Intervention de Véronique Gasté

Réunion du jeudi 19 juillet 2018 à 9h15
Commission d'enquête sur l'alimentation industrielle : qualité nutritionnelle, rôle dans l'émergence de pathologies chroniques, impact social et environnemental de sa provenance

Véronique Gasté, cheffe de bureau de la santé, de l'action sociale et de la sécurité de la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) du ministère de l'éducation nationale :

Je vous remercie, monsieur le président.

La DGESCO a pour mission d'impulser l'ensemble des politiques éducatives pédagogiques, de la maternelle à la terminale. Cela concerne 12,3 millions élèves, répartis dans près de 68 000 établissements et unités pédagogiques, si l'on recense l'ensemble des écoles, collèges et lycées publics et privés sous contrat. Ce chiffre amène déjà un élément de réponse à l'une de vos interrogations relatives à l'aspect hétérogène de l'application des actions, puisque, vous vous en doutez, il est fort difficile de savoir ce qui se passe dans 68 000 unités pédagogiques, même si nous avons des remontées et que de nombreuses enquêtes y sont menées.

La politique de la DGESCO s'inscrit dans la politique gouvernementale, comme vous l'avez souligné. L'éducation à l'alimentation, au sein de l'Éducation nationale, s'inscrit dans le PNNS et, actuellement, nous participons au groupe de travail sur l'élaboration du PNNS 4. Nous nous inscrivons également, dans les orientations du Programme national pour l'alimentation (PNA) qui s'engage à faciliter l'accès des plus jeunes à une éducation fondée sur le goût, l'équilibre et la convivialité.

Nous nous inscrivons dans le cadre de la stratégie nationale de santé (SNS) 2018-2022, qui a été déclinée dans le Plan national de santé publique (PNSP), et un certain nombre de mesures concernant l'école, notamment la notion d'école promotrice de santé, qui sera à déployer dans les années à venir. Nous nous inscrivons également dans un engagement en matière d'éducation à l'alimentation, puisque nous aurons à créer, dès septembre, un vademecum sur l'éducation à l'alimentation, en lien avec nos deux ministères partenaires que sont le ministère de l'agriculture et de l'alimentation et le ministère des solidarités et de la santé, mais également avec un opérateur, Santé publique France.

S'agissant de la stratégie nationale de santé, nous nous occupons également de la refonte, l'actualisation, du portail d'éducation à l'alimentation qui est hébergé sur notre site, Eduscol, créé en 2015, en lien avec Santé publique France. La Stratégie nationale de santé prévoit de l'actualiser, afin qu'il colle mieux aux orientations gouvernementales actuelles.

Nous avons participé aux États généraux de l'Alimentation (EGA), en particulier à l'atelier 9 visant à promouvoir une alimentation saine. Nous avons également été associés aux travaux du Groupement d'étude des marchés en restauration collective et de nutrition, (GEMRCN), dont les normes s'appliquent à la restauration scolaire.

Enfin, toujours au niveau national, nous sommes membre du Conseil national de l'alimentation (CNA) ; nous suivons ses avis, nous les diffusons en interne et nous participons actuellement à la rédaction de son prochain avis.

Ces orientations, définies dans diverses stratégies et plans, font l'objet de partenariats affirmés. Nous avons signé, avec le ministère des solidarités et de la santé, une convention-cadre, le 29 novembre 2016, au niveau national. Nous avons par ailleurs demandé aux rectorats, à savoir les unités, qui, dans les territoires, déploient la politique ministérielle et gouvernementale, de signer des conventions avec les agences régionales de santé (ARS), de manière à déployer les grandes orientations de santé publique, parmi lesquelles figurent, bien entendu, la prévention du surpoids et de l'obésité, la promotion de l'activité physique et l'éducation à l'alimentation.

En partenariat avec le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, nous déployons actuellement le programme européen sur le lait, les produits laitiers et les fruits et légumes.

Par ailleurs, nous avons signé un accord-cadre avec Santé publique France. Le programme annuel d'actions communes (PAC) nous permet d'oeuvrer, notamment sur l'éducation à l'alimentation et la prévention du surpoids, à l'aide d'un ensemble de ressources et d'outils pédagogiques mis à la disposition des enseignements.

Dans les territoires et les établissements d'enseignement, cela se traduit par plusieurs actions. Vous avez évoqué les actions socio-éducatives, mais avant de les aborder, je rappellerai que l'éducation à l'alimentation peut être abordée dans le cadre des programmes d'enseignement, en école primaire, en CE2, et dans le second degré, en classe de 5e, dans le programme de sciences de la vie et de la terre (SVT).

Nous avons également une discipline intitulée « prévention santé-environnement » (PSE), délivrée en lycée professionnel, qui aborde les aspects de l'éducation à l'alimentation. En lycée général et technologique, ce sont les programmes de 1ère ES et L, qui abordent l'éducation à l'alimentation. Enfin, d'autres disciplines y concourent : l'éducation physique et sportive (EPS), avec la promotion de l'activité physique, les langues vivantes, puisque dans cette matière, les langues ne sont pas le seul apprentissage de la langue en elle-même, on y trouve aussi la découverte de cultures, et notamment des actions petit-déjeuner qui sont organisées par les professeurs de langues vivantes, à l'occasion desquels il peut être conduit des actions avec l'infirmier de l'établissement ou le professeur de SVT, de manière à aborder une éducation nutritionnelle et non uniquement les aspects culturels.

Les professeurs d'histoire-géographie et de sciences économiques peuvent, quant à eux, aborder, la dimension économique ou patrimoniale de l'éducation à l'alimentation, puisque nous ne réduisons pas l'éducation à l'alimentation à la seule éducation nutritionnelle ; nous abordons l'ensemble des thématiques, aussi bien écologiques, avec la lutte contre le gaspillage alimentaire, que l'éducation au développement durable, l'éducation sociologique, avec les aspects culturels, économiques, avec l'étude de la faim dans le monde, par exemple, où les circuits économiques, liées à la production alimentaire et agricole.

Au-delà des programmes d'enseignement, les établissements peuvent mettre en place des actions d'éducation à l'alimentation, qui sont inscrites dans le cadre de la politique éducative du projet d'école et du projet d'établissement. Cette inscription n'est pas anodine. Elle donne, à la fois de la visibilité à nos partenaires et aux parents d'élèves, notamment sur les actions menées par l'école, et fait l'objet de discussions dans les conseils d'école pour le premier degré, et dans les conseils d'administration pour le second degré.

Nous disposons d'une instance non-décisionnelle, mais de dialogue partenarial, le Comité d'éducation à la santé et à la citoyenneté (CESC), instance tout à fait intéressante pour déployer ce type d'actions d'éducation à l'alimentation. Elle est intéressante, à la fois parce qu'elle prépare les délibérations du conseil d'école et du conseil d'administration, mais surtout, parce qu'elle permet d'inviter des partenaires – la liste n'est pas limitative. De sorte que, en fonction des ressources partenariales locales, des représentants d'association peuvent être associés aux discussions du CESC, ainsi que des parents d'élèves, puisqu'il est important pour l'Education nationale d'associer les parents d'élèves aux actions dites socio-éducatives.

Nous pouvons également mettre en place une commission des menus, même si la restauration scolaire est la prérogative des collectivités territoriales. Pour autant, dans le second degré, le chef d'établissement a tout loisir de créer cette commission ad hoc, afin d'associer les parents d'élèves et la collectivité territoriale, avec le chef cuisinier et l'adjoint gestionnaire qui passe les commandes, à une réflexion sur une commission des menus. Les élèves participent également à cette commission des menus. Par ailleurs, un lien peut être fait avec d'autres instances où les élèves sont engagés ; je veux parler du conseil de la vie collégienne (CVC) et du conseil de la vie lycéenne (CVL), qui sont systématiquement consultés avant que le conseil d'administration de l'établissement ne délibère sur des questions de santé et de sécurité.

Pour associer les parents, nous disposons de dispositifs. D'une part, les espaces parents, créés en 2013, dans un certain nombre d'écoles et d'établissements du second degré. Des lieux animés par les parents pour les parents, dont les remontées nous font percevoir que dans les thématiques privilégiées par les parents – pour lancer des discussions entre eux, parfois en faisant appel à des experts sous forme de conférences – nous retrouvons le sommeil, les écrans et l'alimentation.

D'autre part, le ministre a souhaité également développer, à la rentrée prochaine, un outil appelé la « mallette des parents » qui, jusqu'alors, n'était destiné qu'aux professionnels de l'éducation, de manière à les aider à accueillir les parents, notamment au moment des réunions de rentrée, et à disposer d'un certain nombre de supports vidéo leur permettant de présenter comment fonctionne une école, et comment s'organisent les orientations.

Le ministre nous a demandé, cette année, de travailler sur un ensemble de thématiques, afin de présenter aux parents, dès la rentrée prochaine, ce que fait l'école en matière de santé ; or l'éducation à l'alimentation fait l'objet d'une fiche thématique. Ces fiches thématiques seront mises à disposition des parents sur un site, « la mallette des parents », actuellement en cours de construction. Pour les parents qui n'ont pas accès au numérique, ces fiches seront distribuées lors des réunions de rentrée.

Nous avons également un ensemble de partenariats avec les collectivités territoriales, qui peuvent se décliner dans des ateliers « Villes-Santé », ou prendre d'autres formes, notamment dans le cadre du réseau français des « Villes-Santé » de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Ce sont souvent les municipalités et les conseils généraux qui proposent de développer des actions éducatives en matière d'éducation à l'alimentation.

Nous disposons de plusieurs exemples dans diverses villes de France. La revue « Santé en action », de Santé publique France, fait état d'un certain nombre de ces actions, notamment à Angers. Ce partenariat avec les collectivités territoriales permet de déployer des actions en matière d'éducation à l'alimentation, dans toutes ses dimensions.

Les CESC font l'objet d'une relance depuis deux ans. En effet, en août 2016, une circulaire a été publiée afin de demander aux recteurs et aux inspecteurs d'académie d'instaurer un comité d'éducation, au niveau à la fois rectoral et départemental. Nous avons lancé, au mois de juin, une enquête sur les CESC, dont les remontées seront traitées en août. Nous pourrons ainsi savoir, à travers cette enquête, si l'éducation à l'alimentation fait bien l'objet d'un traitement au sein des CESC académiques, des CESC départementaux, des CESC d'établissement et des CESC inter-degrés. Comme vous le savez, les écoles n'ont pas de statut en droit, alors que les établissements publics locaux d'enseignement (EPLE), sont des personnes morales qui peuvent avoir des instances ; nous demandons donc, pour le premier degré, le déploiement des CESC inter-degrés de façon que l'école puisse se rattacher à des instances disposant de moyens, notamment en termes de budget. Nous attendons les résultats de cette enquête, de façon à pouvoir déterminer dans quelle mesure l'éducation à l'alimentation est déployée dans les territoires.

Les conventions ARS-rectorat nous en donnent un aperçu, puisque des rectorats ont développé, ces dernières années, notamment à Lille et Amiens, une prévention en matière de surpoids et d'obésité. Si les conventions ARS-rectorat sont établies dans le cadre des grandes orientations nationales, elles définissent des priorités par rapport au diagnostic territorial. Amiens et Lille avaient, dans leur population d'enfants et d'adolescents, un taux de prévalence du surpoids et d'obésité plus important que la moyenne nationale. C'est la raison pour laquelle le rectorat et l'ARS ont décidé d'oeuvrer sur cet axe en particulier.

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