Intervention de Lionel Quillet

Réunion du mardi 22 mai 2018 à 17h30
Mission d'information sur la gestion des évènements climatiques majeurs dans les zones littorales de l'hexagone et des outre-mer

Lionel Quillet, vice-président du conseil départemental de Charente-Maritime, membre de l'Assemblée des départements de France :

Entre la notion illusoire de digue infranchissable et celle de digue transparente, qui est actuellement la base des raisonnements de la DGPR, il y a un entre-deux. Quand les Hollandais viennent sur nos digues, un peu partout en France, ils nous disent « Trop petit ! ». Que voulez-vous, on les a faites en fonction d'une analyse coût-bénéfice… Il y a un risque technique, que l'on prend ou que l'on ne prend pas, il n'est pas le même en métropole et dans les outre-mer, etc.… Mais nos digues sont trop petites pour nous protéger, on a beau en construire, cela ne change pas grand-chose à la situation de départ. Nous devons y remédier.

Un deuxième problème est fondamental. Je me rappellerai toujours le directeur de cabinet d'un ministre, dont je tairai le nom, qui disait : « Le bon échelon, c'est l'EPCI ». Pourtant, quand il se passe quelque chose, seul le département est prévenu, et c'est lui qui est mis en alerte. D'ailleurs, sur la carte météo diffusée à la télévision, ce sont les départements en alerte qui apparaissent. Leurs administrations sont aussitôt sollicitées pour effectuer des surveillances et coordonner l'ensemble des collectivités. Comme celles-ci répondent qu'elles manquent d'agents compétents, ce sont les services départementaux qui mettent en place les engins nécessaires pour que le territoire reste approvisionné en électricité, etc. : les départements sont mobilisés pour l'ensemble des opérations. La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) leur a ôté la compétence générale, mais quand un problème survient, seul le département est là. Les EPCI n'ont pas les moyens de réagir. L'État, bien sûr, répond très bien dans les situations d'urgence – nous étions soulagés, après Xynthia, de voir arriver pompiers et militaires –, mais le département était sorti du jeu.

Nous faisons tout pour l'y ramener, parce que tous les EPCI nous disent : « Ne nous laissez pas tout seuls ! ». Il y a certes des collectivités qui ont des moyens, la communauté urbaine de Bordeaux, par exemple, n'a pas besoin du département, mais ce n'est pas le cas des autres. Or toute la loi a été faite en dépit de ces besoins. On s'est trompé d'échelon : si l'on veut que les responsabilités soient exercées au plus près, il faut en donner les moyens aux collectivités locales. Or la plupart des EPCI littoraux ne les ont pas.

Pour en revenir aux digues, il est vrai qu'elles ne sont pas infranchissables. Le risque est absolu, il faut vivre avec. En France, on n'assume pas le risque, on vit contre, alors qu'on devrait vivre avec. Je suppose que les habitants de La Réunion ou de Tahiti vivent avec le risque, qu'ils le connaissent, et qu'ils savent qu'il est inutile de bâtir des ouvrages énormes. Au lieu de nous obstiner à faire quelque chose contre le risque, nous devrions admettre son existence. Or, plutôt que de chercher une solution, nous en restons à la question : « S'il y a des victimes, qui sera responsable ? » Et nos dirigeants se sont montrés soucieux, avant tout, que ce ne soit pas l'État. Je rappelle la phrase célèbre d'un directeur de cabinet ministériel : « La Faute-sur-Mer a été un grand traumatisme, le directeur adjoint de la direction départementale de l'équipement a donc été renvoyé devant la justice. » Après ce mot malheureux, la réunion s'est mal passée.

La réponse n'est pas juridique. Il s'agit de s'adapter au risque, en tenant compte du fait que, de Hendaye à Saint-Brévin-les-Pins en passant par l'île de Ré, la majorité des habitants ne résident pas là en permanence et ne connaissent de la mer que le spectacle pittoresque des vagues à marée montante. Quelles conséquences tirer du drame de La Faute-sur-Mer ? Que le maire est responsable ? Cela ne suffira pas.

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