il faudrait, selon moi, redonner leur voix à un plus grand nombre de Français, ce que permettrait la reconnaissance du vote blanc.
Défavorable également.
Il s'agit d'une disposition fondamentale, qui redonnerait la parole aux millions de Français qui ne trouvent, parmi les candidats, personne qui soit vraiment digne de leurs suffrages. Selon moi, cette mesure bouleverserait complètement notre système électoral, puisque nos concitoyens pourraient ainsi exprimer leur défiance sans déserter les urnes, ce qui obligerait nécessairement les partis politiques à renouveler leurs candidats et à changer de comportement. Cet amendement est non pas accessoire, mais fondamental. Il redonnerait de la vie à notre démocratie.
L'amendement no 1017 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Nicole Sanquer, pour soutenir l'amendement no 216 .
L'amendement no 216 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 1186 .
Cet amendement vise à répondre à un empêchement prévisible du Président de la République, par exemple en raison d'une maladie. Les risques qu'une telle situation se présente sont certes limités, mais elle peut se produire. Dans ce cas, des élections seraient organisées avant que la démission du Président ne prenne effet, et il n'y aurait pas d'intérim assuré par le président du Sénat, contrairement à ce que prévoit actuellement la Constitution.
L'amendement no 1186 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à ce que le Président de la République nomme le Premier ministre après que celui-ci aura été « investi de la confiance de l'Assemblée nationale par scrutin public et à la majorité absolue des députés ». En effet, l'article 20 de la Constitution dispose que le Gouvernement est responsable devant le Parlement. Il paraît donc logique aux auteurs de cet amendement que le Premier ministre soit investi par l'Assemblée nationale avant que sa nomination ne soit confirmée par le Président de la République.
Dans la Constitution française, l'autorité politique est fondée sur le principe de responsabilité : le Gouvernement est responsable devant le Parlement. Pour sa part, le Président de la République, qui est, lui, garant des institutions, est, au sens étymologique du terme, politiquement irresponsable devant le Parlement.
Cet amendement vise donc tout simplement à mieux faire correspondre la Constitution française au principe de responsabilité qui la sous-tend.
Pouvons-nous considérer, madame Dumont, que vous avez également défendu l'amendement no 1961 , dont le dispositif est très proche ?
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 2234 .
L'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose : « La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont le droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation. » Nous savons à quel point la loi est le fruit du travail du Gouvernement, en particulier du Premier ministre, qui est, avec les projets de loi, à l'initiative de la quasi-totalité des textes. Or le Premier ministre ne tire aucune légitimité du peuple, puisqu'il est nommé par le seul fait du prince. C'est pourquoi nous proposons, par cet amendement, que sa nomination soit soumise à l'approbation de l'Assemblée nationale.
J'ajoute que, en un an d'exercice du pouvoir, nous avons été témoins à plusieurs reprises d'actes symboliquement forts qui transforment le Premier ministre en collaborateur du Président de la République. Ainsi, nous considérons que la réunion du Congrès à Versailles par le Président de la République la veille de la déclaration de politique générale a constitué un affaiblissement sans précédent de la fonction de Premier ministre.
Dans ce cas, il fallait déposer une motion de censure ! La censure est faite pour cela !
De la même manière, la réunion du Congrès par le Président de la République la veille de la présentation par le Premier ministre et la garde des sceaux d'un projet de révision constitutionnelle a représenté un affadissement du pouvoir du Premier ministre et du Gouvernement. Notre proposition vise donc à renforcer la légitimité du Premier ministre et, par là même, celle du Parlement.
Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements en discussion commune ?
La commission a émis un avis défavorable, pour toute une série de raisons. Afin de ne pas présenter un argumentaire trop long, je n'en retiendrai que deux, qui me paraissent les plus éloquentes.
Premièrement, le Premier ministre tire la légitimité de son action à la fois de sa nomination par le Président de la République et de la confiance qui lui est accordée ou non par le Parlement. Il est parfaitement loisible à l'Assemblée nationale de faire tomber le Gouvernement en votant une motion de censure.
Deuxièmement, vous avez évoqué, de notre point de vue, une hypothèse d'école. Si l'on avait suivi votre raisonnement, cela aurait conduit M. Jean-Marc Ayrault et M. Édouard Philippe – pour ne prendre que les deux exemples les plus récents – à demander la confiance d'une assemblée « expirante », si je puis dire, dont les membres devaient se présenter de nouveau devant les électrices et les électeurs. Or il y a un intérêt à ce que le Premier ministre entre en fonction dès sa nomination. Si le Président de la République nouvellement élu ne nommait pas immédiatement un Premier ministre, il y aurait, en quelque sorte, une vacance du pouvoir, pendant toute la période qui sépare son élection de celle des députés. On peut imaginer, je le répète, que l'assemblée finissante n'accorderait jamais sa confiance au Premier ministre.
Avis défavorable également. Si nous adoptions l'un de ces amendements, nous toucherions fondamentalement, me semble-t-il, à l'équilibre de nos institutions telles qu'elles ont été forgées en 1958.
J'ai le sentiment que nous reviendrions d'ailleurs, avec les dispositions que vous proposez, à une sorte de IVe République. Il y avait alors, vous vous en souvenez, d'abord un gouvernement désigné, puis un gouvernement investi. Et, ce système ne fonctionnant pas très bien, on en était même venu à avoir un gouvernement pressenti avant d'avoir un gouvernement désigné ! Ces trois étapes ne contribuaient guère, selon moi, à la clarté et à la lisibilité de nos processus institutionnels.
En application de l'article 8 de la Constitution, le Président de la République nomme le Premier ministre, comme l'a rappelé le rapporteur général. Ce régime est clair, et je ne pense pas qu'il soit utile de l'altérer par l'un des amendements que vous avez déposés.
Dans notre esprit, il s'agit évidemment de solliciter l'avis non pas de la majorité « expirante », pour reprendre l'expression du rapporteur général, mais bien celui de la nouvelle assemblée.
Le cas invoqué par le rapporteur général, à savoir la formation d'un gouvernement avant même la tenue des élections législatives, constitue d'ailleurs, d'une certaine manière, un détournement de procédure. Dans ce cas, le Président de la République forme en effet ce que l'on peut appeler un « gouvernement de campagne », dont la seule fonction au cours de la période précédant les élections législatives est de mettre la compétence et les moyens de l'État, ainsi que la légitimité des différents ministres nommés, au service d'un unique objectif : faire élire une majorité présidentielle. En démocratie, cette manière de procéder est, vous en conviendrez, à la limite de l'acceptable au regard des principes fondamentaux.
Madame la ministre, je conviens qu'il faut ménager l'équilibre de nos institutions, ainsi que leur stabilité, mais il est pour le moins cocasse d'entendre un membre du Gouvernement invoquer cet argument. À quoi tend le projet de loi constitutionnelle, en effet, sinon à déstabiliser nos institutions, qui sont déjà fragiles ?
L'instauration d'une dose de proportionnelle dans le système majoritaire à deux tours leur fera courir un risque réel. Il ressort en effet des simulations effectuées par Cédric Villani que si l'on appliquait ce système à l'assemblée actuelle, le groupe La République en marche et celui du Mouvement démocrate et apparentés perdraient la majorité dont ils disposent actuellement.
Dès lors, il me semble paradoxal de vous entendre plaider pour la stabilité institutionnelle, puisque, je le répète, la réforme déséquilibrera durablement nos institutions et que vous apprêtez à affaiblir le Parlement, qui sera bientôt réduit à portion congrue. Pour le moment, nous n'avons entendu aucun argument tendant à nous prouver le contraire.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement no 387 .
Par cet amendement, nous vous proposons de revenir sur les engagements de campagne du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, et du Président de la République.
Dans le pacte écologique de 2006, Nicolas Hulot avait insisté sur la nécessité de gouverner non seulement dans un temps court – ce que fait le Gouvernement, quel que soit son bord politique – mais aussi dans une vision longue, qui intègre les enjeux du développement durable. Il proposait pour ce faire la création d'un poste de vice-Premier ministre.
Aux termes des propos tenus fin mai 2017 par Nicolas Hulot, il semblerait qu'Emmanuel Macron n'ait pas pu créer ce poste qu'il souhaitait lui confier, parce que celui-ci n'est pas prévu par la Constitution.
La mission du vice-Premier ministre ne serait pas de s'opposer au Premier ministre ni de le contredire, mais d'apporter une vision à long terme, qui permettrait peut-être de procéder à certains arbitrages. Chacun a des exemples en tête. Pour n'en citer qu'un, je rappelle la réussite qu'a constitué l'abandon du projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes.
Je pense aussi que certains échecs auraient pu être évités grâce à cette fonction, puisqu'il arrive qu'un gain immédiat se traduise par une perte à long terme.
Voilà pourquoi je propose, par cet amendement cosigné par de nombreux collègues, de créer cette fonction de vice-Premier ministre.
N'a-t-on pas déjà un vice-Premier ministre en la personne de Christophe Castaner ? Je ne suis pas sûr qu'il nous en faille un autre !
Avis défavorable. Une telle création est inutile. Le rôle que joue Nicolas Hulot en tant que ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, me semble atteindre l'objectif visé.
Madame la ministre, le rôle joué par Nicolas Hulot est celui que joue une personnalité…
… qui, hélas, ne sera pas éternellement ministre, et qui a été nommée ministre d'État sur la proposition du Premier ministre, approuvée par le Président de la République. Un autre Premier ministre ou un autre Président de la République pourraient fort bien juger secondaires les enjeux du développement durable, de la transition écologique ou de l'environnement, assigner au ministre qui en est chargé la vingtième place dans le rang protocolaire et réduire son ministère à portion congrue.
C'est pourquoi, dans la continuité des mesures votées à l'article 1er, nous proposons – selon le principe bien connu qu'il vaut mieux prévoir à la fois ceinture et bretelles – de garantir qu'au-delà du gouvernement actuel, dont l'engagement ne saurait être mis en doute, puisque son action est mesurable, la France épousera une trajectoire de long terme et constituera à cet égard un phare aux yeux du monde. Notre pays, qui vient de remporter la coupe du monde de football, doit aussi remporter celle de l'écologie et de l'environnement.
L'amendement no 387 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Nicole Sanquer, pour soutenir l'amendement no 863 .
L'amendement no 863 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Voici un amendement qui peut être adopté par tous les députés, puisqu'il vise à imposer la parité dans nos institutions. Celle-ci est plus qu'un symbole, puisqu'elle concrétise l'égalité et témoigne qu'on prend en considération les problèmes de l'ensemble des citoyens.
La Constitution doit garantir l'égalité inscrite dans la devise de la République. Certes, depuis plusieurs mandats, la pratique consistant à former un gouvernement paritaire s'est consolidée. Nous saluons cette avancée nécessaire, en regrettant toutefois que les ministères régaliens soient encore trop régulièrement réservés aux hommes.
Cependant, parce qu'aucune règle ne garantit que la parité entre femmes et hommes perdurera au plus haut niveau institutionnel, nous proposons de graver dans le marbre de la Constitution l'obligation que le Gouvernement, dans sa composition, respecte l'égalité républicaine entre les sexes et assure la représentation de chacun d'eux dans l'exercice du pouvoir exécutif.
De la même façon que dans l'ensemble des institutions inscrites dans notre loi fondamentale, l'écart entre le nombre de femmes et d'hommes nommés au Gouvernement ne devrait pas être supérieur à un.
Le Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes recommande cette mesure, qui offre une occasion de faire encore avancer l'égalité dans notre Constitution.
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l'amendement no 1424 .
Je souscris à cette analyse. Bien sûr, la parité s'impose partout – dans les mairies, les conseils départementaux, les conseils régionaux, les assemblées parlementaires – parce que les lois la garantissent.
Quant aux gouvernements, les derniers ont été vertueux. Le Président François Hollande comme le Président actuel ont eu le souci de la parité. Cependant, dans les derniers gouvernements, on ne peut parler de totale équité entre les hommes et les femmes.
Nous saisissons donc l'occasion de la réforme constitutionnelle pour proposer d'inscrire dans l'article 8 l'obligation de la parité dans l'exécutif, mesure qui ne peut être inscrite que dans la Constitution. Nous enverrions un signal fort en affirmant qu'au XXIe siècle, la parité est obligatoire au sein du Gouvernement.
J'émets également un avis défavorable. Nous partageons la volonté, inscrite à l'article 1er de la Constitution, que femmes et hommes aient également accès aux mandats électoraux et aux fonctions électives, mais la parité doit surtout être une pratique effective. C'est le cas aujourd'hui, vous l'avez souligné, madame Untermaier, y compris dans les fonctions régaliennes, puisque Mme Parly et moi-même dialoguons avec M. Le Drian et M. Collomb.
Nous avons encore beaucoup à progresser en matière de parité, car il y a des sujets dont on ne parle pas. Tout le monde s'intéresse aujourd'hui au football. Dans ce sport, le rapport entre le salaire de la meilleure joueuse et du meilleur joueur est d'un à 500. Il faudrait peut-être s'y intéresser un jour.
On ne parle pas non plus de la manière dont s'effectuent, à la discrétion du Gouvernement, les nominations en Conseil des ministres qui dépendent uniquement du Président de la République et du Premier ministre. Est-il digne que les femmes occupent seulement 20 % des emplois les plus importants de la fonction publique ?
Je veux bien qu'on parle toujours du monde politique. C'est très bien, mais parlons aussi du reste, parce que de nos jours, le vrai pouvoir est technocratique. Dans ce domaine, je rappelle que le rapport entre la place des femmes et celle des hommes varie d'un à cinq. Que faites-vous ? Allons-nous nous contenter de manier le verbe dans la sphère politique ou allons-nous aussi agir dans les autres domaines ?
Et vous, qu'avez-vous fait dans ce domaine ?
Je n'ai pas bien compris le sens de votre intervention, monsieur Le Fur. Les travers que vous regrettez n'empêchent nullement l'obligation constitutionnelle de former un gouvernement paritaire. Nous sommes actuellement gouvernés par des démocrates vertueux qui s'exercent à la parité, mais la situation peut s'inverser un jour ou l'autre. Or la Constitution n'impose à l'exécutif aucune obligation de parité comparable à celle qui s'applique aux assemblées ou aux conseils régionaux ou départementaux. Nous avons aujourd'hui une occasion unique d'imposer la parité au sein du Gouvernement.
Le Gouvernement a créé une obligation légale aux termes de laquelle la parité s'applique dans toutes les assemblées communales, départementales, régionales ou nationale. Fort bien, mais pourquoi ne se l'applique-t-il pas à lui-même, tant dans un souci de parallélisme que par adhésion à un principe auquel nous sommes profondément attachés ? Aujourd'hui, la parité s'applique dans les faits, mais rien ne garantit que ce sera encore le cas demain. C'est pourquoi, hors de tout mandat impératif dont on sait qu'il est interdit par la Constitution, je vous invite à voter les amendements.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 67 |
Nombre de suffrages exprimés | 66 |
Majorité absolue | 34 |
Pour l'adoption | 23 |
contre | 43 |
L'amendement no 1424 n'est pas adopté.
L'amendement no 660 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marine Le Pen, pour soutenir l'amendement no 1157 .
De manière plus prosaïque, cet amendement vise à combler une lacune de notre droit constitutionnel, laquelle, loin d'être nouvelle, est fort ancienne. Une jurisprudence du Conseil constitutionnel semble fournir une réponse, mais on a pu constater récemment que cette instance peut changer d'avis.
Nous sollicitons l'inscription dans la Constitution de l'obligation de posséder la nationalité française pour être Premier ministre ou ministre.
On peut s'étonner qu'une telle disposition n'existe pas dans notre Constitution. En tout cas, il est particulièrement utile de l'y faire entrer au moment où certains fédéralistes proposent la nomination de ministres communs entre États membres de l'Union européenne, notamment dans le domaine économique ou budgétaire.
Je ne souhaite pas que notre pays voie arriver un Allemand comme ministre du budget, même si cela plairait sans doute à certains Allemands qui se plaisent à venir nous dicter notre loi.
Voilà un amendement simple et logique, dont certaines évolutions rendent l'adoption nécessaire.
Applaudissements parmi les députés non-inscrits.
À dix-huit heures quinze, Mme Carole Bureau-Bonnard remplace M. François de Rugy au fauteuil de la présidence.
L'avis de la commission est défavorable à cet amendement. Je ressens un peu de tristesse au regard de notre histoire : la France a eu de grands ministres d'origine étrangère…
… et même étrangers, qui ont contribué, avant la République, à ce que notre pays devienne ce qu'il est.
C'est très juste, Mazarin fait partie de ces étrangers qui ont exercé, dans notre pays, des responsabilités ministérielles – quoique ce ne soit pas la plus républicaine de toutes les références.
Sourires et exclamations sur divers bancs.
En plein débat sur la révision constitutionnelle, c'est une vraie révélation !
Quoi qu'il en soit, le Conseil constitutionnel a explicitement répondu à cette question le 5 mai 1998, en fermant la porte à la possibilité de nommer une personne étrangère à « des fonctions inséparables de l'exercice de la souveraineté nationale ».
Dans la pratique, si un Premier ministre souhaite un jour nommer un ministre étranger, il procédera à sa naturalisation par décret après avis du Conseil d'État. Il s'agit donc là d'une pure hypothèse d'école. C'est pourquoi votre amendement n'a pas convaincu la commission, madame la députée.
Comme l'a dit M. le rapporteur général, la France n'a pas commencé avec la République : cela mériterait un long débat. Sans entrer dans cette question, je me bornerai à dire que je suis d'accord avec M. le rapporteur général. Avis défavorable.
Écrire dans la Constitution que le Premier ministre et les ministres doivent être français : on n'y avait pas pensé ! Il me vient à l'esprit, tout d'abord, qu'il peut y avoir des ministres ayant une double nationalité, et personne n'a observé que ce soit au préjudice de l'État ou de la vie du pays.
Ensuite, j'imagine que si une personne n'ayant pas la nationalité française entre dans un gouvernement français, c'est pour le bien commun.
Mme Le Pen a pris l'exemple d'un Allemand qui deviendrait ministre de la République française. Pour ma part, ce n'est pas le fait qu'il soit allemand qui me poserait problème, c'est ce qu'il viendrait faire au Gouvernement ! Il est clair que s'il s'agit du docteur Schäuble, je n'en voudrais pas, mais si c'est Oskar Lafontaine, cela ne me dérangerait pas.
Tout cela pour dire, madame Le Pen, que votre proposition me paraît complètement loufoque. En effet, supposez que le cas se présente : où serait le problème ? Dites-nous où serait le problème ! Croyez-vous qu'un Premier ministre, qu'un Président de la République, désigneraient un ministre pour faire autre chose qu'oeuvrer au bien commun ? Quelle raison auriez-vous de le soupçonner d'en être incapable ? Vous n'en avez pas !
Dans la tradition révolutionnaire de 1789 – j'admets que cela ne vous concerne pas, que ce n'est pas votre source idéologique – on trouvait bien d'élire des étrangers à la députation – je pense notamment à Anarchasis Cloots, qui n'était pas français. Encore aujourd'hui, plusieurs membres de notre assemblée se disent que ce serait peut-être une bonne idée.
En définitive, les êtres humains sont semblables ; ce qui compte, pour siéger dans une assemblée ou un gouvernement, c'est ce qui les différencie politiquement.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Ce problème n'est pas anodin. Encore une fois, monsieur Mélenchon, vous le traitez de manière approximative : vous oubliez que la Révolution française a été la période de l'histoire la plus hostile aux étrangers. Il est vrai qu'Anarchasis Cloots a été fait député de la Convention parce que ses idées correspondaient à celles du régime conventionnel, mais à partir de 1793, il n'y eut plus d'étrangers dans les assemblées françaises. Vous savez très bien que les régimes révolutionnaires se sont tournés totalement contre l'étranger, à quelques exceptions près – je crois que cela concerne cinq députés en tout.
C'est déjà pas mal ! Combien y a-t-il d'étrangers dans notre assemblée ? Aucun !
Je pourrais vous donner leurs noms : Anarchasis Cloots est le plus célèbre.
Tout au long du XIXe siècle, les responsabilités publiques furent interdites à ceux qui avaient une double nationalité – non seulement les ministres, mais aussi les ambassadeurs ou les militaires, contrairement à ce qui se passait avant 1789, où l'armée était si favorable aux étrangers que des généraux de l'armée française pouvaient ne pas être français.
Cet amendement n'est donc pas sans intérêt. Vous avez dit, monsieur Mélenchon, que vous « imaginiez » qu'un ministre étranger oeuvrerait pour le bien commun. Mais il ne s'agit pas là d'imaginer quoi que ce soit, excusez-moi ! La double nationalité pose en effet problème vis-à-vis de la défense nationale et des affaires étrangères.
Je vous le dis d'autant plus facilement que j'ai eu une franche discussion avec le Premier ministre israélien à ce sujet. Vous savez en effet qu'en Israël, de très nombreux citoyens ont la double nationalité.
Je trouve tout à fait inadmissible qu'un binational obtienne des fonctions gouvernementales impliquant un pouvoir de direction sur la défense nationale ou les affaires étrangères. Je ne mets pas en cause les binationaux, mais il arrivera forcément un moment où ils auront à choisir entre les deux pays en question – cela vaut aussi pour les députés, mais passons – dont les intérêts ne sont pas nécessairement convergents.
C'est une vraie question qu'a posée Mme Le Pen, ne vous y trompez pas : elle nous rattrapera.
Applaudissements parmi les députés non inscrits.
C'est un député à la double nationalité qui va répondre à M. Goasguen, puisqu'il se trouve que je suis à la fois Français et Cubain. Je ne vois pas en quoi ma nationalité cubaine ferait courir un risque à la France dans l'exercice de mon mandat de député français ! Je trouve votre critique extrêmement imprudente. A contrario, on a vu des députés et des ministres ayant la seule nationalité française entretenir des relations très troubles avec des puissances étrangères, notamment parmi les ex-républiques soviétiques. Ces personnes étaient d'ailleurs plutôt dans votre camp politique : je n'y reviendrai pas. La question n'est pas d'être binational ou non : la question, c'est les valeurs que nous portons.
J'en profite pour rendre hommage à Severiano de Heredia, fils d'esclave, né à Cuba, mulâtre, arrivé en France à l'âge de dix ans et naturalisé à l'âge de quarante-quatre ans, en 1870.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Il fut le premier maire de Paris – plus exactement, le premier président du conseil municipal de Paris. Ministre des travaux publics, ce visionnaire fut le premier à promouvoir la voiture électrique. Voilà la réalité, voilà ce que sont ceux qui sont nés avec une autre nationalité que la nôtre, qui ne nient pas leur origines, …
Mais vous êtes vous-mêmes les premiers à critiquer Meyer Habib en raison de sa double nationalité !
… et qui font la grandeur de la France – jusqu'à mourir pour elle. Voilà pourquoi ce que vous proposez est honteux, madame Le Pen.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM ainsi que sur les bancs des groupes NG, GDR et FI.
Pour contribuer à ce débat passionnant, je voudrais dire que si je ne suis pas binational, je suis encore un peu plus : j'ai une fille binationale et une fille trinationale. Je me sens donc concerné.
J'invite notre assemblée à ne pas voir le problème par le petit bout de la lorgnette.
La difficulté soulevée par M. Goasguen n'est pas négligeable, mais comme l'a rappelé M. Lambert, il n'est pas besoin d'être binational pour avoir des conflits d'intérêts, faire des erreurs, être un voleur, un bandit, et ne pas servir le bien commun.
Il ne faut pas oublier que la double nationalité, en particulier dans le cadre de la construction européenne, est une grande richesse pour l'individu, de même que la triple nationalité.
Comme nous venons de le rappeler, il y a eu parmi nos responsables politiques de ces gens qui, comme je le dis parfois de mes filles, ont la tête et le coeur un peu plus larges que le mien.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Chacun a raconté sa petite histoire personnelle, qui n'intéresse absolument personne.
Alors que nous avions posé une question de principe, nous en arrivons aux détails de la vie de tel ou tel, de ses enfants binationaux ou trinationaux, ce dont nous nous moquons totalement.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Sans compter que vous mélangez le problème que nous abordons par cet amendement avec la question de la naturalisation. Vous savez pourtant pertinemment que nous défendons la naturalisation : nous comptons même, d'ailleurs, lui rendre du contenu en la fondant sur le mérite – elle est en effet hélas, par habitude, devenue automatique.
Je note qu'un certain nombre de personnes dans cet hémicycle, lorsque nous exigeons que les membres du Gouvernement aient la nationalité française, trouvent mille excuses pour ne pas réellement examiner la question, au prétexte que ce débat serait ridicule, folklorique, dérisoire, comme si, après tout, le drapeau français ne devait être brandi que lors des matchs de football !
Exclamations sur divers bancs.
Apprenez donc à brandir le drapeau français, à défendre la nationalité française, à en être fier en toutes circonstances, chaque jour de l'année, tout au long de votre vie, et non pas seulement lorsque cela peut vous apporter des suffrages.
Monsieur Lambert, est-ce qu'à Cuba, on se comporte ainsi dans l'hémicycle ? Essayons de ne pas le faire ici, en France !
Je considère qu'il est essentiel que les ministres aient la nationalité française.
Ceux qui ont des liens avec le Kazakhstan l'ont, la nationalité française !
Exclamations sur divers bancs.
N'oubliez pas de respirer entre chaque invective, monsieur Lambert !
Je reprends : cet amendement est essentiel, et la question soulevée par M. Goasguen, qui est différente, est importante également. Je vous rappelle que dans de nombreuses démocraties, notamment de grandes démocraties que vous admirez énormément, il y a des exigences de nationalité et des interdictions de double nationalité pour ceux qui jouent un rôle fondamental dans la direction de la nation, y compris les hauts fonctionnaires. Il y a même des exigences de ce type pour le président : il doit avoir la nationalité de ce pays par la naissance, il doit la tenir de parents qui eux-mêmes l'avaient.
Je regrette que ces questions importantes soient considérées comme dérisoires par des interventions tout à fait décalées – je dirais même : déplacées.
Applaudissements parmi les députés non inscrits.
L'amendement no 1157 n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-huit heures vingt-cinq, est reprise à dix-huit heures trente-cinq.
Rappel au règlement
Pouvez-vous, monsieur le rapporteur général, madame la présidente, nous en dire un peu plus sur l'organisation des débats ? Se poursuivront-ils la semaine prochaine ? Envisage-t-on d'ouvrir des séances supplémentaires ce week-end ? Nous demandons à en être informés, de sorte que nous puissions nous organiser pour être présents quand le débat mérite notre intervention.
La conférence des présidents, qui doit se réunir demain à dix heures, est le lieu de l'organisation des débats.
La parole est à M. le rapporteur général.
Comme vous le savez tous, les présidents de groupe participent à cette conférence.
Sur l'amendement no 2236 , je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements, nos 2236 et 1963 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 2236 .
J'espère que le sérieux avec lequel nous participons aux débats vous permettra d'apprécier la cohérence de nos amendements, même si celle-ci ne se dévoile qu'au fur et à mesure de leur examen.
Parce que nous pensons que le Président de la République dispose d'un pouvoir excessif, nous saisissons toutes les occasions de le limiter, notamment pour ce qui concerne ses compétences exorbitantes du droit commun. Parce que nous pensons qu'au fil des législatures, le Parlement voit ses pouvoirs affaiblis, affadis, diminués, nous ferons au cours du débat des propositions visant à les renforcer.
Nous pensons que le Gouvernement et ses membres, notamment le Premier ministre, voient la pratique du pouvoir les réduire peu à peu à un rôle subalterne, au-delà même de ce que la Constitution permet, ravalés qu'ils sont au rang de simples collaborateurs. Ce qui faisait hurler du temps du président Sarkozy est aujourd'hui pratiquement entré dans les moeurs.
C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement, qui vise à ce que le Premier ministre préside le Conseil des ministres, afin qu'il soit en mesure de diriger la politique de la Nation, le Président de la République ayant quant à lui le rôle d'assurer la continuité de l'État, d'être le garant des institutions et le chef des armées, ce qui est déjà beaucoup.
La parole est à Mme Laurence Dumont, pour soutenir l'amendement no 1963 .
Je serai brève, mon amendement étant quasiment identique au précédent en termes d'objectifs et n'en différant qu'à la marge s'agissant de sa rédaction.
Il s'agit d'être cohérent avec l'article 20 de la Constitution, selon lequel le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation. Il est donc logique de corriger l'article 9 afin que ce soit le Premier ministre qui préside le Conseil des ministres, sauf en cas d'empêchement. Je n'ai rien à ajouter aux arguments qui viennent d'être développés.
Vous avez été clair, monsieur Jumel : la Ve République donnant selon vous trop de pouvoir au Président de la République, vous saisissez toutes les occasions d'en proposer la limitation. Nous ne partageons pas votre point de vue, et notre projet ne vise pas à modifier en profondeur ni à dénaturer la Ve République. C'est pourquoi l'avis défavorable émis en commission est maintenu.
J'émets également un avis franchement défavorable. Les pouvoirs propres du Président de la République sont d'une importance indéniable, mais il ne les utilise pas tous les jours. Dans la pratique, son pouvoir véritable réside dans la présidence du Conseil des ministres, notamment dans la fixation de son ordre du jour.
Nous ne pouvons pas vous suivre sur ce point, monsieur Jumel. Le but de nos travaux n'est aucunement d'abaisser le Président de la République, mais de rehausser le Parlement. Notre but n'est pas de réduire des compétences présidentielles qui ont été clairement énoncées dès 1958, mais de permettre au Parlement de retrouver la place qui était la sienne et qu'il a perdue, pour de multiples raisons sur lesquelles nous aurons l'occasion de revenir.
Nous voterons donc contre votre amendement.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 58 |
Nombre de suffrages exprimés | 54 |
Majorité absolue | 28 |
Pour l'adoption | 7 |
contre | 47 |
L'amendement no 2236 n'est pas adopté.
L'amendement no 1963 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement no 2342 .
Dans le souci de restreindre l'omnipotence présidentielle, nous souhaitons encadrer la possibilité pour le Président de la République de demander une seconde délibération sur des lois définitivement adoptées par le Parlement. Ce pouvoir exorbitant contrevient en effet au principe d'équilibre des pouvoirs.
Certes, l'exercice de cette compétence propre au Président de la République est en pratique exceptionnelle – le Président de la République a demandé par trois fois une nouvelle délibération de la loi – , mais si dans deux cas cette demande était justifiée par le souci de remplacer les articles déclarés contraires à la Constitution, la Constitution ne précise pas explicitement quels motifs justifient le recours à cette compétence.
C'est la raison pour laquelle nous proposons la rédaction suivante de l'article 10 de la Constitution : « Dans le cas où le Conseil constitutionnel déclare que la loi dont il est saisi contient une disposition contraire à la Constitution sans constater en même temps qu'elle est inséparable de l'ensemble de cette loi, le Président de la République peut, soit promulguer la loi à l'exception de cette disposition, soit demander aux assemblées parlementaires une nouvelle lecture. » Cette formulation, qui reprend les termes du premier alinéa de l'article 23 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, permet d'exclure tout risque de détournement de cette procédure.
Défavorable, d'autant que votre exposé des motifs évoque un « pouvoir exorbitant » du Président de la République. Ce pouvoir prétendument exorbitant ne l'est pas tant que cela puisqu'il est, je le rappelle, soumis à contreseing.
L'amendement no 2342 n'est pas adopté.
Cet amendement propose de remanier profondément l'article 11 de notre Constitution afin d'élargir le champ du référendum, mais aussi de l'initiative de la procédure référendaire. Il sera complété par l'amendement no 1200 relatif au référendum d'initiative populaire, dont nous discuterons plus tard les modalités.
La démocratie est aujourd'hui assez mûre pour que l'article 11 vise l'ensemble des politiques publiques et des questions qui se posent au peuple. Le précédent de 1962 avait été admis par le Président Mitterrand comme une source possible de demande de référendum, et dès lors que l'article 89 vise à la modification de la Constitution, l'article 11 élargi permettrait au peuple de se saisir de bon nombre de questions économiques, sociales, sociétales ou même européennes, ce qui renforcerait la souveraineté du peuple et la démocratie.
Applaudissements parmi les députés non inscrits.
Au fond, la philosophie de cet amendement consiste à multiplier les possibilités de référendum, tantôt à l'initiative du Président de la République sur une loi en attente de promulgation ou sur toute orientation qu'il lui paraîtrait utile de soumettre à référendum, tantôt à l'initiative des parlementaires sur une proposition de loi ou tout sujet relatif à l'Union européenne.
La commission a émis un avis défavorable, que je réitère aujourd'hui, car il ne s'agit pas de priver de sa portée la démocratie représentative que nous incarnons ici, toutes et tous. Le référendum a du sens sur des sujets fondamentaux, mais il se prête assez mal, convenons-en, aux sujets touffus et extrêmement techniques que nous abordons parfois ici.
De surcroît, le Président de la République a un moyen assez simple de permettre au peuple de s'exprimer en cas de désaccord important – hypothèse que vous retenez – entre le Parlement et lui-même : cela s'appelle la dissolution, moyen qui permet au peuple de se choisir de nouveaux représentants en cas de désaccord criant entre l'exécutif et le législatif. Voilà pourquoi l'avis est défavorable.
C'est la deuxième fois dans la même journée que la dissolution est évoquée…
Avis identique : l'ouverture sans limite du référendum, y compris sur des questions très sensibles, risquerait d'entraîner des divisions qui ne sont pas nécessairement utiles au sein de la société française.
L'amendement no 1151 n'est pas adopté.
La parole est à M. Nicolas Dupont-Aignan, pour soutenir l'amendement no 189 .
Je reviens sur la question du référendum. Le présent amendement, comme celui présenté par M. Louis Aliot, propose dans un premier temps d'ouvrir le champ de l'article 11 en libérant complètement l'usage du référendum par le Président de la République. Il propose ensuite de créer un vrai référendum d'initiative populaire, c'est-à-dire de faire sauter le verrou des 185 parlementaires mis en place lors de la réforme constitutionnelle qui a créé le référendum d'initiative partagée.
J'ai écouté attentivement les uns et les autres pendant ce débat : il a beaucoup été question de la crise de la démocratie. On a beaucoup parlé de déséquilibre entre le Président de la République et le Parlement. Mais le général de Gaulle, qui avait donné beaucoup de pouvoirs au Président de la République, avait prévu le référendum comme contrepoids ; il est d'ailleurs parti sur un référendum perdu. La grande différence avec ses successeurs, c'est que ces derniers ont pris le pouvoir mais ont abandonné la responsabilité devant le peuple. Pire, ils ont trahi les votes du peuple par référendum !
Si, d'un côté, il faut maintenir les pouvoirs du président – il ne s'agit pas, en tout cas dans mon esprit, d'abaisser le président, comme certains l'ont exprimé dans leurs amendements, mais de réhabiliter et de renforcer le Parlement : tout le contraire de ce que vous allez faire avec ce projet ! – , il faut, d'un autre côté, donner la parole au peuple : c'est le seul moyen de le réinvestir dans les affaires publiques, de lui redonner confiance dans la politique, de croire à nouveau en la citoyenneté.
Voilà pourquoi le référendum est fondamental. Nous donnerions ici la capacité, avec 500 000 signatures seulement et sans le verrou des parlementaires, de parler des questions sensibles. Arrêtez de mettre le couvercle sur la marmite, de dire ce que le peuple aurait le droit de voter ou pas : pensez-vous sincèrement qu'ici, nous sommes plus raisonnables que le peuple ? Quand je vois le comportement ahurissant d'un parlementaire faisant preuve de sectarisme et d'idéologie, quand je vous entends parfois, je m'inquiète et je me dis que le peuple serait tout aussi sage que les parlementaires et le Président de la République dans le traitement des affaires publiques.
Applaudissements parmi les députés non inscrits.
J'ajoute, en soutien de mon collègue Dupont-Aignan, que l'article 3 de la Constitution dispose que « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum. » C'est donc qu'il y a une égalité, en quelque sorte, entre les représentants du peuple que nous sommes et le suffrage direct que représente le référendum. Je ne vois pas pourquoi l'on ne pourrait pas soumettre au peuple des textes – même sensibles : le peuple est quelquefois beaucoup plus sensé que l'ensemble de la représentation nationale, comme il l'a prouvé d'ailleurs en 2005 en rejetant la Constitution européenne.
Je regrette que Mme la garde des sceaux ne précise pas sa pensée, à l'occasion de la réponse qu'elle aurait pu me faire, sur les domaines dans lesquels le peuple ne serait pas assez avisé pour pouvoir trancher. Cela aurait été intéressant d'avoir son avis. Je rappelle qu'en Suisse, petit pays, mais grand par son aspect démocratique, les Suisses décident de sujets graves, de sujets parfois passionnels, et le décident avec beaucoup de sens de la responsabilité. Je ne crois pas que l'on doive avoir peur du peuple français ; je crois au contraire que la peur de ses élites, de ses dirigeants, de ses partis accentue la crise de confiance et que les Français ont compris que malheureusement, souvent, les gouvernements dirigeaient contre le peuple.
Applaudissements parmi les députés non inscrits.
L'amendement no 189 n'est pas adopté.
L'article 11 de la Constitution prévoit la voie de la consultation populaire, du référendum, pour un grand nombre de textes ; il est d'ailleurs dommage qu'on l'utilise si peu. En revanche, je voudrais vous proposer de clarifier l'étude des réformes constitutionnelles. J'ai été très frappée, l'an dernier, par tous les débats et les doutes qui ont porté sur la procédure de la révision constitutionnelle : cela mériterait d'être clarifié.
À mon sens, très concrètement, c'est bien l'article 89 qui pose la procédure de principe : la révision constitutionnelle de nos textes prévoit une consultation obligatoire des deux assemblées. Ensuite vient le choix entre le référendum ou le vote par le Parlement à la majorité des trois cinquièmes. Ce qui me dérange, c'est que cette liberté de choix entre l'article 89 et l'article 11 subsiste jusqu'au bout. Par cet amendement, je souhaite non pas restreindre la voie du référendum, mais bien clarifier le fait qu'en cas de révision constitutionnelle, il y a bien une consultation obligatoire de nos assemblées.
Nous avons vu la richesse des débats sur cette réforme constitutionnelle : nous sommes là aussi pour représenter nos territoires, nous sommes la voix des populations que nous représentons. Je trouve donc plutôt sécurisant pour la population de garantir une consultation des deux assemblées. Par cet amendement, je propose que l'on maintienne le référendum de l'article 11 pour tous les types de textes prévus par cet article, sauf les textes constitutionnels qui, eux, devraient obligatoirement être adoptés par la procédure de l'article 89.
Cet amendement reprend la doctrine aujourd'hui majoritaire, qui interdit au Président de la République de réviser la Constitution par référendum sans en passer par le Parlement : c'est l'article 89 de la Constitution qui l'ordonne. Mme la garde des sceaux nous a d'ailleurs indiqué que cette lecture était aussi celle du Gouvernement.
Il est vrai que nous avons en souvenir les deux référendums constituants que le président Charles de Gaulle a pris de son initiative, en 1962 et en 1969, sur la base de l'article 11.
Oui, je pensais bien au général de Gaulle, en 1962 et en 1969. Mais, à l'époque, le Conseil constitutionnel était bien moins aguerri et ne s'arrogeait pas la compétence de vérifier que les décrets de convocation d'un référendum eux-mêmes étaient conformes à la Constitution. Tel est aujourd'hui le cas, …
… de sorte que votre amendement est finalement pleinement satisfait par le droit en vigueur. Cela explique que la commission ait émis un avis défavorable.
M. le rapporteur général a parfaitement expliqué la situation : aujourd'hui, cela serait absolument impossible. Madame la députée, M. Ferrand vous a justement répondu qu'un seul article permettait de réviser la Constitution : l'article 89, dans les modalités que vous avez précisées. Il ne serait pas possible de convoquer les électeurs pour réviser la Constitution sur la base de l'article 11, parce que le Conseil constitutionnel s'opposerait à ce décret de convocation des électeurs ; or il est forcément consulté. Il n'est plus possible d'imaginer cela.
Madame la garde des sceaux, permettez-moi de ne pas partager votre analyse. Si le président veut passer par l'article 11, il convoque par la voie d'un décret ; or ce décret ne relève pas du Conseil constitutionnel. L'amendement de notre collègue Sage est donc parfaitement fondé. Quelle juridiction pourrait empêcher un président d'utiliser l'article 11 ? C'était tout le débat en 1962, certains accusant le président de forfaiture pour avoir utilisé une procédure qui n'était pas faite pour cela. Cela ne l'a pas empêché de convoquer le référendum de 1962, qui a permis l'élection au suffrage universel direct du Président de la République, et de nouveau en 1969, sans soulever cette fois de grand débat sur le crime de forfaiture.
Puisque le Gouvernement est d'accord avec cette analyse, votons cet amendement de Maïna Sage : cela ne sera plus possible et il existera une garantie constitutionnelle de ne pas « dévoyer », comme certains l'avaient dit à l'époque, l'article 11 de la Constitution. Là réside la faiblesse de votre argumentaire – ce n'est pas sur le fond, puisque nous sommes d'accord – : aujourd'hui, un président qui voudrait détourner l'article 11 peut le faire, sans sanction juridique.
À ce stade du débat, madame la ministre, j'aimerais avoir une réponse à la question suivante : si le texte qui nous occupe est une révision constitutionnelle, il y a derrière une loi organique et une loi ordinaire. Ces deux dernières peuvent parfaitement donner lieu à une consultation référendaire sur la base de l'article 11. Alors même que nous parlons de l'un des trois aspects, il n'est pas inutile que le Gouvernement nous précise ce qu'il envisage de faire : envisage-t-il, sur cette loi organique et cette loi ordinaire très liées à notre texte, d'avoir recours à l'article 11, c'est-à-dire à un référendum ?
Je souhaite préciser ma pensée : l'article 60 de la Constitution dispose que « Le Conseil constitutionnel veille à la régularité des opérations de référendum prévues aux articles 11 et 89 [… ] ». Cela signifie, ce qui n'était pas le cas jadis, sous le général de Gaulle, qu'il n'est pas loisible au Président de la République, sans contrôle, de convoquer un référendum ; voilà ce que je souhaitais indiquer.
Juridiquement, il peut le faire ! Mais politiquement, je ne le lui conseille pas !
Sans vouloir allonger les débats, c'est la raison pour laquelle je proposais la modification et l'élargissement de l'article 11.
Deux mots pour répondre à MM. les députés : effectivement, le Conseil constitutionnel intervient pour toutes les opérations préalables au référendum, dans une répartition des compétences avec le juge administratif lui permettant d'intervenir sur le décret de convocation des électeurs. Cela ne relève pas de sa compétence ordinaire, mais de sa compétence relative aux opérations référendaires.
Ensuite, pour répondre à M. Le Fur, vous aurez effectivement à examiner dans quelque temps la loi organique et la loi ordinaire relatives aux opérations électorales : à ce stade, il n'est nullement prévu d'organiser un référendum sur ces lois, puisqu'elles sont inscrites à l'ordre du jour des assemblées.
Je précise que cet amendement vise à clarifier la procédure. J'ai en effet trouvé incroyable que pendant des semaines, l'an dernier, se pose la question de savoir s'il fallait ou non utiliser l'article 11 – car cela a réellement fait l'objet d'un débat. Ce serait donc aujourd'hui l'occasion de clarifier les choses.
Je comprends ceux qui défendent la voie du référendum, mais selon moi, pour un texte aussi important, il faut au moins que les deux assemblées soient consultées et que l'examen aille beaucoup plus loin qu'un simple débat.
J'ai entendu que sur tous les bancs, de nombreux élus pensent encore qu'il est possible d'utiliser l'article 11. Je vous remercie donc de votre réponse très claire qui, je l'espère, fera foi au cas où nous nous poserions à nouveau cette question : en tant que garde des sceaux, vous avez précisé aujourd'hui, dans cet hémicycle, que ce n'était pas le cas. Vos déclarations sont importantes pour tout le monde, car elles clarifient le fait qu'il n'y a pas lieu de recourir à l'article 11 dans le cadre d'une révision constitutionnelle.
L'amendement no 2413 n'est pas adopté.
Le peuple a raison, et devant le peuple, il est bien normal que le pouvoir législatif, le juge et le juge constitutionnel s'effacent, mais encore faut-il que le peuple puisse être consulté. Or, il n'y a pas de raison qu'on le considère comme capable d'être consulté sur certains sujets et incapable de l'être sur d'autres.
Mon amendement a donc pour objet de permettre de poser, au titre de l'article 11, des questions de nature sociétale touchant à la vie, à la mort et à certains autres débats nous avons eus et que nous aurons. Il n'y a pas de raison de censurer le peuple sur ces questions.
C'était d'ailleurs possible, selon moi, dès 1958. En effet, la rédaction de l'article 11 évoque les questions sociales, mais le mot « sociétal » n'existait pas à cette époque. Un débat a eu lieu entre constitutionnalistes pour savoir si le « social » de la version de 1958 intégrait le « sociétal » et plusieurs opinions se sont exprimées à cet égard.
Mon intention est d'en terminer avec ce débat et de permettre que les questions de cette nature puissent aussi faire l'objet d'un référendum au titre de l'article 11. Il n'y a pas de raison de considérer le peuple comme incapable de traiter de tels sujets.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et parmi les députés non inscrits.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement no 570 .
Notre amendement va exactement dans le même sens. Aujourd'hui, les sujets de société ne peuvent faire l'objet d'un référendum. Nous estimons pour notre part qu'il va dans le sens d'une démocratie bien sentie que le peuple puisse être directement consulté sur des débats de fond, ce qui n'est actuellement pas possible.
Je rappelle aussi que, selon un sondage qui n'est pas si ancien, une majorité de Français considèrent qu'ils auraient dû être consultés sur certaines questions de fond, en particulier sur l'euthanasie et la fin de vie.
La parole est à M. Christian Jacob, pour soutenir l'amendement no 724 .
La parole est à M. Fabien Di Filippo, pour soutenir l'amendement no 981 .
Cet amendement va dans le même sens que celui qu'a défendu mon collègue Marc Le Fur. Aujourd'hui, l'article 11 prévoit une possibilité référendaire pour des questions touchant à l'organisation des pouvoirs publics et des questions économiques, sociales ou environnementales. Or, sur des questions sociétales aussi importantes que la procréation médicalement assistée et l'euthanasie, voire d'autres qui ont été évoquées à l'instant, il est capital que ce soit le peuple – qui n'a pas moins de bon sens que nous – qui puisse se prononcer, car ces questions touchent au cours de l'évolution d'une société. Pour ces décisions, qui changent à jamais le destin d'une société, il faut que le peuple dans son ensemble puisse se prononcer.
Quand, comme on le voit avec l'exemple de la procréation médicalement assistée, on se prépare à faire naître, si la mesure est adoptée, des générations d'enfants qui n'auront pas de père et qui ne pourront pas savoir qui il est ni le connaître, il est important que nous ne prenions pas cette décision ici, entre nous, mais qu'elle soit soumise à l'approbation du peuple dans son ensemble, qui est l'expression la plus forte de la souveraineté en démocratie.
Applaudissements parmi les députés non inscrits.
Depuis le début de nos débats, ou quasiment, nous entendons dire sur de nombreux bancs, surtout ceux du groupe Les Républicains, que nous passerions notre temps à vouloir rabaisser les pouvoirs du Parlement. Or, voilà qu'on nous fait une proposition qui vise à augmenter de manière exorbitante les pouvoirs du Président de la République et viendrait déposséder le Parlement, coeur de la démocratie représentative,
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM
en fonction d'un tri auquel seraient soumises les questions posées.
De deux choses l'une : …
… et il vous faut alors retirer cet amendement, soit vous souhaitez qu'au lieu que le Président de la République vienne, par l'intermédiaire de son Gouvernement, débattre des projets de loi et du reste, et entendre les voix qui s'expriment sur tous les bancs, on instaure un rapport direct entre le Président et le peuple.
Si c'est la négation du Parlement que vous voulez, si c'est le pouvoir direct par-dessus les chambres, votez cet amendement ! Si vous voulez laisser une chance au Parlement et à la démocratie représentative, retirez-le. Avis défavorable.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Sourires.
Avis également défavorable, pour plusieurs raisons. Monsieur Le Fur, comme vous le reconnaissez vous-même, la sémantique des termes « social » et « sociétal » est relativement imprécise. Notre texte évoque des questions sociales, mais il n'aborde évidemment pas le sociétal. Il me semble donc que cette sémantique imprécise ne permettrait peut-être pas d'aboutir à un consensus sur l'écriture constitutionnelle.
Par ailleurs, lors de la révision constitutionnelle de 1995, le terme « sociétal » avait été expressément refusé. Sans doute la maturité n'était-elle pas encore advenue, mais ce refus mérite d'être pris en considération.
Il est vrai par ailleurs que tous les thèmes ne sont pas ouverts au référendum – c'est vous, je crois, monsieur de Courson, qui le disiez.
Le mot est précis : cela concerne les réformes, mais pas, par exemple, les acquis. La question pourrait en effet se poser de savoir si l'on veut revenir sur des points aujourd'hui considérés comme des acquis, tels que la scolarité gratuite et obligatoire.
Or, ce n'est pas le cas : ce qui est visé, ce sont les réformes.
Ensuite, comme l'a dit M. le président Ferrand, il s'agit bien de faire confiance au Parlement. C'est important, car ce dernier est bien l'espace de la délibération éclairée et nous savons les difficultés qu'il y aurait à faire prendre en charge certaines thématiques très sensibles, qui méritent le lieu et l'espace de la délibération raisonnée et éclairée.
Pour toutes ces raisons, j'émets un avis défavorable.
Je tiens à m'associer aux propos tenus par le rapporteur général. On pourrait croire, en effet, que cet amendement est sous-tendu par un abaissement des droits du Parlement, mais la réalité, ce n'est pas que les Républicains ne seraient pas sûrs de leurs opinions : ils en sont très sûrs et ces amendements expriment leur volonté farouche et déterminée de faire obstacle à ce qui a été tranché dans le cadre de l'élection présidentielle, à savoir la légalisation de la procréation médicalement assistée – PMA – pour toutes.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.
Je suis désolé de vous le dire : non seulement nous allons le faire, mais nous allons le faire parce que nous l'avons dit, comme nous l'avons déjà fait à de nombreuses reprises.
Sur ces sujets, je vous dirai plusieurs choses. D'abord, vous ne pouvez pas ne vous réclamer du peuple que quand cela vous semble bon et vous feriez bien d'être un peu cohérents pour ce qui concerne l'abaissement du Parlement, compte tenu notamment d'une tribune que vous avez signée récemment dans le Journal du Dimanche. Par ailleurs, nous connaissons vos positions : vous ne nous referez pas un mauvais spectacle de la Manif pour tous !
Je ferai deux remarques. La première est que je suis stupéfait de voir le président Ferrand opposer le Parlement et le peuple qui s'exprimerait par référendum. En effet, nous sommes les représentants du peuple et nous n'avons pas peur des référendums. La vraie opposition est avec l'exécutif – et, en fait, avec Bruxelles, qui a accaparé une grande partie des pouvoirs. On n'en parle jamais et il semble qu'on raisonne ici comme dans le passé, alors qu'en réalité, la plupart des pouvoirs ont été transférés à des autorités oligarchiques non élues. J'ajoute que le peuple, par référendum, est aussi l'allié des représentants du peuple, et je ne vois pas pourquoi vous opposez l'un et l'autre.
Deuxième remarque : l'amendement de M. Di Filippo, qui propose un élargissement du recours au référendum, est pleinement justifié, car les opinions sur les questions sociétales traversent la vie des partis politiques, et vous savez très bien qu'on ne peut pas dire que l'appartenance à tel parti suppose obligatoirement et immédiatement l'adhésion à telle position sur l'euthanasie, la PMA ou d'autres questions.
Voilà pourquoi il est impératif d'ouvrir cette possibilité aux champs sociétaux et à ces problèmes majeurs qui font l'intime, la vie de chacun de nos concitoyens : il est vital de dépasser la vie partisane et d'ouvrir le choix au peuple et aux citoyens.
Je reviendrai sur les arguments qui viennent d'être employés : M. Houlié nous dit qu'en réalité, nous défendons ces amendements parce que nous souhaitons que les questions sociétales puissent être traitées par référendum, et il cite à ce propos le cas de la PMA, en nous disant que cette dernière doit être légalisée.
C'est précisément là le problème : sur de tels sujets, nous savons que nos concitoyens peuvent avoir un avis et il faut savoir leur faire confiance. Or, vous vous défiez d'eux. Vous invoquez le programme du Président Macron, mais pour ce qui concerne les sujets de société, sur lesquels vous savez pertinemment qu'il n'y a pas accord de la part de nos concitoyens, que craignez-vous ? Dans votre logique, …
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Vous ne pouvez pas vous réclamer d'une logique selon laquelle, parce que nos concitoyens auraient voté pour le Président Macron, ils auraient voté pour l'intégralité de son programme. Vous le savez pertinemment. De tels problèmes, qui concernent leur quotidien, méritent mieux que de petites tambouilles En Marche.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Mais quelle est donc cette pantalonnade ? Monsieur Ferrand, la question n'est pas de savoir si l'on minore les pouvoirs du Parlement au profit du pouvoir présidentiel. Un équilibre est nécessaire entre les pouvoirs exécutif et législatif, et votre réforme le met à mal. Nous sommes cependant ici par la volonté du peuple et le pouvoir suprême, c'est celui du peuple.
Quoi qu'il arrive, je ne me soumettrai jamais au pouvoir du Président de la République, mais toujours à celui du peuple. Sur ces questions hautement sensibles, c'est à lui qu'il revient de dire dans quel sens il veut qu'évolue la société.
Madame la ministre, vous avez tenu des propos inqualifiables en disant qu'il fallait que le débat ait lieu ici, parce qu'il fallait que puisse se tenir sur ces questions un débat « raisonné » et « éclairé », comme si le peuple n'était pas capable de comprendre quels sont les enjeux ni d'avoir un avis. C'est ce même peuple qui nous a tous élus : s'il n'est pas « raisonné » et « éclairé », interrogeons-nous sur ce que nous faisons ici !
Madame la ministre, quand le peuple voit une majorité qui vote comme un seul homme à chaque fois que vous lui demandez de lever la main, il se demande si c'est bien ici qu'ont lieu les débats raisonnés et éclairés.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et parmi les députés non inscrits.
Monsieur le rapporteur général, j'ai beaucoup apprécié votre réponse et vous apprécierez certainement beaucoup notre prochain amendement, qui tend à ce que le peuple puisse demander le référendum sans que cette demande relève obligatoirement du Président de la République. Je ne doute pas qu'il recueillera votre voix.
Les discussions que nous tenons dans cet hémicycle me semblent soulever un autre problème – à moins que je ne sois la seule à le penser – : je rappelle en effet qu'aucune idée ne suscite un accord à 100 %. Quand j'entends dire que les gens ont voté pour un projet, j'ose espérer que, sur les bancs de la majorité, vous ne le défendez pas à 100 % – ou alors, c'est que vous êtes formatés pour.
Nous avions, pour notre part, un programme, qui s'intitulait L'avenir en commun, mais certains points de celui-ci peuvent parfois faire l'objet de désaccords : c'est ce qu'on appelle la discussion, le débat, l'approfondissement d'un projet.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM.
Eh oui !
Dire que les Français ont voté pour vous parce qu'ils sont tous d'accord à 100 % avec vous sous-entend que vous êtes tous d'accord à 100 %, et cela m'inquiète, car cela n'existe pas chez l'être humain.
On a toujours, à un moment ou à un autre, des désaccords et il faut savoir garder ses convictions, même assis sur ces bancs.
Je termine. J'entends tout le monde dire que nous avons été élus par et pour le peuple, mais je rappelle que nous avons tous été élus, à peu près, par 15 % seulement des électeurs. Si nous voulons pouvoir dire, demain, que nous avons été élus par 80 %, 85 % ou 90 % d'entre eux, il faut leur donner envie de nous écouter, il faut leur donner envie de participer au débat et il faut leur donner envie d'aller déposer un bulletin dans l'urne !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et parmi les députés non inscrits.
C'est la seule solution !
Les Français, mesdames et messieurs, ne sont pas stupides : ils ont envie de participer ! Selon La Croix – je choisis ce journal à dessein – , 89 % d'entre eux sont favorables à l'euthanasie : quand on n'est pas capable d'en parler dans cet hémicycle, il y a un problème !
Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur quelques bancs du groupe LR.
Nous le voyons bien, personne n'est dupe : avec cet amendement, la droite a une arrière-pensée politicienne
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Nul ne peut ne pas s'en apercevoir !
Cela étant dit, sur le fond, nous considérons que le peuple ne doit jamais faire peur…
… et qu'a priori, aucun sujet ne peut échapper à son jugement. La représentation nationale en émane, donc, par définition, aucun sujet ne saurait échapper à la capacité de discernement du peuple. C'est là un fait irréfragable, que personne ne peut contester.
Nous proposerons quant à nous, à travers des amendements, que l'initiative référendaire puisse être élargie, renforcée, pour le peuple lui-même. Du coup, nous verrons si la droite…
… qui, quelquefois, est moins encline à l'écouter et à le soutenir, notamment quand il est dans la rue, votera en faveur de notre amendement visant à instaurer un référendum d'initiative populaire élargi. Je serai attentif, pour vérifier si sa cohérence s'étend jusque-là !
En tout état de cause, nous soutiendrons cet amendement, sans son arrière-pensée politicienne, parce que moi, j'ai confiance en la capacité du peuple français à trancher avec discernement, y compris sur des sujets où la démagogie est prompte à s'exercer.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Trois choses, simplement.
Tout d'abord, monsieur le rapporteur général, vous commettez un contresens en imaginant une concurrence entre nous et le peuple. Il n'y en a pas ! Par définition, nous nous effaçons devant le peuple, et nous ne sommes ici qu'en son nom ! Il n'y a pas de concurrence ! La démocratie représentative existe parce que la démocratie directe n'est pas possible en permanence.
En outre, le propos de M. Houlié était très intéressant, car ce dernier n'est pas tout à fait un député comme les autres : c'est un jeune homme talentueux…
… qui a ses entrées où nous savons, etc. , etc. Que dit-il ? Qu'il refuse dès à présent toute intervention populaire sur ce sujet, comme il l'affirme très explicitement et comme il le théorise, même ! Circulez, le peuple n'a rien à voir là-dedans !
Enfin, lorsque nous débattrons de la PMA – et nous aurons ce débat qui, croyez-moi, prendra du temps, et dans l'opinion, et dans cette assemblée…
Tout à fait, monsieur le président !
Je vous interdirai alors, mes chers collègues, d'évoquer les sondages ! On n'a pas le droit de le faire alors que l'on se refuse à consulter le peuple ! Moi, je ne crois pas aux sondages, mais je crois à la consultation populaire, à la réalité du vote populaire, qui est le plus éclairé de tous !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Je reprends la parole pour soutenir ces amendements.
Il me semble qu'il est en effet très difficile, dans une démocratie, d'opposer l'éminente fonction du Parlement et la présence du peuple. Le principe de base de la démocratie, c'est que le Gouvernement exerce le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple.
Il est complètement irréaliste d'opposer le Parlement et le fondement même de la démocratie !
On pourrait d'ailleurs se poser une question d'actualité : pourquoi l'adoption de cette réforme constitutionnelle tellement importante serait-elle le fait du Parlement réuni en Congrès et pas celui du peuple, par référendum ?
Mes chers collègues, un peu de sagesse ! Peu sont encore dans cet hémicycle, mais qu'ils se souviennent du vote de la proposition de loi de nos collègues Claeys et Leonetti – lequel était d'ailleurs dans l'opposition – à la quasi-unanimité ! Nous avons eu des heures et des heures de discussions où nous nous sommes mutuellement influencés.
Dans un référendum, quel est le choix du peuple ? Voter oui ou voter non.
Or, beaucoup de questions sociétales renvoient à des problèmes complexes. La réalité n'est pas noire ou blanche. Donc, mes chers collègues, gardons-nous de soumettre à référendum des sujets aussi complexes que ceux concernant les questions de société.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-Agir, LaREM et MODEM.
Que l'on soit pour ou contre la peine de mort, son abolition a été votée par une majorité parlementaire. Si cette question avait été soumise au référendum – ce n'était pas possible, puisque l'article 11 de la Constitution ne le permettait pas – le peuple aurait été favorable à son maintien.
Notre collègue a soulevé le problème de la PMA, qui est en effet très complexe. On ne peut pas se contenter de dire que l'on est pour ou contre. Elle existe déjà, mais jusqu'où va-t-on ? C'est là une question compliquée !
Ne votons donc pas ce qui est proposé, mes chers collègues ! J'appartiens à une famille politique qui a toujours défendu les droits du Parlement : eh bien, nous les défendrons jusqu'au bout, y compris lorsqu'il sera question d'autres articles de la Constitution.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UDI-Agir, LaREM et MODEM.
La parole est à Mme Cécile Untermaier, puisque personne ne s'est exprimé pour le groupe Nouvelle Gauche.
Ce débat est extrêmement important et intéressant.
Monsieur de Courson, il est évident que s'il faut répondre par oui ou par non, le citoyen sera dupé par la question qui lui est posée et nous le serons quant à nous par la réponse qu'il donnera.
En revanche, nous devons réfléchir à l'organisation de référendums de nouvelle dimension, à plusieurs entrées, avec un débat public les précédant.
Il faut nous donner les moyens de faire en sorte que les citoyens puissent saisir les questions posées. Désormais, le rôle pédagogique du député sera extrêmement important, car cela relèvera éminemment de notre responsabilité. Nous déposerons des amendements en ce sens.
Je vous rejoins sur ce point, monsieur de Courson : s'il faut répondre par oui ou par non à un référendum, ce n'est pas la peine, mais notre démocratie aurait beaucoup à gagner à réfléchir, entre autres questions, à la mise en place d'un référendum précédé d'un grand débat public, avec des questions à plusieurs entrées et une organisation de la réflexion dans tout le pays.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement no 1131 .
Voilà un amendement pour M. Ferrand qui, j'en suis certain, retiendra toute son attention ; il mettra tout son poids dans la balance pour le faire adopter.
Sourires
J'ai bien entendu l'argumentaire contre mes collègues des Républicains, qui veulent étendre les référendums aux sujets sociétaux : cela reviendrait à renforcer le pouvoir du Président de la République. Or, si nous n'y sommes pas hyper-favorables, je suis certain que le pouvoir du peuple requiert toute l'attention de notre collègue président du groupe La République en marche. Le peuple, cela l'intéresse ! C'est le coeur de la démocratie, c'est la raison d'être de notre présence ici – pour le représenter… mais pas pour s'y substituer.
Par cet amendement, nous défendons la possibilité de créer un référendum d'initiative populaire – et non partagée, comme c'est le cas actuellement, ce référendum étant d'ailleurs trop peu utilisé – pour l'abrogation ou l'adoption d'une loi, en conservant le même critère que pour celui du référendum d'initiative partagée : 10 % des inscrits, ce qui fait déjà un paquet de monde, avec environ 4,7 millions de personnes.
Voilà la proposition que nous mettons sur la table. Je compte sur vous, monsieur Ferrand, pour mettre tout votre poids dans la balance.
J'imagine que, parlant de mon poids, l'orateur précédent voulait parler de mon influence ? C'est en tout cas ainsi que je l'ai compris,
Sourires
même s'il évoque immédiatement après la balance. Au fond, peu importe.
Ce que vous venez de dire, c'est du Le Fur à l'envers.
Sourires
L'un voudrait que le Président de la République ruine le rôle du Parlement, et voilà un autre éminent collègue qui propose que l'ensemble des débats puissent être préemptés par l'idée même d'un référendum sur la base d'une initiative, etc.
Il existe quelques exemples glorieux. Tout à l'heure, quelqu'un vantait la grande démocratie cantonale helvétique, mais voyez les thèmes des votations : ils sont très souvent le fait de quelques cliques affairistes et de quelques lobbyistes qui, à la fin, sont d'ailleurs démasqués.
En Californie, la très fameuse proposition 13, en 1978, a très rapidement entraîné la dégradation des services publics et autres.
Dans le cadre du travail que nous menons aujourd'hui, nous souhaitons un Parlement renforcé…
… qui puisse exiger plus d'évaluation et plus de contrôle de l'action du Gouvernement.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Nous voulons un gouvernement qui puisse agir, qui soit contrôlé, et des parlementaires qui puissent rendre compte de l'action menée et l'évaluer. Voilà l'enjeu, voilà le périmètre initial de la réforme constitutionnelle que je, que nous ne souhaitons pas voir dénaturé, même si – je l'ai bien compris, et c'est compréhensible – une révision constitutionnelle aiguise les imaginations et permet à chacun, tel est le jeu démocratique, de formuler des propositions qui lui sont chères.
Pour ce qui nous concerne, pour ce qui concerne la commission – qui a statué sur un certain nombre d'amendements, et même un nombre certain, pendant plus de quarante heures – nous souhaitons en rester à cet équilibre. Nous verrons plus tard, si nous y arrivons, ce qu'il en sera de la suppression d'un certain nombre de règles totalement dépassées et archaïques, mais nous voulons renforcer un certain nombre de pouvoirs du Parlement et, au fond, permettre à la Ve République de prendre un nouvel élan pour pouvoir durer dans la stabilité que nous lui connaissons.
Voilà pourquoi j'émets un avis défavorable. Les raisons sont d'ailleurs quasiment les mêmes que précédemment, en récusant toutefois un argument que j'ai entendu – outre le contresens que je pourrais commettre, mais je ne serais pas le seul – selon lequel je verrais une concurrence entre l'expression référendaire et le rôle du Parlement. Pas du tout ! M. de Courson a parfaitement explicité ce point ! Il ne s'agit pas d'organiser ou de craindre une concurrence : il s'agit simplement de considérer que le Parlement a un rôle majeur à jouer dans l'élaboration de l'expression de la volonté générale – qui s'appelle la loi – et que nous ne souhaitons pas nous dérober…
… à nos responsabilités sous le prétexte parfois démagogique de se saisir de l'opinion publique, le plus souvent d'ailleurs pour anéantir la contradiction, donc minorer les oppositions. L'usage régulier de la pratique référendaire, au fond, c'est de faire taire les minorités et les oppositions. Eh bien, nous, nous ne voulons pas de cela. S'il faut être démocrates pour un plus grand nombre que nous, nous le serons.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
C'est un avis défavorable, parce que depuis 2008, notre Constitution prévoit déjà le référendum d'initiative partagée…
Contre nous ? Pourquoi contre nous ? Mais si vous voulez, pas de problème, si cela vous fait plaisir !
Il s'agit donc d'un référendum d'initiative partagée.
Je voudrais seulement dire que ce référendum d'initiative partagée est le fruit d'un équilibre, qui résulte de deux propositions de révision constitutionnelle. En 1993, d'abord, le comité Vedel avait proposé la mise en place d'un référendum d'initiative minoritaire, qui reposait également sur une combinaison des initiatives parlementaires et des initiatives populaires. Plus tard, le comité Balladur a quant à lui recommandé la création d'un référendum d'initiative populaire. Entre ces deux propositions, c'est une voie médiane qui a été trouvée, avec le référendum d'initiative partagée.
Cette voie médiane associe à la fois les parlementaires et l'initiative populaire. Elle a été conçue pour aboutir à un équilibre, qui permet d'associer les parlementaires, sans pour autant déposséder la représentation nationale de son rôle légitime dans l'élaboration de la loi.
Je conviens avec vous que cette disposition n'est pas d'un maniement aisé, mais tel est l'équilibre qui a été construit. Et c'est la raison pour laquelle je pense qu'il convient de le préserver, tel qu'il a été écrit en 2008.
Par ailleurs, la question des initiatives populaires sera traitée un peu plus loin, lorsque nous évoquerons la Chambre de la société civile et le rôle qu'elle peut avoir dans le cadre du traitement des initiatives populaires. Cela n'interdit d'ailleurs pas à la représentation nationale que vous êtes de jouer également son rôle. C'est pour toutes ces raisons que j'ai émis un avis défavorable sur cet amendement.
Je voudrais répondre sur deux points. D'abord, monsieur le président Ferrand, je vous invite à regarder le système suisse de plus près et à ne pas le caricaturer. Je pense d'ailleurs que notre assemblée ferait mieux de réfléchir. Souvenez-vous du deuxième tour des élections législatives : sur 45 millions d'électeurs, il n'y a eu que 20 millions de votants, et 18 millions de suffrages exprimés. Nous sommes élus, et je m'inclus là-dedans, par 18 millions de Français, sur 45 millions d'électeurs !
Et cela ne vous pousse pas à réfléchir à la crise de notre démocratie ? Quel mépris pour le peuple français, qui ne serait pas assez raisonnable pour trancher lui-même !
Mais, sans le référendum, jamais nous n'aurions pu régler la question de l'Algérie, qui fut si douloureuse, et jamais nous n'aurions eu l'élection du Président de la République au suffrage universel ; sans le référendum, le général de Gaulle n'aurait pas quitté le pouvoir au moment où il l'a fait – un départ malheureux pour moi. Une assemblée qui a été élue par 18 millions de Français, sur 45 millions d'électeurs, qui prétend détenir la vérité, cela m'étonne !
Vous nous dites, madame la garde des sceaux, que le référendum d'initiative partagée est une solution d'équilibre. Elle est tellement équilibrée, qu'aucun référendum d'initiative partagée n'a jamais eu lieu !
C'est grotesque ! L'objectif, c'était de faire semblant ! Et la réalité, aujourd'hui, vous le savez très bien, c'est que si on ne débloque pas le verrou législatif, le verrou du Parlement, il n'y aura jamais de référendum d'initiative partagée. La seule solution, c'est évidemment de voter l'amendement qui nous est proposé. Pour ma part, j'étais beaucoup plus généreux, puisque j'ai proposé de baisser le seuil à 500 000 électeurs. Il faut aérer notre démocratie, il faut l'oxygéner, avant qu'il soit trop tard.
La logique de tout cela est évidente, et vous l'avez vous-même avouée ! Heureusement que tous les Français ne regardent pas cette séance, puisque, selon vous, le peuple n'est pas raisonnable, le peuple ne peut pas trancher !
Je n'ai pas dit cela !
Vous l'avez dit ! Vous avez dit qu'il n'était pas éclairé. Parce que vous, vous êtes éclairés ? C'est le gouvernement des juges, le gouvernement de la technocratie, le gouvernement de la finance !
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
C'est cela, la réalité de cette assemblée ! Prenez garde, à force de cadenasser le système, que le système n'explose !
À mon tour d'évoquer la sagesse. La tradition républicaine se méfiait des référendums, et les propos du rapporteur général, de ce point de vue, s'inscrivent dans cette tradition. En effet, par le passé, les référendums ont été utilisés comme des plébiscites, contre la République. Ce fut le cas, notamment, du référendum de Louis-Napoléon Bonaparte contre la République qui était balbutiante et qui venait de surgir de la nouvelle fin des rois.
Mais depuis, de l'eau a coulé sous les ponts, et la capacité populaire à contrôler ce qui lui est proposé et à faire des réponses raisonnables est attestée, précisément par le contre-exemple que vous avez donné, monsieur le rapporteur général. Personne ne se souvient que les Suisses aient voté, par référendum, des choses totalement déraisonnables. Quant aux appréciations que vous portez sur les sujets mis en débat, elles vous sont très personnelles ! Affirmer que les textes de loi qui arrivent au Parlement ne sont jamais sous-tendus par des intérêts de lobbyistes, voilà qui va faire sourire bien du monde ici !
Et il est encore plus risible de dire que les textes de loi ne sont jamais sous-tendus par des partis pris politiques !
C'est ainsi, la société est traversée par des intérêts contradictoires qui s'expriment et, à la fin, on tranche. Mais on ne peut pas opposer le Parlement au suffrage populaire. Prenez le problème par le bout que vous voudrez, vous arriverez à une absurdité. Cela reviendrait à dire que notre assemblée est d'une nature distincte de la volonté générale, mais cela n'existe pas dans la conception théorique de la République ! Nous ne sommes pas les notables du peuple ! Nous sommes ses représentants directs. Voilà pourquoi le référendum, à cette étape de la vie du pays, de son niveau d'éducation et de ses capacités, est la meilleure chose que l'on puisse faire.
Peu importe, ensuite, où on met la barre. Mais dites-moi, monsieur le rapporteur général, pourquoi serait-ce un problème que 500 000 Français aient la capacité d'initiative des lois, alors qu'ici, un groupe, même s'il ne compte que dix-sept personnes, peut déposer une proposition de loi, un jour de niche parlementaire ? Si l'on rapporte cela au nombre de députés, dix-sept fois 51 000, cela ne fait pas une quantité excessive !
Voilà pourquoi le référendum d'initiative populaire, tel que nous le proposons, n'a rien d'une absurdité. D'ailleurs, Mme la ministre a bien voulu rappeler tout à l'heure que la proposition en avait été faite par quelqu'un qui n'était pas spécialement un exagéré – me semble-t-il.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Vous avez défendu avec bonne humeur et bonhomie, avec un poids politique certain – je dis bien un poids « politique » – le Parlement, comme s'il n'y avait pas un contexte particulier, comme s'il n'y avait pas ce texte. Le contexte, c'est un an d'exercice du pouvoir où votre majorité s'est assise sur les prérogatives du Parlement…
… avec le recours aux ordonnances, le vote bloqué et le temps programmé !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Vous avez montré, par cet exercice du pouvoir, à quel point vous méprisiez les parlementaires que nous sommes, y compris l'opposition que nous représentons.
Quand on vous écoute, on a l'impression que vous défendez la veuve, l'orphelin et le Parlement. Mais le texte que vous nous présentez prévoit d'amputer le Parlement de 30 % de ses représentants ! Le texte que vous nous présentez prévoit de faire passer directement en commission, notamment pour échapper à l'opinion publique, des textes dont on ne connaît pas encore l'importance ! Le texte que vous nous présentez prévoit de réduire la capacité d'amendement du Parlement !
Ne vous faites pas le défenseur du Parlement, après un an d'exercice du pouvoir et avec le projet que vous nous présentez, parce que ce n'est crédible ni pour le peuple, ni pour les représentants du peuple que nous sommes.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et LR et parmi les députés non inscrits.
L'amendement no 1131 n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement no 2237 .
Dans le même esprit que le précédent, cet amendement vise à permettre l'organisation de référendums à l'initiative de 500 000 électeurs inscrits sur les listes électorales, pour renforcer et amplifier la démocratie participative dans notre pays.
La disposition actuelle du référendum d'initiative partagée est une disposition qui est inusitée, et il faut en tirer quelques leçons. Si nous voulons établir des droits réels, il faut sans doute réévaluer le dispositif. La procédure était supposée impliquer davantage les citoyens dans le processus législatif, mais tout le monde reconnaît aujourd'hui qu'elle ne s'apparente en aucun cas à un référendum d'initiative populaire. Elle repose en effet sur une participation populaire relative à l'initiative parlementaire. Si, en théorie, cette procédure offre une nouvelle possibilité au peuple d'exprimer sa volonté par la voie référendaire, les obstacles procéduraux sont tels qu'en pratique, ils entravent cette faculté.
La procédure confère l'initiative aux parlementaires, tant pour la rédaction de la proposition de loi, que pour les conditions matérielles de recevabilité. Je n'entre pas dans le détail du dispositif, puisque chacun ici le connaît. Dans ce dispositif, en définitive, la décision initiale – le fait de proposer une loi référendaire – et la décision finale – le sort réservé à cette proposition – échappent au peuple. Elles ne dépendent en réalité que du bon vouloir des parlementaires, et s'opposent donc à toute forme de démocratie directe.
Je veux préciser une chose : il est évident que nous devons penser le référendum en l'articulant avec le travail parlementaire, avec une nouvelle conception du rôle des parlementaires eux-mêmes et elles-mêmes, qui doit consister à vivifier la démocratie, à participer, à avoir un débat instruit et une délibération approfondie, afin d'aboutir à la décision la meilleure.
Ce que nous voulons, comme le disait Gracchus Babeuf, c'est que le peuple puisse exercer lui-même « tout le plus qu'il peut de souveraineté ». Nous pensons que cette disposition, bien articulée avec le pouvoir du Parlement, peut le permettre.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.
Comme sur l'amendement précédent, la commission a émis un avis défavorable.
Le Gouvernement a également émis un avis défavorable sur cet amendement. J'aimerais, madame la présidente, répondre d'un mot à M. Dupont-Aignan.
Je n'ai pas dit, monsieur le député, que le peuple n'était pas raisonnable. Je n'ai absolument pas dit cela.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM – Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.
J'ai dit très exactement que le Parlement était un espace de débat raisonné et éclairé.
Il vous appartient d'en déduire ce que vous voulez, mais ce n'est absolument pas ce que j'ai dit. Par ces propos, monsieur le député, j'entends que l'écriture de certaines lois suppose d'infinies précautions, la pesée de certains termes au trébuchet, ainsi que de la nuance. Pour l'écriture de ces textes, le Parlement, parce qu'il est composé des représentants de la nation, des représentants du peuple, est un espace de débat qui me semble pertinent.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Cet amendement est encore plus raisonnable que le nôtre, puisqu'il propose d'abaisser le seuil à 500 000 électeurs, ce qui accroît encore l'initiative populaire. Monsieur le rapporteur général, vous disiez tout à l'heure, comme Mme la ministre, que le référendum d'initiative partagée était une solution équilibrée. Mais ce que l'on constate dans cette proposition de loi constitutionnelle, comme dans toutes les lois organiques et lois ordinaires, c'est qu'il y a un déséquilibre en défaveur du peuple. C'est très net et très clair.
Oui, nous sommes favorables à ce que l'intervention directe du peuple sur la scène politique et publique ait lieu le plus souvent possible, parce qu'il n'y a pas d'autre souverain. La souveraineté, c'est la souveraineté populaire. Point. Nous-mêmes, nous tenons notre pouvoir législatif du peuple et, en réalité, d'une portion seulement de celui-ci. Compte tenu du taux de participation assez faible, nous ferions mieux de faire appel au peuple plus souvent.
Vous disiez tout à l'heure, à demi-mot, qu'il fallait éviter de faire trop de référendums, parce que des lobbyistes ou des intrigants risquaient de détourner l'attention du peuple et d'utiliser l'opinion populaire. Mais notre projet d'organiser des référendums repose précisément sur la volonté de faire naître un débat au sein de l'opinion. Nous voulons avoir un débat raisonnable et éclairé, pour reprendre vos termes, madame la ministre, pas au sein de ce seul hémicycle, mais à l'échelle du pays tout entier. Voilà ce qui nous honorerait. Si je pouvais rester à la maison, en sachant que c'est le peuple qui prendra les grandes décisions pour le pays, je ne m'en porterais pas plus mal.
Madame la garde des sceaux, j'ai entendu votre raisonnement, mais rien n'interdit de poser une question bien écrite, précise et argumentée au peuple français. Rien ne l'interdit. Sur certains sujets fondamentaux, seule compte la réponse du peuple : lui seul peut la donner. Il ne s'agit pas, je le répète, de remplacer le vote de la loi au Parlement par des consultations référendaires mensuelles ou hebdomadaires. Il s'agit, sur des sujets fondamentaux, à un moment donné, de laisser la voix du peuple s'exprimer, au moment où nos institutions sont malades d'un rejet par le peuple de leurs décisions. Il ne s'agit pas de mettre fin aux travaux de notre Parlement, mais de les compléter à certains moments, en faisant vivre l'initiative populaire. C'est une attente majeure de nos concitoyens.
L'amendement no 2237 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l'amendement no 1394 .
Le rapporteur général le reconnaissait lui-même : le constituant ne doit pas se dérober aux questions qui se posent à lui. Nous serons tous d'accord pour admettre qu'au moins une se pose à nous, à l'article 11, celle du référendum d'initiative partagée. Cette procédure, en effet, ne fonctionne pas, en raison des seuils qui sont imposés.
Les consultations citoyennes que nous menons depuis un an dans le cadre des travaux réalisés à la demande du président François de Rugy, ont révélé que les citoyens étaient favorables au développement de différentes formes d'expression citoyenne. Le référendum en est une.
Nous avons besoin, à ce sujet, d'une véritable réflexion démocratique critique. Nous devons travailler à l'utilité du référendum, élaborer un texte clair et modifier la majorité nécessaire pour emporter la question posée au référendum, en l'établissant par exemple aux trois cinquièmes.
Nous devons apprendre à débattre avec le peuple.
Nous vous proposerons ainsi trois amendements : celui-ci et deux amendements de repli, soutenus par d'autres collègues. Si vous voulez être efficaces, vous ne pouvez laisser dans la Constitution un dispositif qui ne fonctionne pas. Vous devez au peuple la vérité. Vous ne pouvez lui proposer un dispositif d'initiative partagée qui n'est en réalité jamais partagé, qui n'a jamais fonctionné.
Nous vous demandons d'être réalistes et de perfectionner cet outil pour qu'il puisse faire ses preuves.
Je me réjouis de constater l'hégémonie du mot « peuple », dans cette assemblée, pour désigner l'acteur de notre histoire. À d'autres périodes, d'autres mots auraient été employés car d'aucuns, ici, répugnaient à faire usage de celui-ci.
Il nous reste à présent à approfondir, d'un point de vue théorique, la notion de peuple car le mot, en lui-même, ne suffit pas à apporter la réponse.
Je vous conseille un très bon livre sur ce sujet, L'Ere du peuple, qui s'est déjà très bien vendu.
Sourires
J'en viens aux arguments opposés aux partisans du référendum. Je m'en veux encore de ne pas avoir répondu à celui avancé par le président Richard Ferrand, pour qui on ne saurait résumer un sujet complexe à « oui » ou « non ». Je comprends cet argument mais admettez, monsieur le rapporteur, que c'est ce que nous faisons ici, du matin au soir. Nous débattons de sujets complexes sur lesquels il nous est demandé, après des heures de discussion, de nous prononcer par « oui » ou par « non ». Le caractère binaire de la décision ne peut être un argument. La démocratie est un mode de prise de décision, pas de formation de la conviction. Chacun conserve ses convictions, une fois la décision prise.
Enfin, je voudrais vous convaincre du caractère complémentaire du référendum d'initiative populaire par rapport au mandat parlementaire. Dans mon esprit, il n'y a aucune différence entre ce que doit faire un élu et ce que veut le peuple, mais il faut bien admettre que dans maintes circonstances, la consigne n'est pas donnée. Qui plus est, nos textes interdisent le mandat impératif. C'est pourquoi des personnes élues pour une raison précise peuvent ensuite voter ici bien différemment. On explique alors que les débats les auraient fait changer d'avis !
En attendant, le mandat impératif répond parfois à une nécessité. Ainsi, en 2005, il aurait été judicieux que ceux qui ont voté à l'inverse de leurs engagements au Congrès aient été liés par un mandat impératif !
Voilà pourquoi le référendum d'initiative populaire n'affaiblit pas l'expression populaire, ne réduit pas le débat des assemblées, mais renforce au contraire la qualité du débat public.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
L'amendement no 1394 n'est pas adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 692 rectifié , 1723 , 1382 , 1395 , 401 , 630 , 1339 et1720 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 692 rectifié et 1723 d'une part, 401, 630, 1339 et 1720 d'autre part sont identiques.
La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l'amendement no 692 rectifié .
Nous débattons de ce fameux référendum d'initiative partagée, que j'avais voté. J'avais déjà fait remarquer, à l'époque, qu'en raison de la procédure, il serait probablement inefficient, ce qui s'est avéré exact.
Je vous propose donc, par cet amendement, d'abaisser les seuils.
Puisque nous parlions de certaines avancées sociétales, citons l'exemple de l'Irlande qui, après avoir refusé, par référendum, de légaliser l'avortement, vient de l'accepter, toujours par référendum. Le dialogue a permis aux Irlandais de progresser et d'autoriser ce qui leur paraissait inacceptable jusqu'alors.
Je suis un démocrate. Même si je ne suis pas d'accord avec le peuple, c'est lui qui, par son vote, a toujours raison.
Je voudrais que la France se forge une culture du référendum. Nous avons évoqué le cas de la Suisse. Les citoyens de la Confédération helvétique reçoivent régulièrement des papiers pour leur expliquer les avantages et les inconvénients d'une réforme, et de quelle manière leur vote s'entend. Ils ont d'ailleurs intérêt à jouer le jeu, sinon leur inaction pourrait leur être reprochée.
J'aimerais que nous accédions à cette culture. Je n'oppose pas ce que nous sommes, les représentants du peuple, au peuple qui, dans certains cas, devrait trancher directement.
En France, hélas, le peuple n'est que rarement appelé à trancher directement – la dernière fois, c'était en 2005 – et il a toujours tendance à s'étonner qu'on lui demande son avis. En général, il ne parvient pas à répondre à la question posée, mais si nous avions développé la culture du référendum, cette procédure nous permettrait d'avancer.
La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l'amendement no 1723 .
Cet amendement vise à rendre effective la procédure du référendum d'initiative partagée introduite par la révision constitutionnelle de 2008.
Les conditions actuelles, complexes et nombreuses, compromettent la possibilité de rendre effective la tenue d'un référendum de ce type.
C'est pourquoi une modification de la Constitution en ce sens est nécessaire. Il est ainsi proposé de diminuer le nombre de parlementaires requis pour présenter la proposition de loi, en conférant ce droit à tout groupe parlementaire, au lieu de 20 % de parlementaires actuellement requis dans l'une ou l'autre des deux assemblées, de réduire le nombre de soutiens des électeurs nécessaires de 10 % des électeurs inscrits à 5 %, soit environ 2,3 millions de soutiens, de remplacer la condition d'un examen par le Parlement de la proposition de loi par l'exigence de l'adoption de celle-ci dans une version en conformité avec son objet initial, afin d'éviter que ne soit adoptée une proposition de loi avec un objectif dénaturé, de fixer au Président de la République un délai maximal de six mois pour convoquer le référendum, ce qui permettrait d'éviter toute situation d'inertie.
Enfin, cet amendement tendrait à remplacer, au sixième alinéa, les mots « portant sur le même sujet » par « comportant des dispositions législatives similaires ».
Cet amendement vise à faciliter le déclenchement de la procédure instituée lors de la révision constitutionnelle de 2008.
Dès lors que le référendum n'a lieu qu'à la condition que les assemblées parlementaires n'aient pas examiné la proposition dans un délai de six mois, il s'agit en réalité d'un droit de pétition conduisant à un débat parlementaire.
Ainsi, les seuils institués en 2008 apparaissent-ils bien trop élevés.
Cet amendement est au demeurant un amendement de repli, eu égard aux propositions formulées par le groupe Nouvelle Gauche concernant la proposition de loi citoyenne et l'amendement citoyen.
La parole est à M. Hervé Saulignac, pour soutenir l'amendement no 1395 .
Le rapporteur général a rappelé son souhait de donner un nouvel élan à la Ve République, grâce à ce texte. Or, si nous accouchons d'une réforme de la Constitution qui ne permet pas de faire progresser le sujet du référendum, le peuple aura le sentiment d'être laissé sur le bord du chemin, ce qui peut mal se terminer.
J'ai bien entendu les arguments avancés pour refuser de revoir en profondeur le sujet du référendum, mais cet article 11 n'est que du bluff. Le peuple, qui n'est pas idiot, le sait parfaitement.
Qui peut prétendre rassembler 4 500 000 signatures en quatre mois dans ce pays ? Personne.
De deux choses l'une : soit nous ne nous défions pas de ce peuple et nous sommes prêts à améliorer la procédure du référendum, en abaissant les seuils, soit nous marquons notre défiance à l'égard de nos concitoyens, et le discrédit dont nous souffrons ira croissant, jusqu'à se retourner contre nous.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Cet amendement n'a pas d'autre ambition que de réviser les seuils en les fixant à un million d'électeurs, et non à un dixième des électeurs, et à un cinquième des parlementaires plutôt qu'à un dixième.
Nous abordons une série d'amendements identiques.
La parole est à M. Olivier Becht, pour soutenir l'amendement no 401 .
Par cet amendement, le groupe UDI, Agir et indépendants souhaite témoigner son attachement à la procédure du référendum. Il n'y a aucune raison d'avoir peur du peuple, mais nous devons, comme l'a rappelé Mme Untermaier, moderniser cette procédure, l'adapter à son temps, en autorisant la tenue de débats via les vecteurs numériques, les réponses à choix multiples.
L'amendement de M. Pancher tend à assouplir les conditions de déclenchement du référendum d'initiative partagée. Si cette procédure n'a pas été très utilisée jusqu'à présent, c'est sans doute parce que le Parlement a confisqué à son profit ce débat, sans parvenir à réunir les conditions de son déclenchement.
Cet amendement tend par conséquent à abaisser les seuils à un dixième des parlementaires et à 5 % du corps électoral, ce qui permettrait de passer de 4,7 à 2,3 millions d'électeurs.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement no 630 .
Notre amendement a le même objectif, même si l'on peut toujours discuter du montant des seuils. L'idée sous-jacente est, bien évidemment, d'impliquer le peuple, de faire respirer la démocratie.
De nombreux collègues ont souligné que les dernières élections avaient été marquées par une très forte abstention. L'une des solutions pour donner un regain d'attractivité à la démocratie serait de mieux impliquer le peuple en lui faisant sentir qu'il est partie prenante des décisions qui le concernent directement.
La parole est à M. Jean-Félix Acquaviva, pour soutenir l'amendement no 1339 .
Dans le même esprit que les précédents, cet amendement tend à abaisser la part de parlementaires à un dixième et le nombre d'électeurs à un vingtième pour le déclenchement du référendum d'initiative partagée, afin de prévenir la détention d'un monopole de déclenchement du processus par les partis majoritaires. Par ailleurs, le renforcement de la démocratie territoriale et locale est le corollaire nécessaire de la décentralisation politique, ce qui pourrait se traduire par la création d'un cadre plus actif d'échanges, de débat, de dialogue, autour des questions économiques, sociales et environnementales entre élus et populations, et par la réduction des seuils de déclenchement du référendum d'initiative partagée.
Cette mesure nous paraît fort utile pour revigorer notre démocratie, à un moment où l'on dénonce le fossé qui se creuse entre le peuple et sa représentation.
La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l'amendement no 1720 .
Il s'agit d'un amendement de repli par rapport à celui que j'ai présenté précédemment. Il vise à réduire les seuils de déclenchement en abaissant la part de parlementaires à un dixième et le nombre d'électeurs à un vingtième, afin de prévenir la détention d'un monopole de déclenchement de ce processus par les partis majoritaires.
La parole est à Mme Yaël Braun-Pivet, présidente et rapporteure de la commission des lois, pour donner l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements.
Je fais partie de ceux qui se sont longuement interrogés en commission des lois sur la question des seuils. Nous sommes arrivés à la conclusion qu'il n'était pas possible d'affirmer que les seuils ne sont pas les bons, puisqu'à ce jour, aucun référendum n'a été organisé dans ce cadre. Ce processus est encore trop récent, puisque la loi organique n'a été adoptée qu'à la fin de 2013. À ma connaissance, aucune tentative n'a échoué faute d'avoir atteint les seuils exigés.
À l'étranger, par exemple en Californie, le seuil a été fixé à 8 % de la population : les seuils que nous avons fixés ne sont pas si éloignés. En 2018, nous n'avons aucun élément factuel nous permettant d'affirmer que les seuils que le législateur a fixés dans la précédente révision constitutionnelle sont si élevés qu'ils empêcheraient tout référendum d'initiative partagée. Il est donc prématuré de les modifier. La commission maintient donc son avis défavorable à ces amendements.
Avis défavorable. Je ferai trois observations. La première est que, comme l'a rappelé Mme la rapporteure, si la révision constitutionnelle est de 2008, la loi organique et la loi ordinaire sont relativement récentes, puisqu'elles ont été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel au début de décembre 2013 : cette procédure n'est donc pas très ancienne. Elle suppose de réunir 180 parlementaires autour d'une demande de l'examen d'un texte, ce qui n'est pas inatteignable, et de recueillir ensuite quelque 4,5 millions d'électeurs, un chiffre élevé…
… mais, sur un sujet passionnant, il est possible d'y réussir.
Deuxième observation : je tiens à rappeler que la procédure de référendum d'initiative partagée ne déclenche pas immédiatement un référendum. Comme vous le savez, elle vise tout d'abord à inscrire une proposition de loi à l'ordre du jour des assemblées, qui s'engagent, chacune, à l'examiner. C'est seulement si elles ne l'ont pas examinée dans un certain délai que le Président de la République la soumet au référendum.
Troisième et dernière observation : nous comptons assouplir ce processus dans le cadre de la Chambre de la société civile. Nous ferons alors des propositions pour vivifier et densifier cette initiative populaire.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Il suffit d'écouter les observations de la garde des sceaux et de la rapporteure pour être certain que la langue de bois continue d'être employée.
Madame la rapporteure, je vous rappelle que j'ai déposé une proposition de loi sur l'immigration, dans le cadre de l'initiative partagée, qui n'a pas abouti – c'est une évidence. Comment voulez-vous que, sous la Ve République, avec le système des groupes parlementaires et le fait majoritaire avéré, il soit possible de réunir 180 parlementaires ? Cette barre est infranchissable.
Il faut cesser de nous prendre pour des imbéciles. Reconnaissez que vous ne le voulez pas ! Soyez claires ! Soyez limpides ! Soyez franches ! Cessez de trouver des prétextes. Vous ne faites pas confiance au peuple, à tel point que la plupart des groupes politiques de l'Assemblée, en 2005, se sont empressés de désavouer ce que le peuple avait voté, sans le consulter de nouveau – ce que propose mon prochain amendement, le no 188 – , mais au contraire en votant en catimini exactement ce que le peuple français avait refusé, ce qui a provoqué une rupture civique considérable dans notre pays. Le divorce est né de cette forfaiture du Parlement à l'égard du peuple français.
Mme Ménard et M. Aliot applaudissent.
Ne prétextez pas le fait que nous n'aurions pas le recul nécessaire. Votre volonté de fermeture tient à un refus de faire confiance au peuple français. Vous avez une méfiance incroyable, alors même que votre projet de loi est, selon son intitulé, censé faire avancer la transparence, la démocratie et je ne sais quoi d'autre encore. Vous oubliez que notre assemblée n'a été élue que par 18 millions d'électeurs sur 45 millions d'inscrits.
Applaudissements parmi les députés non inscrits
J'ai rarement vu autant d'initiatives parlementaires pour tenter de convaincre le Gouvernement, qui n'est absolument pas disposé à écouter ni à comprendre. Je regrette son état d'esprit : vous n'êtes pas responsable, mais les filtres qui ont été prévus ne permettent pas d'atteindre l'objectif que vous aviez vous-même indiqué.
Vous avez, du reste, écarté d'un revers de la main toutes les propositions qui pourraient nous rapprocher de la population dans le cadre d'une démocratie de proximité, qu'il s'agisse de la démocratie participative ou de toutes les mesures entrant dans les logiques territoriales et leur diversité, mesures qui montrent qu'on n'a pas peur du peuple.
Qu'il s'agisse du référendum que je qualifierai de classique ou du référendum d'initiative partagée, j'ai entendu des arguments d'une extrême gravité. Puisque nous sommes face à une société complexe, comme l'a souligné M. de Courson, il ne faudrait pas élargir les thématiques soumises à consultation populaire au champ sociétal. Cela, je le répète, me semble particulièrement grave, parce que nous sommes effectivement dans une société complexe et que de nouveaux sujets doivent être soumis au peuple.
Je ne comprends pas cette attitude de défense déterminée du Parlement, comme s'il fallait lui opposer la consultation populaire, alors qu'ils sont complémentaires. Dans les cas où le Parlement ne peut pas aboutir, le peuple peut construire les résiliences locales et organiser des consultations qui lui permettent de s'exprimer véritablement.
C'est la raison pour laquelle il faut absolument assouplir les procédures permettant au peuple d'accéder le plus rapidement possible et dans les meilleures conditions à la consultation populaire. Il ne faut pas avoir peur du peuple.
Certains arguments reposent sur des syllogismes étranges ! Nous défendons l'idée que les seuils existants ne permettent pas d'enclencher la procédure de référendum d'initiative partagée puisqu'il n'a jamais été utilisé, et on nous répond que c'est justement parce que le référendum d'initiative partagé n'a jamais été utilisé que nous ne pouvons pas prétendre que les seuils posent problème.
Avec de tels arguments, nous ne débattrons bientôt plus de grand-chose !
Je vous propose d'abaisser le seuil des parlementaires à dix-sept tout en laissant le seuil des pétitionnaires à 4,7 millions : vous verrez alors que je vous proposerai un grand nombre de textes permettant d'enclencher la procédure du référendum d'initiative partagée, car vous avez raison, madame la garde des sceaux, cette procédure ne conduit pas directement à la convocation d'un référendum. Pour qu'il soit organisé, il faut que les assemblées n'aient pas examiné la proposition de loi dans les six mois. Personnellement, je suis favorable à ce que la procédure permette d'enclencher directement un référendum. Puisque tel n'est pas le cas, il ne s'agit pas d'un véritable référendum d'initiative partagée.
C'est la raison pour laquelle nous avons présenté l'amendement no 1131 visant à permettre l'organisation d'un référendum sur l'initiative d'un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales.
La force de tous nos arguments est de reposer sur une grande cohérence : puisque le peuple est souverain, il faut s'en remettre à lui. Toutefois, s'il faut adopter une position de repli, je suis favorable à l'abaissement des seuils qui permettent d'enclencher la procédure du référendum d'initiative partagée. Ce sera mieux que si c'était pire, comme j'aime à le souligner souvent ! Faisons cet effort-là ! Madame la garde des sceaux, madame la ministre, abaissez au moins le nombre des parlementaires à dix-sept, si vous voulez laisser le seuil des électeurs à 4,7 millions.
Les amendements identiques nos 692 rectifié et 1723 ne sont pas adoptés.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi constitutionnelle pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures dix.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra