Je veux d'abord remercier la Cour des comptes, qui a rendu un rapport tout à fait remarquable, extrêmement utile en ce début de législature.
La Cour des comptes est tout à fait dans son rôle en posant la question de la sincérité des comptes publics, de même que le Conseil constitutionnel. L'opposition a saisi le Conseil constitutionnel au mois de décembre dernier à propos de la loi de finances initiales pour 2017. Notre saisine posait, entre autres, la question de la sincérité des prévisions de recettes et de dépenses. La Cour des comptes insiste sur un élément nouveau, qu'a souligné le président de notre commission : la question de la sincérité porte sur les recettes, leur évaluation et les problèmes que pose l'évaluation de l'élasticité des recettes, mais aussi sur les dépenses. Citons le rapport d'audit, en page 97 : « l'écart relevé […] résulte en 2017 quasi exclusivement d'une sous-estimation des dépenses de l'État, pour lesquelles ce dernier dispose des capacités d'action les plus directes ». C'est cela, la différence, notamment par rapport à 2012. Et le problème tiendra de plus en plus à l'estimation des dépenses car, grâce à la création du Haut Conseil des finances publiques, nous disposons aujourd'hui, sur les prévisions macroéconomiques et les prévisions de recettes, de garanties que nous n'avons pas pour les dépenses.
Nous avions donc saisi le Conseil constitutionnel, qui a rejeté les arguments par lesquels nous défendions l'idée d'une insincérité de ce dernier budget dans un ensemble de considérants. Le plus important est le dernier : « En dernier lieu, si l'évolution des charges ou des ressources était telle qu'elle modifierait les grandes lignes de l'équilibre budgétaire, il appartiendrait en tout état de cause au Gouvernement de soumettre au Parlement un projet de loi de finances rectificative. » Or, c'est un décret d'avance qui est en cours de préparation, mes chers collègues, qui porte sur des sommes d'un montant totalement inédit, probablement supérieur à 4 milliards d'euros. Grâce à la loi organique relative aux lois de finances – remercions Didier Migaud qui en est l'un des pères –, les décrets d'avance sont désormais présentés pour avis à la commission des finances. Notre rapporteur général fera donc un rapport. Je pose cependant la question : peut-on s'affranchir de la nécessité d'une loi de finances rectificative, procéder par simple décret d'avance, au mépris de nos responsabilités essentielles de parlementaires ? C'est une question dont j'espère que le président de la commission des finances la posera. En tout cas, nous sommes là pour défendre les pouvoirs du Parlement. Dans la Constitution, en matière de loi de finances, le rôle du Parlement est absolument décisif, et nous ne pouvons pas l'aliéner à l'administration ou à l'exécutif. C'est ma question, que je pose aussi à notre rapporteur général.
Dernier point, vous évaluez, monsieur le Premier président, le déficit 2017 à 3,2 points de PIB, mais j'ai cru comprendre que vous parveniez à ce chiffre en tenant compte de l'annulation, à vos yeux quasi automatique, de 2 à 3 milliards d'euros de crédits. Me trompé-je donc en disant que, sans ces annulations, le déficit réel s'élève à 3,4 points de PIB ?