Intervention de Jean-Paul Dufrègne

Réunion du mercredi 5 juillet 2017 à 8h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Dufrègne :

Cette première matinée de travail au sein de la commission des finances est donc marquée du sceau de l'austérité et de la rigueur budgétaire.

La Cour des comptes vient étayer l'idée que notre pays vivrait au-dessus de ses moyens, publiant un audit dont l'essentiel de l'analyse a pour vocation d'accréditer la thèse selon laquelle l'État serait « accro à la dépense publique », dépense publique jugée inefficace et endémique.

Cet audit tombe à point nommé pour le Gouvernement. Lorsque M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics, nous présentera ses orientations budgétaires, ne doutons pas qu'il s'appuiera opportunément sur ce travail dont il aura besoin pour mettre en oeuvre la politique régressive esquissée hier par le Premier ministre.

Une nouvelle fois, nous regrettons que l'audit de la Cour des comptes se focalise sur les seules dépenses publiques, sans aborder dans le détail l'autre versant d'un budget, à savoir les recettes.

Je n'entrerai pas dans une bataille de chiffres. Ils ne rendent compte en rien de la réalité vécue par de nombreux Français sur nos territoires : chômage, services publics en recul, sentiment d'abandon, et menace du déclassement.

Ces chiffres occultent largement les sacrifices consentis par nos concitoyens depuis cinq ans, alors même que l'on va manifestement leur en demander encore plus. Ces derniers ainsi que les collectivités locales ont dû faire des efforts incroyables. Je pense à la consolidation budgétaire nécessaire pour financer le CICE et ses 20 milliards d'euros de crédits d'impôt annuels, accordés sans contreparties et sans ciblages. Si les promesses de créations d'emplois s'étaient réalisées, le niveau de certains déficits ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui.

Pourquoi la Cour des comptes n'emploie-t-elle pas son énergie à dénoncer ce gaspillage d'argent public ? Pourquoi se contente-t-elle de demander dans son rapport que les évaluations se poursuivent sur le sujet ? Monsieur le Premier président, en supprimant le CICE et les autres mesures inefficaces du pacte de responsabilité, n'aurions-nous pas un excellent moyen d'atteindre les sacro-saints 3 % de déficit ?

Je n'aborderai pas les raisons qui expliquent que l'endettement de notre pays s'est creusé au cours des trente dernières années. En tout cas, une fois encore, en brandissant le spectre de la dette, on veut tuer dans l'oeuf toutes les politiques de progrès social qu'attendent nos concitoyens les plus exposés. Ils ne demandent pas une réduction des effectifs de la fonction publique. Lorsque l'on connaît les moyens dont dispose aujourd'hui l'hôpital public – et surtout ceux qui lui manquent –, votre projet de ne pas remplacer un agent de la fonction publique hospitalière sur trois nous fait froid dans le dos.

J'ai aussi cherché dans votre rapport un propos sur la fraude et l'évasion fiscales. Elles font perdre chaque année à l'État 60 à 80 milliards d'euros, soit l'équivalent de notre déficit. Je n'ai rien trouvé. Pourquoi ce silence de la Cour des comptes ?

En remplaçant le CICE par un dispositif réellement efficace pour l'emploi et l'industrie, en faisant de la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales une priorité nationale, nous retrouverions, dans la justice fiscale, des marges de manoeuvre budgétaires pour soutenir nos écoles, nos hôpitaux, le logement, la sécurité, l'éducation, et la transition écologique – autant de sujets dont l'on parle beaucoup.

Nous avons le sentiment que vous tracez une feuille de route pour le Gouvernement et que nous n'avons pas d'autre choix que de suivre vos préconisations.

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