L'impact du changement climatique sur la forêt française en général, notamment sur la forêt littorale, est un phénomène très complexe. Il fait l'objet de colloques qui durent des semaines, dont on ressort parfois sans avoir les idées plus claires… S'il est très complexe, c'est parce qu'il fait intervenir simultanément plusieurs facteurs, sur lesquels plane une grande incertitude.
Premièrement, que sera exactement le changement climatique du point de vue local ? On dispose d'un certain nombre de modèles qui donnent des idées de ce qu'il peut être, mais avec des variations. En moyenne, comment le climat va-t-il changer ?
Deuxièmement, quels seront les phénomènes extrêmes qui vont se produire, et à quelle fréquence ? La question est très importante pour un arbre, qui a une durée de vie très longue. Un événement exceptionnel par sa dureté qui se produit tous les siècles n'aura pas du tout le même impact qu'un événement qui se produit tous les dix ans. La réaction forestière sera très différente.
Les effets indirects des températures élevées ou basses sur l'état sanitaire des forêts sont un troisième élément. Les attaques parasitaires sur les forêts sont aujourd'hui relativement bénignes, mais elles pourraient être massives demain si les conditions climatiques devenaient plus favorables aux parasites et fragilisaient les arbres. Or, on ne traite pas une forêt, d'abord parce qu'on ignore comment le faire, mais aussi pour des raisons écologiques : face à une attaque sanitaire massive, l'unique façon de stopper la progression est d'intervenir de façon chirurgicale, en coupant les arbres dans les parties de la forêt touchées. Il nous est très difficile de prévoir comment les parasites évolueront en fonction des changements climatiques.
Enfin, ces différents facteurs se cumulent. Si la forêt peut parfaitement résister à un phénomène et s'en remettre, le couvert forestier deviendra beaucoup plus vulnérable s'il doit à la fois subir des sécheresses et une attaque parasitaire.
La substitution des espèces dépend beaucoup de ce cocktail de facteurs et de leur importance. Il est donc difficile de savoir si le chêne se substituera au pin. Ce que nous savons, c'est que les espèces rustiques sont moins sensibles à ces phénomènes. Dans la pratique, nous mélangeons le plus possible les espèces et les essences en espérant que certaines sortiront indemnes, ou peu touchées. Nous demeurons tout de même dans l'inconnu, d'autant plus que nous raisonnons à cent ou cent cinquante ans : les arbres que nous plantons aujourd'hui devront résister au climat que la France connaîtra dans plus d'un siècle.