Intervention de Gilles Fumey

Réunion du mercredi 27 juin 2018 à 11h00
Commission d'enquête sur l'alimentation industrielle : qualité nutritionnelle, rôle dans l'émergence de pathologies chroniques, impact social et environnemental de sa provenance

Gilles Fumey, professeur de géographie culturelle à l'Université Paris Sorbonne IV Lettres, Pôle alimentation, risques et santé :

Ce sont nos modes de vie qui formatent notre manière de manger. Si vous êtes une jeune maman, que vous travaillez, que votre mari ne fait pas la cuisine et que vous voulez quand même donner une nourriture variée à vos enfants, vous irez chez Picard et achèterez des aliments industriels. Mais, le dimanche, vous irez au marché et ferez de vos invitations à la maison une offrande sociale. Je l'explique ainsi à mes étudiants pour les faire sourire : quand on fait un barbecue, on reproduit l'attitude très archaïque de l'homme de Cro-Magnon, puisque monsieur s'occupe de la viande et madame s'occupe du reste.

Nos modes de vie et nos techniques fabriquent notre rapport à l'alimentation, sans parler des évolutions induites par les smartphones. Ainsi, par beau temps, j'ai pu constater que la place du Panthéon est devenue un gigantesque restaurant : les étudiants s'installent partout, il y a du plastique, du carton, des plats pas chers – même le Picard du quartier a installé une petite salle et un micro-ondes pour réchauffer les produits achetés en magasin ! L'évolution de nos modes de vie est donc considérable. Elle va transformer notre accès à l'alimentation.

En outre, dans quelques années, nos smartphones nous feront des propositions en fonction des recommandations de notre diététicien, des informations qu'ils auront enregistrées et de ce que nous aurons mangé la veille. La personnalisation de l'offre fera d'énormes progrès et les distorsions accrues entre l'« alimentation contrainte » de la semaine – hors du domicile ou « cuisine corvée » à la maison – et l'« alimentation loisir » du dimanche.

Dans ce contexte, les jardins partagés ou les jardins en toiture ne sont pas complètement ridicules, même s'ils ne suffiront pas à nous nourrir. Comme truchement éducatif, ils sont utiles pour sensibiliser les jeunes et les enfants, en grande majorité urbains, et leur rappeler que ce qu'ils mangent vient de la terre et de l'eau.

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