Madame la présidente, je voulais simplement dire tout à l'heure que cette session extraordinaire n'a pas de bornes connues…
L'amendement AS131 vise à substituer aux mots « la périodicité et le contenu des consultations et des négociations obligatoires, ainsi que d'adapter le contenu et les modalités de fonctionnement de », les mots : « une périodicité plus fréquente et un contenu plus large que ceux prévus par la loi des consultations et des négociations obligatoires, ainsi que d'élargir le contenu et d'améliorer l'accès des représentants des salariés à ».
Les consultations périodiques obligatoires sont nombreuses et dépendent du type d'institution représentative du personnel (IRP) considérée. Les principales concernent le comité d'entreprise. Elles constituent la traduction du principe de participation des travailleurs à la gestion de leur entreprise, inscrit à l'alinéa 8 du préambule de la Constitution de 1946. Permettre la modulation de la périodicité et du contenu de ces consultations par voie d'accord, c'est remettre entre les mains des entreprises les mesures d'application de ce principe constitutionnel.
Les négociations obligatoires concernent des sujets d'une importance cruciale pour les salariés. Les thèmes obligatoirement posés sur la table chaque année sont : les salaires effectifs, la durée effective du travail, l'organisation du temps de travail, l'intéressement, la participation et l'épargne salariale, la protection sociale complémentaire des salariés, l'égalité femme-homme, le handicap, l'insertion professionnelle et le maintien dans l'emploi, la pénibilité, le droit d'expression, la qualité de vie au travail, la conciliation entre vie syndicale et vie professionnelle. D'autres thèmes doivent être négociés tous les trois ans.
Le contenu des négociations obligatoires est actuellement prévu par la loi. Le Gouvernement pourrait s'appuyer sur cet article pour laisser aux entreprises la liberté de fixer le contenu de la négociation. Des thèmes aussi importants que les salaires, l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ou les conditions de travail pourraient tout simplement disparaître de la table des négociations si ces sujets étaient vidés de leur contenu.
Il est actuellement possible de déroger à la périodicité des négociations par voie d'accord, mais uniquement dans une limite fixée par la loi en passant d'un à trois ans ou de trois à cinq ans. Cette disposition permettrait au Gouvernement de prendre une ordonnance laissant à la libre appréciation des négociateurs la périodicité des négociations sans encadrement par la loi. Ainsi, ces sujets d'une importance cruciale pour les salariés pourraient n'être plus négociés que très rarement puisque le projet de loi d'habilitation ne prévoit aucune limite à l'adaptation de la périodicité des négociations.
La base de données économiques et sociales (BDES) donne aux IRP le droit d'accès aux données relatives à l'entreprise. Lorsque des négociations et des consultations ont lieu, elle est censée mettre sur un pied d'égalité le chef d'entreprise, qui a accès à toutes les données, et les IRP qui n'ont accès qu'à cette base. Il existe donc déjà un déséquilibre dans le droit positif.
Le contenu de cette base de données est actuellement fixé par la loi. Le Gouvernement souhaite être habilité à prendre une ordonnance permettant de modifier son contenu et ses modalités de fonctionnement sans qu'aucune garantie ne soit apportée quant à l'amélioration de cet outil au profit des salariés. Il souhaite également pouvoir autoriser son adaptation par voie d'accord. Rien n'interdirait donc à l'employeur, sous couvert d'un accord signé dans les conditions très larges prévues par la présente loi d'habilitation, de retirer aux IRP l'accès à des données essentielles pour l'ensemble des consultations et négociations, ce qui déséquilibrerait encore d'avantage le rapport de force.
L'amendement AS131 vise à encadrer le Gouvernement pour que les ordonnances qu'il souhaite prendre ne puissent qu'être favorables aux salariés.