Intervention de Albert Maillet

Réunion du lundi 5 février 2018 à 15h00
Mission d'information sur la gestion des évènements climatiques majeurs dans les zones littorales de l'hexagone et des outre-mer

Albert Maillet, directeur forêts et risques naturels de l'Office national des forêts (ONF) :

S'agissant de la manière dont le système forestier évolue en fonction des changements climatiques attendus ou anticipés, j'insisterai sur deux points – en me concentrant sur la forêt domaniale puisque la forêt des collectivités locales ne relève pas de l'ONF. Je le disais tout à l'heure, c'est l'État qui est propriétaire de la forêt domaniale. Nous n'en sommes que les gestionnaires mais des gestionnaires un peu particuliers puisque l'État nous en cède en quelque sorte l'usufruit – même si ce n'est pas le terme exact : nous assurons toutes les dépenses de gestion et encaissons toutes les recettes du domaine.

En tant que directeur de l'ONF, je gère 1 300 forêts domaniales en France. Elles sont évidemment identifiées une par une mais je les gère en fait comme si elles étaient une seule forêt. C'est l'avantage d'avoir un établissement public national : on peut faire de la péréquation entre les forêts qui rapportent, au titre de la vente de bois comme de la chasse, et celles dont le bilan économique est moindre mais dont l'intérêt est important sur le plan touristique ou de la gestion des risques.

D'autre part, sur le plan économique, on assiste à une évolution assez rapide de la filière bois. Il n'y a plus une, mais des filières. La filière bois énergie n'est pas la filière bois d'oeuvre ni la filière bois industrie. Autrefois, vous aviez un acheteur qui faisait son affaire du bois que vous lui vendiez. Aujourd'hui, les filières ont leur logique économique propre. Elles n'ont ni le même rythme de développement ni les mêmes périodes de croissance et de creux. Par exemple, la filière bois énergie dépend très fortement des prix du pétrole et du gaz ; la filière bois d'oeuvre, pas du tout. Nous essayons donc de trouver la meilleure façon de valoriser une essence donnée dans une filière donnée et de mettre le plus de valeur ajoutée possible dans notre manière d'appréhender le bois. Il y a quelques dizaines d'années, nous vendions l'arbre en entier à un acheteur. Aujourd'hui, nous faisons du bois façonné. Nous faisons abattre l'arbre nous-mêmes et y identifions différentes parties – le tronc, les branches etc. – que nous injectons dans différents circuits de valorisation. La manière dont les forêts seront valorisées demain dépend donc non seulement de leurs caractéristiques, mais aussi de la stratégie des filières aval et des stratégies d'innovation. Il y a énormément de bois qu'on jugeait impropre à la construction il y a quelques années et qui, aujourd'hui, grâce à de nouvelles technologies de rectification, peut être retravaillé et rendu utilisable par le transformateur. Les matières forestière et industrielle ne relèvent pas des mêmes échelles temporelles. Colbert avait planté des chênes pour fabriquer des mâts pour les voiliers de guerre de Louis XIV ; on en fait aujourd'hui des barriques qui servent à certains grands noms d'alcool français pour exporter cette industrie du luxe aux quatre coins du monde – et c'est le même arbre. (Sourires)

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