Chaque jour qui passe apporte la démonstration que le président Trump a choisi de procéder à une remise en cause fondamentale, à ce que, en d'autres temps, John Foster Dulles aurait appelé une « révision déchirante » de la politique des États-Unis telle qu'elle avait été définie, il y a plus de soixante-dix ans, par le président Truman et poursuivie depuis lors avec un plein succès.
Cette politique reposait sur un principe simple : l'affirmation sans relâche de la solidarité humaine, économique et militaire des deux piliers de la démocratie mondiale que sont, de part et d'autre de l'Atlantique, les peuples européens et américains. Les bases de cette solidarité s'appellent l'Alliance atlantique, l'Union européenne et l'organisation régulée des échanges.
Le président Trump a décidé de piétiner cet héritage, d'agresser ses amis et de flatter ses ennemis, d'opposer les peuples européens entre eux au lieu de les unir, de tourner le dos à tous les principes d'organisation multilatérale, de préservation de l'environnement et de défense des droits fondamentaux, qui forment le coeur de notre engagement collectif et le ciment de notre héritage occidental. Nous ne pouvons plus nous voiler la face. Nous devons opposer à ces tentatives absurdes d'autodestruction du meilleur de notre histoire des réponses qui soient à la hauteur des nouveaux défis.
Militairement, pouvons-nous, face au désengagement moral des États-Unis, nous satisfaire d'une initiative de défense, certes bienvenue, mais totalement sous-dimensionnée ? Judiciairement, pouvons-nous nous accommoder plus longtemps de la compétence prétendue universelle des États-Unis en matière de transactions financières ? Commercialement, si nous voyons bien l'intérêt qu'il y a à ne pas entrer dans le jeu de l'escalade protectionniste, ne devons-nous pas voir, comme les Chinois en font la démonstration, que seule la fermeté est respectée ? Il ne s'agit plus de relancer la construction européenne mais d'oser l'indépendance européenne.