Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs, chers collègues, j'ai dit tout à l'heure à mon collègue Lionel Quillet : « Parlons peu, parlons bien ». Sur le sujet qui vous occupe, et pour répondre à toutes les questions que vous nous posez, il y aurait effectivement beaucoup à dire. À ces questions, des réponses de bon sens s'imposent immédiatement, au sujet notamment des problèmes d'urbanisme, ou à celui de la solidarité – il est certain qu'en période de crise elle est très importante.
Nous avons vécu plusieurs étapes. La première de vos questions, madame la présidente, portait sur le problème des événements climatiques : perçoit-on, des uns aux autres, une évolution sensible ? La réponse est oui. Je faisais partie, il y a une quinzaine d'années, des climato-sceptiques. Maire d'une petite commune littorale, j'ai pourtant constaté, au fil du temps, le réchauffement, le changement climatique, et parfois des événements tempétueux rapprochés, totalement différents de ce que j'avais vécu enfant. Le changement est perceptible à l'échelle de trente, quarante, cinquante ans, pas d'une année sur l'autre. Je peux comprendre qu'il y ait encore aujourd'hui des gens qui n'y croient pas.
Le rapport direct avec l'érosion du trait de côte a été établi très récemment. Plusieurs textes en témoignent : deux propositions de lois émanant du Sénat, en particulier, reflètent directement la perception, sur les territoires littoraux, des événements climatiques, mais aussi de l'érosion côtière. Il y a un travail à faire, il est engagé. Il permettra de prendre en compte tout à la fois l'organisation territoriale et urbanistique du littoral, et les événements climatiques, notamment les risques de submersion. Sur ce dernier point, Lionel Quillet sera peut-être mieux à même de vous répondre, à partir des travaux pratiques qu'il mène dans sa commune.
Sur les systèmes d'alerte, la France n'est pas la dernière de la classe. Son approche du sujet a progressé, depuis de nombreuses années, grâce aux travaux d'organismes comme Météo-France et à ceux des associations, en coopération parfois avec le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). La carte de vigilance météorologique, par exemple, est aujourd'hui un élément important des stratégies de court et de moyen terme – quant à parler de long terme en météorologie du quotidien, c'est difficile… Mais on a là quelque chose de très intéressant, qui peut être un bon support préalable, avant l'alerte, notamment pour les populations d'Outre-mer.
Parmi les éléments qui me sont transmis à l'ANEL, en particulier depuis les territoires ultramarins, je retiens la dépendance satellitaire des informateurs susceptibles de nous alerter. La plupart des satellites d'où proviennent, dans les moments de crise, nos informations météorologiques seraient, pour autant que je puisse en parler sans expertise dans ce domaine, des satellites américains. Donc, si nous visons à l'indépendance face à des phénomènes dramatiques comme Irma, il faut se poser la bonne question sur ces satellites d'information, mais aussi sur les satellites de suivi au moment de la crise, lorsqu'il est crucial de pouvoir remettre en place des moyens de communication très rapides, au-delà de ceux du réseau courant. Or, la voie satellitaire est aujourd'hui la plus sûre et la plus rapide, notamment pour permettre aux secours de venir sur place.
Beaucoup d'élus m'ont parlé d'un site nommé Géorisques, réalisé par le BRGM, qui fait connaître les risques pour un territoire donné. Il ne fournit pas d'anticipation, à court ou moyen terme, de ce qui pourrait se produire, mais définit au présent les types de risques susceptibles de s'y réaliser. On est, certes, confronté, dans ce domaine, aux échelles de temps et d'espace, mais je pense qu'il est intéressant de développer ce genre d'outils pour affiner notre connaissance des événements et de l'influence du réchauffement climatique sur les digues.
Un dernier mot, avant de laisser la parole à mes collègues, sur les PPRL et sur le sentiment des élus du littoral à leur sujet. Il y a eu plusieurs phases, et un traitement différencié des PPRL selon les territoires. Ils ont souvent été élaborés lors d'une première phase d'urgence, de manière peut-être un peu précipitée, dans la situation dramatique qui a suivi la tempête Xynthia. De tous bords, face la gravité de l'événement, on a souhaité verrouiller les territoires littoraux. Dans certains, la discussion et le temps pris pour l'élaboration de ces documents ont permis de les amender, mais dans d'autres la situation reste figée et très complexe pour les élus locaux – Lionel Quillet nous en parlera –, qu'il s'agisse de réaliser les projets ou simplement de reconstruire et de développer le territoire.
Il y a là un vrai problème. Je pense que les PPRL devraient être traités de la même façon par tous les préfets, de manière à être à la fois équitables et conformes aux problématiques du territoire, qu'elles soient climatiques, comme dans les outre-mer, ou liées à la géographie locale. Là où les côtes sont très basses, on ne se pose évidemment pas les mêmes questions que là où le premier point de contact avec la ville est à neuf ou dix mètres au-dessus de la plage, parce que les effets de la submersion ne seront pas les mêmes.
Voilà, donc, en quelques mots, ce que je souhaitais vous dire en préambule sur ma vision de votre mission. Je l'approuve pleinement, et je l'ai d'ailleurs citée lors des discussions générales, au Sénat, sur les textes littoraux que j'évoquais tout à l'heure. Après chaque événement grave, on organise une nouvelle mission, mais il est important de pouvoir évaluer les réponses apportées, afin de se poser les bonnes questions sur ces sujets sensibles.