Chers collègues, nous nous apprêtons à aborder la discussion de l'article 3, qui porte sur les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance. Or, comme l'ont déjà souligné mes collègues Colombani et Castellani, nous nourrissons les plus grands craintes quant au déroulement du débat sur le contenu du projet de loi, s'agissant notamment, à l'article 3, des notions de « raisons sérieuses » ou de « relation de manière habituelle » que peut avoir un individu avec des organisations terroristes, notions qui ne sont pas caractérisées et qui peuvent laisser libre cours à l'arbitraire et au sécuritaire.
Ce qui nous pose problème, c'est évidemment l'absence de caractérisation sérieuse et la mise à distance de l'autorité judiciaire. Ainsi l'alinéa 9 permet au ministre de l'intérieur, après en avoir informé le procureur de la République, de faire obligation à la personne mentionnée de respecter certaines mesures sans le contrôle de l'autorité judiciaire.
Nous constatons également qu'au fur et à mesure du débat on n'hésite pas, comme l'a fait hier le rapporteur de la commission des lois, M. Gauvain, à assimiler certaines situations, notamment en Corse ou au Pays basque, à du terrorisme islamiste. Une telle comparaison est indécente. On ne saurait comparer, en démocratie, un étudiant indépendantiste ou autonomiste – peu importe – qui jette une pierre sur une préfecture, même si son acte est répréhensible, avec une personne qui entre armée d'une kalachnikov dans une salle de spectacle pour y tuer plus de 130 personnes, dont des enfants. Ce n'est pas la même chose ! En démocratie, il faut savoir raison garder, respecter le droit des citoyens et être proportionné. M. Gauvain ne l'a pas été hier, ce qui a suscité un grand émoi au sein de la société corse, chez les députés, bien sûr, mais aussi au sein de la majorité territoriale et chez d'autres acteurs.
« L'ignorance a un bandeau sur les yeux, elle est ténèbres et cécité », disait Louis de Bonald. Monsieur Gauvain, vous avez été hier « ténèbres et cécité » et nous le regrettons fortement.