Intervention de Laurence Vichnievsky

Réunion du mercredi 13 septembre 2017 à 15h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurence Vichnievsky :

La sage commission des Lois du Sénat a innové avant nous en proposant un amendement très similaire à celui que nous défendons aujourd'hui, et qui vise à conditionner la prolongation des mesures de surveillance et de contrôle à la décision du JLD.

Soyons clairs : ce n'est pas le contenu de ces mesures qui nous pose problème. Elles nous paraissent justifiées au regard de la menace à laquelle nous sommes exposés, en l'absence même de commission d'infraction. C'est seulement le régime de leur mise en oeuvre qui nous paraît poser problème.

Nous entendons concilier efficacité et respect de l'article 66 de la Constitution, et donc des équilibres institutionnels. Nous souhaitons que l'autorité judiciaire, à qui la Constitution donne le rôle de garante des libertés individuelles, soit réintroduite dans le dispositif.

L'efficacité serait préservée, car nous laissons au ministre de l'Intérieur le soin de prescrire ces mesures. Au contact des services de renseignement, c'est lui qui sait le premier où doit porter la surveillance. Mais dès lors qu'il s'agit de les renouveler, l'autorité judiciaire doit retrouver sa place naturelle.

On ne manquera pas, je le sais, de nous opposer la récente jurisprudence du Conseil constitutionnel qui, dans le cadre de l'état d'urgence, a restreint l'intervention exclusive du juge judiciaire aux seules mesures privatives de liberté, estimant que les mesures de police administrative qui seraient simplement restrictives de liberté ne relèvent pas de son contrôle. Nous observons que l'article 66 ne procède pas à une telle distinction et que l'esprit des constituants de 1958 était bien de faire de l'autorité judiciaire la garante des libertés individuelles, et notamment de celle d'aller et de venir.

Nous pensons que les modifications proposées par le Sénat, et que nous reprenons dans notre amendement, représentent un bon équilibre entre efficacité et protection de la liberté individuelle, en laissant au seul ministre de l'Intérieur la décision initiale, mais en confiant au juge judiciaire la possibilité de la renouveler.

Le texte proposé prévoit que, pour prolonger ces mesures, le ministre de l'Intérieur devra s'appuyer sur des éléments nouveaux ou complémentaires. Le juge judiciaire, lui, devra apprécier si la menace terroriste perdure sans avoir à apporter d'éléments complémentaires. C'est un argument de plus en faveur de l'efficacité.

Par ailleurs, nous avons prévu des délais réduits s'agissant du recours possible contre la décision du ministre de l'Intérieur de manière à éviter tout chevauchement dans le temps entre la décision du juge administratif et la décision de prolongation du juge judiciaire.

Il n'y a pas non plus de risque de chevauchement entre les interventions respectives du juge administratif et du juge judiciaire. Le juge judiciaire ne sera jamais amené à apprécier la validité d'un acte administratif dans le système que nous proposons.

Pour finir, je précise que ce système mixte existe déjà en matière d'hospitalisation d'office pour troubles mentaux à la demande du préfet et en matière de rétention administrative pour les étrangers.

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