Merci, monsieur le Premier président, pour ce rapport très éclairant. N'étant pas une ancienne de la Cour des comptes, contrairement aux précédents intervenants, j'en respecte totalement l'indépendance, que nous devons respecter à la lettre. Je me demande donc si les anciens membres de la Cour des comptes devraient siéger au sein de notre commission des finances...
Je souhaite revenir sur plusieurs points. Au fond, vous écrivez qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil, puisque nous lisons, en page 15 de votre rapport, que le dérapage que vous constatez « est du même ordre de grandeur que celui mis en évidence lors de l'audit des finances publiques en 2012 ». Vous expliquez très clairement qu'en 2012 il y avait un problème de recettes et qu'en 2017 il y a un problème de dépenses. Cela étant, un problème de recettes ne peut pas être réglé : si vous ne les avez pas, vous pouvez toujours chercher mais vous ne les trouverez pas. En revanche, un problème lié aux dépenses peut être résolu, ou, du moins, atténué par la réserve de précaution à laquelle vous faites référence en page 66 de votre rapport d'audit et dont vous qualifiez le niveau – 13 milliards d'euros – de « très élevé ». J'ai entendu les commentaires prononcés ici ou là mais il se trouve que, l'an dernier aussi, la réserve de précaution était très importante, et que près de 6 milliards de cette réserve ont été annulés : 3 milliards de véritables annulations et 2,8 milliards de gel jusqu'en fin de gestion. À supposer que Gilles Carrez ait raison et que vous ayez déjà pris en compte l'annulation de 2 milliards d'euros dans le calcul du déficit et que vous arriviez ainsi à 3,2 % du PIB, si j'intègre les mêmes éléments que l'an dernier, soit 4 autre milliards d'euros annulés, nous parvenons bien à 3 % de déficit public pour l'année 2017, et nous sommes « dans les clous ».
Naturellement, je serais heureuse de savoir ce que vous pensez de ce calcul, mais j'ai du mal, monsieur le Premier président, à comprendre pourquoi vous avez choisi de donner cette tonalité à votre rapport. Vous affirmez – c'est un titre qui figure en page 26 de votre rapport – que « seules les administrations locales et de sécurité sociale ont amélioré leur solde », sous-entendant que l'État n'a rien fait. Cependant, dans le développement qui suit, vous écrivez qu'il faut prendre garde au fait que l'État paye pour les autres. Effectivement, toutes les exonérations de cotisations sont autant de recettes en moins pour la sécurité sociale, que l'État compense. S'il paie en somme pour tout le monde, vous aurez évidemment du mal à trouver qu'il a réduit son déficit ! La Cour des comptes aurait pu prendre plus de précautions dans le choix de ce titre et montrer la réalité de la réduction du déficit de l'État hors ces compensations versées à tout le monde. Évidemment, si l'État paie pour tout le monde, on peut toujours dire qu'il ne réduit pas son déficit, mais c'est une lecture un peu biaisée...
Deuxième point : vous livrez en page 43 un tableau très intéressant, qui vise à faire le bilan des 50 milliards d'euros d'économies proposés et votés en lois de finances. Voilà qui rouvre notre éternel débat sur la fameuse tendance. Chaque fois que l'on calcule une économie, c'est par rapport à une tendance. Quelle tendance la Cour a-t-elle donc prise en compte pour calculer ces économies et comment la justifie-t-elle ? A-t-elle pris cette tendance selon laquelle, en raison de l'augmentation et du vieillissement de la population, chaque année les dépenses augmentent naturellement de 1 %, 2 % ou 3 % ? Si la tendance intègre les économies déjà réalisées les deux ou trois années précédentes, l'exercice est quelque peu faussé. Quel est le détail des hypothèses retenues ?
En tout cas, le même gel de la réserve de précaution que l'an dernier nous permettrait un déficit limité à 3 % du PIB, ce qui est exactement ce que requièrent les traités européens !