Une remarque d'ordre général tout d'abord : le seul fait de ne pas être d'accord entre nous n'implique pas qu'il y aurait d'un côté ceux qui seraient soucieux de la sécurité de nos concitoyens, et de l'autre, ceux qui ne le seraient pas. Il est nécessaire, lorsque nous examinons des textes fondateurs comme celui-ci, que le Gouvernement prenne toutes ses responsabilités pour trouver un terrain d'entente. Des avancées utiles doivent aboutir à un point d'équilibre. C'est ainsi que la représentation nationale pourra sortir collectivement renforcée de l'examen de ce projet de loi. Cela dépend autant des parlementaires que nous sommes que du ministre que vous êtes.
Comme mes collègues MM. Éric Ciotti et Guillaume Larrivé l'ont souligné avant moi, nous nous accordons sur le constat alarmant que vous avez établi, monsieur le ministre d'État. En revanche, je ne vous suis pas du tout lorsque vous avancez que l'état d'urgence aurait des effets contre-productifs sur le tourisme. Ce qui peut nous motiver à sortir de l'état d'urgence, ce n'est pas ce genre de contingences mais la conviction que nous pourrons plus efficacement préserver la sécurité de nos concitoyens. Pardonnez-moi d'être un peu brutal mais qu'importe ce que les compagnies d'assurance américaines en penseront !
Il y a une disposition du projet de loi dont je ne parviens pas à trouver la cohérence : le changement du régime de l'assignation à résidence. L'assignation ne sera plus « à résidence » mais à l'échelon de la commune. Or dans des grandes villes comme Paris ou Marseille, les services de sécurité perdront très vite de vue l'individu faisant l'objet d'une surveillance dans les méandres de leurs rues. Un tel changement est motivé par la volonté de préserver les intérêts professionnels et familiaux de l'individu concerné. J'aimerais que vous nous disiez combien de personnes ont pâti de la mesure d'assignation dans leur vie professionnelle ou familiale. Je pense que bien peu se sont heurtées à des contraintes. Il me semble que vous desserrez dangereusement l'étau.
De deux choses l'une : ou bien ces individus sont véritablement dangereux et il convient de les assigner à résidence car ils risquent sinon de profiter des failles du nouveau dispositif en essayant d'entrer en contact avec d'autres personnes dans la ville où ils ont leur domicile en invoquant des liens familiaux ; ou bien vous considérez qu'il est nécessaire de leur laisser une certaine liberté pour mieux les suivre et glaner des renseignements, comme le suggéraient certains membres de l'extrême-gauche, et, à ce moment-là, autant renoncer à l'assignation à l'échelon de la commune et lâcher totalement la bride.