Les agriculteurs, premières victimes, mais aussi les consommateurs, sont ainsi devenus une simple variable d'ajustement dans la guerre de profitabilité que se livrent les groupes transnationaux de l'agroalimentaire et de la distribution. Cette guerre défait toute la chaîne de valeur. Cette guerre sape toute construction d'une politique agricole durable et juste pour les producteurs. Cette guerre fragilise l'ensemble du secteur agroalimentaire français, pourtant stratégique pour l'économie nationale en termes d'emplois, de balance commerciale, mais aussi de structuration de notre territoire.
Mais la plus grande hypocrisie politique se révèle dans le constat que la France, gouvernement après gouvernement, a non seulement accompagné cette voie de la libéralisation des échanges agricoles, mais a même fait tout son possible pour accentuer la dérégulation des activités commerciales.
Et à ce stade, mes chers collègues, vous me permettrez tout de même de faire un bref rappel historique. Il y a dix ans exactement, en 2008 – eh oui, j'étais déjà sur ces bancs ! – , la loi Chatel, puis la loi de modernisation de l'économie, dite LME, directement inspirée des travaux de la commission Attali « pour la libération de la croissance française », ont servi d'appui pour accentuer la pression sur les fournisseurs dans les négociations commerciales et, par ricochet, sur les producteurs.
Curieusement, les représentants des grands groupes transnationaux, dont certains du secteur de la transformation et de l'agroalimentaire, constituaient l'essentiel de cette commission Attali qui, tenez-vous bien, affichait ainsi la couleur dans l'introduction de son rapport : « Ceci n'est ni un rapport, ni une étude, mais un mode d'emploi pour des réformes urgentes et fondatrices. Il n'est ni partisan, ni bipartisan : il est non partisan. » La formule doit sans doute vous rappeler quelque chose.
Le rapporteur général adjoint de cette commission était un tout jeune inspecteur des finances. Je crois, au risque de me tromper, que son nom était Macron. Oui, je crois...