Madame la présidente, vous me demandiez comment allier atelier participatif et pédagogie. Nous ne devons pas entrer dans la discussion par la pédagogie, sinon le risque est grand de s'installer dans une opposition entre « sachants » et « ignorants ». Par ailleurs, il est toujours intéressant de voir ce qui ressort du ressenti et de l'expérience vécue, ou non, des participants.
Parfois, et vous avez raison sur ce point, Monsieur Bourlanges, les participants demandent à l'Europe de faire quelque chose qu'elle fait déjà. Parfois, ils lui demandent de faire une chose, pour laquelle elle n'a pas compétence ; la mauvaise connaissance des institutions européennes est donc un vrai sujet. En revanche, s'il y a une appétence très forte sur un domaine de compétence, débattons de savoir pourquoi les États ont résisté, débattons de la signification de l'intégration de telle ou telle politique publique…
La consultation idéale est celle qui commence par des petits ateliers, en petits groupes, et qui se termine par une restitution collective, où chacun s'exprime. On peut ainsi faire la somme des propositions formulées et, ensuite, de la pédagogie. Parfois, la pédagogie de l'immédiat consiste à mettre en valeur les projets que l'Union européenne a soutenus sur un territoire. On le sait, la France, de ce point de vue-là, est tout sauf exemplaire. Nos maires, nos régions, nos départements s'enorgueillissent de projets, expliquent que c'est grâce à eux qu'ils ont aboutis et oublient d'évoquer la part de l'Union européenne dans telle ou telle infrastructure ou tel service apporté aux habitants. C'est une excellente occasion de le rappeler et de mettre l'Europe en valeur.
S'agissant de la restitution, je vous l'ai dit, elle sera réalisée par un panel d'experts indépendants, pour éviter que nous soyons soupçonnés d'avoir écrit, en conclusion, ce que nous aurions pu écrire à l'avance, parce que cela nous arrangeait bien. Nous essayons de convaincre nos partenaires européens de faire de même, mais vous imaginez bien que dans certaines démocraties, pudiquement qualifiées d'« illibérales », la notion d'experts indépendants est une notion à combattre. Nous aurons donc deux niveaux de restitution, c'est la raison pour laquelle les restitutions nationales sont importantes.
Nous réfléchissons aussi à un rassemblement physique des porteurs de projets et des porte-parole de chaque consultation, à la fin du processus, pour un nouveau débat. Il sera, ensuite porté à l'ordre du jour du Conseil européen de décembre et se poursuivra en mars à Sibiu – une étape importante.
Je partage votre sentiment sur la nécessité de poursuivre les consultations au-delà du processus, mais nous ne pouvons pas interférer avec la campagne électorale qui va bientôt commencer et qui obéit à des principes stricts. C'est la raison pour laquelle nous arrêtons ces consultations fin octobre. Mais il sera nécessaire, ensuite, d'accompagner les institutions européennes et le processus européen vers une forme de démocratie participative.
Je ne suis pas totalement en accord avec l'analyse de Jean-Louis Bourlanges : non, nous n'étions pas clairs sur les objectifs poursuivis par l'Union européenne. Pour ma part, il m'arrive plus souvent de confronter la réalité européenne à l'Europe des cauchemars d'un certain nombre de nos concitoyens, qui craignent une Europe ultra-libérale. Nos concitoyens ne savent pas que l'Europe est porteuse d'autres politiques, telles que la Garantie jeunesse, le Fonds social européen (FSE) ou le Fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD)...
Il m'arrive d'expliquer à des jeunes, que l'on appelle pudiquement « très éloignés de l'emploi », pourquoi un retour au franc – une monnaie qu'ils n'ont d'ailleurs jamais connue – n'est pas la solution, de leur expliquer ce qu'est l'euro, ce qu'il apporte, comment il fonctionne, de leur expliquer les risques qui étaient liés au franc – le taux du change, l'inflation, etc. Alors, quand j'entends dire que nous étions au clair sur l'Europe de leurs rêves et que nous les avons déçus dans la mise en oeuvre, je ne suis pas d'accord.
Nous payons tout de même très cher le Traité de Lisbonne et le référendum de 2005, et ce ne sont pas uniquement les militants « nonistes » qui nous le rappellent. Le fait d'avoir repris les discussions après ne pas avoir tenu compte du référendum, de faire des élections européennes un débat purement national, voire local, a donné envie à 17 000 personnes de passer du temps à discuter de l'Europe.
Je suis d'accord sur la nécessité, selon les publics, de choisir une thématique. Il m'est arrivé, notamment face à des jeunes, de procéder de cette façon, mais je trouve cela un peu dommage, car nous sentons bien que l'on se prive de quelque chose.
J'ai débattu, par exemple, en présence de Matthieu Orphelin, de la question migratoire avec des jeunes, et c'était intéressant. Mais nous sentions bien qu'ils avaient aussi des choses à dire et j'ai trouvé dommage de s'en priver. Mais, je vous l'accorde, débattre de thématiques peut être très utile, nous l'avons fait avec la défense, le numérique… La première fois, c'était avec Michel Barnier, sur le Brexit – devant 500 personnes.
S'agissant des zones blanches, je vous renvoie à la carte. Effectivement, aucune consultation n'a été menée dans votre département. Nous allons diffuser la liste des départements où il n'y a pas eu de consultations citoyennes.
Monsieur Pueyo, surtout ne vous censurez pas : vous êtes un élu du peuple, vous êtes donc totalement légitime à organiser des consultations citoyennes. Bien entendu, si vous organisez une consultation au sein de votre parti et uniquement avec vos électeurs comme public, nous ne pourrions pas vous délivrer le label.
Si, comme à Montpellier, avec Coralie Dubost et Carole Delga, il y a une démonstration du caractère transpartisan de la consultation, elle ne sort pas de la pièce ; donc tout va bien. Organiser une consultation citoyenne pour un homme politique fait partie de son travail. Je n'y vois donc aucun problème, dès lors que tout le monde est autorisé à participer et à s'exprimer. Il m'est arrivé, quand un maire me disait « Non, pas ceux-là, je les connais, ils sont du Rassemblement national », de lui répondre : « Et bien moi, je ne les connais pas, justement. J'aimerais savoir ce qu'ils ont à dire et, puisque je suis là, pouvoir leur répondre ! »
Concernant les préfets, nous les avons sollicités. Nous leur avons transmis des informations, et le secrétariat général s'est déplacé à plusieurs reprises. Cependant, nous ne souhaitons pas de communication institutionnelle ni que les consultations citoyennes soient organisées par les préfets.
Je partage les propos de Liliana Tanguy sur la qualité de cette démarche. Un débat de plusieurs heures est en effet différent d'un questionnaire fermé, rempli par 17 000 personnes. Les gens se sont déplacés et nous ont présenté leurs attentes et suggestions. Nous devrons effectivement trouver un moyen de poursuivre cette démarche.
S'agissant des Français de l'étranger, nous avons labellisé tous les projets qui nous ont été proposés, avec parfois des déceptions sur le nombre de participants et, d'autres fois, des consultations de très bonne facture. J'ai participé à des consultations avec des Français de l'étranger, évidemment très soucieux que leur voix soit entendue.
Nous souhaitons également organiser ce débat avec des communautés européennes présentes en France. Nous l'avons fait une fois, avec ma collègue portugaise, à la Fondation Calouste Gulbenkian, à Paris. Il s'agit aussi d'une dimension très importante qui est bien accueillie. Nous devrons en réaliser davantage à la rentrée, c'est vraiment l'un des axes sur lesquels nous devrons travailler.
Madame la présidente de la commission, c'est une bonne idée de solliciter nos collègues d'autres États membres de l'Union européenne pour travailler ensemble.