Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission mixte paritaire, madame la rapporteure, mes chers collègues, au beau milieu d'une crise, et peu après l'adoption d'un projet de loi qui restreint considérablement le droit des étrangers et confirme l'enfermement des enfants en centre de rétention, il apparaît pour le moins cocasse, si vous me permettez cette observation, de plancher sur un texte qui, en réalité, ne changera rien à un problème de fond.
Tout d'abord, on ne peut que souligner le paradoxe qui affecte la majorité : en tant qu'ultralibéraux, vous prônez un interventionnisme moindre de l'État dans tous les champs de la société, mais cela semble valoir davantage pour les entreprises que pour les écoles. En effet, vous légiférez – d'autres l'ont dit – sur une mesure qui relève des règlements intérieurs des écoles et collèges. En outre, beaucoup l'ont rappelé, cette mesure existe déjà dans la loi, mais aussi dans les textes régissant les établissements. Quelle est donc l'utilité d'une loi qui se contente de rappeler ce que les règlements des établissements scolaires prévoient déjà ? Le texte se contente d'inverser la rédaction de l'interdit : auparavant, le règlement intérieur disait où le portable était interdit ; désormais, il doit prévoir où il est autorisé. Cela ne change rien.
Le texte n'a donc que peu de portée. Il n'offre pas de nouveaux outils aux directeurs et directrices d'établissement et vient acter des pratiques déjà courantes au sein des établissements. Le choix d'intervenir au niveau législatif laisse entendre que les règlements des établissements comporteraient des lacunes ; or il ne faudrait pas donner le sentiment que nous ne faisons pas confiance aux équipes pédagogiques alors même que la loi ne leur donne aucun moyen supplémentaire pour travailler à l'élaboration d'outils pédagogiques utiles.
Le texte correspond simplement à une promesse de campagne. C'est dommage, car le monde enseignant attend des outils, des moyens et des formations. Surtout, la bonne utilisation du téléphone portable est un sujet qui mérite toute notre attention. Mais inscrire son interdiction dans la loi sans aucune mesure complémentaire n'est pas la solution et revient un peu – comme le souligne la FCPE, la Fédération des conseils de parents d'élèves – à laisser le soin aux seules familles d'accompagner les enfants et, surtout, les adolescents dans l'usage des outils numériques. Or, même si les ruptures générationnelles sont moindres qu'auparavant, il faut admettre que certains parents sont pour le moins démunis dans ce domaine.