Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, chers collègues, quelle formation professionnelle pour les femmes et les hommes d'aujourd'hui et de demain ? Pour répondre à cette question, il faut faire preuve d'audace et de courage politique.
Audace et courage, pour permettre notamment aux plus jeunes d'apprendre et pour élever le niveau global des connaissances et des qualifications.
Audace et courage, pour oeuvrer dans l'intérêt général des hommes et des femmes de notre pays, qu'ils soient salariés ou sans emploi.
Audace et courage, pour concevoir la formation professionnelle dans un objectif d'émancipation humaine.
Une nouvelle fois, ce n'est pas le chemin que vous empruntez. Votre conception de la formation professionnelle, c'est la réponse aux seuls appétits immédiats du marché : la formation ne devrait répondre qu'à la demande du marché, correspondre à des tâches plutôt qu'à des métiers, accorder des certificats plutôt que des diplômes, être prise sur son temps personnel et non sur son temps professionnel. Vous faites l'impasse sur la dimension éducative de toute formation professionnelle.
C'est une démarche qui paraît rentable en apparence, mais qui, au bout du compte, sera inefficace et dangereuse. La monétisation du compte personnel de formation et la division par deux des droits à la formation vont aggraver les inégalités sociales et territoriales. Beaucoup de salariés devront soit attendre des années, soit mettre la main à la poche. Vous vous inscrivez, madame la ministre, dans une logique d'individualisation de la responsabilité, qui piétine les responsabilités et les garanties collectives.
Le conseil en évolution professionnelle, aujourd'hui service public, vous l'ouvrez à des officines privées à but lucratif dont le seul objectif sera la rentabilité, la politique du chiffre, peut-être l'entrée dans des formations d'une maison-mère ou amie, le tout avec les deniers publics.
Vous démantelez notre système d'information et d'orientation, à commencer par l'ONISEP, qui est privé de sa sève et amputé d'une capacité de travail pédagogique répartie dans les territoires. Avec la disparition annoncée des centres d'information et d'orientation, la population la plus fragile risque d'être abandonnée – et ne nous dites pas que les conseillers vont enfin être dans les établissements du secondaire : ils y sont déjà. À qui et où vont s'adresser les décrocheurs scolaires, les jeunes des missions locales, les adultes sans emploi ou en reconversion, les familles ?
Et que dire de l'apprentissage ? Vous l'inscrivez dans une logique de marchandisation du système et vous le sortez de la formation initiale, affaiblissant ainsi sa dimension éducative. La modification du système de financement risque de voir disparaître 700 centres de formation d'apprentis. Votre logique est partout la même : il s'agit de répondre aux seuls besoins immédiats en main-d'oeuvre pas chère, au détriment de la qualité des formations, le tout en réduisant les droits des apprentis.
Comme si le texte n'allait déjà pas assez loin, vous allez augmenter les contrôles exercés sur les demandeurs d'emploi, avec ce carnet de bord affligeant, et pénaliser les bénéficiaires des allocations. On se trouve, là encore, dans l'édification de l'État libéral, puisque vous prenez en main une gestion qui était jusque-là assumée de façon paritaire et que l'État pourra décider de la somme qu'il affectera chaque année à l'assurance chômage.
La réalité de vos décisions met à mal votre promesse d'universalisation du droit à l'assurance chômage, désormais financée par la contribution sociale généralisée et par 7 millions de retraités, qui ont vu leur pouvoir d'achat sévèrement entaillé.