Un autre, destiné à instaurer la sélection à l'université en adaptant le nombre d'étudiants au nombre de places disponibles sur les bancs des facultés, se dit « relatif à l'orientation et à la réussite des étudiants ». La liste pourrait être longue.
J'ai déjà eu l'occasion de le dire à cette tribune, il ne peut y avoir de liberté de choisir son avenir professionnel sans une relance de l'activité, et donc de l'emploi. Mais votre projet de loi fait pire que de passer à côté des objectifs qu'il prétend viser : il procède à de nouveaux reculs en matière de droit des salariés. En transformant le compte personnel de formation crédité en heures en compte crédité en euros, vous ne faites rien d'autre, en effet, que donner de la visibilité aux organismes lucratifs, lesquels vont pouvoir anticiper plus facilement le volume d'argent qu'il y a à se faire sur ce qu'il faut désormais bien appeler le « marché de la formation ».
Vous prétendez qu'ainsi, le salarié y verra plus clair. Mais ce qu'il verra surtout, c'est la diminution de son droit à la formation ! Vous voulez créditer ce compte d'un montant de 500 euros, mais étant donné le prix moyen d'une heure de formation, il faudrait bien davantage pour garantir aux salariés un droit à la formation équivalent : nous vous l'avons répété. Au prétexte d'améliorer la visibilité du droit à la formation pour les salariés, vous les laissez livrés à eux-mêmes ; surtout, vous déresponsabilisez les entreprises, auxquelles incombe l'obligation de formation. S'il fallait encore une preuve de ce que j'affirme, ce serait la possibilité, prévue par ce même projet de loi, que la formation soit suivie en dehors du temps de travail.
Vous augmentez l'âge limite pour recourir à l'apprentissage, vous donnez plus de pouvoir aux branches et aux entreprises au détriment des régions, et vous dérégulez le droit du travail pour les apprentis. Ce projet de loi aggrave donc la logique des « salariés-Kleenex ». Qui plus est, ces salariés jetables devront se former sur leur temps libre, par leurs propres moyens, afin de coller aux compétences – comme vous dites – requises par les entreprises à un instant donné : vous n'avez vraiment aucune vision de long terme.
Vous avez refusé nos amendements visant simplement à intégrer dans la formation professionnelle un volet de formation écologique, permettant aux salariés de développer des savoirs en la matière et de les sensibiliser au rôle de l'entreprise et du collectif humain qui la constitue quant à la question environnementale. Aujourd'hui, 1er août, est le « jour du dépassement » pour l'année 2018 : l'humanité entre en dette écologique envers la planète. Ce jour arrive de plus en plus tôt chaque année : cela montre le caractère absolument irrationnel de notre manière de produire, de consommer et d'échanger. Dans ce contexte, c'est vers la planification écologique et la bifurcation de notre économie que nous devrions tous nous tourner.