Intervention de Gilles Carrez

Réunion du mercredi 20 septembre 2017 à 11h05
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Carrez :

Je reviens sur la question des primes à l'émission. Nous avons déjà eu ce débat l'an dernier : nous étions parfaitement conscients du fait que l'écart de taux, dans un contexte de baisse, justifiait une politique de primes à l'émission ; nous savions également que cela se faisait également à l'étranger et qu'il n'y a pas si longtemps, peut-être en 2011, le montant avait atteint une dizaine de milliards d'euros. Pourquoi avons-nous soulevé ce problème ? Parce que brutalement, en l'espace de trois ans, les primes à l'émission ont atteint un montant compris entre 2 et 3 points de produit intérieur brut (PIB). Cela avait évidemment l'avantage pour nous de moins frôler le seuil symbolique des 100 % de PIB, et de ce point de vue, nous pouvions comprendre les motivations du Gouvernement. Mais pourquoi les primes à l'émission se sont-elles brutalement envolées, atteignant le double des maxima historiques ? La Cour des comptes elle-même l'avait souligné, en termes certes plus mesurés que notre commission des finances.

Cependant, l'essentiel n'est peut-être pas là, mais pour la suite. Observez des frais financiers dans le budget de l'État : 37 milliards d'euros en 2002, un peu plus de 41 milliards d'euros aujourd'hui. La dette a pratiquement doublé entre-temps. Toutes les majorités successives ont bénéficié pleinement de cette baisse des taux, toutes ces dernières années – y compris à la fin de la législature 2007-2012, tous les budgets ont été bouclés en loi de finances rectificative grâce à une économie de constat sur les frais financiers. En 2017, pour la première fois, ce ne serait, si j'ai bien compris, pas forcément le cas – il serait bon que vous précisiez ce point. Or le gros inconvénient des primes à l'émission, c'est de renvoyer aux années suivantes une augmentation de la charge financière ; cela ne peut être contesté. Dans cette situation où, année après année, les budgets sont bouclés grâce aux économies sur les frais financiers, cette politique peut se révéler dangereuse. Il est vrai que la dette est un véritable paquebot et que les choses n'évolueront que doucement, mais c'est quand même inquiétant. Comment boucler le budget sans faire déraper le déficit ? Je parle bien en comptabilité budgétaire. Les frais financiers augmentent assez rapidement... Il faudrait d'ailleurs nous donner des chiffres plus précis à cet égard.

Autre sujet de préoccupation : pendant la crise, le déficit public a atteint 130 milliards d'euros. Nous l'avons financé par la dette et, compte tenu de sa maturité moyenne, les prêts alors contractés devront être refinancés prochainement. Nous allons donc nous retrouver avec un besoin de financement qui, alors que nous restions ces dernières années à 100 ou 110 milliards en amortissement et financement, va passer à 140, voire 150 milliards d'euros. Comment allons-nous nous situer par rapport aux autres pays européens ? Notre besoin de financement ne va-t-il pas devenir le premier – et de loin – au sein de la zone euro, ce qui diminuerait la qualité de notre dette, c'est-à-dire la confiance que les investisseurs – en majorité des non-résidents – peuvent avoir dans les titres que nous émettons ?

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